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20 juin : Réflexions en marge de la Journée des Réfugiés

À l’occasion de la Journée Mondiale du Réfugié 2014, une recueilli des témoignages de reporters de la Maison des journalistes :

 

Dessin de Liza Donnelly - de L'exposition internationale L'Exil de la Maison des journalistes (2011)

Dessin de Liza Donnelly – de L’exposition internationale L’Exil de la Maison des journalistes (2011)

“Être réfugié dans un pays étranger?” ne revient pas à cesser les hostilités à l’encontre de nos persécuteurs mais c’est se donner les moyens de les poursuivre depuis un lieu où l’on est invincible. 

Larbi Graïne (Algérie)  

 

Le refuge est le résultat d’un long processus d’exil. Trouver refuge, c’est toujours un moment d’exaltation dans la vie d’un exilé.
Certes, ce n’est pas une fin en soi, mais c’est un temps de soulagement et d’allégresse. C’est pourquoi en tant qu’exilé et demandeur d’asile je suis en attente d’une régularisation. Je tiens à travers ces quelques lignes malformées soutenir par mes mots solidaires, tous les exilés et autres réfugiés du monde.

Jean Mati (Congo RDC)

 

Etre réfugié en France change le statut de journaliste : quand on est dans son Pays, on peut travailler aussi comme correspondant pour des médias français, alors qu’une fois réfugié en France, on a du mal à s’intégrer dans ces mêmes médias.

Djibril Diaw (Mauritanie)

 

En ce qui concerne l’accueil et la condition des réfugiés en France, si je m’appuie sur l’exemple de la MDJ où j’ai moi-même été hébergé pendant six mois, je ne peux que tenir des propos élogieux quand à l’accueil des réfugiés en France.

J’ai rencontré des réfugiés reçus par d’autres structures françaises. Ils étaient moins « chouchoutés » qu’à la MDJ mais ce n’était pas la misère du tout.

Mes 2 enfants, eux, étaient réfugiés aux USA et croyez-moi, ils n’avaient aucune aide matérielle. Par contre, ils étaient autorisés à travailler tout de suite, contrairement à la France où il faut d’abord obtenir son statut de réfugié pour pouvoir travailler légalement.

Aux Etats Unis, les réfugiés n’ont pas de soins gratuits comme en France, n’ont pas d’argent de poche comme en France où on nous accorde 280 euros (en tout cas en mon temps en 2003 – 2004 NDLR : 350 Euros ajd). Mes enfants n’avaient RIEN de tout ça !!!

Soro Solo (Cote d’Ivoire)

 

Le monde d’aujourd’hui est très difficile pour nous, les réfugiés, même s’il peut nous offrir de meilleures opportunités.

Être réfugié signifie pour moi vivre dans un limbe, entre le monde d’aujourd’hui et celui d’autrefois.

Mon corps est ici, même si mon âme reste toujours dans mon pays.

Je ne peux pas rentrer dans mon Pays, parce que de 2006 à 2008 j’ai été en prison en Iran. Lors de ma libération, j’ai continué à collaborer clandestinement avec des organisations humanitaires, en envoyant des rapports sur la situation humanitaires dans le Kurdistan Iranien.

Rebin Rahmani (Kurdistan d’Iran)

 

Ma situation de réfugié a changé mon métier de journaliste. Je suis plus libre d’écrire mes opinions sans craindre de persécutions, de représailles et de menaces de mort. Je suis réfugié en France parce que j’ai échappé à une tentative d’assassinat par rapport à mon travail de journaliste.

Benson Sérikpa (Cote d’Ivoire)

 

Je suis réfugié en France car étant journaliste, ce pays reconnait les droits de l’homme notamment ceux relatifs à la liberté d’expression dans les médias.

John Chitambo Lobe « Rigolo » (Zambie)

 

Ma situation de réfugiée a beaucoup entamé ma fonction de journaliste. Surtout dans la mesure où le récépissé que nous délivre la préfecture ne nous permet pas de circuler librement. 

Carole Attioumou-Serikpa (Cote d’Ivoire)

 

Comme réfugiée politique en France, je dois remercier le gouvernement français pour m’avoir aidée à sortir de ma grave situation.

Priyanka S. Wikesinghe (Sri Lanka) 

 

Qu’est-ce que signifie être réfugié dans un pays étranger ? C’est le contraire de l’idée qu’on peut avoir : dans mon pays je vivais comme un réfugié, il n’y avait pas de travail, pas d’assurance maladie, aucune droit, vu qu’on pouvait être emprisonné à n’importe quel moment pour n’importe quelle raison. En France les droits de l’homme sont respectés. En plus, être ici est une opportunité pour moi de connaître une autre langue et une autre culture.

Muzzafar Salman (Syrie)

 

Etre réfugié signifie la naissance d’une nouvelle vie.

Nart Abdalkareem (Syrie)

 

Etre réfugié : le combat reste le même mais dans un contexte différent.

Sékou Chérif Diallo (Guinée Conakry)

 

Etre réfugié dans un pays étranger signifie avoir été accepté, et c’est un dernier recours, pour quelqu’un qui supportait difficilement sa situation dans son pays.

Pour un réfugié, l’amour de la liberté est ce qui guide la vie.

Dès que je suis arrivé comme réfugié en France, mon travail a changé. Maintenant je peux écrire plus librement.

La situation des réfugiés en France est meilleure que dans d’autres pays. Il existe de nombreuses associations en France pour aider les réfugiés.

 Majid Sedghi (Iran)

 

Journalistes réfugiés, le combat continuel : « Il faudrait une politique d’écoute »

À l’occasion de la Journée Mondiale du Réfugié 2014, René Dassié, journaliste d’origine camerounaise réfugié en France depuis 2004 (cliquez ici pour écouter son historie – audio), fait le point sur la situation de la liberté de la presse au Cameroun ainsi que sur la condition des professionnels de l’information en exil en France.

Propos recueillis par Lisa Viola Rossi (lisaviola.rossi @ maisondesjournalistes . org )

atangana

René Dassié et Michel Thierry Atangana (1er mars 2014)

Après dix ans d’exil en France, vous ne pouvez toujours rentrer au Cameroun. Pourquoi ?

Aujourd’hui on peut publier dans un journal sans condition, mais après la publication on peut être soumis à des pressions de toutes sortes, à l’heure qu’il est beaucoup de journalistes camerounais continuent à être persécutés. Dernièrement, il y a 2 ans, l’un d’entre eux est décédé en prison […] Il y a également une pression économique sur les médias. Ils ne  reçoivent pas la publicité des entreprises : elles ont peur de recevoir des redressements fiscaux de la part de l’Etat […]

Ecoutez la réponse intégrale :

 

Est-ce que vous pouvez continuer vos activités professionnelles et militantes ici en France en tant que journaliste réfugié ? 

Je suis diplômé de Sciences Po Paris, mais malgré cela je n’arrive pas à trouver du travail. Les entreprises de presse quand je leur présente mon CV ne comprennent  pas ce qu’est le statut de réfugié politique […]. Le journalisme est la seule chose que je sais faire : donc si la situation se poursuit comme cela, peut-être que j’envisagerais de quitter la France pour aller dans un Pays où les étrangers diplômés sont mieux accueillis. […] Récemment en enquêtant sur le cas de Michel Thierry Atangana, j’ai constaté qu’au Cameroun il y a beaucoup de prisonniers politiques. J’ai donc mis en place avec des amis un comité de libération de ces prisonniers. […] Ce combat, c’est une façon aussi pour montrer notre reconnaissance au Pays qui nous a vu grandir. […]

Ecoutez la réponse intégrale :

 

Si vous aviez la chance de rencontrer un chef d’État ou un membre du gouvernement français et / ou européen, quel sujet concernant la condition des reporters réfugiés aimeriez aborder avec lui ?

Les journalistes réfugiés sont des personnes qui ont beaucoup d’expérience, de savoirs et de savoirs-faire, ils peuvent aussi apporter du sang neuf dans l’Etat qui les a accueilli : tout ce qu’ils ont appris ailleurs, ils peuvent s’en servir ici. […]. Il faudrait une véritable politique d’écoute et ensuite d’insertion.  Il faudrait nous donner la chance de montrer notre reconnaissance aux Etats qui nous accueillent. […]

Ecoutez la réponse intégrale :

René Dassié reporter au Messager, Cameroun, avec David Sasson ancien ambassadeur d’Israël à Yaoundé