Exclusif : «JE NE SUIS PAS UNE FICTION» nous déclare le panda !

Moi, Yun Meng, panda né en exil au zoo de Beauval et mangeur de bambou, je finis par me poser des questions sur moi-même … au moins autant que les animaux humains qui me rendent quotidiennement visite. Qui suis-je? Et vous? Où vais-je? Et vous? Selon que vous serez informés ou non, vous ne vous situerez pas dans le monde de la même manière.

Etre ou ne pas être, telle est la question quasi shakespearienne que je suis en droit de me poser. Et de même on peut s’interroger sur tout ce qu’on nous laisse plus ou moins voir et entendre. Cela marche ensemble, sur deux pattes, voyez-vous.

Je préfère le bambou à la banane

Y a pas à dire : à force d’écouter les leaders de la planète arranger la réalité à leur avantage, ça m’agace, ça me chatouille et ça me gratouille. Je suis un panda : pas un âne, ce confrère souvent présenté comme un niais (mais je n’ai pas eu l’occasion de vérifier l’information). On ne me fera, en tout cas, jamais prendre une banane pour un bambou, même en la maquillant comme une voiture volée.

Parfois, j’en suis tout de même à me demander si j’existe vraiment ou si je ne suis qu’une fiction. Pour certains beaux esprits je suis une curiosité touristique, pour d’autres : un enjeu diplomatique entre Chine et Occident. Pour les enfants : je suis un jouet vivant et pour les scientifiques : un objet d’étude.

La réalité n’est pas une fable

Vous voyez ce que je veux dire ou bien faut que je vous explique, hmmm ?…

… Bon… alors j’explique, comme Tarzan à Jane : MOI panda, VOUS lectrices et lecteurs. Et entre nos deux univers il y a qui ? Les journalistes ! Yes ! Ils et elles sont là pour remettre les pendules à l’heure. Et, on peut le dire : ils et elles sont utiles parce que, pendant ce temps-là, à force de nous raconter des fables (sans morale) les puissants de la Planète Bleue finiraient même par croire ce qu’ils affirment.

Une cuisine à toutes les sauces

Du coup, nos chefs suprêmes tendent à réduire, pour prendre un exemple illustre, le panda à une attraction de zoo, comme je le supputais plus haut. Et ils ne se gênent pas pour accommoder cette manière de procéder à toutes les sauces (drôle de cuisine), selon leurs intérêts immédiats, à tous propos : l’économie, la politique, les tensions internationales afin de mieux manipuler les opinions. (Je ne sais pas s’ils influent sur le résultat du Loto… mais je finis par avoir des doutes CAR… je ne gagne jamais !)

Le vieux poilu avait raison

Museler la presse permet à leurs fictions successives de prospérer et de faire office de réalité. Soit par la fascination des masses, soit par la contrainte, ceux à qui on laisse la bride sur le cou contribuent à « une diminution de la Civilisation » comme l’écrivait un autre, au moins aussi poilu que moi : ce bon vieux Victor Hugo dans « Les Misérables ».

En attendant – croyez-moi – je ne suis pas une fiction et suis bien là, ici et maintenant, pour commenter le monde grâce aux relais des médias. Cela, au moins, c’est sûr. Le panda sait, le panda ressent et le panda dit, le panda discute, le panda « point ne se dédit », nom d’un bambou!

Crédit : Sylvie Howlett

Yuan Meng

(Traduction de Denis PERRIN)