La liberté d’informer
Journalistes et lanceurs d’alerte, liberté d’expression et droits de l’Homme… Le combat pour la liberté d’informer est actuel, partout dans le monde et ne cesse d’être menacé. La Maison des journalistes – MDJ – à travers ses nombreuses missions et son journal “l’Oeil de la MDJ” lutte quotidiennement pour que chacun puisse jouir de son droit fondamental : critiquer librement.
Dans la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789, la liberté est le premier des quatre droits de l’Homme. Après la définition de la liberté et le rappel de la primauté de la loi (article 4), c’est le refus de la détention arbitraire (article 7), puis la présomption d’innocence (article 9) et l’affirmation du respect des opinions notamment « religieuses » (article 10). De plus, la « libre communication des pensées et des opinions » apparaît comme la première des libertés (article 11), dont les bornes sont définies par la loi.
La « libre communication des pensées et des opinions » est définie aujourd’hui par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme adoptée par Les Nations Unies en 1948 et ses diverses adaptations dans les lois des pays. Elle est aussi l’objet de réflexions philosophiques, politiques et éthiques quant à la meilleure façon de la pratiquer.
Guinée Conakry – Entre élections et Goulag, interview de Thomas Dietrich, journaliste expulsé qui analyse la situation politique et sociale
/dans Afrique, Liberté d'informer /par Mamadou Bhoye BAHUne rencontre, une interview.
C’est par Twitter que la rédaction de l’Oeil de la MDJ est rentré en contact avec Thomas Dietrich qui a tout de suite accepté de répondre aux questions de Mamadou. Loin de la censure guinéenne, il livre ses expériences et le traitement de son cas par les autorités lors de son expulsion.
Thomas Dietrich, journaliste pour Le Média
Diplômé de Science Po Paris, Thomas Dietrich a vécu et travaillé dans plusieurs pays africains.
Le continent noir (et en particulier la République Centrafricaine) est d’ailleurs le cadre de son premier roman, Là où la terre est rouge (Albin Michel, 2014), Prix Folire, finaliste du prix Emmanuel Roblès, du prix Senghor et du prix de la Vocation, sélectionné pour le prix Landerneau, le prix littéraire ENS Cachan, le prix du premier roman de Chambéry et le prix du jeune romancier.
En 2016, Thomas Dietrich est élu Président d’honneur de l’association des écrivains tchadiens.
Durant cette interview, plusieurs scandales sont traités. L’un d’eux attire particulièrement l’attention : l’existence d’un camp de déportation pour les opposants politiques dénoncées par Amnesty International.
Les méthodes du Président en exercice qui se sert du Coronavirus pour passer en force son referendum.
Par exemple, l’Organisation internationale de la Francophonie, qui accompagne le processus électoral en Guinée, a jugé “problématiques” près de 2,5 millions de noms d’électeurs figurant sur les listes des doublons et des personnes décédées.
Les mots “déportation” et “Goulag” sont associés au scandale du camp de Soronkoni. “La situation des droits humains et des libertés fondamentales, leur protection ne semble plus être la préoccupation première de ceux qui ont la charge. Le barreau de Guinée reste profondément préoccupé par la rumeur persistante quand à l’existence d’un “Goulag” dit de Soronkoni” a déclaré Maitre Djibril Kouyaté le 17 mars 2020.
Sans oublier le cas du gouverneur de la ville de Labé, grande ville Guinéenne, dont l’inspecteur de l’Éducation Nationale avait menacé de mort notre journaliste Mamadou, contraint de quitter le pays après avoir reçu ses menaces.
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/dans Droits de l'Homme, Liberté d'informer, Moyen et Proche Orient /par Massoumeh RAOUFIranWire, un site d’informations, a publié les sources reçues par un représentant du gouvernement. Selon une estimation officielle établie par le “Comité national du coronavirus” à la demande du gouvernement iranien, la mise en garde est explicite.
“Si la politique de quarantaine complète n’est pas mise en œuvre dans toutes les zones infectées du pays et si la même tendance se poursuit jusqu’à la fin du mois de mai, le nombre de décès par coronavirus en Iran pourrait atteindre 700.000. En cas de mise en quarantaine totale des zones infectées, le nombre de morts est estimé à près de 200.000″.
Guinée – Comme à chaque campagne électorale, les journalistes sont menacés
/dans Afrique, Liberté d'informer, Liberté de la presse /par Mamadou Bhoye BAHC’est en plein automne, en octobre 2017, que le seul cas d’exaction dénoncé vis-à-vis d’un journaliste guinéen par RSF a eu lieu. Il s’agit d’Abdoubacar Camara, directeur de radio et télévision. Le week-end précédent, sa radio avait diffusé une musique funèbre suite au décès d’un de ses journalistes, crime imputé au président de la République Alpha Condé.
Depuis cet épisode, les arrestations arbitraires et les menaces de l’Etat se multiplient à l‘encontre des journalistes. En d’autres termes, la loi L002/22/ 06/2010, qui encadre la presse guinéenne et l’exercice du métier de journaliste en Guinée, est souillée sans scrupule.
Un premier journaliste sous la menace de l’Etat
Remontons au samedi 15 juin 2019. Ce jour-là, Elhadj Madifing Diané, ancien ministre de la sécurité et actuel gouverneur de la région administrative de Labé, a menacé de faire arrêter et emprisonner le correspondant de Guineematin.com et de l’Agence guinéenne de presse (AGP) à Labé. Il s’agit du journaliste Idrissa Sampiring Diallo.
Suite au meurtre de l’étudiant Amadou Boukariou Baldé, bastonné à mort par des agents de la sécurité, eux-mêmes envoyés à l’université de Labé sur ordre du gouverneur, le 31 mai 2019. L’étudiant est mort à l’hôpital régional de Labé.
Se contredisent alors la version des journalistes et celle du pouvoir. Les autorités locales ont fait croire que le jeune Amadou Boukariou Baldé a cessé de respirer au cours de son évacuation vers Conakry… à cause des manifestations qui auraient empêchées l’ambulance de circuler. Sans manifestant, il ne serait donc pas mort. Or, les médias locaux ont prouvé que le jeune est bien mort à l’hôpital et non dans l’ambulance.
Conséquence, malgré une loi adoptée en 2010 qui dépénalise les délits de presse, le journaliste a été entendu par le juge de Dixinn. En attente de son jugement, il pointe tous les mercredis et vendredis à 10 heures au TPI de Dixinn.
Fin 2019, répression contre des journalistes pour des motifs très futiles
Jeudi 31 octobre, une foule se rassemble pour accueillir le président Alpha Condé à Conakry. Mais le président ne s’arrête pas pour les saluer. Ce simple fait, évoqué par la presse, a provoqué une onde de choc répressive.
Le directeur général de la radio Lynx FM, Aboubakr Diallo a été inculpé et placé sous contrôle judiciaire pour « diffusion de données de nature à troubler la sécurité publique par le biais d’un système informatique ». Il avait juste diffusé cette information sur sa radio.
3 jours plus tard, c’est le chef des reporters de l’influent Guinée Matin, Ibrahima Sory Diallo, qui est agressé au siège du parti au pouvoir, le RPG, situé au quartier Aviation de Conakry. Parti couvrir l’assemblée générale ordinaire du parti comme plusieurs autres journalistes, il a été violemment pris à partie par des militants, avant d’être bousculé et traîné dehors manu militari par les agents de sécurité.
Mohamed Mara, agressé par la police puis menacé de mort depuis plusieurs mois
Depuis mi-décembre 2019, notre confrère Mohamed Mara, animateur de l’émission Les Grandes Gueules fait l’objet de menace de mort. Mohamed Mara avait été violemment agressé le 16 novembre 2019 par des policiers de la CMIS, Compagnie Mobile d’Intervention et de Sécurité à Conakry dans le quartier Cosa, dans la commune de Ratoma. Malgré une bataille qu’il a menée pour que justice soit rendue, les policiers identifiés comme auteurs de l’agression ont toujours bénéficié d’une impunité totale. Ils sont protégés par leur hiérarchie, plus exactement par le commandant Ansoumane Bafoé.
En 2020, des gens anonymes l’appellent pour le mettre en garde. «Il y a une sorte de contrat sur ta tête» avait lancé un inconnu. «Il y a une petite liste noire dans laquelle tu figures» martèle un autre.
Des appels et des messages téléphoniques se multiplient, des individus tapis dans l’ombre jurent de mettre fin à la vie de Mara, jugé trop critique sur les sujets concernant la violation des droits humain.
On pouvait lire dans le message que le journaliste a reçu le 30 Janvier 2020 notamment celui-ci: «Tu dois savoir que tu n’es pas le seul journaliste du pays, ou tu la fermes, ou on te la ferme pour toujours!».
Même les journalistes des médias français ne sont pas épargnés
Mercredi 12 février 2020, au marché de Coyah, Thomas Dietrich, journaliste presse pour «Le Media» s’est vu retirer son accréditation par un officier militaire, alors qu’il filmait des manifestations de rue.
Joint par mosaiqueguinee.com, à propos de la confiscation de son accréditation, le journaliste français Thomas Dietrich est revenu sur les faits.
« J’ai une accréditation en bonne et due forme, je travaille pour l’entreprise de presse française «Le Média ». Je filmais les manifestations à Coyah ce matin, et finalement un officier militaire est venu me dire que c’est interdit de filmer. Il m’a dit que c’est un lieu stratégique. Je lui ai répondu que je suis en train de travailler dans un quartier, ce n’est donc pas un camp militaire. L’officier militaire a voulu retirer les images que j’ai prises, j’ai refusé. Ensuite il a pris mon accréditation, en exigeant que je lui donne mes images. Il a donc confisqué mon accréditation, pour avoir filmé les manifestations. Je ne peux donc plus exercer mon travail»
2020, à l’approche des élections, la répression contre les journalistes s’intensifient
Mercredi 22 janvier 2020, à Kankan, le journaliste correspondant de la radio lynx FM, Abdoulaye N’Koya Sylla, a été mis aux arrêts par la police, détenu puis libéré au terme d’une audition. Joint par mosaiqueguinee.com quelques heures après sa libération, celui-ci est revenu sur les circonstances de son arrestation.
«Le matin, j’étais avec un confrère, on est venu pour couvrir une manifestation des élèves-maîtres de l’ENI, qui avaient érigé des barricades devant l’inspection régionale de l’enseignement technique et professionnel. C’était à 9 heures. Les agents de la CMIS ont investi les lieux pour disperser les manifestants. Les agents m’ont arrêté, puis ils m’ont embarqué avec certains élèves. J’avais mon badge et mes équipements. On m’a détenu au CMIS pendant 3 heures. J’ai été auditionné pour trouble à l’ordre public. Grâce à l’intervention de mes confrères, j’ai été libéré» a-t-il relaté à mosaiqueguinee.com. «Je suis déçu de la CMIS de Kankan, leur premier responsable m’a insulté père et mère».
Le 2 février 2020, le journaliste de la radio nostalgie FM Aunée, Thierno Madjou Bah, l’animateur d’Africa 2015, l’émission politique phare de la radio Nostalgie, est menacé d’arrestation. Selon le journaliste, on lui reprocherait d’avoir tenu des propos malveillants et incitatifs à la violence dans son émission. En décembre 2018, la Haute Autorité de la Communication avait déjà suspendu Thierno Madjou et deux ses collègues pour une période d’un mois.
Cette menace d’arrestation a été lancée suite à une plainte du ministre de la communication Amara Somparé.
Même les enquêtes déconnectées des élections sont sujet à répression
Vendredi 21 février 2020, c’est au tour de Mamadou Aliou BM Diallo, journaliste reporter d’images arrêté par les services de la police routière d’Enco5. Selon nos informations, le journaliste était en train de filmer un scénario de corruption entre un policier et un conducteur de taxi.
«Nous avons vu un policier retirer de l’argent des mains d’un chauffeur de taxi et le journaliste s’est mis à filmer la scène. C’est ainsi qu’un autre policier est venu lui demander ce qu’il est en train de faire. Il a demandé à visionner le film et la discussion a commencé. Ils l’ont ensuite emmené au commissariat. Tout cela parce que les policiers rackettent les conducteurs de véhicules ou de motos. Et ils n’aiment pas que ces actes soient mis au grand jour» explique un témoin de la scène sous couvert d’anonymat.
Le matériel de travail du journaliste y compris son téléphone a été retiré. Le journaliste a été détenu au sein du commissariat d’Enco5 pendant 2 jours avant d’être libéré.
Le lendemain, samedi 22 février 2020, Alpha Ousmane Bah, journaliste reporter du site d’information Africaguinée.com et à la radio Espace Foutah et son collègue Mamadou Kossa Sow, ont été arrêté à Koundara. Foutah est une ville située à la frontière entre la Guinée et le Sénégal.
« Nos confrères étaient partis en reportage dans cette préfecture, sur la fermeture de la frontière aux camions transportant des marchandises dans des pays voisins. » déclare un journaliste de cette rédaction.
Ces quelques exemples ont été vérifiées par plusieurs sources mais ne reflètent que partiellement la dure répression que vit la liberté de la presse en Guinée. Notre journaliste, contraint à l’exil et dont voici l’histoire cf portrait, aurait pu étayer cet article par d’autres exemples. Mettre en lumière tous les journalistes guinéens menacés de mort pour avoir exercés leur métier de journaliste semble un travail titanesque. Bien qu’une aprtie de la répression soit liée à la campagne électorale et référendum qui aura lieu le 1er mars 2020, la liberté d’informer en Guinée est régulièrement et gravement remis en cause, y compris hors période électorale.
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Egypte – Histoires de la plus grande prison pour femmes, Al-Qanatir
/dans Liberté d'informer, Moyen et Proche Orient /par RédactionAprès une heure de route à travers différents quartiers entourant la capitale égyptienne, je me retrouve devant la porte principale de la prison, signalé par un gros écrit en arabe «Manṭiqa al-sujūn al-Qanāṭir» (zone des prisons d’al-Qanāṭir) au sommet duquel flotte le drapeau tricolore égyptien.
Située dans la zone d’al-Qanāṭir, au sommet du delta du Nil, la prison d’al-Qanāṭir comprend la seule grande prison pour femmes d’Égypte. De plus, le complexe présente une division pour les détenus étrangers et les détenus égyptiens. Un visiteur fréquent de la prison a indiqué qu’environ 2000 détenus sont actuellement détenus dans la section des femmes, dont 200 étrangers, malgré une capacité maximale de 1200 personnes. Les hommes sont au nombre de 250, dont 160 Égyptiens et 90 étrangers.
Poncet, originaire du Congo Kinshasa RDC qui visite les prisonniers depuis 23 ans, passe attentivement en revue les principales règles applicables à la zone: pas de téléphone, pas d’équipement électronique, identification personnelle obligatoire. Avec Nina, il organise des visites régulières aux détenus des divisions hommes et femmes de la prison d’al-Qanāṭir et dans d’autres endroits comme le poste de police de Nuzha. Avec certains membres de l’église communautaire de Maadi (MCC), ils fournissent un soutien aux détenus étrangers, à travers des visites régulières, des consultations avec les avocats et les ambassades ainsi que la livraison de nourriture et de fournitures générales.
La longue attente
Comme c’est la première fois que je visite une prison, je suis particulièrement vigilante, observant attentivement mon environnement et essayant de saisir chaque détail autour de moi. Tout en restant dans la longue file d’attente pour le contrôle de sécurité, un certain nombre de choses attirent inévitablement mon attention.
Une atmosphère humaine remarquable est paradoxalement générée dans un endroit confiné où, par définition, les gens ne peuvent pas bénéficier du même traitement humain qu’à l’extérieur.
En particulier, je suis stupéfaite par la variété de personnes qui se réunissent par hasard en visitant leur conjoint en prison. Des familles entières, femmes, hommes, plusieurs enfants, des gens de la ville ainsi que de la campagne, des classes sociales différentes, des emplacements géographiques, des niveaux d’éducation, d’âge, toutes ces catégories de personnes se mélangent et partagent le même espace pendant presque toute une journée.
En raison du long temps d’attente et de l’absence de dispositifs technologiques, les visiteurs inévitablement interagissent les unes avec les autres, se regardent et s’engagent même dans des conversations. En conséquence, une atmosphère humaine remarquable est paradoxalement générée dans un endroit confiné où, par définition, les gens ne peuvent pas bénéficier du même traitement humain qu’à l’extérieur.
De plus, un certain nombre d’événements sont observables dans ce très petit espace rempli de trop de monde.
À côté de moi, un groupe de femmes venant du Caire échange avec désinvolture des discussions sur leur voyage à al-Qanāṭir.
De l’autre côté, certains hommes font la queue en silence, tandis que d’autres s’entraident en portant les sacs lourds avec les fournitures nécessaires aux détenus. Pendant ce temps, d’autres personnes traversent la porte après avoir parlé avec les responsables de la prison. Je ne peux que remarquer l’échange d’argent et des bakchich qui se produisent à la porte d’entrée. Je me souviens immédiatement de l’avertissement du «Code de conduite – Ministère pénitentiaire international» que Poncet m’a envoyé avant la visite:
«Veuillez ne donner aucun baqshīsh (bakchich) à aucun membre du personnel pénitentiaire. C’est la seule responsabilité du chef d’équipe.»
Après avoir été soigneusement fouillés par les policiers, nous finissons par entrer dans la zone de la prison. Cependant, un autre long temps d’attente nous attend. Tout le monde essaie de se mettre à l’aise en espérant que la visite aura lieu bientôt.
L’étape suivante consiste à faire de nouveau la queue pour trouver une place dans les wagons tirés par un tracteur menant à la division féminine de la prison. Alors que nous approchons de la destination, certains officiers marchent le long du chemin et un camion transportant des détenus passe. Loin du bruit constant de la circulation au Caire, seuls les sons des oiseaux interrompus par les voix fortes des gardiens de la prison résonnent.
Détérioration des conditions des détenus
Nous sommes finalement devant le bâtiment dédié à la détention des femmes, étrangères et égyptiennes. D’autres procédures de sécurité approfondies sont nécessaires avant de pouvoir enfin rencontrer les prisonniers.
Ayant à l’esprit quelques informations générales sur le système pénitentiaire égyptien ainsi que des rapports spécifiques sur les conditions des détenus, je ne peux que porter mon attention sur la condition physique des détenus ainsi que sur l’environnement général.
Sans surprise, une grande image du président égyptien Abd al-Fattāḥ al-Sīsī accompagné des pyramides et de la mosquée de MuḥammadʿAlī se dresse au centre de la prison pour femmes, entourée de la devise répandue “Taḥyā Miṣr” (“Vive l’Égypte”) et une déclaration anglaise définissant l’Égypte comme le meilleur pays de tous les temps.
Je ne peux pas imaginer comment la vie peut devenir une fois enfermé dans cet endroit. Par conséquent, je me prépare à observer silencieusement et à écouter ce que les détenus sont prêts à partager avec moi.
«Je n’en peux plus», poursuit-elle
«J’ai commencé à détester l’Égypte depuis que je suis ici», raconte Nada, originaire du Soudan et condamné à cinq ans de prison pour enlèvement [très probablement un enfant à la suite d’un divorce et d’une lutte pour la garde d’un ou plusieurs enfants].
Sa peine est presque terminée car elle m’explique qu’elle a officiellement encore sept mois de prison. En pensant à l’avenir, les yeux de Nada brillent. Elle prévoit de retourner au Soudan et de prendre sa famille entre ses bras. Cependant, une ride de douleur apparaît soudain sur son visage. «Je n’en peux plus», poursuit-elle. Avant sa détention, Nada souffrait de problèmes de santé qui ont profondément affecté sa vie. Depuis son arrivée en prison, sa santé s’est détériorée physiquement et psychologiquement. Elle m’explique son besoin de médicaments, mais en raison de l’absence de soins médicaux appropriés, ses conditions physiques et mentales se détériorent de façon inquiétante comme la plupart des autres détenus autour de nous.
Elle décrit brièvement les conditions de vie dans la prison d’al-Qanāṭir, où depuis quatre ans et cinq mois elle est privée non seulement de sa liberté mais également de son espace privé dans la vie quotidienne.
«Nous avons une petite pièce, nous dormons près les uns des autres sans aucun espace privé vital», raconte-t-elle.
De plus, la nourriture fournie par la prison est insuffisante et les détenus survivent avec les vivres de leurs visiteurs à leur arrivée. Elle ne peut toujours pas croire à quel point sa vie a pris une telle tournure depuis son arrestation et sa mise en prison rapide.
Évitant d’entrer dans les détails de son arrestation, elle se souvient simplement qu’elle a aimé ce pays au cours des premiers mois en tant que personne libre malgré le stress de ne pas disposer de documents juridiques suffisants.
Les raisons de l’arrestation peuvent en effet être diverses et parfois contraires à la condamnation officielle prononcée. Parmi le groupe de détenus étrangers que Maadi Community Church (MCC) visite régulièrement, certaines personnes sont déclarées condamnées pour meurtre, drogue, vol, fraude, prostitution, enlèvement et immigration. Ils viennent de Biélorussie, de Bolivie, du Brésil, du Chili, d’Angleterre, d’Allemagne, de Guinée, des Pays-Bas, du Kenya, du Maroc, du Nigéria, du Pérou, des Philippines, du Soudan du Sud, du Soudan, de Tanzanie, d’Ukraine et du Venezuela.
Des détenues politique pour un post Facebook qui critique le régime en Egypte
L’image de la prison pour femmes d’al-Qanāṭir ne serait pas complète sans mentionner un autre type de détenue. Il est en effet possible de retrouver des prisonniers politiques, dont le crime était de s’opposer au récit officiel de l’État.
Je quitte la prison d’al-Qanāṭir, avec de nombreuses réflexions sur la valeur du mot “liberté”.
C’est le cas d’une jeune fille de 21 ans originaire d’un village du gouvernorat de Minufia. Je ne l’ai pas rencontrée personnellement car elle ne faisait pas partie du groupe de personnes qui m’était attribuée. Pourtant, j’ai appris son histoire à travers sa famille en attendant notre visite.
Selon sa mère, elle est détenue depuis 45 jours. Elle a été enlevée de chez elle après avoir publié un post sur Facebook condamnant l’arrestation de plusieurs personnes innocentes en Égypte. Ironiquement, sa mère dit: «Maintenant, elle est devenue l’une d’entre elles. C’est ce qui se passe en Egypte».
Elle a besoin de médicaments réguliers, donc chaque semaine, la famille vient avec des médicaments en plus de la nourriture. Sa mère, dont le visage indique la présence d’une profonde souffrance intérieure, ne dispose d’aucune information sur un éventuel procès ou remise en liberté. Elle attend, soutenue par sa sœur et les deux autres filles, tout en espérant que ce cauchemar se terminera bientôt.
Avec les images des nombreux officiers de prison, les voix fortes résonnant partout dans la prison d’al-Qanāṭir dans mon esprit et les histoires de certains détenus dans mon cœur, je quitte la prison d’al-Qanāṭir, avec de nombreuses réflexions sur la valeur du mot “liberté”.
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Parmi eux, 31 journalistes ont été assassinés en raison de leur travail. Les 18 autres l’ont été dans l’exercice de leur fonction mais n’était pas délibérément visés.
En tête de ces pays, la Syrie, qui est toujours en guerre, compte 10 journalistes tués et plus de 30 otages. Certains le sont depuis plusieurs années, comme le sud-africain Shiraaz Mohamed dont c’est la troisième année de captivité.
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Le pays aux 2000 fosses révélées par une équipe de journalistes (qui ont établi une carte consultable ici et fait changer les lois mexicaines grâce à leur enquête), est clairement un terrain de guerre pour les journalistes.
Découvrez l’enquêtes sur les 2000 fosses mortuaires recensées par les journaliste mexicains
Interview de Mago Torres: “la menace contre les journalistes existe, notre travail y répond”.
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Cette victoire des journalistes d’investigation sur l’Etat mexicain ne doit pas cacher les autres défaites du pays face à la liberté de la presse.
Face à la dizaine de journalistes tués, l’impunité est totale: 90% des meurtres de journalistes ne sont jamais jugés. Ce taux d’impunité de crime commis contre les journalistes est le pire au monde.
Le festival de cinéma Viva Mexico dont la MDJ est partenaire chaque année, a remis le prix du meilleur film au documentaire « Disparos », qui raconte l’histoire d’un journaliste mexicain dont les amis sombrent peu à peu dans les puissants gangs mexicains.
Festival Viva Mexico ! – Le prix de la MDJ remis au documentaire “Disparos”.
“Lors d’une couverture à Guerrero, lui et d’autres journalistes sont pris au piège entre les mains d’un groupe armé qui va les kidnapper…”
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Aucun journaliste tué en-dehors de son pays
Cela peut sembler surprenant. Les journalistes qui enquêtent dans leur pays risquent plus qu’à l’étranger. Ainsi, couvrir une guerre, ou se rendre dans des pays pour enquêter sur des sujets dangereux comme le narcotrafic ou les problèmes environnementaux, serait moins dangereux qu’enquêter sur son propre pays.
La journaliste mexicaine Norma Garabia Sarduza en est un triste exemple: assassinée alors qu’elle avait reçu plusieurs menaces suite à ses enquêtes sur la corruption de la police locale.
Dans ce pays, même la protection étatique ne suffit pas quand elle existe: le journaliste Francisco Romero Diaz a été tué alors qu’il bénéficiait d’une protection rapprochée de l’État mexicain.
389 journalistes en prison
Ce chiffre fourni par RSF augmente de 12% en un an et ne prend pas en compte «les journalistes enfermés quelques heures, quelques jours, voire plusieurs semaines.» Pourtant ce type d’arrestation est en nette progression.
Outre l’arrestation et la privation de liberté, les conditions de vie des journalistes en prison sont particulièrement draconiennes. Le journaliste de la MDJ Ghys Fortuné Bemba Dombe en a fait l’expérience au Congo Brazzaville.
“De l’enfer à la liberté” – L’enfermement arbitraire durant 18 mois au Congo Brazzaville
En prison. «La nourriture est-elle empoisonnée? Peu importe, il faut la nettoyer avant consommation, elle est si rare: seulement trois repas par semaine. Les sévices physiques ne suffisant pas à briser un esprit combatif, l’humiliation est donc de mise.»
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RSF pointe aussi du doigt la situation des journalistes prisonniers en Turquie et en Chine.
La Chine détient à elle seule 120 journalistes en prison, soit le double de 2018. La plupart des nouvelles arrestations concernent la minorité ouighours pour laquelle les investigations sont très difficiles. La MDJ a accueilli cette année un journaliste ouighour en danger, son portrait est à lire prochainement.
Des journalistes qui ne sont plus journalistes: l‘inquiétant exemple du Yemen
Mais au-delà des chiffres, certaines situations inquiètent, le Yemen est un exemple. Pays en guerre où la censure règne en maître comme en témoigne notre article, les journalistes changent de profession.
“La plupart des français ne savent pas ce qu’il se passe au Yemen”
“Aujourd’hui, beaucoup de journalistes sont en prison, comme les écrivains, les activistes… Il n’y a plus aucun journal qui publie quotidiennement au Yemen, sauf le journal intitulé 14 octobre qui est pro-gouvernemental. Il est uniquement publié dans la nouvelle capitale, Aden. Il glorifie les rebelles et les saoudiens au détriment du gouvernement légitime.”
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Bien que le bilan soit moins meurtrier que l’année passée avec deux morts contre 18, il y a en fait de moins en moins de journalistes. Ainsi le rédacteur en chef du célèbre journal Al Tafasseel est devenu vendeur d’objets d’occasion.
C’est aussi le cas de l’Afghanistan, pays le plus meurtrier pour les journalistes en 2018. En un an, il y a statistiquement moitié moins de journaliste dans le pays.
La liberté d’informer en 2020
Entre les arrestations arbitraires, la prison (et les conditions d’enfermement), les kidnappings (57 en 2019) et l’impunité des crimes contre les journalistes, le combat pour la liberté d’informer reste plus que jamais d’actualité.
L’intégralité du rapport RSF est à découvrir ici.
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