Articles

Afrique : l’heure de la justice a-t-elle sonné ?

[Par Jean-Jules LEMA LANDU]

L’heure de la justice, en Afrique, contre les crimes impunis, a-t-elle sonné ? Les deux procès qui viennent de s’y dérouler semblent l’indiquer. Le 30 mai, à Dakar, au Sénégal, c’est Hissène Habré, l’ancien président du Tchad, qui était devant les juges, tandis que le 31 mai, à Abidjan, en Côte d’Ivoire, ce fut le tour de Simone, l’épouse de l’ancien président Laurent Gbagbo. Lui-même retenu à la Cour pénale internationale (CPI), à la Haye, aux Pays-Bas.
Lire la suite

Tchad : élection présidentielle sur fond de répression généralisée de la société civile

[Par Makaila NGUEBLA]

Au Tchad, l’élection présidentielle est prévue pour le 10 avril 2016. Cette élection intervient dans un contexte politique, économique et social délétère marqué par des arrestations des responsables de la société civile et mouvements citoyens opposés à un 5ème mandat d’Idriss Deby.

Le 10 avril 2016, aura lieu au Tchad, l’élection présidentielle à laquelle prennent part 13 candidats dont le président sortant Idriss Deby au pouvoir depuis 1990.

Les Tchadiens sont conviés aux urnes le 10 avril prochain en faveur des candidats à l’élection présidentielle dans un climat politique, économique et social tendu.

Il convient de souligner que depuis 2015, le Tchad vit dans un climat politique difficile né du processus électoral  contesté par l’opposition tchadienne qui soupçonne la Commission  Électorale Nationale Indépendante (CENI), organe en charge d’organiser l’élection présidentielle de jouer le jeu du Mouvement Patriotique du Salut (MPS). Les partis d’opposition au Tchad, ont dénoncé le manque de transparence  au sein de la CENI  au sujet du fichier électoral jugé peu fiable. Ils ont reproché au CENI d’avoir enrôlé des réfugiés soudanais et centrafricains vivant au Tchad en leur donnant des cartes d’électeurs pour voter en faveur du Président Idriss Deby.

À ce différend politique s’ajoute la crise économique et sociale qui s’aggrave dans le pays. Les travailleurs tchadiens réclament de l’État plusieurs mois des salaires restés impayés face à une cherté de vie galopante dans le pays.

(Source : Makaila Nguebla)

(Source : Makaila Nguebla)

Devant cette situation de plus en plus intenable, l’Union des Syndicats du Tchad (UST) et des organisations de la société civile se sont structurés  en mouvements citoyens appelés « ça suffit », « Trop c’est Trop » et « IYINA » en arabe tchadien signifiant « on est fatigué » pour contester  la candidature à un 5ème mandant d’Idriss Deby.

Ces mouvements citoyens reprochent au Président Idriss Deby, sa longévité au pouvoir, la mal gouvernance politique, économique et sociale des ressources du pays et la confiscation des libertés et le non-respect des droits humains.

C’est dans ce climat que l’opposition et les organisations de la société civile ont organisé des marches et des manifestations qui ont été systématiquement interdites ou violemment réprimées. Plusieurs leaders sont arrêtés arbitrairement et condamnés à six mois d’emprisonnement.

(Source : Makaila Nguebla)

(Source : Makaila Nguebla)

Au niveau international, les organisations internationales de défense des droits humains ont dénoncé les arrestations des responsables des mouvements de contestation et appelé à leur libération.

La France reste aphone face à la tension politique et sociale actuelle en cours au Tchad. Elle considère que le Président tchadien, Idriss Deby est allié précieux dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, ce qui fait dire certains observateurs que Paris reste dans une logique de compromission avec le régime tchadien.

Quelle que soit l’issue de l’élection présidentielle du 10 avril (bien qu’elle soit sans douté déjà jouée), Idriss Deby aura encore moins de légitimité aux yeux de son peuple.

Afrique du Sud : la vision de Mandela trahie

[Par Jean-Jules LEMA LANDU]

De la prison à la présidence. Telle a été l’apothéose du parcours politique de Nelson Mandela. Mais tout autant saisissant était cet espoir qu’il avait suscité de faire de l’Afrique du Sud une nation « arc-en-ciel ». Formule qui s’autorisait le rêve de voir cohabiter en harmonie les différentes communautés locales (Blancs, Noirs, Indiens, métis).

En clair, il s’agissait de maîtriser l’art du compromis entre les affres que nourrissaient les Blancs sud-africains, à la fin de l’apartheid (régime basé sur la ségrégation raciale), et les ardeurs des Noirs qui voulaient, à tout-va, vite jouir des effets de leur victoire.

L’homme était-il à la hauteur de ses ambitions ? Et, qu’en reste-t-il, aujourd’hui, 17 ans après son départ du pouvoir ?

Quand Mandela accède au pouvoir, en 1994, l’Afrique du Sud est partagée entre ravissement et sentiment de doute. L’apartheid était bel et bien aboli, mais on avait du mal à imaginer la notion de « paix des braves » faire naturellement carrière entre Blancs Sud-Africains (anciens dominateurs) et Noirs autochtones (anciens dominés). Tant ce mode de renversement des rapports de force ne rime qu’avec avec la violence.

(Source : IGEO TV)

(Source : IGEO TV)

Tel a été le cas, au Zimbabwe, au début des années 2000. Les Noirs avaient chassé 4 000 Blancs de leurs fermes, non sans effusion de sang, se disant être en bon droit de réclamer leurs « biens spoliés ».

En Afrique du Sud, par contre, Mandela a réussi à endiguer cette dérive va-t-en-guerre, alors que les crispations étaient au zénith. Aux uns, il a garanti l’application des accords signés en 1991 (Seven closes), assurant protection des Blancs, en tant que minorité ; aux autres, il est simplement parvenu à se faire écouter comme « chef et père ». A l’africaine

Absence d’un contrat social

Ainsi commença à se forger, lentement, mais sûrement, une nation « arc-en-ciel », à la recherche de l’unité. Avec, au départ, en 1995, cette image symbolique, forte, qui marquera toute la vie politique de l’ancien prisonnier : Mandela en maillot des Springbok, équipe sud-africaine « blanche » de rugby, considérée comme un des emblèmes de l’apartheid ! C’était, en Afrique du Sud, à l’occasion de la coupe du monde de rugby. Ce jour-là, dit-on, tous les mythes s’étaient écroulés !

L’après-Mandela est à situer sur un autre versant. Plutôt, celui de clivages réactivés ou imposés par le fait d’une direction politique dénuée de toute conscience nationale. Ainsi, « le pays est passé de l’apartheid racial à l’apartheid social », déplore Songezo Zib, journaliste sud-africain (*). Avec pour conséquence directe, la division dans les rangs de la communauté noire. Désormais clivée, celle-ci n’est plus un bloc monolithique. L’élite, qui roule sur l’or, se démarque clairement de la classe ouvrière. Qui broie du noir.

Les grèves à répétition dans le secteur minier – moteur de l’économie sud-africaine -, accompagnées de violence, en disent long sur l’absence d’un contrat social acceptable par tous dans ses grandes lignes.

(Source : AFP)

(Source : AFP)

Si la communauté blanche n’a pas éclaté, elle n’est pas moins bousculée par les effets néfastes de la mauvaise gouvernance du pays, qui fait que les Blancs riches sont devenus pauvres. Et les pauvres plus pauvres, au point de faire la manche. Ce qui a le don de renforcer, chez la plupart d’entre eux, l’idée de créer une « République libre ». Ce n’est pas une simple vue de l’esprit. Ils s’y préparent, militairement.

      L’Afrique du Sud se délite. A l’œil nu. Où est donc passé le grand rêve de Mandela ?

——————–

(*) SONGEZO Zib, Courrier International, n° 1 140

Affaire de l’avion présidentiel au Cameroun : la condamnation d’Atangana Mebara innocente Marafa

[Par René Dassié]

C’est un principe universel du droit pénal. Pour que deux personnes soient condamnées dans la même affaire, il faut qu’elles aient été, dans l’infraction justifiant les poursuites, coauteurs ou complices. En plus clair, dans la coaction, le coauteur commet l’infraction avec l’auteur, tandis que dans la complicité, le complice participe à l’infraction commise par l’auteur.

Appliqué à l’achat manqué il y a près de seize ans, de l’avion présidentiel de Paul Biya, ce principe signifie que les deux anciens secrétaires généraux de la présidence camerounaise, Marafa Hamidou Yaya et Jean-Marie Atangana Mebara, tous deux accusés d’avoir détourné l’argent alloué à l’achat de cet aéronef ne peuvent pas à bon droit être condamnés dans la même affaire. Et que la condamnation devenue définitive du second met automatiquement hors de cause le premier à qui il a succédé au Secrétariat général de la présidence camerounaise.

Le 6 janvier dernier, la Cour Suprême du Cameroun statuant en dernier ressort a en effet rejeté le pourvoi formé par M. Atangana Mebara contre sa condamnation à 15 ans de prison par la Cour d’Appel de Yaoundé, il y a un peu plus de trois ans pour tentative de détournement de deniers publics en coaction de la somme de 31 millions de dollars destinés à l’achat de l’avion présidentiel.

 

(Source : cameroon web news)

(Source : cameroon web news

Des faits que ce haut commis d’État de 62 ans « et dont la Commission des droits de l’homme de l’Union africaine exige la libération » a toujours nié. Un remaniement opportun au sein de la haute juridiction camerounaise avait même plusieurs mois avant l’audience de janvier 2016 permis d’écarter de la Cour Suprême de Yaoundé tous les magistrats « présumés » hostiles à la confirmation de sa condamnation, dont le rapporteur, Jean-Jacques Bikoue, renvoyé au ministère de la justice. Celui-ci avait requis l’annulation de sa peine.

Il n’en demeure pas moins qu’en toute logique, la condamnation du Ministre Atangana Mebara confirme l’innocence de Marafa Hamidou Yaya. Le 22 septembre 2012, au terme d’une audience marathon de plus de 18 heures, celui-ci avait été condamné à 25 ans de prison pour « complicité intellectuelle » de détournement de 29 millions de dollars débloqués en 2001 pour l’achat manqué de l’avion de Paul Biya.

C’est la tentative de détournement présumé d’une somme de 31 millions de dollars dont fait partie ces mêmes 29 millions de dollars qui ont servi de base à la condamnation de M. Atangana Mebara.

 

(Source : étudiant-ados)

(Source : étudiant-ados)

A noter que l’ordonnateur des dépenses, l’ancien ministre des finances, Michel Meva’a Meboutou, un proche du président camerounais qui avait reconnu devant le tribunal avoir débloqué l’argent pour le transférer à un négociant chargé d’acheter l’avion n’a jamais été inquiété. Il a en outre affirmé n’avoir jamais reçu quelque instruction que ce soit à cet effet « de la part de Marafa », qui de toute façon n’était pas son supérieur hiérarchique.

Au moment où M. Atangana Mebara prend en main la gestion administrative de l’achat de l’avion problématique, Marafa Hamidou Yaya n’en est plus du tout en charge, puisqu’il lui a cédé son poste auprès du président Paul Biya pour devenir ministre de l’Administration du territoire et de la Décentralisation, en 2002.

Comment les deux hommes auraient-ils pu, à des périodes différentes, gérer ou détourner les mêmes fonds ? Par quelle opération miraculeuse auraient-ils pu contracter le temps, pour se retrouver à la même époque, au même poste, et commettre les mêmes méfaits?

« Mon successeur au Secrétariat général de la présidence a été condamné pour avoir détourné la somme que je suis censé avoir dérobée », ironisait d’ailleurs M. Marafa, dans une interview publiée en janvier 2013 dans Slate Afrique.

Depuis des années dans cette affaire, la justice camerounaise s’emmêle les pédales. Si elle suivait la logique de la justice internationale, elle n’évoquerait même plus l’affaire de l’achat manqué de l’avion de Paul Biya. En 2006, le gouvernement de Yaoundé avait saisi le tribunal arbitral de l’État d’Oregon aux États-Unis.

 

(Source : Camerpost)

(Source : Camerpost)

Celui-ci avait rendu une sentence arbitrale laquelle condamnait le négociant dans l’achat de l’avion, le groupe GIA International, à remettre à l’État camerounais un Boeing 767-300 et 800 000 dollars de dommages-intérêts. Cette sentence arbitrale acceptée par toutes les parties précisait du reste qu’aucune des personnes impliquées dans le dossier ne ferait plus l’objet de poursuites.

Lors d’une conférence de presse tenue à Yaoundé en 2014, l’avocat commis par l’État du Cameroun pour le représenter auprès du tribunal arbitral de l’Oregon, le Bâtonnier Akere Muna, avait indiqué que l’avion en question avait bien été réceptionné par son client. D’où la position de la communauté internationale, qui a reconnu Marafa Hamidou Yaya prisonnier politique.

Depuis trois ans, l’ancien ministre figure dans les rapports annuels du Département d’État américain dans la rubrique des prisonniers politiques. L’année dernière, l’Internationale Socialiste, la plus grande organisation des partis socialistes et socio-démocrates du monde a pris une résolution exigeant sa libération.

Au Cameroun, la Cour Suprême qui de par la loi est tenu d’examiner son pourvoi en cassation dans un délai de six mois accuse un retard de trois ans pour ce faire, et même ses problèmes récurrents de santé n’ont pas fait fléchir le pouvoir de Yaoundé

2000-2015 : quels résultats du programme de l’Onu pour le progrès de l’Afrique ?

[Par Jean-Jules LEMA LANDU]

Le contient africain, on le sait, est ravagé par plusieurs fléaux. La pauvreté, les maladies endémiques, l’analphabétisme et les guerres récurrentes sont parmi les plus dévastateurs. Au début des années 2000, l’Onu a mis en place un programme pour les pays du Sud, avec vocation d’améliorer le sort « des plus défavorisés de la planète ». Il s’agissait des 8 « Objectifs du millénaire pour le développement » (OMD). L’année 2015 a été retenu comme date buttoir. Qu’en est-il, aujourd’hui, de l’Afrique ?

Les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) [source : un.org]

Les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD)
[source : un.org]


 

L’Onu a également initié, en septembre 2015 – faisant donc de cette période une année charnière -, un second programme, portant sur 17 « Objectifs de développement durable » (ODD), adopté comme le premier par tous ses 193 pays membres. Universel, celui-là, et plus ambitieux, car alignant aussi l’environnement, il va jusqu’à toucher les aspects liés à la paix, à la justice et à l’efficacité des institutions. Son échéance est fixée à l’horizon 2030. L’Afrique des dictatures s’y retrouve dans les premières loges.

Si le bilan de ce premier faisceau d’objectifs (OMD) n’est pas totalement positif, il a au moins le mérite de montrer que le mal n’est pas une fatalité. On cite en exemple la pauvreté (quand on vit avec moins de 1,25 $ par jour, seuil défini par la Banque mondiale), les statistiques prouvent que pour chaque espace de trois ans, le continent connaît une diminution de 9 millions de pauvres. Ce standard est tiré des calculs effectués entre 2005-2008 : de 395 millions de faméliques, ce chiffre est tombé à 386 millions.

(source : oeildafrique.com)

(source : oeildafrique.com)

Un autre exemple qui inspire est à trouver dans le domaine de l’éducation. En 10 ans, entre 1999 et 2009 le nombre des enfants non scolarisés a diminué de 13 millions, passant de 43 millions à 30 millions. On épingle le même « progrès relatif » dans quasi tous les autres Objectifs. Sauf dans l’univers de la mortalité infantile (avant 5 ans), où le nombre s’est sensiblement élevé, entre 2002-2014, à 174 morts sur 1 000 naissances. Comparativement, ce chiffre a baissé, un peu partout, de 90 à 43 décès sur 1 000 naissances.

Ce que, globalement, l’Afrique n’est pas encore sortie de l’auberge. Mais, pourquoi cette inhibition et comment en venir à bout ?

De but en blanc, on relèvera des « motifs classiques », telle la question liée à l’insuffisance de financement, qui exige plusieurs dizaines de milliards d’euros, ou à la situation de certains Etats, qualifiés de pauvres, par exemple ; mais à s’obstiner dans les détails, on y découvre aussi le diable : le « syndrome de Peter Pan ». Autrement dit, cette maladie liée au refus de devenir adulte. Les Africains ne veulent pas grandir. De « grands enfants », aux yeux de l’Occident.

« ODD » est déjà entré en vigueur, après « OMD ». Jusqu’en 2030. Peu de dirigeants africains y pensent. Il y a en a même ceux qui vont jusqu’à en oublier l’existence. En attendant que le continent guérisse du complexe nuisible évoqué ci-dessus, à charge pour la communauté internationale de « boucher le trou ».

 

 

Electrification : Sunna Design et Lendosphère veulent électrifier 600 millions d’africains

[Par Emile Zola NDE TCHOUSSI]

Ces deux entreprises françaises lancent une opération de levée de fonds pour financer ce projet ambitieux de lampadaire solaire. L’annonce a été faite lors d’un petit-déjeuner de presse tenu vendredi 20 novembre à Paris.

_FLO2492_rPendant 90 minutes d’entretien avec la presse Thomas Samuel, le directeur général de Sunna design, s’est montré très convaincant et sûr de la réussite son projet. Il est parti d’un constat : « Aujourd’hui 600 millions [sur une population estimée à un milliard, Ndlr] de personnes vivent en Afrique sans accès à l’électricité. Pour permettre leur développement, leur accès à l’éducation, à la croissance économique et lutter contre l’exode rural, il est essentiel de leur procurer mieux qu’une lampe à kérosène. Le coût financier et écologique que représenterait leur raccordement au réseau électrique classique ne rend pas cette perspective possible ».

Pour remédier à cette situation, « une solution révolutionnaire » est donc proposée par deux entreprises, Sunna Design, installée près de Bordeaux et Lendophère, basée à Paris. La première citée amène la technologie innovante et la fabrication « Made in France », la deuxième apporte une solution de financement participatif, grâce à son expertise dans ce secteur d’activité : le crowdlending. Faut-il le rappeler, ces deux entreprises appartiennent au réseau Up Afrique, un groupement de 10 jeunes sociétés françaises persuadées que l’économie verte et les star-up (entreprises à fort potentiel de croissance et qui fait la plupart du temps l’objet de levées de fonds) peuvent dynamiser les liens humains et économiques entre la France et l’Afrique.

Le Nanogrid

_FLO3213_01Dans les faits, la solution proposée est un mini réseau électrique qui alimente quatre foyers à partir d’un lampadaire solaire. Complètement écologique et autonome, le Nanogrid (une box intelligente pour à la fois vous donner de la lumière et recharger votre iPhone) peut s’installer partout en quelques minutes. « Mieux, le Nanogrid est très fiable. Il ne demande qu’à être dépoussiéré, car il faut dix ans d’utilisation avant d’assurer sa maintenance ». Thomas Samuel explique également que les foyers qui y sont connectés bénéficient ensuite d’un service essentiel d’accès à l’énergie, pour éclairer l’intérieur des maisons et recharger de petits équipements électroniques comme les téléphones mobiles ou les radios. Les personnes intéressées par ce type de lampadaire solaire prépayent le service grâce à leur réseau téléphone mobile, « une utilisation très répandue en Afrique ».

De l’avis des promoteurs, ils ont, lors business plan, tenu compte du pouvoir d’achat des africains : « Il faut 100 000 euros (environ 65 500 000 Fcfa) pour équiper 500 foyers. Le coût d’installation des box par foyer s’élève à 200 euros (environ 130 000 Fcfa). Mais chaque foyer ne pourra débourser que 20 centimes d’euros (130 F Cfa) par jour, soit environ 4000 F cfa par mois. Mieux, ils auront trois ans pour payer ». Avec cette formule, les lampadaires solaires « Sunna Design » sont largement à la portée des familles africaines, même les plus modestes.

Frais de fabrication

IMG_0945A travers les images projetées lors du point de presse, l’on a pu se rendre compte que certains villages de la région de la Casamance au Sénégal sont déjà sortis de l’obscurité,avec ces lampadaires solaires modèles Sunna Design. Au Bénin, grâce à l’entreprise partenaire, Ecolabs, de Charles Agueh, les études pour l’implantation de cet ambitieux projet sont en phase de finalisation. En Afrique de l’Est et Centrale, et notamment au Cameroun, nos partenaires sont encore en phase de sensibilisation : « Il faut que les populations africaines démunies, en manque d’électricité, comprennent bien ce concept. Une fois qu’ils se seront connectés à notre réseau, ces populations comprendront qu’il est moins coûteux et écologiquement plus viable », précise un autre intervenant.

Pour satisfaire ces besoins, il ne manque donc que l’avance des frais de fabrication des lampadaires dans l’usine girondine. Pour y parvenir, Sunna Design compte sur un nouvel outil de financement d’avenir : le crowdlending. Au lieu de faire des dons, les particuliers prêtent à Sunna Design l’argent nécessaire à la fabrication des équipements, via le site www.lendosphère.com. Cet investissement leur est ensuite remboursé par Sunna Design, avec un taux d’intérêt annuel de 6% brut.

A l’image de Jean-Louis Borloo dont la Fondation Energies pour l’Afrique veut électrifier l’Afrique en 10 ans, le brillant Thomas Samuel a aussi rappelé que l’électrification de l’Afrique est aussi pour la France un nouveau marché en perspective. Un discours de mobilisation que ce jeune chef d’entreprise et ses principaux collaborateurs continueront à faire passer pendant la Conférence de Paris sur le climat du 30 novembre au 11 décembre 2015.

 

 

Burundi: Tant qu’il y aura le tout puissant président Nkurunziza !

[Par Jean MATI]

Maître du jeu, le président sortant du Burundi, Pierre Nkurunziza est loin de lâcher prise. Malgré les contestations de la rue, l’homme fort du pays reste insensible face à l’émotion de tout un peuple. Cynisme, déni, mépris et autres stratégies mises en place pour demeurer au pouvoir, Pierre Nkurunziza se représente pour un troisième mandat en toute violation de la constitution.  

Le président Pierre Nkurunziza Source : notreafrik.com

Le président Pierre Nkurunziza
Source : notreafrik.com

N’eussent été les mouvements de contestations de la rue et le semblant « coup d’Etat » de ce dernier temps, peut-être beaucoup des gens et autres curieux n’auraient pas entendu parler du Burundi en boucle et de son fameux président Pierre Nkurunziza devenu sans doute une Super Star dans les médias. Burundi, pays d’Afrique de l’Est avec une superficie de 27.834 km2, était jusqu’alors, l’une des nations africaines, la moins agitée, malgré une politique dictatoriale du régime en place. Inutile de le rappeler, le Président de la République burundaise s’appelle : Pierre Nkurunziza. Comme un bon chef d’Etat africain, il est le père de la nation. Il est le garant. C’est celui qui détient les âmes et la vie de tous ses compatriotes. On le déteste parce qu’il est chef. Pourquoi ? « En Afrique, les présidents (les chefs)  sont toujours détestables parce qu’ils sont riches et voleurs. Mais aussi tueurs et criminels », accuse l’homme de la rue. « Parfois, leur fortune dépasse même les dettes de leurs pays. Toutefois, ils ont des sympathisants. Ceux qui les acclament ou  les vénèrent », ajoute-t-il. Le président Nkurunziza est-il différent des autres ?

Du condamné à mort au Chef de l’Etat

L’histoire de l’ascension du tout puissant Nkurunziza tente de ressembler aux  récits des personnages religieux ou prophétiques. Était-il l’homme de destin du pays ? Le messie, celui qui devait venir…  En tout cas, il y a trop de mystification là-dessus. On connait, par exemple, peu sur son enfance. Pas grand-chose n’a été dit sur l’enfant Nkurunziza. On retiendra tout de même que son père fut un ancien gouverneur des provinces de Kayanzi et de Ngozi. Le père de Nkurunziza est élu au parlement en 1965, à en croire les sources dignes de foi, avant d’être liquidé en 1972. Son fils Pierre n’avait que huit ans et demi et a vu le père assassiné… Point barre. Plus rien n’a été dit par la suite sur la vie du tout puissant Nkurunziza.

Il fallait attendre le début des années 90. Un vent nouveau souffle en Afrique avec la vague de démocratie. La fin des partis uniques. C’est aussi la nouvelle donne mondiale. La chute du mur de Berlin. La fin de la guerre froide. Comme dans un rêve, Pierre Nkurunziza réapparaît. Cette subite apparition n’est pas sans doute pour venger le père assassiné. Ça non et non ! Ici, on parle de futur « l’homme fort du Burundi » en termes d’un grand sportif. Un grand athlète qui aurait pu faire une belle carrière sportive si jamais la volonté du Très Haut ne lui avait pas guidé sur le terrain politique. Selon le site Internet de la Présidence, le tout puissant Nkurunziza est un sportif talentueux qui aime le football et la course à vélo. Il a même entraîné un club de la première division… (qui malheureusement n’a pas gagné de titres, ndlr). Il finit dans les auditoires de l’Université de Bujumbura comme professeur assistant. En 1993, des violences ethniques s’éclatent, deux des sept membres de la famille de Nkurunziza sont tués. Le professeur Pierre abandonne les salles de cours et rejoint les maquis pour tenir les armes et faire la guerre. Cette fois-ci, il est revanchard. Très revanchard même. L’ancien footballeur et cycliste devient terroriste. Il planifie des projets d’attentat comme celui de 1995 qui a coûté la vie à des dizaines de morts dans la capitale burundaise. Il est condamné à mort par la justice. Il s’exile discrètement dans des pays voisins avant de revenir au bled pour s’activer dans la rébellion.

Dans sa pérégrination, Pierre Nkurunziza songe à devenir « Chef de l’Etat ». Martin Luther King avait fait un rêve. Pourquoi pas lui ? Mais pour concrétiser ce destin acharné, il doit se convertir et chercher la rédemption. Pierre, pas encore « Tout puissant » à l’époque, devient pacifiste. Il signe les accords de paix d’Arusha de 2000 et  de 2003. Une démarche payante, car, sa peine de condamnation à mort est amnistiée… provisoirement !

En 2005, il est élu chef de l’Etat. Son arrivé au pouvoir est salué par les partenaires occidentaux. C’est un jeune président. Un bel avenir pour le Burundi ! Mais vite, ça sera la déception. L’homme est un vieux routier. On n’apprend pas à faire des grimaces à un vieux singe, dit un vieil adage africain. Nkurunziza est un dictateur né. Un despote. Un démagogue aussi. Il est vite désavoué par une majorité des Burundais. Même les gens de son ethnie ont fini par cracher sur sa mauvaise politique. En 2010, il est réélu maintenant comme un vrai dictateur avec un score fleuve de 91 % de voix. L’opposition crie à la fraude et en appelle même à la Communauté internationale. Le camp présidentiel ferme les oreilles à toutes les jérémiades des opposants burundais. Les années passent vite. Durant deux mandats, le président n’a pas fait grand-chose. Arrive l’an 2015, les élections sont prévues en ce mois de juin. Sauf que le tout puissant Nkurunziza n’a plus le droit de se représenter. Pourquoi l’empêcher ? C’est la Constitution. Foutez-nous tranquille avec vos constitutions  écrites à la main par les intellectuels noirs africains à l’aide des conseillers politiques blancs ! – imagine-t-on un tel scénario. Finalement, le pouvoir en place modifie la Constitution. Le président peut se représenter plusieurs fois (illimité) tant qu’il aura encore la force de servir son peuple grâce à la volonté divine du très Haut.

Le peuple burundais est tout sauf idiot. Les manifestants sont dans la rue. Certains bâtiments publics sont mis à sac. Les échauffourées dégénèrent entre les contestataires et les forces dites de l’ordre, en Afrique, sont généralement du « désordre ». Des tirs à balle réelle sont entendus dans les grandes artères de la capitale, certains tombent et d’autres s’échappent miraculeusement.

Des manifestants dispersés par la police au cours d’une manifestation contre un 3e mandat du président, vendredi 17 avril 2015 Source : voaafrique.com

Des manifestants dispersés par la police au cours d’une manifestation contre un 3e mandat du président, vendredi 17 avril 2015
Source : voaafrique.com

Le Tout puissant Nkurunziza en Tanzanie lors d’un déplacement apprend par les voies des médias, qu’il est déchu. Coup d’Etat ! C’est la jubilation à Bujumbura. Les femmes enlèvent leur pagne et dansent. Les manifestants scandent la victoire conquise de manière héroïque. Le nouvel homme fort, le général Godefroid Niyombare, lut un discours à la télé comme un enfant. Très rapidement, on remarque que l’officier n’a ni charisme, ni aura pour être « Quelqu’un de la situation ». Les loyalistes refusent d’obtempérer. Ça barde de nouveau. Les manifestants déchantent. Tout le monde est retranché dans sa maison. Attention ! Quand les militaires se battent – il faut éviter d’être une victime collatérale, on nous dit souvent au moment de la pagaille. Les hommes du Président déjouent le complot. Nkurunziza rentre tranquillement dans son palais présidentiel et reprend service. Les conspirateurs fuient comme des « chiens » la queue entre les pattes. Certains quittent le jour même le pays par craintes des représailles. D’autres comploteurs sont liquidés ou capturés, jetés dans des lugubres geôles. Le président Nkurunziza se bombe le torse. Il convoque ses services à la présidence. Les ministres, agents du renseignement et autres s’agrippent au chef. Ce dernier les tire aux oreilles comme des gamins turbulents. Ils répondent par : un oui «  Chef ».

Comme si de rien était, le lendemain, le président Nkurunziza poursuit sa tournée nationale dans le cadre de la campagne électorale à laquelle il est candidat, nous l’avions déjà dit, pour un troisième mandat. Cette arrogance inacceptable du tout puissant président a occasionné la montée en fièvre du  peuple burundais. Celui-ci est descendu encore dans la rue. Sans doute, les Burundais se sont sentis roulés dans la pâte à farine. En attendant la tenue des élections au Burundi, la question est de savoir : jusqu’où ira Pierre Nkurunziza ?