Entrées par Jean-Jules Lema Landu

Annuler la dette de l’Afrique. Et après ?

Les rencontres ayant traité du financement des économies et de la dette de l’Afrique sont légion. Et, ce ne sera pas forcer le trait que de dire celle convoquée, à Paris en l’unique journée du 18 mai, par Emmanuel Macron, président français, en est une de trop. Juste, pour souligner que l’argent chaque fois sorti – et c’est beaucoup d’argent -, a moins profité au développement du continent noir, qu’à enrichir ses dirigeants.

Qu’à cela ne tienne. Le Covid-19, cette déferlante sanitaire qui terrasse les Terriens, oblige l’humanité à la solidarité sans faille. L’idée émerge, l’an dernier, parmi les pays riches du monde. Ils prévoient la débâcle économique des pays africains subsahariens, à juste titre, et parlent de financer la relance post Covid-19, sans alourdir le fardeau de leur dette. C’est dans ce sens, en première itération, qu’il faut comprendre la volonté du président Macron de créer une occasion de son New Deal avec l’Afrique. Autrement dit, une autre manière – positive -, de pratiquer la coopération.

A Paris, l’Afrique était représentée par 19 pays, dont le président congolais Félix Tshisekedi, président en exercice de l’Unité africaine (UA), le Sénégalais Macky Sall, l’Angolais Joao Lourenço et autres le Rwandais Kagame, tandis que du côté des créanciers, ils étaient presque tous au rendez-vous. Tant au niveau des pays que des institutions internationales (Etats-Unis, Chine, Union européenne, Fonds Monétaire International, Banque Mondiale…).

“Journée économique africaine”, donc ou, comme à l’accoutumée, plutôt, nouvelle séance de perfusion pour cette Afrique moribonde ! Au premier abord, le regard devait être porté sur le continent impacté par la pandémie, ce maelström (sans doute passager) et, accessoirement, sur la dette. Pathologie de longue durée.

 

Crotté jusqu’aux genoux

Contre la première, l’Afrique n’y pouvait rien. Solution : recours aux DTS (Droits de tirage spéciaux). En termes simples, ce sont des chèques convertibles, garantis par la réserve internationale de 183 pays membres au sein du Fonds Monétaire International (FMI). La part de l’Afrique, dans les 650 milliards de dollars à allouer, est mince : 34 milliards, au lieu de 250 milliards minimum. D’où la proposition de Macron, faite aux pays nantis de « réallouer » leurs DTS à l’Afrique. Encore une dette !

Quant à la dette, proprement dite : allégement ou suppression ? Un sursis est accordé jusqu’à la prochaine rencontre du G 20 (groupe de pays riches associés à certains pays du Sud).

De cette dette dans laquelle le continent est crotté jusqu’aux genoux, avec 365 milliards de dollars. Qu’a-t-on fait avec ce montant abyssal ? Surtout, en Afrique noire, où la majorité des populations vivent avec moins d’un dollar par jour. Pourtant, Jean-Ferdinand Céline (1894-1961), un écrivain français, affirme que « l’on ne meurt pas de dette, on meurt de ne plus pouvoir en faire ».  C’est à quoi Dambisa Moyo, économiste de renom zambienne, dans un ouvrage intitulé “L’aide fatale”, rétorque que « l’Afrique marche sur du sable mouvant ».

 

Comment en sortir ? Le défi est lancé à Jean-Christophe Gallien, politologue et communicant, dont l’optimisme au zénith va jusqu’à dire : « Au-delà des messes diplomatiques, Paris, 55e capitale du continent, doit devenir celle d’une nouvelle finance africaine ».

Au fait, annuler la dette, c’est recommencer la dette. Cercle vicieux.

Jean-Jules LEMA LANDU

Par Jean-Jules LEMA LANDU, journaliste congolais, réfugié en France


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RD Congo : un nouveau gouvernement sans issue

Le nouveau gouvernement a été investi le 26 avril par l’Assemblée nationale. Mais, il aura fallu patienter dans l’angoisse 4 mois durant. L’attente du précédent gouvernement avait duré 9 mois, le temps qu’un bébé prenne forme et naisse. Pourtant, l’enfant est né malingre.

Le nouveau gouvernement a été investi le 26 avril par l’Assemblée nationale. Mais, il aura fallu patienter dans l’angoisse 4 mois durant. L’attente du précédent gouvernement avait duré 9 mois, le temps qu’un bébé prenne forme et naisse. Pourtant, l’enfant est né malingre.

Enfin, le voilà, le gouvernement Sama Lukonde (le nom du nouveau Premier ministre). Seulement voilà : il porte les mêmes tares que celui qui l’a précédé, concocté à l’aune des désidératas de l’ancien président Kabila.

Quant à la forme et de par son programme, ce gouvernement est proprement ce qu’il convient d’appeler un « inventaire à la Prévert », c’est-à-dire un méli-mélo comprenant près de 350 devoirs à accomplir, en un laps de temps record. (Un inventaire à la Prévert est une énumération hétéroclite).

Sur le fond, on retrouve les mêmes failles d’ossature : le gigantisme ronflant (57 ministres budgétivores) ; absence d’équilibre régional (facteur important en RD Congo) ; inconséquence politique (projets formés sur la base d’un budget chimérique), qui est, en fait, un mensonge vis-à-vis du peuple ; retour au gouvernement de mêmes têtes, blanchies sous les harnais des combines, de la triche et des massacres du peuple congolais…

Une sarabande mortifère

A bien regarder, ces défauts ne sont pas que conjoncturels. Ils tissent leur origine bien loin dans le temps, depuis que le pays connaît la faillite politique, à l’aube de son indépendance, en 1960. Depuis, il y a comme une sorte de lien organique qui prospère et oriente les hommes politiques à n’épouser que le négativisme (pathologie à plusieurs spécificités).

Pour ceux qui croient aux forces obscures de sortilèges – et ils ne sont pas moins nombreux -, ils évoquent volontiers la malédiction proférée par le général belge Emile Janssens (surnommé Petit Maniaque). Pris d’une folle colère, à l’idée que le Congo aller acquérir son indépendance, il jeta l’anathème : « Le Congo avant l’indépendance est égal au Congo après l’indépendance ». C’était fin 1959.

Les Romains qui aimaient bien la guerre de conquête disaient aux vaincus : « Statu quo ante bellum », signifie littéralement « comme les choses étaient avant la guerre ».

Qu’on ajoute foi à ces deux hypothèses ou non, la réalité est sous nos yeux, toute crue. Depuis 1960, le Congo tourne en rond, dans une sarabande mortifère. Le Congolais vit depuis des décennies avec un demi-dollar (cinquante cents) par jour. Les statistiques qui lui accordent plus de ce montant méritent d’être corrigées.

De fait, en dehors du gouvernement Lumumba – du 24 juin au 5 septembre 1960 -, soit 74 jours seulement de vie démocratique, le reste est une véritable parodie de démocratie. Depuis, trente-deux « gouvernements d’apparat » se sont succédé, s’étirant sur une période de 61 ans de mensonge éhonté et de dictature.

Il y eut donc trente-deux « Premiers ministres bidon », au service de la volonté des maîtres des horloges Mobutu et Kabila Joseph, pour ne pas le citer. Qu’y a-t-il changé entre les deux régimes précédents et celui que dirige Tshisekedi ? Du parlement monocolore de Mobutu, à parti unique, à l’indéfinissable « Union sacrée » de l’actuel chef de l’Etat, en passant par les années de plomb sous Kabila Joseph, le « système » demeure vivace. C’est du même au pareil.

De la poudre aux yeux

Le maître mot qui englobe ces trois régimes s’appelle « illégitimité ». Et, celle-ci a plus d’épaisseur, d’autant que Tshisekedi a été nommé par un deal plutôt qu’élu, deal conclu avec son prédécesseur Kabila.

Sama Lukonde devient donc le 33ème « Premier ministre bidon », au service d’un prince à qui il doit obéir au doigt et à l’œil. Mais qui, contrairement aux princes jadis disposant des ressources, est presque désargenté. Le Trésor public ayant été siphonné par le prince lui-même et ses conseillers voraces. Le pays est financièrement exsangue.

Pourtant, le nouveau Premier ministre s’entête. Son plan d’action sur trois ans, jusqu’à fin mandat de Thisekedi, en 2023, s’appuie sur 36 milliards de dollars, dont presque 15 milliards destinés au budget ordinaire, pour la même période. Sama Lukonde, avec son inventaire à la Prévert, se prévaut de ces chiffres sans pour autant préciser les moyens par lesquels il disposera de cette somme. C’est de la poudre aux yeux du peuple.

Fatigué de mensonges, ce peuple, sceptique, attend de voir. La communauté internationale, par élégance, se mure dans le silence. Nombre d’analystes, friands d’actualités du Congo, se replient dans leur tour d’ivoire, n’ayant plus grand-chose à dire. Sama Lukonde, à l’instar de ses trente-deux prédécesseurs, va aller fatalement droit dans le mur.

Tant que la chaîne de l’illégitimité ne sera pas rompue, pour libérer la démocratie, aucun gouvernement ne sortira du labyrinthe.

Par Jean-Jules LEMA LANDU, journaliste congolais, réfugié en France


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Tchad. La France de Macron à l’épreuve des réalités ?

La disparition du président tchadien Idriss Deby va-t-elle influencer la politique de la France envers ce pays? Le décryptage de Jean-Jules LEMA LANDU, journaliste congolais, réfugié en France.

Françafrique ! Ce néologisme est très connu en Afrique. Il renvoie aux réseaux d’influence « opaques », militaro-mercantiles, entretenus par la France dans sa relation avec le continent africain. Le président Macron, qui voulait être le « dernier de cordée » dans cette mauvaise entreprise, avait promis d’y mettre un point final. Quelle sera l’attitude de la France vis-à-vis de la situation au Tchad, après la disparition du président Idriss Deby ? On sait qu’au-delà de l’inconnue politique qui se présente devant ce pays, ce chef d’Etat constituait un appui non négligeable aux forces françaises Barkane déployées au Sahel.

Pas que. Depuis des décennies, la France militaire campe au Tchad, pour diverses autres raisons, dont celle, capitale, de défendre et contrôler son pré carré.

Novembre 2017, à l’université de Ouagadougou (Burkina Faso), le président français casse les codes : « Il n’y a plus de politique africaine de la France », martèle-t-il. C’est direct. C’est précis. Tonnerre d’applaudissements parmi les 800 étudiants burkinabè qui s’y trouvaient. La déclaration a eu une grande résonance en Afrique. En effet, depuis la chute du Mur de Berlin, en 1989, tous ses prédécesseurs ont certifié la mort de la Françafrique, mais personne n’y est parvenu.

Les présidents François Mitterrand et François Hollande, les socialistes, se sont limités à des vœux pieux. Est-ce parce que la Françafrique avait la vie dure en soi ou, au contraire, c’est parce que ses tenants ne voulaient pas, tout simplement, lâcher leur pactole ?  Quant au président Sarkozy, son désir pour mettre fin à cette forme subtile de néocolonialisme n’avait rien de sincère. A preuve, dans un discours, à Dakar, 2007, il a traité les peuples africains d’arriérés, puisque « l’homme africain n’est pas assez entré dans l’Histoire », selon lui. Autrement dit, la notion de tuteur qui régente tout pour eux devait leur être appli

Ces propos méprisants ont suscité une véritable levée de boucliers en Afrique noire francophone. Plusieurs écrivains et penseurs ont réagi à la provocation dans un ouvrage intitulé « L’Afrique répond à Sarkozy » (Editions Philippe Rey, 2008). Son résumé est simple : « Sapere aude ! » de Horace ou « ose savoir ». Les Africains voulaient dire qu’ils « savaient se servir de leur entendement ».

C’est dans cette atmosphère de méfiance, exprimée de part et d’autre, que le président Macron entre en scène, en 2017. Figure de pédagogue – le bon – et le verbe haut, il promet la mort de la Françafrique dans une sorte de serment : « J’appartiens à une génération qui ne vient pas dire aux Africains ce qu’ils doivent faire », professe-t-il. Exit donc, la génération des Jacques Foccart et autres Albert Bourgi, ceux, qui, après le général de Gaulle, constituaient l’âme damnée des présidents français, à l’égard de l’Afrique.

Aujourd’hui, l’Afrique regarde la France de Macron sur le Tchad, en tourments. Elle est placée au pied du mur. Que va-t-elle faire pour ce pays considéré comme une sorte de fer de lance dans cette partie de l’Afrique de l’Ouest, ensanglantée par des groupes terroristes ? En 2019, le président Macron avait déjà rompu le serment, en bombardant une colonne venue encore une fois de Libye, pour sauver l’ami Idriss.

La situation actuelle au Tchad nous apportera la preuve que la France de Macron a donné un coup de grâce à la Françafrique. Un vrai piège !

 

Par Jean-Jules LEMA LANDU, journaliste congolais, réfugié en France


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Congo. « Marius chez vous », fin d’une émission populaire

Dimanche, 28 mars, Marius Muhunga, annonçait avec une réelle émotion, la fin des émissions TV « Marius chez vous » sur les réseaux sociaux. Il en était, à la fois, le boss et l’animateur vedette. Pour justifier cette cessation, le journaliste évoquait son embauche à « La voix de l’Amérique ».

Ce média congolais émettait depuis Washington DC, capitale des Etats-Unis. Il croulait sous son audience au zénith. En raison, bien sûr, de son excellence.

Je suivais en direct de cette émission spéciale. Elle était conclue par des avis et considérations des fans, celles et ceux qui aimaient suivre cette télévision :  c’était une pluie de félicitations… et un feu de coups d’émotion. Sans doute sincères ! Je ne m’en cache point, j’ai tissé, moi aussi, en l’honneur de mon éminent confrère, un joli bouquet de « fleurs platoniques ».

Tweet de Marius Muhunga annonçant la fin de « Marius chez vous »

De fait, une telle opportunité, pour un journaliste africain, ne relève pas d’une sinécure. Il doit y avoir, pour ce faire, des arguments qui parlent excellence et mérite. C’est, pour Marius, le couronnement d’une carrière flamboyante. Ne le reçoivent que celles et ceux qui ont fait de leur plume et de leur micro un « distributeur » de vérités ; des journalistes qui savent brasser « rigueur du fond et clarté de la forme », pour l’éclat des valeurs républicaines.

Quant à mon bouquet de fleurs, j’avoue que ce sont des roses avec leurs épines. D’un côté, satisfaction et joie, de l’autre, inquiétude, tout de même. Suivie d’une interrogation angoissante : Marius s’est-il donné le temps de triturer la question autour de son « élection » à cette prestigieuse institution américaine ?

Je ne sais. S’il l’a fait, c’est tant mieux. Mais, s’il ne l’a pas fait qu’il essaie de « passer de l’autre côté du miroir », comme on dit, pour en savoir plus. Car, à cause de son rayonnement au sein des populations congolaises, par ces temps de la politique nationale faite de bassesse, « TV Marius chez vous » pouvait être la cible de ceux qui voulaient la voir disparaître. Ces ennemis implacables de la vérité. Ces menteurs au sommet de l’Etat.

Dans ce dernier cas, voilà peut-être un joli « coup de réussite » pour Marius, seul, mais certainement un terrible « coup de massue » pour la masse des Congolais progressistes, épris de justice et d’ardent désir de voir le Congo se relever. Autant au pays que dans la diaspora.

C’est mon humble point de vue.

 

 

Par Jean-Jules LEMA LANDU, journaliste congolais, réfugié en France


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Afrique de l’Ouest : ces élections qui tuent l’espoir

Dans les pays développés, démocratiques, et dans la plupart de ceux qui aspirent à l’être, les urnes constituent une sorte de blanchisserie de la démocratie. Elles « nettoient » et accouchent, en principe, du propre pour donner des nouveaux habits à la République, un nouvel élan. C’est tout le contraire pour l’Afrique qu’elles habillent d’un accoutrement cachant contestations et violences meurtrières. En témoignent, singulièrement, les résultats de récentes élections au Niger, en Guinée Conakry et en Côte-d’Ivoire.

Pendant quasiment une semaine, Niamey, capitale du Niger, et plusieurs autres villes du pays flambaient de colère. On chahutait, on bousculait, on incendiait maisons de particuliers et bâtiments publics. Avec des morts à la clé. Et pour cause. Tout était parti, mardi 23 février, par la publication des résultats du deuxième tour de la présidentielle, remporté sans contexte par Mohamed Bazoum. Selon ces résultats, celui-ci avait récolté 55,75 % des voix, face à son rival de l’opposition, Mahamud Ousman, avec 44,25 % des suffrages.

Pourtant, le président sortant, Mahamadou Issoufou, avait écarté du chemin la pierre d’achoppement consistant à modifier la Constitution pour un « troisième mandat ». Astuce permettant aux présidents en place de se maintenir au pouvoir, mais ayant pour conséquences de générer des mouvements de protestations violents. Tout était donc fondé pour assister, cette fois, à des élections paisibles. On avait vite oublié que les désordres post-électoraux, en Afrique, étaient la règle et leur contraire l’exception.

Or, en novembre et en octobre derniers, il y a eu élection présidentielle, respectivement en Côte-d’Ivoire et en Guinée Conakry. Les présidents des deux pays ont procédé à une modification de Constitution pour un « troisième mandat » et se sont, de ce fait, maintenus à leur fauteuil. Mais, sur fond des crises pré et post-électorales, émaillées de brutalités : destructions de biens publics et bains de sang. L’opinion tant locale qu’internationale l’avait décrié à tue-tête, et on avait cru que cela était suffisant pour servir d’exemple au Niger. Bernique !

Manifestation contre la modification de la Constitution en Guinée, le 24 octobre à Conakry – Crédit : Aboubacarkhoraa

Les deux exemples laissent perplexe. En Côte-d’Ivoire, après avoir publiquement promis de quitter le pouvoir, le président Ouattara est spectaculairement revenu sur sa décision. Or, il est à classer parmi ce que l’Afrique a de meilleur, en termes d’élites intellectuelles. Il a renié la parole donnée, qui a valeur de serment. Sans scrupule. Il en est de même du président guinéen Alpha Condé, professeur des universités, y compris à la Sorbonne. Il s’accroche au pouvoir, à plus de quatre-vingts ans d’âge, après avoir lutté, lui-même, des décennies durant, contre l’aspérité des dictatures guinéennes.

Comment penser, dans ce contexte de proximité de temps (en l’espace de cinq mois) et de position géographique (le Niger est même voisin de la Côte-d’Ivoire) que ces attitudes de responsables politiques ivoiriens et guinéens, et des événements qui y sont liés, n’aient pas eu un impact sur le plan mental des Nigériens votants ? N’avaient-ils pas vu, instinctivement, une « main frauduleuse » dans les résultats d’élections organisées par un alter ego de l’Ivoirien Ouattara et du Guinéen Condé ?

Il y a, à cet égard, un problème fondamental de confiance, qui va continuer de se poser pendant longtemps encore entre les dirigeants africains et leurs peuples, dont la maturité politique ne cesse de croître.

Par Jean-Jules LEMA LANDU, journaliste congolais, réfugié en France


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Covid-19 : l’Afrique en passe de lâcher prise?

Nombre d’observateurs prévoyaient les ravages du Covid-19 en Afrique. Ces prophéties ne s’étant pas réalisées totalement, les Africains ont cru disposer, à leur avantage, de jours moins lugubres que d’autres continents. Ils pensaient qu’il en serait ainsi, jusqu’à la disparition totale du virus. C’était sans compter avec la capacité de celui-ci à revenir par vagues successives et à muter. Et, même, pourquoi pas, à resurgir un jour ici et là, comme c’est le cas d’Ebola.

Nombre d’observateurs prévoyaient les ravages du Covid-19 en Afrique. Ces prophéties ne s’étant pas réalisées totalement, les Africains ont cru disposer, à leur avantage, de jours moins lugubres que d’autres continents. Ils pensaient qu’il en serait ainsi, jusqu’à la disparition totale du virus. C’était sans compter avec la capacité de celui-ci à revenir par vagues successives et à muter. Et, même, pourquoi pas, à resurgir un jour ici et là, comme c’est le cas d’Ebola.

Effectivement, pendant qu’on déplorait, dans les pays du Nord, des dizaines de milliers de personnes infectées et de milliers d’autres mortes, en Afrique subsaharienne, en revanche, le Covid-19 était comme inhibé. Et l’occasion faisant le larron, les charlatans, pour leur gloriole, qualifiait le virus d’une vue de l’esprit. Alors que le président tanzanien, John Magufuli, y ajoutant de son grain de sel, invitait son peuple à éviter tout produit pharmaceutique et à le remplacer par une prière fervente. Le sophisme marquait des points!

Pendant ce temps, le virus, lui, continuait son œuvre destructive. En Occident, la crise sanitaire devenait incontrôlable. Au point que quelques sociologues et philosophes, à cause des statistiques effrayantes de personnes atteintes ou mortes de la maladie, commençaient à voir le spectre de la peste noire asiatique, en 1330. Ou celle plus proche de nous, la peste espagnole, en 1918. Des crises ayant emporté des millions de personnes. La peur gagnait en intensité.

Les carottes étaient cuites

Aujourd’hui, la preuve de ce sentiment est là. À titre d’exemple, la France a enregistré jusqu’au 02 février 2021, 76 512 décès, tandis que la Grande-Bretagne en comptait 106 564.

Frémissements en Afrique ? Sans doute. La brutalité de la réalité était telle que toute superstition se rétrécissait comme peau de chagrin. Le nombre des morts ici et là commençait à inquiéter, malgré le fait que beaucoup ne croyaient pas à la fiabilité des statistiques, pourtant données par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Selon cette organisation, en août 2020, soit cinq mois après la manifestation de la pandémie, l’Afrique comptait 21 000 décès pour un million des cas confirmés.

Les carottes étaient donc cuites pour le continent noir, en dépit des mesures prises par les gouvernements dans le cadre de la réponse sanitaire. En ce début du mois de février 2021, l’OMS recense 3 569 145 cas confirmés pour 90 955 décès. L’impact économique, selon le cabinet britannique Brand Finance, s’élève à 50 milliards.

Quelle sera la situation de ce continent, à l’économie précaire, devant la violence de la deuxième vague du Coronavirus déjà présente ? Qui plus est, il semble que les « conditions naturelles » le protégeaient jusque-là sont en train de lâcher prise. Et, une faiblesse en plus pourrait lui être fatale. A moins que les vaccins en cours d’utilisation soient une bonne solution pour lui. 

 

Jean-Jules LEMA LANDU

Journaliste congolais, réfugié en France.


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Afrique – Kenya et Malawi annulent le résultat des présidentielles

Pour cause de fraude électorale, la Cour suprême du Kenya a pris la décision osée, le 1er septembre 2017, d’invalider le résultat de la présidentielle, organisée un mois auparavant. Une première en Afrique! A son tour, le Malawi vient de sauter le pas. Intrépide, la Cour constitutionnelle de ce petit pays d’Afrique australe s’est autorisée d’annuler, ce 3 février 2020, le résultat de la présidentielle effectuée en mai 2019. Pour le même motif que celui qui avait dicté le renvoi du vote au Kenya.

Comme à l’accoutumée, c’est le président sortant, Peter Mutharika, qui l’a emporté avec 38% des suffrages devant son principal opposant Lazaru Chakwera. 

L’annulation de l’élection présidentielle au Kenya

Victoire biaisée, a aussitôt crié l’opposition, qui a protesté et manifesté sans relâche dans les rues de la capitale, Lilongwe. Et à travers elle, les provinces du pays.

Obligée de revoir sa copie, et placée devant certaines évidences sur la fraude, la Cour constitutionnelle a simplement annulé le scrutin. Elle en a requis un nouveau dans 150 jours. Poser des tels actes judiciaires, en Afrique, où la dictature se cache derrière les démocraties tordues, n’est pas du tout anodin.

A titre d’exemple, c’est dans une auto blindée que les juges se sont rendus au siège de l’institution, à Lilongwe. Aidés en cela par une partie de l’armée malawite, dite «progressiste».

Est-ce là des signes donnés pour briser la glace ? Devra-t-on s’attendre à une réaction en chaîne ? Questions pertienentes, la réponse sera au cas par cas.  

Kenya: rivalité ethnique et enrichissement personnel

La réponse à celles-ci est d’autant plus difficile que la dictature, en Afrique, est multiforme. Au Kenya, elle est principalement assise sur la rivalité ethnique entre les Luo et les Kikuyu, dont leurs deux leaders respectifs (Odinga pour les Luo et Kenyatta pour les Kikuyu) se servent de la politique pour assurer leur puissance économique. De fait, ils sont les deux Kényans les plus riches, pour leur gloire personnelle, mais également pour le bien-être de leur communauté. On a donc assisté à un «arrangement à l’amiable», en sourdine, entre les deux leaders, pour leurs intérêts bien compris, lesquels auraient été mis à mal à travers une confortation ethnique menée de front.

Par conséquent, Odinga a «boycotté» la deuxième manche d’élections, organisées plus tard.

Malawi: un équilibre pour la paix sociale

Tel n’est pas le cas au Malawi, où c’est une partie de l’armée qui mène la barque pro-démocratique. L’armée, selon toute vraisemblance, serait divisée et l’arrêt de la Cour constitutionnelle, après le scrutin prévu dans 150 jours, ne donne aucune assurance qu’il sera accepté de bonne grâce par tous. Surtout par la partie recalée de Mutharika. Quel serait le rôle que pourrait éventuellement jouer l’autre fraction de l’armée restée silencieuse ? Est-elle pour la démocratie ou pour la survie de l’ancien régime ? Difficile à prévoir !

https://twitter.com/mgettoh_254/status/1224317178939351040

Qu’on se souvienne de la Gambie de l’ex-dictateur Yahya Jammeh, en 2017. Il aura fallu l’intervention des militaires de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest pour le résoudre à quitter le pouvoir.

Quoi qu’il en soit, la justice dans ces deux pays est sortie du bois. Elle a donné la mesure des problèmes qui vont surgir et la nature des solutions qui y seraient apportées. Elles sont largement différentes, selon chaque pays. C’est au cas par cas. Ce qui fait dire que l’instauration de la démocratie, d’une manière ou d’autre, avancera à pas de tortue, voire d’escargot.

Par Jean-Jules Lema Landu, journaliste congolais, réfugié en France


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