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Portrait. Sharareh Mehboudi, journaliste et militante iranienne 

« Si je retourne en Iran, je serai emprisonnée, sous un simulacre de système judiciaire, et torturée »

Dotée d’un sourire franc et aux cheveux couleur magenta, Sharareh Mehboudi est une reporter indépendante, activiste et chercheuse iranienne, réfugiée en France depuis mars 2023. Désormais hébergée à la Maison des journalistes, elle revient pour l’Œil de la MDJ sur son parcours éclectique, ainsi que sur la répression des droits civils et sociaux en Iran. 

Sharareh Mehboudi est une femme aux multiples facettes : reporter, activiste, chercheuse universitaire, blogueuse, rien ne semble l’arrêter. Fondatrice du site irandigitalnomad, où elle documente depuis 2015 ses combats, Sharareh s’est érigée en véritable opposante du régime des Mollahs et à l’autoritarisme avec le soutien de la population iranienne. Aujourd’hui, son blog relaie les informations de journalistes sur place et couvre la résistance civile iranienne sur Paris.

La journaliste garde un doux sourire durant tout l’entretien, parlant un français courant, qu’elle a pourtant commencé à apprendre moins d’un an plus tôt. Elle explique que depuis plus de dix ans, elle s’est engagée « en Iran dans le milieu journalistique en faveur d’une diffusion libre des informations et pour la défense des droits de l’Homme », et plus particulièrement dans la protection des droits des femmes. « J’étais et je suis l’une des activistes de la campagne de lutte contre les crimes d’honneur en Iran, et de la campagne s’opposant au port obligatoire du voile. »

Sur son blog, elle poste des photos d’elle sans hijab et relate l’actualité sur les droits des femmes de son pays, ainsi que des communautés kurdes. Une activité qui a manqué de venir à bout de la reporter, contrainte à l’exil.

Sharareh durant son voyage en Turquie, à Istanbul.

Une journaliste-activiste habituée aux arrestations sommaires

Depuis dix ans donc, Sharareh a documenté son combat et ses protestations, ainsi que travaillé pour de nombreux journaux iraniens et occidentaux : Iran Intl, VOA News, Iran Global, Akhbar-Rooz, Tribune Zamaneh, Stop Honor killings, News Gooya ou encore Le Figaro. Elle traite les sujets de tous les domaines : politique, économique, culturel, sociétal, droit des femmes et des kurdes… La journaliste ne se refuse aucun sujet, malgré les menaces et la répression qu’elle subit dès 2011. 

« En novembre 2011, j’ai été emmenée dans les locaux de l’Ershad (Bureau de police de charia), rue Wozara à Téhéran. J’y suis restée trois jours car je ne pouvais pas payer la caution. Lors des interrogatoires, j’ai été torturée par les agents des services de sécurité : ils m’ont insulté, tabassé, donné des coups de pieds et des violentes gifles. » 

Courageuse, Sharareh refuse de signer des excuses et la promesse officielle qu’elle ne s’attaquera plus à certains sujets, notamment sur la communauté kurde. « Les violences ont continué. J’ai été blessée et suivie par un médecin pour cela mais je n’ai jamais pu être soignée. »

Cet épisode n’arrête pas la reporter et activiste, bien au contraire. Elle entame entre 2016 et 2019 un grand voyage en Iran : l’objectif, se balader libre et sans hijab dans les rues et sur les sites historiques. Durant 3 ans, Sharareh se prendra en photo tête nue dans tout le pays, défiant le port du voile obligatoire. 

Et dès 2016, « j’ai publié une photo de moi non voilée lors de la célébration de la mémoire de Cyrus le Grand. Cette photo a été par la suite largement relayé dans les médias étrangers. J’accompagnais souvent cette photographie d’articles critiquant l’obligation du port du voile. La publication d’une de mes premières photos sans voile obligatoire sur Internet m’a valu d’être virée de mon poste de directrice pédagogique d’un centre de conseil Moshaverin. »

Par la suite, « j’ai été la cible de menaces des Services de sécurité iraniens et ai subi de nombreuses pressions de leur part. Je recevais en permanence des appels anonymes des agents des services de sécurité, me menaçant d’arrestation et même de mort. Leur objectif était de me réduire au silence et de me pousser à renoncer à mes activités de militante. »

La communauté kurde, ligne rouge du régime des Mollahs

Un voyage peuplé d’embûches, mais durant lequel Sharareh rencontre un fort soutien de la population. Les civils ne lui font pas de remarques, alors que les services de sécurité n’hésitent pas à la terroriser. 

Qu’à cela ne tienne, Sharareh continue de documenter son aventure ainsi que la vie des Iraniens et des Kurdes qu’elle rencontre. « En 2019, je me suis rendue au Kurdistan afin de préparer un reportage sur la situation des kolbars qui s’y trouvent. À l’issue de mon travail, je me suis rendue à Chiraz dans le sud de l’Iran pour voir mes proches, en novembre de la même année. »

Une période sensible pour le pays, qui entre à l’époque dans une révolte contre le régime des Mollahs, violemment réprimée. En 2019, le pays connaît une période d’inflation extraordinaire, ruinant la population. Le 15 novembre, des manifestations géantes éclatent dans le pays, conduisant à la mort de 140 civils et à 7 000 arrestations, avant que le régime ne coupe l’accès à Internet à la population. 

« Je vivais à ce moment-là à Téhéran mais j’ai participé aux manifestations de Chiraz », nous explique Sharareh de sa douce voix. « Après quelques jours, je suis retournée à Téhéran pour assurer ma sécurité car le risque que l’on m’identifie à Chiraz était trop important. » Trop tard cependant, car une photo d’elle sans hijab dans la ville se met à circuler sur tous les médias persans. Sa visibilité explose et d’autres Iraniennes suivent son mouvement. 

Sharareh tête nue à Chiraz, en 2016.

Une notoriété qui n’est pas sans funeste conséquence : elle fait dorénavant l’objet d’une violente campagne de harcèlement en ligne, où elle est régulièrement menacée de mort. À son retour à Téhéran, sa vie bascule.

Alors qu’elle rentrait chez elle, Sharareh aperçoit la porte de son domicile enfoncée, avec des individus à l’intérieur, appartenant aux services de sécurité. « Ils ont saccagé le mobilier et ont emporté avec eux mon téléphone professionnel ainsi que mon ordinateur portable. Il contenait tous mes documents confidentiels y compris mes reportages d’investigation, mes écrits, les vidéos des manifestations ainsi que mes échanges avec des activistes des droits de l’Homme à l’étranger. »

Dès lors, Sharareh comprend que « [son] arrestation et [mon] emprisonnement étaient inéluctables. Le risque était d’autant plus important qu’à l’issue du soulèvement de novembre, la répression des services de sécurité s’est considérablement intensifiée. J’ai décidé de partir directement d’Iran vers Istanbul à la fin de l’année 2019. »

« Ils m’ont dit qu’ils m’enlèveraient et me rapatrieraient en Iran »

« À Istanbul, j’ai rejoint des amis journalistes et reporters. Ma famille m’a informé qu’une convocation au tribunal était parvenue à mon domicile à Téhéran. De même, le tribunal a contacté ma famille et a menacé ces derniers pour que je me rende au ministère des Renseignements. Je ne connaissais pas la raison de ma convocation mais je ne souhaitais pas prendre le risque de subir toute forme d’interrogatoire ou d’arrestation arbitraire. »

Le mauvais sort ne cesse d’accabler Sharareh, qui s’installe en Turquie juste avant l’annonce du confinement du fait de la pandémie. « Je ne pouvais plus retourner en Iran et mon séjour irrégulier à Istanbul s’avérait compliqué. J’ai alors effectué une démarche en ligne afin d’obtenir un visa de touriste d’une durée d’un an avec une autorisation de travail. J’ai pu le renouveler deux fois pour une durée totale de trois ans. »

C’est durant cette période que Sharareh se met à travailler pour plus de médias occidentaux, parfois sous couvert d’anonymat : Voice of America, Iran International, Tribune Zamaneh, la journaliste ne lésine pas. Elle poursuit par ailleurs son travail d’activiste, en participant à des rassemblements iraniens à Istanbul, notamment en septembre 2022, après le meurtre de Mahsa Jina Amini. Tuée le 16 septembre 2022, date d’anniversaire de Sharareh, Mahsa a durablement marqué les mémoires des Iraniens et de la communauté

« Des photos et des vidéos de ma personne en train de scander des slogans tels que « Femme, Vie, Liberté » et de brûler un voile ont été relayées dans les médias iraniens et turcs. J’ai notamment collaboré avec Le Figaro dans le cadre de la réalisation de nombreux reportages et d’interviews avec les manifestants et opposants en Iran. Ces activités ont été à l’origine d’une reprise des menaces et des appels anonymes à travers les réseaux sociaux et sur WhatsApp. »

Malgré les changements récurrents de numéro de téléphone, les agents des services de sécurité continuent de la harceler et de la traquer. « Ils m’ont dit qu’ils m’enlèveraient et me rapatrieraient en Iran. Ils connaissaient mon adresse postale. Ils pouvaient m’appeler deux à trois fois par semaine ou plusieurs fois dans la même journée. Je me suis recluse chez moi, inquiète de l’effectivité des menaces de mort et de viol. »

Elle demeure néanmoins quatre ans à Istanbul et continue son travail de correspondante étrangère pour plusieurs journaux occidentaux. « En octobre 2022, j’ai également subi une cyberattaque sur irandigitalnomad.com. J’ai perdu les articles que j’avais écrit sur des sujets féministes iraniens et droits de l’Homme, ainsi que la partie graphique de mon site », déplore-t-elle avec douleur. 

Des campagnes de harcèlement en ligne, des menaces quotidiennes et des cyberattaques qui lui font craindre pour sa sécurité à Istanbul. Il n’y a plus d’autres choix que de fuir dans un pays « tiers et lointain », où le régime des Mollahs ne pourrait pas l’atteindre. « Ainsi, j’ai adressé une demande de visa à l’Ambassade de France en Turquie. Ils m’ont proposé de me remettre un visa talent afin que je puisse entrer sur le territoire français et déposer ma demande d’asile, avec la recommandation de Reporters sans frontières. »

« Lorsque j’ai dû déménager à Istanbul, puis en France, ma plus grande crainte et ma plus grande inquiétude étaient de perdre mon indépendance en tant que journaliste. Ma vie a été détruite deux fois parce que j’écrivais et disais la vérité. J’ai dû laisser mon chat à Istanbul pour immigrer en France », témoigne-t-elle avec douleur.

« Avec l’aide d’organisations comme RSF et la MDJ, et avec l’aide de journalistes indépendants comme Delfin Minoui, je suis une journaliste indépendant parrainé par l’Union européenne. Aujourd’hui, je suis un journaliste indépendant parrainé par la Maison des journalistes. S’il n’y avait pas de MDJ, la vie en exil serait plus difficile pour moi. » Des partenaires que Sharareh tient à remercier chaleureusement, lui ayant permis de se sentir plus en sécurité.

Depuis, Sharareh Mehboudi poursuit sa lutte à Paris. Ayant fait l’objet d’un procès par contumace en Iran, dont l’accusation a été formée selon les informations recueillies sur son ordinateur. « Si je retourne en Iran, je serai emprisonnée, sous un simulacre de système judiciaire, et torturée », affirme-t-elle. Alors, elle prolonge la lutte pour ses sœurs iraniennes et pour elle-même, malgré la haine qu’elle subit.

Grâce à la Maison des journalistes, Sharareh a pu bénéficier d’un accompagnement sur le plan administratif, et profiter des cours de français qui y sont dispensés. « Faire la connaissance de journalistes d’autres pays qui ont été contraints d’émigrer en raison de la liberté d’expression est pour moi intéressant et inspirant », précise-t-elle.

« J’aimerais beaucoup publier en français mon livre, qui est une biographie de 20 combattantes iraniennes, et pouvoir poursuivre ma carrière de journaliste dans les médias francophones. Comme vous le savez, plus de 100 journalistes sont emprisonnés en Iran. En raison du manque de liberté d’expression en Iran, je peux publier la vérité sur les événements actuels de mon pays avec Le Figaro. »

Elle continue par ailleurs d’alimenter son blog, Irandigitalnomad, et de travailler avec des médias iraniens indépendants. Elle souhaite également publier son livre en français, récit de la lutte et de la résistance civile des femmes iraniennes. « Je souhaite rester journaliste pour le reste de ma vie et travailler sur les droits de l’homme, les droits des femmes et l’information. Et pouvoir aider les journalistes indépendants dans les pays dictatoriaux », rappelle-t-elle avec fermeté. « Et après la victoire du peuple iranien, je retournerai dans mon pays pour ouvrir une Maison des journalistes en Iran et consolider la liberté d’expression. »

Maud Baheng Daizey

IRAN – Téhéran aspire à la révolte, les mollahs songent à déplacer la capitale

Own work

La base «Khatam», le centre de commandement supérieur des opérations militaires en Iran, a écrit une lettre officielle au président Rohani, lui demandant de transférer de la capitale iranienne. Un membre de la commission de la sécurité nationale du Parlement iranien a déclaré que la demande avait été faite en raison de la crainte de nouvelles protestations populaires et de désobéissances civiles. Il a gardé secret le nom du lieu qui remplacera la capitale.

Cette base «Khatam», chargée de planifier et de coordonner les opérations des forces armées iraniennes (l’armée officielle et les gardiens de la révolution islamique), est le plus haut niveau des opérations militaires en Iran.

Au cours des deux dernières années, l’Iran a été confronté à deux soulèvements populaires majeurs. Les responsables du régime admettent que la raison de cette demande hâtive (à un moment où les caisses de l’Etat sont vides) est la peur de nouvelles émeutes, exacerbées par la mauvaise situation économique du pays.

Abolfazl Torobi, membre de la Commission de la sécurité nationale et de la politique étrangère du Parlement, a déclaré la semaine dernière aux agences de presse officielles iraniennes que le lieu de transfert de la capitale avait été choisi et que la base de ‘Khatam al-Anbia’ (Subdivision économique des Gardiens de la révolution) était prête à concevoir et à construire cette nouvelle capitale administrative et politique, de A à Z.

Selon Torabi, retirer des casernes, des universités, des grandes usines automobiles comme ‘Iran Khodro’ et ‘Saipa’ de Téhéran est l’une des mesures à prendre. Il a explicitement déclaré que la concentration excessive de personnes, de richesses, de connaissances et d’industries à Téhéran est une menace réelle et un risque potentiel d’attaques militaires et de désobéissance civile.

L’antécédent de ce plan

Depuis au moins 30 ans, certains experts ont suggéré de déplacer la capitale pour réduire la migration des petites villes et villages vers Téhéran, la pollution de l’air, le trafic et décentraliser l’administration.

L’emplacement de Téhéran dans une zone sujette aux tremblements de terre était une autre préoccupation des experts qui voulaient déplacer la capitale. Mais c’est la première fois que les institutions militaires se concentrent ouvertement sur cette question de la sécurité du régime.

Selon le dernier recensement du Centre national de statistique en 2016, la population de la capitale était de 13 267 000 personnes et devrait atteindre 20 millions d’ici 2026.

Copyright - Agence de presse ISNA

Copyright – Agence de presse ISNA

Les expériences d’émeutes urbaines à Téhéran

La République islamique n’a pas été confrontée à un soulèvement urbain grave pendant très longtemps après les répressions sanglantes et des années 1980.

Dans les premières années de la fin de la guerre Iran-Irak et au début des années 90, des soulèvements ont eu lieu dans les banlieues de Mashhad (nord-est de l’Iran), Qazvin (80 km à l’ouest de Téhéran) et Islamshahr (une zone ouvrière au sud de Téhéran). Elles ont été rapidement réprimées et n‘ont pas pu se développer.

Le seul soulèvement qui a secoué la capitale iranienne pendant plusieurs jours a eu lieu en juillet 1999, lorsque la police a attaqué un dortoir d’étudiants dans le centre de Téhéran. L’attaque a marqué le début d’un mouvement étudiant à grande échelle qui a provoqué des troubles généralisés à Téhéran et s’est étendu aux universités de villes telles que Tabriz.

Mais l’expérience de ce soulèvement urbain de plusieurs jours et les faiblesses de l’appareil répressif ont incité le gouvernement à décider pour la première fois de retirer les casernes militaires de Téhéran dans un parlement dominé à l’époque par des réformistes pro-Khatami. Les partisans de ce plan se sont souvenus de l’expérience de la révolution en 1979 lorsque le peuple s’est emparé des casernes militaires et a réussi à récupérer les armes qui s’y trouvaient. Ceci a conduit à la chute de la dictature monarchiste.

Aujourd’hui, avec l’expansion incontrôlée et massive de Téhéran, davantage de casernes et de sites militaires sont situés dans la capitale. Selon ce plan, si la capitale devenait hors de contrôle en raison du soulèvement du peuple, la possibilité d’armer la population serait très faible et les forces militaires présentes dans les casernes à l’extérieur de la capitale pourraient reprendre Téhéran plus facilement.

La demande de retrait des casernes de la capitale montre que ce plan n’a pas suffisamment avancé. La deuxième grande agitation qui a longtemps transformé Téhéran en une scène de manifestations généralisées a été la protestation contre les résultats de l’élection présidentielle de 2009.

Ce mouvement, d’abord massif, a souffert de l’incompétence de ses dirigeants pro-Khatami et n’a pas réussi à gagner le soutien des masses, en particulier de la classe ouvrière et des quartiers pauvres de la capitale.

Le soulèvement de décembre 2017-janvier 2018, qui a concerné 140 villes d’Iran et a ébranlé les fondations du gouvernement des mollahs pendant plusieurs jours, a ramené la question de la sécurité de la capitale, en particulier la protection des bâtiments gouvernementaux, des sites militaires et des agences de renseignement.

Plus récemment, lors du soulèvement national de novembre 2019, les mollahs ont été confronté à la plus grande menace depuis trois décennies pour la sécurité du régime. Leur cauchemar de renversement du régime a été réel. Environ 200 villes iraniennes se sont révoltées et selon Reuters, plus de 1500 personnes ont été tuées par les forces de sécurité.

Copyright – Agence de presse ISNA

Dispersion des zones sujettes aux émeutes

Il existe plusieurs «résolutions» approuvées par le gouvernement, le Conseil suprême de sécurité nationale et le ministère des Sciences concernant le transfert des universités et des résidences étudiantes situées à Téhéran.

En effet, l’expérience a montré que les étudiants peuvent être le moteur de ces mouvements. La population étudiante de la capitale est estimée à environ 400 000 personnes. Le départ de grandes usines comme ‘Iran Khodro’ et ‘Saipa’ est également prévu dans le plan de transfert en question, qui semble être à l’ordre du jour en raison de l’intensification des manifestations et des grèves. A eux deux, ces deux grands complexes automobiles rassemblent 110 000 personnes.

Quoiqu’il en soit, avec ces propos des hauts responsables de la République islamique, on voit bien que les mollahs s’endorment avec la peur d’un soulèvement populaire incontrôlable et que Téhéran se réveille avec le rêve d’une révolte décisive. Pour ceux qui ne croient pas aux miracles, le temps va trancher entre les peurs et les rêves.

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IRAN – La machine d’exécution ne s’arrête pas

Au matin du 5 août 2020, Mostafa Salehi, un homme de 30 ans qui avait été arrêté lors des manifestations de “décembre 2017 / janvier 2018” en Iran, a été pendu dans la prison d’Ispahan. L’agence de presse Fars (affiliée aux services de renseignements iraniens) a confirmé l’exécution du jeune homme et a écrit qu’il était l’un des principaux auteurs des manifestations qui s’étaient déroulées de Kahrizsang à Nadjafabad. Il a été condamné à mort pour avoir tué un membre des pasdaran (Gardiens de la Révolution). Une accusation qu’il a toujours rejetée.

Selon le ministre de l’intérieur de la République islamique, au moins 100 petites et grandes villes à travers l’Iran étaient alors devenues le théâtre des manifestations et de soulèvements contre la dictature des mollahs.

Mostafa faisait partie des Iraniens protestataires qui sont descendus dans la rue dans Kahrizsang, petite ville d’une population d’environ 10.000 habitants.


C’est pourquoi Mustafa a été pendu sans aucun préavis et de manière lâche, sans même que sa famille ou son avocat en soient informés, et les organisations de défense des droits de l’homme ont pris connaissance de l’imminence de son exécution quelques heures seulement avant et n’ont pas eu le temps suffisant pour réagir.


Des dizaines de manifestants non armés ont été abattus par les gardiens de la révolution et les Bassiji (milice lié aux Pasdaran) lors des manifestations tandis que de nombreux autres manifestants ont été arrêtés puis tués dans les prisons du régime, le plus souvent agonisant sous la torture. Ces meurtres ont été déguisés en suicide.

Mustafa était l’une des 5.000 personnes arrêtées, torturées et maltraitées. Comme beaucoup de ses compatriotes détenus, il a été privé du droit à un procès juste et équitable.

Le système judiciaire répressif et sous le contrôle de l’Etat a porté de graves accusations contre lui, notamment le meurtre d’un des pasdaran. L’accusation, qu’il a toujours rejetée même sous la torture la plus atroce.

Les Mollahs ont-ils peur de l’opinion publique ?

Le mois dernier, la justice du régime des mollahs a confirmé les condamnations à mort de trois manifestants du soulèvement de novembre 2019. Aussitôt, une campagne en ligne a été lancée dans le cyberespace, et l’Hashtag “Ne les exécutez pas” sur Twitter est devenu la tendance mondiale principale [Trending Topic] pendant plusieurs heures, retweeté par des millions de personnes. Un événement que de nombreux observateurs et militants actifs sur les médias sociaux ont décrit comme «une alliance unique et exceptionnelle» ou «la plus grande marche virtuelle d’Iraniens».

Une vague d’opposition à l’exécution de ces jeunes condamnés s’est répandue dans tout le pays avant de s’étendre dans le monde entier.

Des artistes, des athlètes et des célébrités à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Iran l’ont rejoint.

Diverses organisations de défense des droits de l’homme dans le monde, des personnalités politiques et même les ministères des Affaires étrangères de certains pays ont exprimé leur inquiétude. Finalement, le régime a été contraint de céder et de suspendre ces exécutions.

La pendaison de Mostafa Salehi executée en toute hâte

Mais ce retrait pourrait envoyer un message dangereux pour le régime à savoir que celui-ci est dans une grave crise de légitimité et dans une position de faiblesse. Et si une pression suffisante est exercée, il est susceptible de donner des concessions.

Ce message de faiblesse, d’une part, a conduit à une baisse du moral des partisans de la dictature et, d’autre part, a renforcé le courage des personnes qui ont survécu aux conditions explosives de la société iranienne. Une population qui a connu deux soulèvements majeurs au cours des deux dernières années.


L’exécution de Mustafa montre une fois de plus que le fascisme religieux en Iran sait qu’il n’est pas possible de vivre sans répandre l’atmosphère d’oppression créée par l’emprisonnement, la torture, l’exécution et autres punitions médiévale.


En novembre dernier, en seulement trois jours, 1.500 manifestants sont morts, selon Reuters, lors de manifestations pacifiques.

C’est pourquoi Mustafa a été pendu sans aucun préavis et de manière lâche, sans même que sa famille ou son avocat en soient informés, et les organisations de défense des droits de l’homme n’ont pris connaissance de l’imminence de son exécution que quelques heures seulement avant et n’ont pas eu le temps suffisant pour réagir.

De plus, la justice de la province d’Ispahan a également annoncé les condamnations à mort de cinq autres manifestants du soulèvement de “décembre 2017 / janvier 2018” dans cette province. Les défenseurs des droits de l’homme sont désormais de plus en plus préoccupés par la possibilité de l’exécution secrète de ces cinq condamnés à Ispahan.

L’exécution de Mustafa montre une fois de plus que le fascisme religieux en Iran sait qu’il n’est pas possible de vivre sans répandre l’atmosphère d’oppression créée par l’emprisonnement, la torture, l’exécution et autres punitions médiévales.

En conséquence, toute sorte de concession qui permettrait au peuple d’exprimer son opposition, même de la manière la plus pacifique possible, et tout facteur qui réduirait le coût de l’opposition à la dictature, même la libre expression d’opinion, conduirait à son effondrement.

Il semble donc que le régime des mollahs poursuivra sa politique de répression maximale jusqu’au dernier souffle, qui ne pourra pas durer longtemps.

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