Algérie : El Watan, symbole de contre-pouvoirs

[Par Elyse NGABIRE]

Malgré toute la pression, censure, etc. exercée contre la presse algérienne dans des contextes politiques contraignants, « Contre-pouvoirs » de Malek Bensmaïl montre le combat quotidien des journalistes pour défendre leur liberté et celle du peuple.

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Michel David et Larbi Graïne

Mardi, 2 février à l’Espace Saint-Michel, à Paris. Le film « Contre-pouvoirs » de Malek Bensmaïl est projeté devant un public varié de journalistes, écrivains, réalisateurs, etc. « Contre-pouvoirs » nous transporte dans une rédaction bien particulière : celle du grand journal algérien El Watan. L’ambiance conviviale qui règne lors des différentes conférences de rédaction de ce journal : une remarque par-là du directeur de publication sur un article, défense de son sujet par ici du journaliste-auteur. Et après, ce sont des discutions qui s’en suivent entre collègues qui n’ont certainement pas les mêmes sensibilités ou convictions politiques.
2Dans un climat ouvert, tolérant et démocratique, aucun sujet n’est tabou : de la politique à l’économie, de la justice à la société, etc. tout est commenté, analysé à bâton rompu et sans faux-fuyant avec un esprit collégial. Parfois, le respect du deadline est problématique et le secrétaire de rédaction doit jouer son rôle de rappeler à chaque fois que de besoin. Le bruit de l’imprimerie juste dans les enceintes d’El Watan est devenu la routine et n’empêche pas aux journalistes, rédacteurs, directeurs, etc. de se concentrer sur leur travail.
Le film a été tourné au moment précis de l’histoire politique algérienne : la réélection de Bouteflika pour son quatrième mandat. Et le titre de La Une d’un numéro d’El Watan sorti à cette époque ne s’empêche pas de titrer : « Bouteflika élu dans un fauteuil ».
5Le droit, dit-on, s’arrache, il ne se donne pas. El Watan a donc très bien compris qu’il doit se battre pour sa liberté et son indépendance. Les armes de cette « guerre », explique Larbi Graïne, journaliste algérien de la MDJ, ne sont autres que les enquêtes fouillées que le grand journal algérien mène, des reportages sur le factuel, etc. ; bref, l’exercice du métier de journalisme avec un professionnalisme inattaquable.
En outre, poursuit Michel David de Zeugma Films, distributeur de ce film, l’autonomie financière permet aux journalistes d’El Watan, d’être encore plus indépendants vis-à-vis des pouvoirs publics.
Signalons qu’El Watan fait un tirage de 130 mille exemplaires. Il a son propre imprimerie et prochainement, il va déménager dans son bâtiment qu’il vient de construire avec ses propres moyens financiers.
Et le film « Contre-pouvoirs » a été dédié aux 120 journalistes algériens assassinés durant la décennie noire des régimes militaires dictatoriaux.