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« Portrait(s) d’une Résistance » La MDJ reçoit la photographe Justyna Mielnikiewicz.    INTERVIEW

Traduction Rim Benomar

Invitée à La Maison des journalistes à l’occasion de son exposition photo « Portrait(s) d’une Résistance », Justyna Mielnikiewicz, photographe polonaise installée à Tbilissi (Géorgie) a été interviewée par Manar Rachwani, Journaliste syrien actuellement résident de La MDJ.

M.R : Généralement, les gens admirent les photos, mais s’intéressent peu à la personne derrière l’objectif. Selon vous, quelle est la différence entre un photojournaliste et un journaliste, et comment pourriez-vous décrire votre expérience en tant que photographe de guerre ? 

J.M : La photographie est un outil de communication dont disposent les journalistes, à travers lequel ils peuvent transmettre au monde des fragments de nos réalités. J’ai capturé ces cinq dernières années l’évolution de l’invasion russe et ses conséquences sur la vie quotidienne du peuple ukrainien. C’était important pour moi de dévoiler la réalité d’une vie en guerre et de raconter l’histoire d’une résistance qui dure depuis 2014. J’ai vécu sous l’ombre de l’invasion russe en Géorgie et notamment en Ukraine. Ma motivation pour documenter la guerre est surtout personnelle avant d’être professionnelle. Je raconte tout simplement les difficultés des deux pays qui m’ont accueillie. Je considère que la technologie permet de faciliter la communication dans le monde, ma mission est de donner une voix à l’Ukraine et la Géorgie. Ces deux pays manquent de moyens nécessaires pour transmettre leurs propres messages. Depuis le début de l’invasion russe, de nombreuses fausses informations sur l’Ukraine ont été diffusées sur internet. La Russie a le pouvoir d’orchestrer de diverses campagnes de désinformation sur la guerre en Ukraine. En tant que photographe, je désire partager la vérité.

M.R : On parle souvent de l’objectivité et surtout de l’obligation de neutralité en journalisme. Selon vous, est-ce que chaque journaliste doit disposer d’un message particulier à transmettre ?

J.M : En tant que journalistes, l’objectivité est un outil que nous devons appliquer et respecter dans nos recherches. Il faut partager l’information sans faire intervenir des préférences personnelles. C’est à nous de restaurer la crédibilité des médias, et dévoiler les vérités. Toutefois, il est difficile d’atteindre l’objectivité dans certaines situations, surtout face à des événements monstrueux. 

M.R : Que représente pour vous cette exposition de vos portraits à la Maison des journalistes ?

J.M : Voir mes portraits tirés en grand format et exposés sur la façade de la MDJ me fait très plaisir, cela les rend beaucoup plus accessibles, en effet, les passants s’arrêtent et peuvent découvrir les photographies directement, contrairement aux galeries. De plus, j’admire beaucoup le travail de cette structure qui défend les journalistes menacés. La France se mobilise beaucoup plus que la Géorgie et l’Ukraine pour les journalistes.  

Quelques pages du livre “Ukraine Runs Through it (2019)” de Justyna Mielnikiewicz

M.R : Les photos affichées sur la façade de la MDJ ne sont qu’une petite partie des portraits que vous avez pris lors de votre déplacement en Ukraine. Quelle est la particularité de ces photos et est-ce qu’elles montrent les différents aspects de la guerre ? 

J.M : La guerre n’est qu’une partie de la vie parmi tant d’autres, et elle n’empêche pas les habitants du pays de pratiquer leurs activités et d’assurer les responsabilités quotidiennes : faire les courses, emmener les enfants à l’école, etc.. Ces aspects de la vie, certes, impactés par la guerre, continuent d’exister.

Le but de ces photographies est de montrer que la vie de ces femmes et ces hommes continue malgré la pression du conflit, afin que chacun puisse s’identifier dans leur quotidien et de se retrouver dans leur histoire.

Dans mon travail, j’essaye de mettre en avant la résistance de tous ces gens ordinaires face à cette guerre qu’ils sont en train de subir, et essentiellement les femmes, afin de déconstruire les idées reçues et démontrer que la guerre n’est pas qu’une affaire d’hommes.

M.R : En tant que photographe qui documente la vie en Ukraine depuis 2014, est-ce que vous étiez surprise par la résistance Ukrainienne, ou vous vous y attendiez ? 

J.M : En 2014, un grand nombre d’Ukrainiens s’est porté volontaire dans l’armée et l’État ne pouvait pas fournir l’équipement à tout le monde. Donc les Ukrainiens ont organisé plusieurs campagnes de collecte de fonds afin de se procurer des armes, des gilets de sauvetage et des médicaments. C’est en restant unis qu’ils ont réussi à résister face à l’invasion russe. Actuellement, l’armée de l’Ukraine est mieux équipée et mieux gérée, mais  les Ukrainiens continuent à faire des dons et d’aider de toutes les manières possibles. Par exemple, une de mes amies a perdu son compagnon durant le conflit de 2014. Suite à ce drame, elle a décidé de travailler dans le bureau des personnes disparues à Dnipro en tant que bénévole en parallèle de son travail à l’Université. Quand la guerre a éclaté en 2022, elle a commencé à récolter les dons pour les réfugiés et à préparer les médicaments pour les soldats. Les gens qui sont bien informés sur la situation de l’Ukraine, savent très bien que les Ukrainiens ont toujours résisté face à l’occupant russe. 

M.R : Est-ce que vous avez peur que le monde commence à oublier la guerre en Ukraine et à négliger la souffrance du peuple ukrainien ? 

J.M : Je pense que c’est un souci qui vient avec chaque guerre. Les guerres en Syrie et Afghanistan ont été oubliées au moment du déclenchement de la guerre en Ukraine. J’espère que le monde n’oubliera pas l’Ukraine et que le peuple ukrainien continuera à écrire son histoire. 

Justyna Mielnikiewicz avec Darline Cothière, directrice de la MDJ, et Alberic De Gouville, président de la MDJ

 « Portrait(s) d’une Résistance – Ukraine 2004-2022 » est une exposition de photographies de la photographe-documentaire Justyna Mielnikiewitcz, mise en place par la Maison des journalistes en partenariat avec L’Institut polonais de Paris, le Centre Culturel Ukrainine et la communauté des bellaruss à paris 

Justyna Mielnikiewicz, photographe polonaise, vit à Tbilissi, en Géorgie, depuis 2003. Ses travaux ont été publiés dans le monde entier entre autres par le New York Times, Newsweek, Le Monde, Stern et National Geographic. Elle a été lauréate du World Press Photo, de la Bourse Canon de la Femme Photojournaliste , du prix du jeune photographe du Caucase de la Fondation Magnum, de l’Aftermath Project Grant et du Eugene Smith Fund. La plus grande partie de son travail est consacrée à des projets personnels de long terme, publiés sous forme de livres: Woman with a MonkeyCaucasus in Short Notes and Photographs (2014), Ukraine Runs Through it (2019). Ce dernier a été présélectionné parmi les 20 meilleurs livres par Paris Photo et Aperture. Justyna Mielnikiewicz est représentée par l’agence MAPS

© Elyaas Ehsas


Revue de presse

« Photographie : la résistance ukrainienne dans l’objectif de Justyna Mielnikiewicz », La Croix

« Exposition « Portrait(S) D’une Résistance – Ukraine 2004-2022 » À Paris XV », Carnets de Week-end

« L’Ukraine dans le viseur de Justyna Mielnikiewicz : « Portrait(s) d’une résistance ». Maison des Journalistes, Paris », Blog de Philippe Rochot

« UKRAINE : UNE EXPO PHOTO À LA MAISON DES JOURNALISTES », Sgen-CFDT 

« Portrait(s) d’une ukrainienne sur les grilles de l’Hôtel de Ville », Mairie de Paris

« Portrait(s) d’une résistance ukrainienne sur les grilles de l’Hôtel de Ville », Sortir à Paris

« Journée internationale de la liberté de la presse : mise à l’honneur de la résistance ukrainienne par la Maison des journalistes », L’Oeil de la Maison des journalistes 

« Une exposition pour rendre hommage aux reporters de guerre en Ukraine », France 24, reportage 

« Portrait(s) d’une résistance en Ukraine », TV5 monde

Journée internationale de la liberté de la presse : mise à l’honneur de la résistance Ukrainienne par la Maison des journalistes

Par Emma Rieux-Laucat

« C’est une guerre géopolitique mais c’est aussi une guerre de l’information avec tout ce qui va avec : les fakes news, la manipulation, le complotisme. Présenter ce travail c’est montrer en « toute objectivité » ce qui se passe en Ukraine » a expliqué Darline Cothière, directrice de la MDJ, invitée par la chaîne de télévision TV5 monde pour présenter l’exposition grand format «Portrait(s) d’une Résistance. Ukraine 2004-2022. Justyna Mielnikiewicz » accueillie sur la façade de l’association du 3 mai au 3 septembre 2022.

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*S.E Vadym Omelchenko, ambassadeur d’Ukraine, pendant sa prise de parole
* Natalia Barbarska, chef de projet à l’Institut Polonais de Paris, et Laetitia Ganaye, coordinatrice chez MAPS, en train de présenter l’exposition
*Darline Cothière, directrice de la MDJ, lors de sa prise de parole

Le 3 mai dernier, journée mondiale de la liberté de la presse et dans le cadre des célébrations de ses vingt d’existence, la Maison des journalistes a mis à l’honneur le travail de Justyna Mielnikiewicz, journaliste polonaise qui documente la situation ukrainienne depuis le début des années 2000. Résidents-journalistes, partenaires et amis de la MDJ ont pu découvrir sur la façade de la Maison, 13 photos grands format prises en Ukraine par la photographe entre 2004 et 2022. Date à la symbolique forte, pour la liberté de la presse et les droits des journalistes dans le monde et aussi fête nationale pour la Pologne.

En collaboration avec l’Institut Polonais, l’Ambassade d’Ukraine en France et la Communauté des Bélarusses à Paris, ce projet, lancé à une date hautement symbolique pour la défense du droit à l’information et des droits des journalistes, a surtout été l’occasion de mettre en lumière l’actualité immédiate du conflit en Ukraine, notamment en offrant une tribune à son Ambassadeur en France, S.E Vadym Omelchenko. Devant une assemblée de représentants diplomatiques et politiques européens et internationaux, tels que l’Ambassadeur de Colombie en France, l’Ambassadeur d’Haïti en Belgique, le Ministre plénipotentiaire auprès de l’Ambassade d’Allemagne, la Représentante de la France auprès de l’Unesco ou encore le Maire du 15ème arrondissement,  l’ambassadeur ukrainien en France a délivré un poignant discours.  Prenant en exemple l’assassinat de la journaliste russe Anna Politovskaïa et le rapprochant des décès des 12 journalistes depuis le début du conflit, il a rappelé l’importance de documenter la guerre et a salué cette exposition expliquant, qu’ « être ukrainien c’est le choix d’être libre et cela est très bien exprimé dans le travail de Justyna Mielnikiewicz ».

Monsieur l’ambassadeur d’Ukraine S.E Vadym Omelchenko accompagné de son traducteur, pendant sa prise de parole le 3 mai 2022.

Sur le terrain en Ukraine, au moment du vernissage, la photographe a cependant rédigé un texte pour accompagner ses photographies. Elle y explique notamment son travail de documentation depuis plus de 10 ans sur les divergences politiques entre l’Ukraine et la Russie vis-à-vis de leur passé soviétique commun et des conflits idéologiques et territoriaux qui en ont découlés. Les photographies de Justyna Mielnikiewicz sont prises dans les régions avoisinantes du Dnipro, fleuve qui traverse le Bélarus et l’Ukraine, que la documentariste  a choisi comme ligne métaphorique de son travail. Ce choix n’est pas le fruit du hasard :  ce courant d’eau est devenu au fil des années la ligne de défense des soldats ukrainiens face à l’arrivée des troupes russes. Au travers de ses reportages, la photographe cherche à mettre en lumière l’omniprésence de la guerre et ses impacts immédiats sur le quotidien des Ukrainiens. Dans le texte accompagnant l’exposition, elle explique d’ailleurs que « les récits rassemblés ici sont le témoignage d’expériences individuelles sur fond de problèmes fondamentaux, moteurs de la transformation d’un pays et de sa société ».  Des portraits de femmes et d’hommes dans l’ombre de la guerre pour parvenir à dresser celui d’un peuple en résistance.

Au premier plan, Laetitia Ganaye membre de l’agence MAPS qui représente Justyna Mielnikiewicz en France, entrain de faire une présentation du travail de la photographe.

« Portrait(s) d’une Résistance. Ukraine 2004-2022. Justyna Mielnikiewicz » est exposée jusqu’au 3 septembre sur la façade de la Maison des journalistes. 

Le travail de la photographe est aussi  visible sur les grilles de l’Hôtel de ville à Paris du 10 mai et jusqu’au 20 juin 

Une table-ronde est organisée à l’Académie du Climat, le 08 juin 2022, avec la participation de Justyna Mielnikiewicz, Mohamed Badra photojournaliste syrien lauréat des Prix Bayeux Calvados-Normandie et Worldpress photographie, Julie Dungelhoeff grande reporter à France 24 et à RFI, Stefan Foltzer journaliste franco-polonais correspondant de la radio “Polskie Radio SA” et Manon Loizeau grande reporter franco-britanique prix Albert Londres et spécialiste de la Russie. Albéric de Gouville, président de la MDJ et Secrétaire général de l’info à France 24  est en charge de la modération de la discussion. 

©Ahmed Muaddamani

REPORTAGE, FRANCE 24

Guerre en Ukraine : l’Afrique prise en étau entre l’Occident et Moscou ?

Par Jean-Jules Lema Landu

Manifestation en soutien à l’Ukraine, Paris, France. © Cédric VT on Unsplash 

” La guerre en Ukraine place l’Afrique dans une position inconfortable.”

Jean-Jules Lema Landu, journaliste congolais, réfugié en France

Il y a, d’abord, les anciens pays d’Europe occidentale. Après la séquence historique de colonisation, ils sont restés liés à leurs anciennes colonies. Y avait-il moyen de faire autrement, pour les Africains, que d’accepter cette relation « naturelle », sur fond de rapports de force largement déséquilibrés ? Ainsi, les deux parties, bon an, mal an, devaient-ils coopérer dans quasi tous les domaines, à ce jour. Et ce, depuis 1960, années des indépendances. Il y a donc de cela plus de six décennies avant que la machine se grippe. Le continent réclame justice, l’Europe promet de modifier le tir. On en est là.

Quant aux deux autres dimensions, il y a celle dans laquelle les relations entre l’Afrique et la Russie sont également liées par l’Histoire. Mais sur l’autre versant, comme par osmose, où Moscou parlait « libération », alors que l’Europe colonialiste, se cabrant, durcissait sa position pour ne pas lâcher-prise. Il s’en suivit une bonne saison de guerres de libération. L’Union soviétique, à l’époque, fut aux côtés des Africains, à travers l’Algérie, l’Afrique du Sud et l’Angola, notamment. Sa part dans le domaine de la coopération militaire, surtout, fut des plus appréciables. Elle permit également à plusieurs Africains de fréquenter ses universités et, qui plus est, construit l’université Lumumba, en mémoire du héros de la lutte de libération. Ce n’est pas rien, en termes de symbole. Et, enfin, la mondialisation, cette réalité qui met le monde en synergie, interconnecté. Où s’exprime un véritable effet papillon, image d’un « village planétaire », cher à McLuhan.

Pour qui opter ?

A cet égard, globalement, la guerre en Ukraine place l’Afrique dans une position inconfortable. Pour qui opter ? Il y a là à boire et à manger. La coopération avec l’Europe n’a pas été que négative sur toute la ligne. Les nouveaux venus, la Chine en première ligne, suivie de la Russie et des autres pays dits émergents, n’a rien d’ange tutélaire. La notion de mondialisation ? Elle ne profite qu’aux pays riches. Le vote à l’ l’Onu sur l’Ukraine, le 2 mars, a donné la mesure sur la considération des pays africains, par rapport aux « blocs économiques » qui dirigent le monde. La tendance a traduit une « neutralité » sensible quand sur 154 pays, un seul a voté pour la Russie ; 28 ayant été contre et le reste s’étant abstenu.

En réalité, c’est une des indications que les Africains se réveillent, en ouvrant un œil… responsable. C’est positif. Nombre d’observateurs rapprochent cette image et celle de l’après-Conférence de Bandung (Indonésie), en 1954, ayant prescrit la politique de « non alignement » pour les pays Africains, vis-à-vis des blocs communiste et occidental. A l’époque. A quelque chose, malheur est bon, dit-on. La guerre en Ukraine a permis au continent de se rappeler au bon souvenir des « fondamentaux », préconisés par les pères des indépendances.

Image drapeau ukrainien flottant, © Noah Eleazaron on Unsplash

Critique du film “Le Procès: L’Etat de Russie vs Oleg Sentsov”

[FILM] Le Procès c’est l’histoire d’une cinéaste originaire de Crimée qui s’appele Oleg Sentsov, un directeur qui est devenu célèbre après la sortie en 2012 de son film Gamer. Il a aussi travaillé comme un activiste pendant le mouvement de protestation ukrainien appelé “Euromaidan.” Le mouvement était contre l’annexion russe de la Crimée. Le gouvernement russe l’a arrêté et retenu pour les activités te

A Paris, la révolution ukrainienne au « Luminor »

[Par Seferina SERANI]

Récemment, devant l’hôtel de ville de Paris, des gens chaussaient leurs patins et, comme dans un film, ils tenaient le rôle des protagonistes au gré de leurs cris de satisfaction. Une année auparavant, un peuple a résisté dans le froid et la glace, durant trois mois, jour et nuit, pour la Liberté et la Démocratie… mais ses cris n’étaient pas heureux et ils ont secoué le monde.

Dans le cadre des rendez-vous des Jeudis du FIFDH de Paris, le « Luminor », une bonne salle de cinéma parisienne, a eu l’occasion et la judicieuse idée de devenir, elle aussi, une sorte de protagoniste de ce drame en projetant « La compagnie céleste » du collectif Babylon’13, un film-mémoire dédié aux 82 morts de la place Maïdan à Kiev.
Le film a été tourné au fil des événements, à toutes les étapes de cette révolution populaire, jalonnée, plan après plan, de scènes sanglantes et de morts causés par la police et les militaires du pouvoir dictatorial du Président Yanoukovitch, lequel est le principal responsable de cette tragédie humaine ukrainienne.
Le gouvernement et ses snipers ont combattu et tué des gens qui protestaient contre le système mis en place par Yanoukovitch. Ce dictateur a agi sans comprendre ce qui se passait réellement. Pourtant c’est le peuple qui, en principe, met ses dirigeants en place et, du fait de sa légitimité, peut les destituer et les jetant comme de simples « peaux de banane ». Il en vient à cette solution si le Pouvoir ne respecte pas les intérêts, les espoirs et l’avenir du pays.

Un film qui appartient désormais à l’Histoire
Le film évoqué ici, porte, durant 45 minutes, le message de l’Ukraine de 2014 avec sa révolution dont le théâtre a donc été la place Maïdan. Le terrible massacre qui l’a marquée, la guerre, la mort omniprésente, les victimes dans leur ensemble, le sang, les pleurs et les blessés : tout ceci est vrai, terriblement vrai. Avec ce documentaire, nous sommes les témoins de l’époque, c’est de l’Humanité dont on parle. Ainsi se déroule l’Histoire.
Cette « époque », ce moment historique tel que nous le voyons à l’écran, nous permet d’être enfin bien informés. Nous sommes conscients une fois placés face à cette « époque » essentielle.
Disons-le en conclusion : afin d’être des citoyens informés, capables de comprendre encore mieux ce que je vous dis ici : allez donc voir le film dès que possible !

Focus sur l’Ukraine, un reportage collectif

[Par Marta Fallani,  John Chitambo Lobe et Behzad Qayomzada, René Dassié]

Une image de la guerre civile à Donietsk  (Juillet 2014)

Une image de la guerre civile à Donietsk
(Juillet 2014)

Ukraine, les images d’une guerre oubliée :

L’article de Marta Fallani

Mardi 5 août, la Rédaction de la Maison des journalistes a reçu Marina Bodrichenko, porte-parole du Collectif citoyen pour la paix en Ukraine (http://frudialogue.wordpress.com/), venue apporter son témoignage sur la guerre civile dans le Sud-Est de l’Ukraine.

Activiste russe d’origine ukrainienne, Marina Bodrichenko vit en France depuis sept ans.
Le Collectif citoyen pour la paix en Ukraine dans lequel elle milite s’est donné pour mot d’ordre d’ “appeler les médias européens, russes et ukrainiens à une couverture plus objective et suivie de la crise ukrainienne”.

Marina arrive à la Maison des journalistes avec un grand sac en papier. Elle en sort des grands panneaux sur lesquels sont collées des dizaines de photos. Maisons détruites, personnes qui tentent de s’en échapper, une vielle dame assise dans son salon désormais dévasté. Et puis, des enterrements, des mères qui pleurent devant des cercueils blancs, des hommes qui serrent dans leurs bras les corps sans vie d’enfants.

Ce sont des images de la guerre. Les photos arrivent de Donetsk, la région du sud-est de l’Ukraine, où habite une minorité de Russes, parmi lesquels les « rebelles » qui s’opposent au gouvernement qui a pris le pouvoir à Kiev. Ces images sont très récentes. Les dernières photos datent le 27 juillet 2014. Cependant, on ne les voit pas dans les journaux occidentaux. « Internet est plein de vidéos d’amateurs, de photos prises par les gens du lieu. Moi-même je traduis souvent les vidéo du russe, mais je n’en trouve aucune trace dans la presse occidental », s’étonne Marina Bodrichenko.

Samedi 2 août, le collectif, des activistes des ONG humanitaires, des citoyens ukrainiens, russes et français, ont manifesté à Paris pour demander un “cessez-le-feu immédiat”. Cette date a été choisie exprès, pour rappeler le « massacre d’Odessa » du 2 mai 2014. Ce jour-là, 38 « rebelles » pro-russes avaient été tués, lors d’une guérilla organisée par des groupes d’extrême droite qui soutiennent le gouvernement de Kiev.

Jusqu’à présent, aucune investigation internationale n’a été ouverte pour identifier les auteurs de ce massacre. « Ce qui se passe dans le Sud-Est de l’Ukraine est une véritable guerre civile », analyse Mme Bodrichenko, qui dénonce par ailleurs la « manipulation des informations par l’occident », désireux de « garder l’équilibre politique actuel » au détriment des civils. Selon les données publiées par les autorités russes et considérées comme fiables par l’OTAN, 730.000 Ukrainiens auraient fui le conflit pour se réfugier en Russie.

Crèdit photo L: isa Viola Rossi

Crédit photo L: isa Viola Rossi

L’interview à Marina Bodrichenko :

Propos recueillis par John Chitambo Lobe et Behzad Qayomzada

Vous avez crée le premier collectif de citoyens russes et ukrainiens à Paris. Pourquoi ?

Manifester, dans quel but ?

Par rapport à votre prochaine manifestation publique, où, quand et comment aura-t-elle lieu?

Qu’est-ce que vous pensez de l’opinion publique française ?  

En ce qui concerne les enjeux de ce conflict, quel est votre avis ?

Le rêve d’empire soviétique de Vladimir Poutine : 

L’opinion de René Dassié

Nostalgique de la puissance soviétique, Vladimir Poutine avait qualifié l’effondrement de l’URSS de « plus grande catastrophe géopolitique du XXe siècle ». Et même s’il avait tempéré en ajoutant que « Ceux qui ne regrettent pas la disparition de l’URSS n’ont pas de cœur, mais ceux qui voudraient la refaire n’ont pas de tête », le maître des destinées de la Russie depuis quatorze ans n’a jamais caché son ambition de refaire de son pays une puissance internationale.
Exit donc la résurrection du Grand Empire, eu égard à l’impossibilité de remettre en cause la souveraineté de la plupart des Etats qui s’en sont détachés il y a un peu plus de deux décennies.
Vladimir Poutine qui sait pouvoir compter sur une forte majorité de l’opinion publique russe qui désormais approuve sa politique diplomatique dans la construction de l’Union eurasienne, sorte d’URSS light capable de faire face à l’Union européenne, à la Chine et aux Etats-Unis. Il s’agit en somme d’un bloc géopolitique autour de son pays, rassemblant la Russie et la plupart des républiques issues de l’URSS. Avec l’économie libérale, mais pas la démocratie et les droits de l’homme.
L’acte de naissance de ce bloc à caractère économique, bâti sur le modèle de l’Union européenne a pris la forme d’un traité signé le 29 mai dernier par trois Etats fondateurs, la Russie, le Kazakhstan et la Biélorussie. D’autres États qui ont fait partie de l’Union soviétique ont aussi exprimé leur désir de rejoindre ce projet qui doit entrer en vigueur le 1er janvier 2015. Il s’agit notamment de l’Arménie, du Kirghizistan et du Tadjikistan.
Dans la stratégie de M. Poutine, les accords diplomatiques ne constituent pas le seul ticket d’entrée dans ce nouveau club. Le président russe veut pouvoir compter sur les pressions, y compris militaires, pour parvenir à ses fins.
Il y a eu ainsi l’invasion de la Crimée, venant après celle de l’Ossétie du Sud en 2008 sous le prétexte officiel de défendre les Russes ethniques ou porteurs d’un passeport russe, dans ces anciennes Républiques soviétiques.
Il y a maintenant l’Ukraine, qui goûtait au pluralisme démocratique depuis la Révolution orange de 2004 et dont une partie du territoire a sombré depuis quelques mois dans un conflit meurtrier, entre l’armée régulière et des séparatistes pro-Russes. Vladimir Poutine que les Occidentaux accusent d’attiser ce conflit verrait dans l’Ukraine, eu égard à sa population, ses infrastructures industrielles et son agriculture, un des piliers du nouvel édifice régional qu’il entend bâtir.
« A l’époque soviétique, il était tout simplement impossible d’imaginer que l’Ukraine et la Russie puissent être des Etats différents (…). Mais cela est arrivé. Et quand la Crimée s’est soudainement retrouvée dans un autre Etat, la Russie a senti qu’on l’a non seulement volé, mais carrément pillé. Et qu’est-ce qu’a fait la Russie ? Elle a baissé la tête », déclarait-il dans un discours d’une heure devant des parlementaires des deux chambres réunies, et en présence de nombreuses personnalités russes, lorsqu’il signait, le 18 mars dernier, le traité d’intégration de la Crimée à la Russie.
En Occident, les visées hégémonistes de Vladimir Poutine passent mal. Les Etats-Unis ont clairement exprimé leur opposition à la création d’une Union eurasienne pilotée par Moscou. « Cela ne portera pas le nom d’URSS. Cela portera le nom d’union douanière, d’Union eurasiatique etc., mais ne nous y trompons pas. Nous en connaissons les buts et nous essayons de trouver le meilleur moyen de le ralentir ou de l’empêcher», laissait déjà entendre fin 2012 l’ex Secrétaire d’État américaine, Hillary Clinton.
Réagissant au conflit dans l’est de l’Ukraine dans lequel ils voient la main cachée de Vladimir Poutine, l’Union européenne (UE) et les Etats-Unis ont pris de nombreuses sanctions économiques contre la Russie. Notamment le gel des avoirs et une interdiction de voyager concernant des proches de Vladimir Poutine. L’UE a aussi décidé d’interdire de nouveaux investissements dans l’exploitation du pétrole, du gaz et des minerais en Crimée et à Sébastopol ainsi que dans les infrastructures des projets de transports et de télécommunications de la région. Des sanctions que le président américain, Barack Obama, a promis d’accroitre.
Pour de nombreux analystes, ces sanctions non seulement ne suffiraient pas à faire fléchir le président russe, mais pourraient s’avérer contre-productives. M. Poutine a répliqué, en sortant sa vieille arme de l’embargo sur les produits agroalimentaires en provenance des pays condamnant sa position. Son premier ministre, Dimitri Medvedev a de son côté menacé d’interdire le survol du territoire russe pour les compagnies aériennes effectuant des liaisons entre l’Europe et l’Asie via la Sibérie, la route la plus courte.

Samy, 19 mars 2014

[Par SAMY]

 

« Très délicieux ce gâteau ! … Aujourd’hui c’est la partie Crimée qui sait, demain tout le reste… »

 

Samy, 19 mars 2014