MÉDIAS, LIBERTÉ ET LA PRESSE AU BURUNDI

[Par Diane HAKIZIMANA, envoyée spéciale au 38e Festival de Cinéma de Douarnenez]

Ci-dessous l’extrait de l’émission n. 3 de la radio Vos Gueules Les Mouette publié pendant cette édition du Festival :


L'incendie à la Radio publique africaine où Diane Hakizimana travaillait avant de s'exiler

L’incendie à la Radio publique africaine où Diane Hakizimana travaillait avant de s’exiler

Liberté d’expression au Burundi : le bateau est-il à la dérive ?

[Par Diane HAKIZIMANA]

Le coup d’état déjoué du 13 mai dernier a-t- il accéléré les choses ? On ne saurait pas le dire. Mais les faits sont têtus et parlants, parfois. Depuis 2010, une certaine méfiance s’est installée entre le pouvoir de Pierre Nkurunziza et les médias privés indépendants. Une méfiance qui a grandi jusqu’au désamour. Un désamour qui s’est inéluctablement traduit par un divorce vu l’état actuel des radios indépendantes et le fait qu’il n’existait qu’une seule télé privée. Toutes ces stations ont été réduites au silence.

Manifestation contre le 3e mandat de Nkurunziza Source : ici.radio-canada.ca

Manifestation contre le 3e mandat de Nkurunziza
Source : ici.radio-canada.ca

Au Burundi, au cours de ces dernières années, la relation entre les médias indépendants et le pouvoir en place n’était pas au beau fixe. Il y a toujours eu une sorte de suspicion surtout après la dénonciation des résultats issus des élections de 2010 par une partie des opposants au régime de Nkurunziza. Les médias indépendants, qui jusque-là avaient pris le soin de couvrir les élections en synergie et en toute transparence, n’avaient jamais pris partie dans ce conflit entre le pouvoir donné vainqueur par le scrutin et les partis de l’opposition qui ont par la suite choisi de quitter la course électorale. Mais juste après ce scrutin, le pouvoir n’a cessé de taxer ces médias d’être à la solde de l’opposition surtout quand il s’agissait de dénoncer les pratiques de mauvaise gouvernance et de corruption, de violations graves des droits humains, etc.

Des menaces

Des journalistes ont eu droit à des menaces de mort au cours de ces dernières années, certains ont même connu la prison à l’instar du patron d’une radio privée très populaire au Burundi, la RPA, Radio Publique Africaine, pour avoir diffusé un reportage sur l’assassinat de sœurs italiennes, qui impliquait certaines personnalités proches du pouvoir, pour ne citer que celui-ci. Toutefois, personne ne pouvait prévoir que cet état des faits allait déboucher sur une destruction macabre des stations de quasi toutes les radios privées burundaises ainsi que de la seule télé privée du pays.

Les médias burundais pris entre deux feux

La volonté manifeste du président burundais Pierre Nkurunziza de briguer un 3e mandat et les soulèvements populaires qui ont suivi n’ont pas facilité le travail des médias burundais. Avant les événements du 13 mai 2015 où quelques éléments militaires et policiers burundais, sous le commandement du général Godefroid Niyombare, annonçaient la destitution du président Pierre Nkurunziza, les radios privées ne pouvaient pas émettre à travers tout le pays. La fameuse RPA, elle, a eu droit à la fermeture. Dans la foulée, le coup de force du 13 mai a entraîné une liesse populaire, justifiée sûrement par le fait que ce coup de pouce militaro-policier allait mettre fin à des représailles policières que les manifestants subissent chaque jour. Ces derniers n’ont pas tardé à désenchanter. Mais entre-temps, des combats ont éclaté entre les pro-Nkurunziza et les putschistes.

Apparemment, ces deux camps ont vite compris que cette bataille ne devrait pas être seulement militaire, qu’il s’agit plutôt de contrôler aussi les outils d’information. Les putschistes vont jusqu’à utiliser les médias privés pour faire passer leur message à la nation car ils n’ont pas jusque-là accès à la Radio Télévision Nationale du Burundi « RTNB ». Le dernier combat déterminant se déroulera par ailleurs devant cette dernière (RTNB) car, il amènera les putschistes à reconnaître leur défaite moins de 48 heures plus tard.

Les événements du 13-15 mai, coup fatal pour les médias privés burundais

Les médias burundais indépendants sont réduits au silence total depuis l’échec du putsch contre le Président Nkurunziza, s’est indigné Alexandre Niyungeko, président de l’Union Burundaise des Journalistes sur les réseaux sociaux.

 Un manifestant exhortant le gouvernement à rouvrir la station locale de la Radio Publique Africaine (RPA), Bujumbura, la capitale, le 29 avril 2015 Source : ifex.org

Un manifestant exhortant le gouvernement à rouvrir la station locale de la Radio Publique Africaine (RPA), Bujumbura, la capitale, mai 2015
Source : ifex.org

Des éléments en tenue policière et les miliciens du parti au pouvoir ont attaqué à l’arme lourde toutes les stations des radios et télés indépendantes : la Radio Publique Africaine (RPA), Bonesha FM, Isanganiro et la Radio Télévision Renaissance, a-t-il raconté. Peu avant, la radio Rema FM, une radio du parti au pouvoir avait été saccagée et détruite par des manifestants contre la troisième candidature du Président Nkurunziza, juste après l’annonce du putsch, a-t-il poursuivi.

Maintenant, aucune radio privée ne fonctionne à part la radio télévision nationale que contrôle le pouvoir de Bujumbura. Les ruines des radios détruites sont gardées par des policiers lourdement armés, et ils sont prêts à en découdre avec le premier des journalistes qui s’y présenterait, a-t-il conclut. Du coup, plusieurs journalistes de ces radios vivent en clandestinité, surtout les directeurs de ces médias et du syndicat des journalistes, l’Union Burundaise des Journalistes (UBJ).

Le déroulement de ces événements a accentué le désamour qui existait déjà entre les journalistes indépendants et le pouvoir de Nkurunziza. « Je crois que le gouvernement a développé une intolérance grave à l’encontre des voix critiques », a annoncé Bob Rugurika sur France 24, un des directeurs d’une radio privée contraint à l’exil. Il a qualifié ces attaques perpétrées contre ces médias d’« attaque grave envers la liberté de la presse ».  Aujourd’hui, le seul média en mesure d’émettre est la RTNB (Radio Télévision Nationale du Burundi) qui finalement a été gagnée par les forces loyalistes au président Pierre Nkurunziza et qui n’émet que des éloges du gouvernement. Il aura fallu seulement moins de 48 heures pour que le Burundi fasse un bond en arrière de plus de 15 ans, du temps où le pays était secoué par des conflits armés et où il n’existait qu’un seul média d’Etat pour donner sa version des faits.

 

Guinée : L’opposition dans une guéguerre inutile

[Par Sékou Chérif DIALLO]

« Moi contre mon frère, mon frère et moi contre mon cousin, mon frère, mon cousin et moi contre l’étranger ». Cette maxime est évocatrice des rapports de « groupabilité », d’appartenance ou encore d’alliance politique. Vous verrez plus loin que ce type de rapport (positif et négatif) est d’une ambivalence sournoise. Aujourd’hui, deux formations de l’opposition guinéenne se donnent en spectacle. Leurs lieutenants par médias interposés attisent les haines dans une dynamique d’abrutissement généralisé. Ils tiennent tous leur célébrité des idioties qu’ils propagent tous les jours. Dans le souci de dépersonnaliser le débat politique où des passions se déchaînent et obscurcissent le raisonnement, je ferai l’effort de ne mentionner que les noms des formations politiques en question. Il s’agit de l’UFDG (Union des forces démocratiques de Guinée) et l’UFR (Union des forces républicaines).

Sidya Touré (à gauche), leader de l'UFR et Cellou Dalein Diallo (à droite), leader de l'UFDG (Source : africaguinée.com)

Sidya Touré (à gauche), leader de l’UFR et Cellou Dalein Diallo (à droite), leader de l’UFDG
(Source : africaguinee.com)

Quand des forces prétendument « démocratiques » et « républicaines » exposent leurs faiblesses stratégiques

Rappel : au deuxième tour de l’élection présidentielle de 2010, l’UFR arrive en troisième position derrière le RPG (Rassemblement du peuple de Guinée, l’actuelle formation au pouvoir) et l’UFDG. L’UFR accepte alors de s’allier à cette dernière en donnant des consignes de vote à ses militants. Inutile de rappeler que l’objectif visé était la conquête et le partage du pouvoir. Inutile aussi de rappeler que ce scénario planifié ne prenait pas en compte des cartes que détenait le vieux routier de la politique guinéenne qui avait les faveurs des « petits dieux » qui gouvernaient à l’époque. Bref, l’alliance circonstancielle va muter en alliance conjoncturelle face aux nouveaux défis lancés par les maîtres de Conakry. Autrement dit, on reste ensemble parce que l’on s’est retrouvé de l’autre côté de la grille. C’est avant tout l’expression d’une conscience de survie rationnellement évaluée.

Entre 2010 et 2015, de l’eau est passée sous le pont. D’ailleurs, il serait illusoire de croire à des alliances naturelles. Elles sont avant tout délimitées dans le temps en fonction des enjeux et objectifs qui motivent leurs signataires.

Dans une approche compréhensible, faisons un effort pédagogique afin d’élucider la notion d’alliance politique. Aujourd’hui la confusion est totale chez les militants de ces deux formations politiques. Mais ma consternation est encore plus grande quand j’écoute les lieutenants « mauvais communicants » et « foncièrement médiocres » des leaders des formations politiques en question. Quand de simples crieurs publics s’improvisent communicants politiques, il faudrait s’attendre à une foire aux banalités ou à un cirque d’idioties.

Sur la foi de lectures scientifiques, les travaux d’un auteur sur les questions d’alliances politiques ont conforté ma position et serviront de tremplin pour asseoir mon argumentation. Il s’agit de Vincent Lemieux. A son avis, « Il y a alliance quand des acteurs qui ont des rapports positifs entre eux ou qui, tout au moins, n’ont pas de rapports négatifs, cherchent à maintenir ou à améliorer leur position par rapport à des acteurs cibles, qui sont des rivaux… . Une alliance peut-être négociée ou tacite, et elle peut être durable ou temporaire ».

Comme mentionné précédemment c’est une alliance de raison et non de cœur. Les acteurs politiques guinéens et leurs militants doivent intérioriser cette dynamique de partenaires politiques et éviter de toujours ramener le débat au niveau des personnes.

Quand l’environnement fausse l’approche politique

La politique étant différente de l’arithmétique, en 2010, l’UFDG s’illusionnait dans un calcul élémentaire (39,7+15,6 = 55,3), ce qui révèle d’ailleurs sa naïveté politique à l’époque.

Cette formation avait besoin de l’UFR. Du coup, elle avait du mal à s’intéresser aux petites formations politiques qui totalisaient à peine 1% de l’électorat à l’issue des résultats du premier tour de l’élection présidentielle de 2010. Aux dires de ses membres, l’UFR suffisait pour remporter l’élection au deuxième tour. Erreur de « Gawa » (excusez ma vulgarité circonstancielle). Une lecture biaisée du jeu politique qui profitera au RPG qui d’ailleurs, adoptera l’approche inverse en ratissant large sans se soucier du poids électoral des alliés pour donner l’impression d’une représentation « nationale ». Et l’approche était juste parce qu’elle collait parfaitement à la sociologie politique du pays où le dosage ethno-stratégique apparaît comme une « règle » tacite parce que héritée d’une logique d’instrumentalisation des ethnies à des fins politiques. Aussi, la lecture extérieure sur la Guinée qui est le plus souvent réductrice, fait apparaître un bicéphalisme politico-ethnique. L’UFDG n’avait pas saisi cette réalité. Comme le rappelle Lemieux « Il est important pour l’alliance victorieuse de donner l’impression qu’elle a un large appui des autres acteurs qui jouent des rôles sur la scène politique ». Loin d’avoir des ambitions hégémoniques « communautaires » comme le reprochent certains, l’UFDG a cependant du mal à se débarrasser des nombreux préjugés historiquement fabriqués et entretenus pour diviser. Dans un environnement où les croyances populaires teintées d’appréhensions sur telles ou telles ethnies sont plus vivaces que les vérités historiques, la tâche d’anéantissement de ces croyances fabriquées semble gigantesque. Surtout si les commis dédiés à cette tâche excellent le plus souvent dans la propagation d’âneries de toutes sortes.

A l’opposé des extrêmes ethniquement identifiables, l’UFR se targue d’être une formation à la représentation large. Même si aucune statistique ne le confirme. Inutile ! Car en Guinée, nous avons des données statistiques toutes faites qui ne relèvent d’aucune étude scientifique mais simplement concoctées par de pseudo « connaisseurs ».

A ses débuts, l’UFR était avant tout une formation qui puisait son électorat en milieu urbain, donc cosmopolite et au sein d’une catégorie socioprofessionnelle de fonctionnaires et cadres moyens. Auréolé de son passage jugé « remarquable » à la primature guinéenne, son leader a bénéficié d’un crédit confiance auprès de ceux qui avaient la capacité de lecture d’une action gouvernementale et ceux qui s’impressionnent facilement face à la nouveauté et aux mirages du quotidien. Cependant, avec l’évolution de la dynamique politique dans le pays où les assises électorales sont géographiquement compartimentées, l’UFR n’échappera pas à cette tendance vicieuse de courtisanerie communautaire. Dans le contexte guinéen, est-ce faire preuve de réalisme politique ou d’inconstance idéologique ? Je ne saurais vous répondre. Seuls les politiciens savent les motivations qui sous-tendent leurs positionnements ou actions. Il faut cependant déplorer les incessantes mutations observées çà et là dans les démarches et approches politiques, afin, soutiennent-ils, de s’adapter à un environnement politique qui est assez malsain.

Quand tous prétendent faire de la politique à l’aveuglette

Dans une alliance ou toute forme d’association, les rapports de pouvoir sont inhérents. Du coup, la motivation première de chaque acteur politique est d’occuper une position avantageuse. L’UFR comme l’UFDG cherche avant tout à accéder au pouvoir. Songer à une relation de vassalité est foncièrement prétentieuse. Rien n’est acquis avant le verdict des urnes. L’assurance aveugle d’un environnement ambiant et profondément instable où quelques personnes tapis dans l’ombre ont ce pouvoir de faire basculer une élection relève de la naïveté politique.

Il est impératif d’avoir des alliés à plusieurs niveaux. Il faudra apprendre à dépersonnaliser et dépassionner le débat politique. Même au sein de l’appareil d’état actuel, la récupération de certains frustrés de la gouvernance relève du pragmatisme politique. Mais il faudrait les rassurer pour qu’ils mettent en jeu leurs positions et privilèges au profit d’une promesse. Tous cherchent une existence meilleure, une visibilité, une reconnaissance, un environnement pour s’épanouir. Qu’est-ce qui empêcherait à un leader politique d’entamer un processus de rapprochement avec le président de la CENI par exemple ? Sachant pertinemment qu’il fait partie du puzzle de la fraude électorale. Ces personnes ont peur de perdre leurs privilèges et sont prêtes à toutes les bassesses pour se maintenir. La démarche politique est graduelle et l’exclusion est improductive. Loin de moi l’idée de faire l’apologie du principe : la fin justifie les moyens ; mais il faut privilégier une approche inclusive dans la conquête et l’exercice du pouvoir.

Quand un rapport négatif devient ambivalent pour redevenir négatif

Pour finir, revenons sur cette maxime qui illustre bien cette ambivalence relationnelle qui caractérise très souvent les alliances politiques « Moi contre mon frère, mon frère et moi contre mon cousin, mon frère, mon cousin et moi contre l’étranger ». Vincent Lemieux apporte une explication qui conforte ma compréhension de la guéguerre encore inutile entre l’UFDG et l’UFR. A son avis, « L’alliance avec le frère, puis avec le frère et le cousin, n’efface pas tout à fait l’hostilité préalable. Elle la tempère plutôt d’une affinité qui transforme un rapport négatif en un rapport ambivalent, toujours susceptible de redevenir plus négatif que positif quand la menace de l’ennemi commun s’estompe. »

 

Burundi: Tant qu’il y aura le tout puissant président Nkurunziza !

[Par Jean MATI]

Maître du jeu, le président sortant du Burundi, Pierre Nkurunziza est loin de lâcher prise. Malgré les contestations de la rue, l’homme fort du pays reste insensible face à l’émotion de tout un peuple. Cynisme, déni, mépris et autres stratégies mises en place pour demeurer au pouvoir, Pierre Nkurunziza se représente pour un troisième mandat en toute violation de la constitution.  

Le président Pierre Nkurunziza Source : notreafrik.com

Le président Pierre Nkurunziza
Source : notreafrik.com

N’eussent été les mouvements de contestations de la rue et le semblant « coup d’Etat » de ce dernier temps, peut-être beaucoup des gens et autres curieux n’auraient pas entendu parler du Burundi en boucle et de son fameux président Pierre Nkurunziza devenu sans doute une Super Star dans les médias. Burundi, pays d’Afrique de l’Est avec une superficie de 27.834 km2, était jusqu’alors, l’une des nations africaines, la moins agitée, malgré une politique dictatoriale du régime en place. Inutile de le rappeler, le Président de la République burundaise s’appelle : Pierre Nkurunziza. Comme un bon chef d’Etat africain, il est le père de la nation. Il est le garant. C’est celui qui détient les âmes et la vie de tous ses compatriotes. On le déteste parce qu’il est chef. Pourquoi ? « En Afrique, les présidents (les chefs)  sont toujours détestables parce qu’ils sont riches et voleurs. Mais aussi tueurs et criminels », accuse l’homme de la rue. « Parfois, leur fortune dépasse même les dettes de leurs pays. Toutefois, ils ont des sympathisants. Ceux qui les acclament ou  les vénèrent », ajoute-t-il. Le président Nkurunziza est-il différent des autres ?

Du condamné à mort au Chef de l’Etat

L’histoire de l’ascension du tout puissant Nkurunziza tente de ressembler aux  récits des personnages religieux ou prophétiques. Était-il l’homme de destin du pays ? Le messie, celui qui devait venir…  En tout cas, il y a trop de mystification là-dessus. On connait, par exemple, peu sur son enfance. Pas grand-chose n’a été dit sur l’enfant Nkurunziza. On retiendra tout de même que son père fut un ancien gouverneur des provinces de Kayanzi et de Ngozi. Le père de Nkurunziza est élu au parlement en 1965, à en croire les sources dignes de foi, avant d’être liquidé en 1972. Son fils Pierre n’avait que huit ans et demi et a vu le père assassiné… Point barre. Plus rien n’a été dit par la suite sur la vie du tout puissant Nkurunziza.

Il fallait attendre le début des années 90. Un vent nouveau souffle en Afrique avec la vague de démocratie. La fin des partis uniques. C’est aussi la nouvelle donne mondiale. La chute du mur de Berlin. La fin de la guerre froide. Comme dans un rêve, Pierre Nkurunziza réapparaît. Cette subite apparition n’est pas sans doute pour venger le père assassiné. Ça non et non ! Ici, on parle de futur « l’homme fort du Burundi » en termes d’un grand sportif. Un grand athlète qui aurait pu faire une belle carrière sportive si jamais la volonté du Très Haut ne lui avait pas guidé sur le terrain politique. Selon le site Internet de la Présidence, le tout puissant Nkurunziza est un sportif talentueux qui aime le football et la course à vélo. Il a même entraîné un club de la première division… (qui malheureusement n’a pas gagné de titres, ndlr). Il finit dans les auditoires de l’Université de Bujumbura comme professeur assistant. En 1993, des violences ethniques s’éclatent, deux des sept membres de la famille de Nkurunziza sont tués. Le professeur Pierre abandonne les salles de cours et rejoint les maquis pour tenir les armes et faire la guerre. Cette fois-ci, il est revanchard. Très revanchard même. L’ancien footballeur et cycliste devient terroriste. Il planifie des projets d’attentat comme celui de 1995 qui a coûté la vie à des dizaines de morts dans la capitale burundaise. Il est condamné à mort par la justice. Il s’exile discrètement dans des pays voisins avant de revenir au bled pour s’activer dans la rébellion.

Dans sa pérégrination, Pierre Nkurunziza songe à devenir « Chef de l’Etat ». Martin Luther King avait fait un rêve. Pourquoi pas lui ? Mais pour concrétiser ce destin acharné, il doit se convertir et chercher la rédemption. Pierre, pas encore « Tout puissant » à l’époque, devient pacifiste. Il signe les accords de paix d’Arusha de 2000 et  de 2003. Une démarche payante, car, sa peine de condamnation à mort est amnistiée… provisoirement !

En 2005, il est élu chef de l’Etat. Son arrivé au pouvoir est salué par les partenaires occidentaux. C’est un jeune président. Un bel avenir pour le Burundi ! Mais vite, ça sera la déception. L’homme est un vieux routier. On n’apprend pas à faire des grimaces à un vieux singe, dit un vieil adage africain. Nkurunziza est un dictateur né. Un despote. Un démagogue aussi. Il est vite désavoué par une majorité des Burundais. Même les gens de son ethnie ont fini par cracher sur sa mauvaise politique. En 2010, il est réélu maintenant comme un vrai dictateur avec un score fleuve de 91 % de voix. L’opposition crie à la fraude et en appelle même à la Communauté internationale. Le camp présidentiel ferme les oreilles à toutes les jérémiades des opposants burundais. Les années passent vite. Durant deux mandats, le président n’a pas fait grand-chose. Arrive l’an 2015, les élections sont prévues en ce mois de juin. Sauf que le tout puissant Nkurunziza n’a plus le droit de se représenter. Pourquoi l’empêcher ? C’est la Constitution. Foutez-nous tranquille avec vos constitutions  écrites à la main par les intellectuels noirs africains à l’aide des conseillers politiques blancs ! – imagine-t-on un tel scénario. Finalement, le pouvoir en place modifie la Constitution. Le président peut se représenter plusieurs fois (illimité) tant qu’il aura encore la force de servir son peuple grâce à la volonté divine du très Haut.

Le peuple burundais est tout sauf idiot. Les manifestants sont dans la rue. Certains bâtiments publics sont mis à sac. Les échauffourées dégénèrent entre les contestataires et les forces dites de l’ordre, en Afrique, sont généralement du « désordre ». Des tirs à balle réelle sont entendus dans les grandes artères de la capitale, certains tombent et d’autres s’échappent miraculeusement.

Des manifestants dispersés par la police au cours d’une manifestation contre un 3e mandat du président, vendredi 17 avril 2015 Source : voaafrique.com

Des manifestants dispersés par la police au cours d’une manifestation contre un 3e mandat du président, vendredi 17 avril 2015
Source : voaafrique.com

Le Tout puissant Nkurunziza en Tanzanie lors d’un déplacement apprend par les voies des médias, qu’il est déchu. Coup d’Etat ! C’est la jubilation à Bujumbura. Les femmes enlèvent leur pagne et dansent. Les manifestants scandent la victoire conquise de manière héroïque. Le nouvel homme fort, le général Godefroid Niyombare, lut un discours à la télé comme un enfant. Très rapidement, on remarque que l’officier n’a ni charisme, ni aura pour être « Quelqu’un de la situation ». Les loyalistes refusent d’obtempérer. Ça barde de nouveau. Les manifestants déchantent. Tout le monde est retranché dans sa maison. Attention ! Quand les militaires se battent – il faut éviter d’être une victime collatérale, on nous dit souvent au moment de la pagaille. Les hommes du Président déjouent le complot. Nkurunziza rentre tranquillement dans son palais présidentiel et reprend service. Les conspirateurs fuient comme des « chiens » la queue entre les pattes. Certains quittent le jour même le pays par craintes des représailles. D’autres comploteurs sont liquidés ou capturés, jetés dans des lugubres geôles. Le président Nkurunziza se bombe le torse. Il convoque ses services à la présidence. Les ministres, agents du renseignement et autres s’agrippent au chef. Ce dernier les tire aux oreilles comme des gamins turbulents. Ils répondent par : un oui «  Chef ».

Comme si de rien était, le lendemain, le président Nkurunziza poursuit sa tournée nationale dans le cadre de la campagne électorale à laquelle il est candidat, nous l’avions déjà dit, pour un troisième mandat. Cette arrogance inacceptable du tout puissant président a occasionné la montée en fièvre du  peuple burundais. Celui-ci est descendu encore dans la rue. Sans doute, les Burundais se sont sentis roulés dans la pâte à farine. En attendant la tenue des élections au Burundi, la question est de savoir : jusqu’où ira Pierre Nkurunziza ?

RDC : Controverse autour de 425 cadavres découverts à Kinshasa

[Par Jean MATI]

425 corps ont été retrouvés naguère à Maluku dans la banlieue de Kinshasa. Au moment où les indiscrétions pointent un doigt accusateur en direction des industries de la mort installées par le régime en place, cette découverte macabre a suscité la réaction de l’opinion nationale mais aussi de la communauté internationale. Elle relance, par ailleurs, le débat sur la question sécuritaire en République démocratique du Congo, un pays dont les droits de l’homme sont bafoués. Les opposants emprisonnés, les contestataires muselés, les journalistes assassinés et voire pousser à l’exil…Telle est la présentation d’un tableau sombre qu’expose le Congo-Kinshasa.

kinshasa
Ce jour-là, une odeur nauséabonde bouchait les narines des citadins de Maluku, une commune située dans le faubourg de Kinshasa, la capitale de la RDC. « Presque tout le monde voulait savoir d’où venait une telle odeur, car ça donnait l’envie de vomir. Est-ce une odeur d’excréments ? Se demandaient les uns. Non, affirmaient les autres. C’était plus que ça ! », Confie un témoin.
A quelques pas de là, dans l’enceinte du cimetière local « fula-fula », les badauds découvrirent une fosse commune. Des corps humains mal enterrés ont refait surface. Ils traînaient à la hauteur de la terre. On pouvait observer les bras, les cheveux, les têtes et autres partie du corps. Une scène effrayante à la manière d’un film d’horreur. De quel monde sortent-ils ces corps ? Ce sont des fantômes ? A priori, à ces questions manquaient les réponses. Trop vite les mots ont pu remplacer le silence. « C’est le Gouvernement qui a fait ça » affirment les observateurs avisés. « Ce sont des Congolais qu’on tue chaque jour. Dans ce pays, l’Etat ne se soucie pas de la protection de la population. Les Congolais sont assassinés par des mains criminelles. Personne ne fait rien. Et rien ne fera rien. Ainsi va la vie au Congo-Kinshasa» soutiennent-ils.
Pour mieux accabler le Gouvernement congolais de son cynisme quant à la façon d’enterrer ses compatriotes, de multiples voix vont s’élever et dire que ces corps seraient ceux des manifestants tués lors des émeutes de janvier dernier à Kinshasa. « L’Etat aurait voulu les inhumer discrètement comme dans ses habitudes. Mais cette fois-ci, les morts ont refusé de mourir », fait savoir un habitant de Maluku.

Réaction du gouvernement
Dans la précipitation, le gouvernement de Kinshasa, craignant une mauvaise publicité à l’extérieur du pays, réagit. Mais c’est une riposte tardive. La nouvelle s’est répandue comme une traînée de poudre. A l’ère du développement des réseaux sociaux, les informations se propagent vite. Les photos et les vidéos macabres circulent déjà sur Facebook, Whatsaap, Viber, Youtube…La presse internationale est déjà au courant ? Oui, ça c’est sûr !

Evariste Boshab (source : http://24hcongo.com/)

Evariste Boshab (source : http://24hcongo.com/)

Par l’entremise de son Vice-Premier ministre de l’Intérieur, Evariste Boshab, le pouvoir de Kinshasa va présenter les faits à sa manière. Les 425 corps découverts dans la fosse commune de Maluku seraient des cadavres qui pourrissaient dans les chambres froides de la morgue de l’Hôpital général de Kinshasa. « Ce sont des fœtus de morts – nés et des corps d’ inconnus décédés des morts naturelles. C’est une pratique courante en RDC où les familles ne possédant pas de moyens abandonnent leurs proches à la morgue», soutenait Evariste Boshab. Pour étayer sa version de thèse privilégiée, le pouvoir de Kinshasa offrira un spectacle désolant en mode « Syndrome Timisoara ». Le lendemain, les médias d’Etat sont à l’Hôpital général et filment les cadavres des indigènes qui se trouvaient à la morgue. Le gouvernement de Kinshasa brandit cela comme des pièces à conviction et promet de les enterrer dignement. Pourquoi ne l’a-t-il pas fait avec les 425 cadavres de Maluku ? Pourquoi en RDC les autorités ont perdu tout le caractère du sens moral ?

Le pouvoir de Kinshasa ou l’ « ante-peuple » congolais
Cette représentation cynique du pouvoir de Kinshasa ne va pas apaiser la colère. Mais elle va plutôt jeter de l’huile sur le feu. L’opposition qualifiera cette découverte macabre de « charnier ». L’opposant historique Etienne Tshisekedi parlera même de l’ « escadron de la mort ». Le régime en place est démasqué. Il y a trop de contradictions dans les discours des représentants de la Majorité présidentielle. Lambert Mende, ministre de la Communication et des Médias change de registre et refuse de parler de la « fosse commune ». Il invente une expression : le « tombeau commun ». Les membres de sa famille politique rectifient et préfèrent dire la « tombe commune ». Quelle négation !

(source : http://www.un.org/)

(source : http://www.un.org/)

Dans ce cas de figure, il faut faire appel à l’extérieur. Les Occidentaux doivent mener l’expertise. Ici, il faut pas compter sur nos autorités et surtout pas sur la justice, estime une partie de l’opinion nationale. Comme il fallait s’y attendre, l’ONU intervient finalement et exige l’exhumation des corps afin de mener une enquête approfondie en vue d’établir les circonstances de leur mort. Le pouvoir de Kinshasa fait obstruction.
En attendant de connaître les résultats des experts, force est de déplorer la culture de banalisation qui a atteint son paroxysme en République démocratique du Congo. Les morts ne sont plus respectés. Ces Congolais à qui on a « chosifié » à Kinshasa, ne méritaient-ils pas d’être enterrés dignement ?

 

 

Guinée : l’opposition face à l’équation Alpha Condé

[Par Sékou Chérif DIALLO]

Comment arriver à une alternance politique sans ‘’brûler le pays’’ ? Les inconditionnels du jeu démocratique vous répondront sans équivoque : par les urnes.

Alpha Condé ©africaguinee.com

Alpha Condé ©africaguinee.com

Et pour les autres ? Ils vont sans doute argumenter sur les multiples recours ‘’possibles’’ face à un tel cas de figure. Quel est alors le cas de figure qui se présente en Guinée ? Le régime de Alpha Condé peine à insuffler un véritable changement. La manipulation ethnique semble être le leitmotiv politiquement ancré dans les pratiques du régime. La pauvreté des guinéens est aujourd’hui insoutenable. Les violations de la constitution sont récurrentes. Les statistiques macabres sont alarmantes. Bref, le régime a failli à ses engagements d’offrir aux guinéens des conditions de vie décentes, de les protéger et respecter le contrat social démocratique régi par des lois. Ce diagnostic est partagé par l’immense majorité des guinéens. Mêmes ceux qui soutiennent mordicus le régime savent que l’arc-en-ciel promis par le RPG (parti au pouvoir) n’a réellement qu’une seule couleur : le noir. Loin de faire de la caricature, j’essaie de présenter les faits. Face à un tel bilan, les velléités de changement anticonstitutionnel trouveraient leurs justifications et la légitimité populaire mettrait de l’ombre à la légalité constitutionnelle. Mais, l’issue ‘’envisagée’’ d’une telle entreprise est plus qu’incertaine et son évaluation à priori est inéluctablement hypothétique.

Revenons un instant sur la position de ceux qui défendent la voie des urnes pour ‘’abattre’’ légalement un régime jugé incompétent. Replongeons-nous dans l’histoire électorale récente de la Guinée pour asseoir notre argumentation. En 2010, Alpha Condé a été déclaré président de la République à l’issue d’une élection la plus invraisemblable. Un cas d’école sur la fraude électorale dans le monde. Arrivé en deuxième position avec 20,7% au premier tour de l’élection et ne bénéficiant pas du soutien du troisième (Sidya Touré avec 15,6%) et face au premier (Cellou Dalein) qui avait totalisé 39,7%, Alpha Condé s’en sort avec 52,52% au deuxième tour. Un exploit inédit diront certains mais c’était plutôt le résultat d’‘’une vente aux enchères’’ où le plus offrant a raflé la mise. On pourrait trouver une explication à cette surenchère politico-mafiosieuse sur la guéguerre qui a suivi entre l’acheteur et le vendeur où ce dernier est persona non grata dans son pays. Bref, comme sous l’arbre à palabre qui d’ailleurs mine l’ancrage démocratique dans nos pays, la forfaiture a été entérinée sous le prétexte d’une préservation de la paix sociale.

Une mascarade électorale

Moins d’an an après, nous avons évalué ce que valait réellement cette ‘’prétendue paix sociale’’ avec son couronnement macabre. En 2013, les élections législatives sont organisées. Cette fois-ci encore avec le même modus operandi. Le bras exécutant de toutes ces mascarades électorales n’est autre que l’organe chargé des élections en Guinée. La commission électorale nationale ‘’indépendante’’ est l’une des plus partisanes en Afrique. Sous un soleil de plomb, l’électeur guinéen s’aligne une journée entière dans l’attente pour pouvoir glisser son bulletin dans l’urne et une poignée de guinéens décident autrement des résultats à publier en violant la volonté exprimée par la majorité. Les frustrations qui en découlent décrédibilisent les arbitres électoraux et alimentent le sentiment de rejet et de défiance face une tradition qui semble vivace.

Les crises politiques sont permanentes en Guinée. Le pouvoir est dans une logique de répression, de justification et de manipulation. De l’autre côté, l’opposition est coincée dans une spirale de revendications qui sont d’ailleurs toutes légitimes, de victimisation et des querelles fratricides de positionnement.

Vote dans le quartier Dixinn à Conakry ©rfi.fr

Vote dans le quartier Dixinn à Conakry ©rfi.fr

Comment alors résoudre une telle équation sans basculer dans une violence ‘’inutile’’ ? Partant du constat que la situation du pays résulte d’un colmatage institutionnel initié et adopté par les organes de la transition de 2010 où le laxisme, le favoritisme et l’amateurisme ont contribué à la création et l’entretien d’un environnement de suspicion généralisée. Autre aspect notable, la relégation de la constitution au second plan au profit d’accords tri ou multipartites dont les contours entretiennent des confusions et n’engagent faiblement leurs signataires. Face à une telle exception dans un pays qui se targue d’être exceptionnel par le caractère plutôt insolite et informel de son modèle social, des mesures exceptionnelles s’imposent.

En ma qualité de citoyen lambda dont la notoriété ne dépasse pas le seuil de ma porte, je me permets de faire un certain nombre de propositions aux acteurs qui nous ont injustement piégés dans des querelles infernales.

Au pouvoir (je voulais dire à « Alpha Condé »)

L’organisation des élections communales et communautaires avant la présidentielle qui est aujourd’hui la principale revendication de l’opposition est la résultante d’une suspicion ‘’fondée’’ sur le rôle des délégations spéciales mises en place par le régime. A cet effet, nous suggérons ce qui suit :

1. Alpha Condé devrait prendre un décret révoquant toutes les délégations spéciales qui ont remplacé les élus locaux en déclarant une vacance des pouvoirs locaux jusqu’à l’installation des nouveaux élus ;

2. Le rôle de la force spéciale de sécurisation des élections dans les fraudes électorales précédentes est avéré. La mission de cette force doit être redéfinie et elle doit s’occuper strictement de la sécurisation des bureaux de vote et du pays en général sans aucune implication directe dans la gestion et le transport du matériel électoral ;

3. Ecarter systématiquement toute l’administration déconcentrée du processus.

NB : je me permets cette naïveté intellectuelle de croire qu’Alpha Condé accèdera à cette requête sachant que son salut viendra de ces acteurs précités.

A la CENI (commission électorale nationale ‘’indépendante’’)

1. Procéder à la recomposition de ses démembrements avec la présence des ‘’vrais’’ représentants des partis politiques en lice ;

2. Ces démembrements auront des missions élargies à celles jusque-là détenues par les délégations spéciales. Ils seront chargés de la gestion de tout le matériel électoral et de l’organisation au niveau local.

A l’opposition

1. De faire preuve d’exigence sur le choix de ses représentants au niveau des démembrements de la CENI qui seront leurs véritables observateurs. Finir avec le laxisme et les affinités dans le choix de leurs représentants, qui ne se contenteront pas simplement d’émarger sur une fiche pour percevoir de per diem mais de garants de la transparence. Cette recommandation est aussi valable pour ses délégués au bureau central de la CENI.

Avec ce minimum de mesures concrètes, les positions radicales des différentes parties se décanteront et s’affineront. L’opposition pourrait adhérer à l’argument financier brandit par la CENI qui ‘’justifierait’’ le choix d’inverser l’ordre des élections. Ainsi la seconde phase du processus sera abordée dans un environnement de confiance minimale retrouvée. De toute évidence, les étapes suivantes seront aussi laborieuses. La révision et le toilettage du fichier électoral, la redéfinition de la cartographie électorale, l’élaboration et la distribution des cartes d’électeurs soulèveront sans doute d’autres problématiques encore plus grandes. Le pouvoir reste le seul responsable de cette énième impasse politique.

Pour terminer, je réaffirme ma position inébranlable qui est celle d’un démocrate convaincu : un coup d’Etat militaire est toujours un recul démocratique. C’est plutôt une insurrection populaire qu’il faudrait redouter avec la tournure que prennent les évènements et le pourrissement de la situation. De toute évidence, les révolutions populaires ont souvent connu la récupération militaire. Plusieurs exemples en font foi.

À la Sorbonne : Evénement autour de la liberté d’expression

[Par Nahed BADAWIA]

L’association “Panthéon Sorbonne Monde Arabe” a organisé le 16 mars 2015 une conférence sur la pratique journalistique et la liberté d’expression dans le monde Arabe.

Une moment de la rencontre

Une moment de la rencontre

La Maison des Journalistes a participé à cet événement avec deux journalistes du Moyen-Orient, le Yéménite Mohamad Alchami et la Syrienne Nahed Badawia. Le troisième intervenant était le journaliste français Tangi Salaün qui travaille, actuellement, pour l’agence Reuter comme correspondant en Égypte. Les trois participants ont abordé la liberté d’expression sur leur terrain du travail.
Mohamad Alchami a abordé la violation de la liberté d’expression par différents pouvoirs au Yémen : par le régime en place, les chefs des tribus et les extrémistes. Il a précisé que c’est bien là un réel combat pour les Droits de l’Homme, au-delà de celui de la liberté de la presse.
Nahed Badawia a évoqué trois périodes différentes.
Pendant La première république Syrienne (1932-1963) une liberté de la presse existait. Par exemple, il y avait 128 journaux et 129 périodiques littéraires, scientifiques et professionnels.
Lors de la deuxième république (1963-2011) Pendant le mandat du parti Baas on assistait à La nationalisation de la presse. Il n’y avait que trois journaux : AlBaas (renaissance), Alsawra (la révolution) and Tichreen (Octobre- la date du coup d’état de Hafez Assad). Mais on peut dire que tous étaient de pâles copies les uns des autres.
La presse entre 2011 et 2013 : durant la période révolutionnaire, la vie médiatique a fleuri. Jamais la presse n’a été aussi active et libre. Mais en 2014-2015 La presse fut prise entre deux feux: le régime et les extrémistes.
Tangi Salaün, pour sa part, a constaté que La révolution Twitter-Facebook ne concernait que peu de personnes dans le monde Arabe. En Egypte, son problème principal dans l’exercice de son métier de journaliste, était l’accès à l’information mais pas la répression.
A l’occasion de cette conférence les étudiants ont posé de multiples questions sur le thème de la liberté d’expression au Moyen-Orient et dans le monde dans son ensemble. Les orateurs, quant à eux, ont souligné, en conclusion, que les notions de « démocratie » et de « liberté de la presse » sont définitivement indissociables.

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