Irak : Des journalistes sur le chemin de la mort

[Par Karwan Tayib BAZYAN]

03 septembre 2014, les frontières  entre Daesh et les forces irakiennes à Slemanbag, nord de Bagdad, Irak. Hawre Khalid, Photojournaliste. Photo par Nwenar Fatih

03 septembre 2014, les frontières entre Daesh et les forces irakiennes à Slemanbag, nord de Bagdad, Irak. Hawre Khalid, Photojournaliste. Photo par Nwenar Fatih

Les correspondants de guerre en Irak racontent leur vécu et ses menaces au long de la guerre contre le groupe djihadiste de L’Etat Islamique.
Comment décrivent-ils Daesh ?

Ayant vécu aux Pays-Bas pendant 3 ans, Hawre Khalid, 27 ans, photojournaliste et documentariste kurde irakien avait décidé de travailler dans ce pays. «En fait, je veux bien rester tranquille, mais j’aime travailler dans mon pays malgré les difficultés et le risque,» a-t- dit.
Selon les journalistes concernés : « Daesh (acronyme de L’Etat Islamique en arabe) est un groupe d’ultra barbarie. Pourtant il tue tout le monde : l’enfant, le journaliste, l’homme et la femme. De plus, ce groupe n’accepte pas les autres. Il revendique la suppression de toute les civilisations et de tous ceux qui refusent de s’aligner sur lui. « Daesh est un groupe suicidaire. Il a une culture très différente. Il est une force mortelle ».
Pour les journalistes, la situation est difficile car ils sont spécialement ciblés par ce groupe. « L’Etat Islamique a une mentalité religieuse très agressive et extrémiste. Il n’accepte ni négociation ni dialogue,» estime Aram Jamal, 31 ans, correspondant de la chaîne de télévision de KNN.

12 juin 2014, Talward, Kirkouk. Hawar Star, cameraman de NRT. Il tourne les combattants kurdes pendant la guerre contre Daesh en Irak. Photo par Hawre Khalid

12 juin 2014, Talward, Kirkouk. Hawar Star, cameraman de NRT. Il tourne les combattants kurdes pendant la guerre contre Daesh en Irak. Photo par Hawre Khalid

Daesh et les médias
Une question qui se pose : est-ce que les correspondants travaillent dans les zones sous contrôle de Daesh ?
Selon Hawar Star, 24 ans, qui est cameraman pour la chaîne de télévision de NRT: «Il n’y a pas de journalistes qui travaillent dans les régions contrôlées par Daesh. Les journalistes étrangers travaillent quelquefois sur les événements loin des champs de bataille. Il y a des journalistes qui ont utilisé des moyens techniques comme le zoom pour arriver à travailler à distance». Dans le même temps, l’organisation islamiste maîtrise sa communication en direct : « Daesh utilise les réseaux sociaux pour annoncer ces activités,» soulignent les journalistes.
« Jusqu’à aujourd’hui, je n’ai vu qu’une seule fois la chaîne de télévision « Vice News » diffuser un reportage sur la région qui est sous le contrôle de Daesh. Ce groupe est très dangereux notamment pour les journalistes kurdes. Pour cette les journalistes ne peuvent pas du tout travailler au contact de ce groupe qui les tuerait » explique Hawar Star et Hardy Muhammad, 27 ans, correspondant de la chaîne de télévision de GK.

15 novembre 2014, Hawija, Kirkouk. Hardy Muhammad, correspondant de GK, il interviewe avec les combattants kurdes dans un champs de bataille pendant la guerre contre Daesh en Irak

15 novembre 2014, Hawija, Kirkouk. Hardy Muhammad, correspondant de GK, il interviewe avec les combattants kurdes dans un champs de bataille pendant la guerre contre Daesh en Irak

« Daesh refuse tous les critères du travail médiatique. Il n’accepte aucune pratique du journalisme au point que l’on a vu des journalistes étrangers décapités par Daesh » a rappelé Aram Jamal.
Mais que doivent faire les correspondants de guerre avant de commencer à couvrir les événements ? « Il faut que les journalistes effectuent un stage de journalisme de guerre,» a affirmé Hawre Khalid. Le journaliste doit évaluer la situation avant de se lancer sur le terrain. « Dans tous les cas, quand on travaille dans les zones de guerre, on rencontre toujours la mort ». Concernant les journalistes étrangers il affirme qu’ils « ne courent pas les mêmes dangers que nous. Pour notre part, nous avons bien compris la nature de notre région».
Hardy Muhammad critique, au passage, les étrangers qui viennent en Irak en tant que journalistes alors qu’ils ne le sont pas. « ce sont parfois des espions. »

12 juin 2014, Kirkouk. Hawkar Mustafa, Correspondant de Kirkuk  TV et  Kamaran Najim, photojournaliste, deax heurs avent de blesser de Najim, pendant la guerre contre Daesh en Irak

12 juin 2014, Kirkouk. Hawkar Mustafa, Correspondant de Kirkuk TV et Kamaran Najim, photojournaliste, deax heurs avent de blesser de Najim, pendant la guerre contre Daesh en Irak

Les risques du métier
« Depuis que la guerre a commencé entre les forces Irakiennes et l’Etat Islamique, je continue à travailler comme un photojournaliste dans les fronts, bien sûr que j’ai rencontré la mort plusieurs fois. Malheureusement, j’ai perdu un ami qui était photojournaliste comme moi, Kamaran Najim. Ce n’est pas fini, les risques sont encore là » a dit Hawre Khalid.
« J’ai rencontré la mort plusieurs fois, Nous sommes journalistes, C’est notre destin» confirme Aram Jamal.
Pour Hawkar Mustafa, Correspondant de la chaîne de télévision de Kirkuk TV, la situation est toujours dangereuse: « j’ai risqué ma vie plusieurs fois, de plus j’ai rencontré la mort quatre fois. » a-t-il indiqué Hawkar Mustafa. Autre risque : l’exil, dit, de son côté, Hawar Star « je risque toujours d’être mis à la porte, telle la réalité de mon pays.»
Selon les correspondants cités ici : « Si quelqu’un décide de devenir correspondant de guerre, il faut qu’il se prépare bien avant de le devenir. Le journaliste doit effectivement disposer d’ informations sur la guerre et sur ce que se passe sur le terrain. Le journaliste de guerre doit, une fois qu’il décidé de partir, porter dans son sac de quoi assurer les premier secours. »

30 septembre 2014, Dans un champs de bataille à Daquq. Aram Jamal, correspondant de KNN, avec les combattants kurdes pendant la guerre contre Daesh en Irak

30 septembre 2014, Dans un champs de bataille à Daquq. Aram Jamal, correspondant de KNN, avec les combattants kurdes pendant la guerre contre Daesh en Irak

Le Peshmarga protège les journalistes
Les correspondants de guerre déclarent que « le Peshmarga (le combattant kurde) protège bien les journalistes. Il les soutient beaucoup. C’est la raison pour laquelle on peut dire que le Peshmarga se sacrifie pour la protection de la vie des journalistes dans les champs de bataille. Il nous guide ou conseille bien.»

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Kamaran Najim (source : Twitter)

Kamaran Najim (source : Twitter)

Le cas de Kamaran Najim
Tous les correspondants parlent de Kamaran Najim. Le plus connu des photojournalistes Kurde d’Irak, Kamaran Najim a été blessé en mission professionnelle dans une bataille entre les combattants kurdes (Peshmarga) et le groupe djihadiste de Daesh, le 12 juin 2014. Après avoir été blessé, il a été enlevé par Daesh puis il a disparu jusqu’à aujourd’hui. Kamaran était responsable d’une agence de photographie de Metrography. Il a publié ses photos dans les plus connus des journaux internationaux comme : Times of London, Monocle Magazine, Financial Times Magazine, Vanity Fair, Washington Post, Getty Images, Al Sharq Al Awsat Newspaper…