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Thokozani Khupe peut-elle nous emmener à Canaan?

Une chose que j’ai apprise en couvrant les élections de 2012 aux États-Unis qui ont été remportées par Barack Obama, c’est qu’il est possible que la politique concerne des problèmes et non des individus.

Cette expérience m’a aussi appris que les médias jouent un rôle pertinent dans le processus démocratique d’élection en parlant sincèrement du pouvoir et en couvrant tous les candidats électoraux sans crainte, faveur, ni préjugés. Notre rôle est d’informer les gens sur les candidats afin que les électeurs puissent prendre une décision éclairée le 30 juillet dans le cas du Zimbabwe.

Cette semaine, je me concentre sur un candidat à la présidentielle qui participera au billet du Mouvement pour le changement démocratique – Tsvangirai dit MDC-T. Née le 18 novembre 1963 à Bulawayo, Thokozani Khupe n’est pas une novice du monde politique.

Profil de Thokozani Khupe

Ayant représenté son parti à la fois au Parlement et au Présidium, elle arrive avec une grande expérience et on ne peut nier le fait qu’elle est émotionnellement stable, vue la façon dont elle a géré les attaques sur sa personne à cause des combats de factions dans le MDC.

Khupe n’a pas seulement réussi dans un monde politique dominé par les hommes, mais a toujours apporté des résultats pour son parti. Depuis 2000, date à laquelle elle a obtenu le siège de député de Makokova, elle a pu conserver son siège jusqu’à son expulsion après que le MDC dirigé par Nelson Chamisa est écrit au président du Parlement pour l’informer de son expulsion du parti.

Les réalisations de Thokozani Khupe

En octobre 2012, cette politicienne, qui est aussi une survivante du cancer, a ouvert la Thokozani Khupe Cancer Foundation, qui aide les patients atteints de cancer à accéder à un traitement abordable au Zimbabwe. Ici, de nombreux patients atteints de cancer  ne se battent pas contre la maladie en raison des coûts prohibitifs. Par exemple, une fois qu’on a diagnostiqué un cancer, il faut payer environ 200$ pour déterminer le stade du cancer et ensuite, entre 3000$ et 4000$ pour une séance de radiothérapie. Pour la chimiothérapie, il faut entre 100 et 1000$ par cycle selon le stade du cancer. En ajout, les patients atteints de cancer peuvent aussi avoir besoin d’une transfusion sanguine et une pinte de sang coûte environ 214$.

Khupe a également été impliquée dans le plaidoyer auprès du gouvernement pour introduire une taxe sur le cancer afin de protéger les patients contre les coûts du traitement.

Etant désormais une militante des droits des femmes, Khupe est devenue la présidente du Global Power Women’s Network Africa, un forum qui promeut l’égalité des sexes en Afrique. Son engagement à l’émancipation des femmes est clairement visible même dans la nomination de postes clés pour d’autres femmes comme Linda Masarira et Lynnet Mudehwe, qui sont des activistes formidables pour des postes clés.

Elle a également Priscilla Misihairambwi, qui était la seule femme de l’équipe à avoir négocié le gouvernement d’unité nationale entre Zanu PF et MDC.

Avant d’entrer en politique, le président de l’une des factions du MDC-T était un militant des droits du travail qui a siégé au comité des travailleurs des Chemins de fer nationaux du Zimbabwe.

Thokozani Khupe est membre fondateur du MDC et a été élue à l’exécutif en 1999 lors de la formation du parti. En 2005, elle est élue vice-présidente du MDC, succédant à feu Gibson Sibanda. Cependant, ce qui est le plus remarquable de son profil politique est le fait que Khupe était vice-Premier ministre de la République du Zimbabwe pendant la période du gouvernement inclusif du 11 février 2009 au 13 août 2013.

Les forces de Thokozani Khupe

Son engagement à l’émancipation des femmes est clairement visible dans la nomination à des postes clés d’autres femmes comme Linda Masarira et Lynnet Mudehwe, qui sont des activistes formidables. Elle est émotionnellement stable, elle a réussi dans le monde des hommes. Elle a supporté Morgan Tsvangirai sincérement et honnêtement. Khupe a toujours apporté au parti des résultats exceptionnelles : le MDC n’a jamais perdu dans le Matabeleland.

Thokozani Khupe a également fait preuve d’être une politicienne perspicace et calculatrice. Par exemple, son problème avec Tsvangirai était qu’elle n’avait jamais senti le besoin de partenaires d’alliance dans les circonscriptions, où le parti pouvait gagner toute de même. Et elle avait raison!

Qu’est-ce que les partenaires de l’alliance ont apporté au MDC-T autrement que de jeter une bouée de sauvetage à certains de ces politiciens en train de sombrer?

Khupe est équilibrée. Et elle a subi les insultes avec un sang-froid et un stoïcisme incroyables. Ses arguments ont toujours porté sur le constitutionnalisme et le fait de faire les choses de la bonne façon. Malheureusement, elle est a à faire avec des loups et des hyènes.

Les faiblesses de Thokozani Khupe

Ce n’est pas un secret que la base de soutien de Khupes en ce moment est faible, surtout en dehors de la région de Matabeleland. Même dans cette région, elle fait face à la concurrence de l’Alliance MDC et d’autres partis comme Zapu.

Malgré cela, elle est une politicienne enracinée dans le pouvoir de ses convictions. Dans une démocratie stable et mature, ces qualités seraient recherchées, même par un gouvernement dirigé par un autre parti.

Jouer à la balle dure

Si personne ne savait qui était Khupe, ils le savent maintenant. Depuis la mort de Tsvangirai, toute l’énergie négative du MDC-T orchestrée par l’ambitieux Nelson Chamisa s’est déchaînée sur Khupe. Lors de l’enterrement de Tsvangirai à Buhera, Khupe a failli perdre la vie lorsque des jeunes du MDC-T qui ont soutenu Chamisa à la présidence ont failli la brûler dans une hutte.

Elle était convaincue que l’onction de Chamisa en tant que président était inconstitutionnelle, car la constitution du MDC a un vice-président (elle) élu au Congrès en 2014. Selon elle, l’établissement de deux vice-présidents par Tsvangirai s’est fait en dehors de la constitution et n’a jamais été ratifié par les organes statutaires du parti. Chamisa et son nouvel instrument de pouvoir au sein du MDC ont essayé toute sorte de force, y compris perturber ses réunions à Bulawayo et endommager sa voiture, à des tentatives infructueuses de dialogue. Finalement, ils ont été forcés de la renvoyer du parti.

Khupe a ignoré le licenciement et a continué à tenir son congrès du parti en avril 2018 où elle a été élue présidente, sans opposition, réclamée sous la bannière du MDC-T. Ce n’est pas un cas le fait qu’elle ait dans son coin des hauts fonctionnaires de la MDT et des esprits juridiques comme Obert Gutu.

Pour le nom du parti et la propriété, elle a porté l’affaire au tribunal, et en dépit d’être chahuté par les partisans du parti, elle est restée ferme. A présent, le groupe Chamisa a renoncé à une dispute judiciaire sur l’utilisation de ce nom, et il est bien révélateur le fait que Nelson Chamisa, qui est supposé être le président du MDC-T, ira sur les bulletins de vote comme Président de l’Alliance MDC-T, techniquement parlant sans parti. Une grande victoire pour Thokozani Khupe. On ne peut pas gagner ce genre de combats si on n’a pas  de feu dans son ventre, et la force morale de se battre pour ce qui est juste.

Des espoirs électorales

Thokozani Khupe est une combattante, et lors des élections législatives qu’elle a remportées dans sa circonscription, elle a battu des géants tels que Welshman Ncube et Sithembiso Nyoni de Zanu PF, dans sa circonscription de Makokoba. Si les marges avec lesquelles elle a battu ses adversaires dans le passé ont une signification, Khupe serait assurée de siège Makokoba, si elle ne se présentait pas pour la présidentielle.

Les élections sont un jeu de nombre, et sur cette seule base, Khupe n’a pas et n’aura probablement pas les chiffres que possède Zanu PF, et même ceux que Chamisa a acquis. Cependant, des principes tels que ceux qu’elle a, de la ténacité, de la détermination et du respect pour ce que l’on croit être juste, sont ce dont nous avons besoin au Zimbabwe. Comme le dit la vieille citation la plus célèbre des temps modernes attribuée à Edmund Burke, «la seule chose nécessaire pour le triomphe du mal est que les hommes de bien ne fassent rien».

Je crois que le MDC-T aurait eu un président merveilleux, sobre et réaliste, avec Thokozani Khupe, si d’autres forces n’étaient pas entrées en jeu. Le Zimbabwe a besoin de femmes comme celles-ci. Elle n’a peut-être pas le pedigree historique coloré que Joyce Mujuru peut avoir en termes d’histoire de la lutte de libération, mais elle était dans les tranchées avec Tsvangirai et sait ce que c’est que d’être sur le bout du bâton.

Et tout le monde sait qu’on ne plaisante pas pas avec Thokozani Khupe. Demandez à Nelson Chamisa.

Traduit par Maria Elena Gottarelli

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