Partir rejoindre Daech n’est pas une promenade !

[Par Maha HASSAN] Jeudi 10 mars dernier, deux nouvelles inquiétantes sont tombées le même jour : De la Syrie,  où Daech a exécuté le poète syrien Bachir Alani et son fils Ayas, les accusant d’être des apostats.  Du Royaume-Uni, où 22 000 noms de jihadistes de l’État islamique ont été révélés par la chaîne Sky News, parmi eux au moins 500 Français. Ces renseignements ont obtenus d’un déserteur de Daech, déçu de l’Islam revendiqué et appliqué par l’organisation, qui n’a plus grand chose à voir avec la religion. Ces deux nouvelles ne sont pas très étonnantes. Daech tue tous les jours des personnes en Syrie en les accusant d’apostasie. De même, les infos nous relatent également souvent des cas des français ou d’autres européens qui fuient les islamistes de l’EI, après les avoir rejoints dans un premier temps en Syrie ou en Irak. Si on essaye de lier ces deux nouvelles, on peut alors poser plusieurs questions aux gens qui pensent encore que Daech défend l’Islam : 1. Un poète qui écrit et qui reste discret sur sa pratique de l’Islam, est-il un apostat pour autant ? le poète Bachir Alani est musulman, même si, peut être, il n’est pas pratiquant, mais il n’a jamais déclaré, même à ses amis les plus proches dans la petite société poétique, qu’il ne croit plus en l’Islam. Le page de Bachir sur facebook était pourtant claire, il écrivait des poèmes, il exprimait son attachement à sa ville (Deir ez-Zor), qu’il refusait de quitter malgré la guerre. Il racontait son chagrin d’avoir perdu sa femme et à la fois son contentement de lui avoir trouvé une tombe pour qu’elle puisse reposer dignement, alors que plein de Syriens sont morts et n’ont jamais eu de funérailles décentes. 2. On peut se demander également comment peut-on défendre une réligion (ici l’Islam) en tuant des humains ? Quel est ce combat absurde auquel prennent part de plus en plus de jeunes gens, quittant une vie en Europe et surtout en France pour y participer ? Jusqu’à aujourd’hui, Daech n’a pas combattu contre le régime en Syrie, il ne fait que terroriser des peuples innocents. Le premier problème de ces «rêveurs du jihad»,  c’est qu’ils ne parlent par l’arabe, ils sont très étrangers, loin de cette culture, et grâce à cela c’est très facile d’être manipulé par la propagande de Daech. Le second grand problème est que les gens européens voient les événements en Syrie de loin, par Internet, ils sont victimes des mensonges et lorsqu’ils arrivent là-bas, c’est presque impossible de quitter Daech. L’État Islamique n’est  pas une promenade, une aventure ou une fugue à faire lors de sa crise d’adolescence comme le pense la majorité de ces jeunes gens, surtout les mineurs, ceux qui désespèrent de leur avenir en Europe, tout en espérant que le jihad va changer leur vie. Daech est un piège létal, quand vous tombez dedans, au bout du chemin,  il n’y a que la mort. La mort, non pas pour l’Islam ou pour des raisons d’honneur,  mais pour des mensonges. Et si vraiment quelqu’un, au fond de lui, croit en Dieu, avec un peu de logique, il comprendra que Daech fait n’a rien à voir avec Dieu, ou la religion. Mourir chez Daech ou pour Daech, cela ne sert en aucun cas une cause juste. Et quand vous êtes sur le point de disparaître, il est trop tard pour comprendre et vous ne pouvez que regretter de quitter le vrai combat qu’est la vie. Dites-vous que vous êtes bien plus utiles en vie que mort. Et souvenez-vous qu’il n’est pas de religion et encore moins l’Islam qui va vous encourager à vous sacrifier inutilement ou à tuer des innocents.

Afrique du Sud : la vision de Mandela trahie

[Par Jean-Jules LEMA LANDU]

De la prison à la présidence. Telle a été l’apothéose du parcours politique de Nelson Mandela. Mais tout autant saisissant était cet espoir qu’il avait suscité de faire de l’Afrique du Sud une nation « arc-en-ciel ». Formule qui s’autorisait le rêve de voir cohabiter en harmonie les différentes communautés locales (Blancs, Noirs, Indiens, métis).

En clair, il s’agissait de maîtriser l’art du compromis entre les affres que nourrissaient les Blancs sud-africains, à la fin de l’apartheid (régime basé sur la ségrégation raciale), et les ardeurs des Noirs qui voulaient, à tout-va, vite jouir des effets de leur victoire.

L’homme était-il à la hauteur de ses ambitions ? Et, qu’en reste-t-il, aujourd’hui, 17 ans après son départ du pouvoir ?

Quand Mandela accède au pouvoir, en 1994, l’Afrique du Sud est partagée entre ravissement et sentiment de doute. L’apartheid était bel et bien aboli, mais on avait du mal à imaginer la notion de « paix des braves » faire naturellement carrière entre Blancs Sud-Africains (anciens dominateurs) et Noirs autochtones (anciens dominés). Tant ce mode de renversement des rapports de force ne rime qu’avec avec la violence.

(Source : IGEO TV)

(Source : IGEO TV)

Tel a été le cas, au Zimbabwe, au début des années 2000. Les Noirs avaient chassé 4 000 Blancs de leurs fermes, non sans effusion de sang, se disant être en bon droit de réclamer leurs « biens spoliés ».

En Afrique du Sud, par contre, Mandela a réussi à endiguer cette dérive va-t-en-guerre, alors que les crispations étaient au zénith. Aux uns, il a garanti l’application des accords signés en 1991 (Seven closes), assurant protection des Blancs, en tant que minorité ; aux autres, il est simplement parvenu à se faire écouter comme « chef et père ». A l’africaine

Absence d’un contrat social

Ainsi commença à se forger, lentement, mais sûrement, une nation « arc-en-ciel », à la recherche de l’unité. Avec, au départ, en 1995, cette image symbolique, forte, qui marquera toute la vie politique de l’ancien prisonnier : Mandela en maillot des Springbok, équipe sud-africaine « blanche » de rugby, considérée comme un des emblèmes de l’apartheid ! C’était, en Afrique du Sud, à l’occasion de la coupe du monde de rugby. Ce jour-là, dit-on, tous les mythes s’étaient écroulés !

L’après-Mandela est à situer sur un autre versant. Plutôt, celui de clivages réactivés ou imposés par le fait d’une direction politique dénuée de toute conscience nationale. Ainsi, « le pays est passé de l’apartheid racial à l’apartheid social », déplore Songezo Zib, journaliste sud-africain (*). Avec pour conséquence directe, la division dans les rangs de la communauté noire. Désormais clivée, celle-ci n’est plus un bloc monolithique. L’élite, qui roule sur l’or, se démarque clairement de la classe ouvrière. Qui broie du noir.

Les grèves à répétition dans le secteur minier – moteur de l’économie sud-africaine -, accompagnées de violence, en disent long sur l’absence d’un contrat social acceptable par tous dans ses grandes lignes.

(Source : AFP)

(Source : AFP)

Si la communauté blanche n’a pas éclaté, elle n’est pas moins bousculée par les effets néfastes de la mauvaise gouvernance du pays, qui fait que les Blancs riches sont devenus pauvres. Et les pauvres plus pauvres, au point de faire la manche. Ce qui a le don de renforcer, chez la plupart d’entre eux, l’idée de créer une « République libre ». Ce n’est pas une simple vue de l’esprit. Ils s’y préparent, militairement.

      L’Afrique du Sud se délite. A l’œil nu. Où est donc passé le grand rêve de Mandela ?

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(*) SONGEZO Zib, Courrier International, n° 1 140

Week-end convivial avec le réseau étudiant Animafac

[Par Diane HAKIZIMANA]

Le réseau des associations étudiantes Animafac a organisé le weekend du 06 au 07 février 2016 un double weekend au campus dans les universités de Limoges et de Caen. A Limoges, c’était de la convivialité sous un ciel plus doux et ensoleillé.

©Diane Hakizimana

©Diane Hakizimana

Le matin, un petit déjeuner à la hâte afin de pouvoir commencer la journée à temps. Des repas ont été également offerts aux étudiants à midi, au rythme de chants lancés par un groupe d’étudiants décontractés. L’ambiance était bon enfant comme seuls les étudiants savent le faire. Différents ateliers ont été animés. Le responsable d’Animafac reconnait le rôle et l’importance de cette association dans la vie de campus. Malo Mofakhami parle de ce weekend spécial pour le 20e anniversaire d’Animafac.

« Asso, Boulot (apéro !), dodo », “Ceux qui pensent que c’est impossible sont priés de ne pas déranger ceux qui essaient”, etc. ce sont les mots qu’on pouvait lire sur les pulls des étudiants présents pour ce weekend au campus. Ces mêmes mots figuraient par ailleurs sur le manifeste des 20 ans d’Animafac. Solidarité internationale, écologie, récupération des objets, le numérique dans la vie associative, etc. tels étaient les sujets débattus dans différents ateliers organisés par Animafac à l’université de Limoges. Malo Mofakhami, président d’Animafac racontait que c’est cette même ambiance à Limoges qui régnait à l’université de Caen.

Malo Mofakhami ©Diane Hakizimana

Après les universités de Lille et de Clermont Ferrand, qui sont de la partie Est, le weekend du 30 au 31 janvier dernier, c’était le tour des étudiants de la partie ouest de la France de faire la fête et d’échanger sur les sujets qui touchent la société. Plutôt caisse de résonance des associations étudiantes, Animafac organise les weekends au campus en divisant les universites de l’Hexagone en 4 groupes, deux par deux, de l’est à l’ouest ou vice versa. « La division de la France se fait de manière grossière, mais l’objectif est de choisir une ville qui n’est pas très loin pour les gens autour, c’est pour faciliter le déplacement des étudiants en cars». Créée en 1996, au début par des étudiants très engagés dans les syndicats, Animafac s’est depuis consacrée à l’associatif et met en mouvement la fac. « Même si on représente les étudiants et qu’on fait du lobbying auprès des pouvoirs publics, c’est surtout sur les mesures qui sont en lien avec les associations », tient à souligner Malo Mofakhami. Le président d’Animafac annonce qu’ils ne peuvent pas intervenir sur les examens, le format des cours, etc., qui sont dans le registre syndical.

Engagement, encore de l’engagement

Le réseau des associations Animafac se bat pour la reconnaissance, la facilité et l’encouragement de l’engagement des étudiants. Et cela se fait à plusieurs niveaux selon Malo Mofakhami. Au niveau des étudiants déjà, Animafac s’efforce de mettre en avant tous les avantages que procurent les associations. A cet effet, cette porte-parole des associations étudiantes aide ces dernières à être beaucoup plus visibles en leur procurant les moyens financiers nécessaires pour pouvoir exister. « On a aussi identifié les leviers institutionnels, car on a remarqué que certains présidents et administrations des universites n’ont rien à faire des associations étudiantes, et si l’universite n’est pas bienveillante et assez ouverte aux associations, celles-ci auront beaucoup du mal à se développer », précise Mofakhami. Animafac intervient à ce niveau pour faire comprendre aux chargés de l’éducation que la réussite scolaire rime aussi avec la vie de campus, la vie associative. « Nous usons de notre notoriété et de notre poids politique pour leur faire comprendre qu’ils doivent favoriser l’associatif dans les campus », annonce le président d’Animafac. Malo Mofakhami reconnait toutefois qu’à Limoges, les associations sont hyper actives et que la présidence de l’université y met son paquet.

Limoges la nuit ©Diane Hakizimana

Limoges la nuit ©Diane Hakizimana

A la question de savoir si la vie associative dans les campus ne se limite pas seulement à la durée des études, dans la mesure où la vie active ne permet pas forcement la participation dans les associations, faute de temps et beaucoup de préoccupations quotidiennes, le président d’Animafac estime que l’environnement dans les campus favorise l’engagement associatif, « en plus les étudiants sont dans une phase de leur vie où ils ont très envie de changer le monde et ainsi ils s’appliquent dans les associations assez facilement, même s’ils ont besoin d’un coup de pouce», remarque-t-il. Toutefois Animafac, en tant qu’association essaie de donner une vision plus large aux jeunes étudiants engagés. « Certes ils se sont engagés pour une association, pour une cause qui leur plaît, mais c’est aussi un engagement à l’égard de toute une société, donc il ne faut pas perdre cet engagement, il faut le porter toujours même après », annonce Malo Mofakhami. Et, selon ses dires, ça marche un peu, car différentes enquêtes et questionnaires démontrent que de plus en plus de citoyens revalorisent au maximum les questions d’engagement. Animafac est fait de plus de 400 associations membres qui ont signé une charte, mais elle arrive à toucher d’une manière ou d’une autre plus de 5000 associations étudiantes. L’événement « weekend au campus » se déroule tous les ans. Différentes associations se rencontrent pour débattre, échanger, se former. Ce double weekend au campus à Limoges et à Caen était le dernier de cette année académique en cours.

Exilé du paradis, l’écriture devient un refuge et un combat

[Par Lisa Viola ROSSI]

« Un voyage d’un endroit à l’autre, en tant qu’exilé d’abord, en tant que fugitif ensuite, plus tard comme simple observateur ». C’est le voyage d’ « Exilé du paradis », de Jacobo Machover (Lemieux éditeur, 2015) universitaire, écrivain et journaliste cubain né à La Havane en 1954 et exilé en France depuis plus de cinquante ans. L’auteur nous emmène dans le conte de sa vie de dissident, tissée à la fois au périple de sa famille, juive, persécutée par le nazisme, à l’Histoire de son peuple, des cubains, oppressés et exilés, comme lui. Un voyage sans retour où le témoignage autobiographique devient le cœur de ce que Machover lui-même appelle une « littérature d’urgence ».

Une littérature d’urgence, lieu de refuge et appel à la justice. L’écriture, explique l’auteur, « devient un refuge, un endroit situé loin de l’île et, le plus souvent, des grandes maisons d’édition, pour chuchoter, insinuer, ce qu’il leur [aux exilés cubains ndr] est impossible de crier sur la place publique, en espérant qu’un jour ces paroles parviendront à leur public naturel, celui qui pourra peut-être les faire entièrement siennes, et qui leur rendra un minimum de considération et de justice ».

 Une histoire personnelle qui se reflète et s’enlace à l’Histoire commune. Exilé du paradis est structuré en deux parties : la première, est intitulée  « La fuite, l’initiation », et la deuxième, « Les nôtres, in memoriam ». La narration commence dans l’automne 1963. « L’enfant (moi) vient d’arriver à Paris, à la gare de l’Est, après un long voyage et d’inconcevables détours. J’ai traversé un pan de l’Histoire sans m’en rendre compte, entouré de mes parents, Isaac et Rebecca, et de mon frère ainé, Daniel. Pourtant, je suis seul au monde, sans personne à qui me confier, sans aucun endroit auquel me raccrocher. » A partir de là, l’autobiographie de Jacobo Machover se déroule mêlant l’Histoire aux péripéties d’un jeune inquiète, par ailleurs déserteur de l’armée française et passionné par les femmes et par la vie. Le conte se poursuit en illustrant par images éparses le périple familial de l’auteur et coule finalement, dans la deuxième partie du livre, dans un véritable portrait de l’exil. « L’exil est un territoire étrange, sans véritable centre autre que la mémoire », nous dit l’auteur. La mémoire, qui devient le moteur de l’action littéraire de Machover, est dans ce livre cultivée et gravée. Son but, comme l’explicite l’auteur lui-même, est de « conquérir la liberté, celle de mon île, ou, tout du moins, de perpétuer la mémoire de ceux qui en avaient été expulsé : les exilés, comme moi-même ». Puis que les exilés de l’« île maudite », précise l’écrivain, ne sont pas tout à fait comme les autres : « eux [d’autres exilés, d’ailleurs ndr], ils étaient perçus comme des héros qui avaient combattu les dictatures, pas comme nous, les Cubains, qui avions fui la révolution. Inutile d’expliquer quoi que ce soit. Nous, nous n’étions pas légitimes ».

La douleur d’un exil, le véritable, sans adjectifs : « On ne peut pas rajouter d’adjectifs à cette douleur, à cette calamité ». L’exil, « sans aucun espoir de retour », dont le goût Machover a « appris à aimer » grâce à l’écriture et l’engagement. « J’ai résolu de suivre la voie qui m’était dictée, depuis toujours, je crois, par cette Histoire délirante, mais unique, presque incroyable, inexplicable en tous cas : écrire, pour ne pas sombrer, dans le désespoir, l’abandon, l’indifférence, la drogue, l’alcool. Mais je n’avais plus pour moi le territoire magique et initiatique de mon île, à partir duquel j’aurais pu construire un univers. Il me fallait récupérer, du moins l’espace d’un instant, le monde de l’enfance perdue».

Un combat pour la délivrance des cubains. Page après page, la narration de Machover nous accompagne à dévoiler la cohérence d’un parcours erratique ayant pour but le combat pour une légitimité des dissidents cubains, pour lesquels l’auteur se bat sans cesse, depuis toujours : « Pendant près de vingt-cinq ans, je les [les dissidents anticastristes cherchant une protection à l’étranger ndr] ai écoutés répéter les mêmes récits. Ils m’entretenaient d’un univers abstrait auquel seuls les élus ont accès. Je suis allé les chercher aux quatre coins du monde, loin du pays qui les a vus naitre, le plus souvent dans la capitale de notre exil, une copie presque conforme de l’île maudite, mais plus ordonnée, trop impersonnelle. Je n’ai pas compté le temps, ni le mien ni le leur ».

D’un exilé, des exilés. Survivre, pour vivre. Combien de temps encore ? « La vie en exil n’est pas la mort. C’est autre chose, en équilibre non seulement entre deux géographies, mais aussi entre deux temps. Ceux qui ont échappé au malheur sont pris d’une frénésie de vivre […] ils étaient capables de tout affronter pour fuir, mais ils se sont retrouvés désarmés face aux tracas de la vie quotidienne dans un environnement non pas hostile, plutôt indifférente. Je les vois encore […] Jesús, qu’il a fallu faire sortir de l’île où il avait de fortes chances d’aller croupir pour de longues années en prison, du fait qu’il tentait simplement d’écrire, de décrire, la réalité de ce qu’il vivait dans des articles que pratiquement personne ne pouvait lire sur place : il était journaliste indépendant, c’est-à-dire sans entraves, non reconnu, non officiel. Il a du partir en avion, laissant sa femme et sa fille, en pleurant sans cesse leur absence, sans espoir de les revoir avant longtemps. Combien de temps ? »

Burundi : La double illusion politique

[Par Elyse NGABIRE]

A l’entrée du camp Agathon Rwasa, ancien chef rebelle et grand opposant du pouvoir de Pierre Nkurunziza, à l’assemblée et au gouvernement issus des élections contestées de 2015, le pouvoir a chanté la victoire tandis que l’opposition criait à la trahison. Mais en fin de compte, sa position n’a pas changé depuis.

Agathon Rwasa

Agathon Rwasa

La déclaration d’Agathon Rwasa, deuxième vice-président de l’Assemblée nationale, ce 24 janvier, dans la province de Cankuzo a étonné une certaine opinion : « Le dialogue inter-burundais initié par le gouvernement est une perte de temps. Il est nul et de nul effet. »
Pour M. Rwasa, la crise que connaît le pays sera résolue à travers un dialogue inclusif, y compris des Burundais qui ont fui le pays.
En effet, l’ancien chef rebelle exhorte le concours de la communauté internationale pour accélérer les négociations : « Elles ne doivent pas traîner comme cela a été le cas lors des pourparlers politiques à Arusha. » Pour rappel, les négociations d’Arusha ont duré plus de deux ans (fin 1997 à 2000).
Pour les non avisés, ce discours de M. Rwasa est en contradiction avec son choix de siéger à l’assemblée nationale et dans les institutions étatiques à l’instar du gouvernement. Toutefois, Aimé Magera, son porte-parole le fustige : « Agathon Rwasa, leader historique et charismatique des Forces Nationales de Libération n’a jamais cautionné la troisième candidature de Pierre Nkurunziza. Son choix a été dicté par des militants. »
Pour tromper l’œil des Burundais et de la Communauté internationale, raconte M. Magera, le pouvoir de Bujumbura, a fait croire que la formation du gouvernement est le fruit d’un dialogue interne en pointant du doigt de façon implicite leur camp : « Or, ce même gouvernement ne nous reconnaît pas comme formation politique. »
Cette première démarche, poursuit-il, a échoué. Par la suite, le gouvernement de Bujumbura a organisé des missions de travail dans la Communauté Est Africaine en vue d’obtenir le soutien de celle-ci, explique M. Magera, en vain. La dernière stratégie du pouvoir Nkurunziza, fait savoir Aimé Magera, sera la mise en place de la Commission Nationale du Dialogue Inter-Burundais (CNDI). D’après lui, ce fut un autre échec cuisant car son patron n’y croit pas du tout en témoigne sa dernière sortie médiatique à Muramvya.
Pour M. Magera, le pouvoir ne va pas échapper pour toujours : « La légitimité sera toujours mise en cause aussi longtemps qu’il n’aura pas respecté la volonté du peuple d’élire ses dirigeants, la Constitution et l’Accord d’Arusha. »

 

Algérie, Contre-Pouvoirs : Interview au réalisateur Malek Bensmaïl

Interview à Malek Bensmaïl
réalisateur de long-métrage Contre-Pouvoirs

Réalisée par Wareth Kwaish
Opérateur camera et traducteur : Ali Al-Daher
Montage : Lisa Viola Rossi

(février 2016)

Contre-pouvoirs

Un long-métrage de Malek Bensmaïl

(Sortie en France : 27/01/2016)

 

Projection-débat à l’Espace Saint-Michel

(7, place Saint-Michel 75005 Paris),

le mardi 2 février 2016 à 20h00

Intervention de : Larbi GRAÏNE, journaliste de la MDJ

Michel David, fondateur de la société Zeugma Films animera le débat

Abrités depuis la décennie noire des années 90, au sein de la Maison de la Presse, les journalistes
du célèbre quotidien El Watan attendent la livraison de leurs nouveaux locaux, symbole de leur
indépendance.
Après vingt années d’existence et de combat de la presse indépendante algérienne, de joies et de pleurs, j’ai décidé d’installer ma caméra au sein de la rédaction d’El Watan qui suit l’actualité de ce nouveau printemps algérien… Le Président Bouteflika brigue un quatrième mandat.
Au-delà de ce qu’on appelle « les révolutions arabes » et autres termes médiatiques, ce film, est avant tout comme une contribution à la mémoire des femmes et des hommes, jeunes et moins jeunes, qui mènent un combat au quotidien afin de préserver la liberté d’informer dans un pays politiquement et socialement sclérosé.

Pour en savoir plus sur le film, cliquez ici

 

 

Opinion – Procès Gbagbo, sur la route de La Haye

[Par Armand IRE’]

Le 28 janvier 2016, débute enfin le procès de Laurent Gbagbo contre la Cour Pénale Internationale (CPI). Cinq longues années de détention préventive par une cour aux normes occidentales. Accusé de crimes contre l’Humanité, l’ancien président ivoirien à 70 ans passés est désormais perçu comme une icône, victime des grandes puissances qui dirigent le monde. Il est incarcéré depuis le 29 novembre 2011. Ambiance avant joutes.

Laurent Gbagbo (source : lexpress.fr)

Laurent Gbagbo (source : lexpress.fr)

Comme Harouna Traoré jeune burkinabé et porte-parole d’un comité d’organisation du voyage à La Haye le 28 janvier 2016, de nombreux africains et européens feront le déplacement pour ce procès historique. Plusieurs cars et véhicules de particuliers prendront la route de cette ville des Pays-Bas qui a obtenu un véritable bonus de célébrité depuis que la CPI y a implanté ses quartiers et surtout que Laurent Gbagbo y est embastillé.
C’est dans un nouveau bâtiment sorti de terre, signe de la vitalité financière de la CPI, que celui qu’on accuse d’avoir perdu les élections de 2010 et occasionné la guerre dans son pays sera face à des juges et à une équipe de procureurs conduite par Fatou Bensouda l’ex-ministre de la justice du dictateur Yaya Jammeh de la Gambie et actuel procureur de la CPI depuis le départ d’Ocampo l’homme qui voulait la peau de Gbagbo à tout prix. Cette affaire constamment qualifiée de vide par tous les avertis a déjà usé trois juges, qui ont préféré s’en débarrasser, soit en démissionnant ou en passant la main.

Charles Blé Goudé (source : afriqueinside.com)

Charles Blé Goudé (source : afriqueinside.com)

Le 28 janvier 2016, Laurent Gbagbo ne sera pas seul face aux juges. Avec lui, il y aura Charles Blé Goudé ancien leader estudiantin, président de l’alliance des jeunes patriotes ivoiriens, organisation créée pour manifester pacifiquement contre la guerre déclenchée en 2002 par une rébellion tribale . Le crédo de cet homme de 44 ans que la CPI qualifie de criminel contre l’Humanité est la lutte aux mains nues. Ses actions pacifiques ont dérangé ceux qui pensaient faire une bouchée de la gouvernance Gbagbo en créant et parrainant une rébellion venue du nord du pays. Après sa mémorable sortie lors de l’audience de confirmations des charges en son encontre, l’éphémère ministre de Laurent Gbagbo en charge de la jeunesse piaffe et veut dire la vérité au cours de ce procès.
Maître Seri Zokou, avocat au barreau de Bruxelles qui a rejoint l’équipe de défense du jeune leader ivoirien pense que si le « droit est dit, Charles Blé Goudé ne restera pas en prison ». Les lignes bougent donc dans le monde et en Afrique pour que la longue détention de « l’indocile » Laurent Gbagbo se transforme en libération à la suite d’un procès qui fera date. De nombreux chefs d’Etats africains sous la conduite du mozambicain Joaquim Chissano, du sud-africain Thabo Mbéki et du ghanéen Jerry Rawlings ont écrit une longue lettre à la CPI et à plusieurs organisations internationales pour demander la relaxe pure et simple de celui qui pour de nombreuses voix autorisées – ou pas – a gagné les élections dans son pays mais perdu la guerre face à l’ONU et la France de Sarkozy.