
République Du Congo : Kabila a-t-il franchi le Rubicon ?
Jules César l’avait fait, en lançant son fameux «Alea jacta est», c’est-à-dire les «dés sont jetés». Ou la «ligne rouge est franchie». Il l’a fait contre son rival au pouvoir, Pompée. Kabila l’a fait à sa manière, jeudi 19 juillet, devant les deux chambres du Parlement réunies, à Kinshasa. Contre son rival, le peuple. Mais en usant d’une telle sournoiserie que son «intention de continuer à usurper le pouvoir» ne pouvait être lue qu’entre les lignes. Quoi qu’il en soit, il n’a pas moins franchi le Rubicon.
Qu’on y revienne, brièvement, pour essayer de débrouiller l’écheveau. Et y voir un peu plus clair. Propulsé au sommet de l’Etat, à la mort de son père Laurent Kabila, assassiné en 2001, le fils n’y comprend rien. Il tombe des nues, lui qui n’a aucun autre bout d’éducation que le maniement de la kalachnikov. Mais, en Afrique, on retient en référence – comme une bonne justification – l’exemple biblique de David qui, de petit berger, est devenu un grand roi historique.
Le jeune Kabila en quête de repère
Agé de 30 ans, le jeune homme Kabila y ajoute-t-il foi. Et se met à apprendre comment devenir, plutôt, un «prince machiavélique». Et non un David, l’élu du Ciel. Sur la base, essentiellement, de cette leçon de Nicolas Machiavel : «Il y a plus de sécurité à être craint qu’à être aimé, si l’on doit renoncer à l’un des deux».
Et, comme tous les dictateurs africains (Sékou Touré – le Guinéen, Mengistu – l’Ethiopien, Mobutu – le Congolais, Idi Amin – l’Ougandais…). Il se complaît donc à tuer, sans état d’âme, ainsi qu’à siphonner les deniers publics afin de jouir de la toute-puissance de l’argent. Il fait effectivement peur au peuple autant qu’il assujettit son entourage. Des personnes bien instruites, réduites en valet, obéissant au doigt et à l’œil du maître. Le monde à l’envers !
Des évêques tournés en bourrique
Comme tous les dictateurs, il contracte, inconsciemment, la schizophrénie. En dehors des limites du «monde normal», il se crée un monde propre à lui, où la première réalité repose sur la confusion entre le droit positif (lois, coutumes, usages, etc.) et le droit naturel (le droit du plus fort ou la loi de la jungle, l’ordre établi par Dieu, etc.)
Ainsi se croit-il revêtu des droits divins. De ce fait, il se dit, un jour : “La RD Congo c’est moi, et moi seul suis en capacité de la diriger…“. D’où la conception de tous les tripatouillages et leur stricte application : amendement rétrograde de la Constitution (présidentielle à tour unique), mensonges éhontés, accompagnés de toutes sortes de tricheries, etc. Dans l‘unique dessein de se maintenir au pouvoir.
Il y va de l’ADN de tous les dictateurs. Les mensonges répétés constituent leur arme de prédilection, selon le principe de Joseph Goebbels, ministre de propagande d’Hitler, qui affirmait : «Un mensonge répété mille fois se transforme en vérité». Partant, Kabila a réussi, par le mensonge, à mener tout le monde en bateau. Même les évêques de l’Eglise Catholique. Tournés en bourrique !
Et derrière eux, le Pape François en personne. En témoignent tous les deals conclus pour une transition politique paisible, notamment le fameux Accord de la Saint-Sylvestre, signé le 31 décembre 2016, au soir. Sous l’égide de l’Eglise de Rome.
Que restait-il de ce dernier accord (sans compter les élections truquées ; signatures, promesses et engagements non tenus) ? Un accord qui avait mobilisé toutes les ressources intellectuelles et spirituelles (à travers prières et jeûnes) des évêques, en vue de prendre le meilleur sur tous les arguments insidieux du camp présidentiel.
Ce fut, en quelque sorte, «le Combat entre le Bien et le Mal». Meurtris pendant plus d’un demi-siècle, et estimant qu’ils en étaient ainsi au bout du tunnel, les Congolais l’ont même appris par cœur. Espoirs douchés !
Commençons à compter à rebours
Car, depuis, aucun des points essentiels de son ossature n’a été effleurés. Annoncée avec roulement de tambour, l’adresse «présidentielle», du 19 juillet, à travers laquelle le peuple attendait un mot là-dessus, a été un joli coup d’enfumage. A quinze jours (du 25 juillet au 8 août prochain), période dédiée au dépôt des candidatures aux prochaines élections, le 23 décembre prochain, personne ne sait si le «président hors mandat» sera sur la ligne de départ. En dépit de la Constitution qui lui interdit l’exercice d’un troisième mandat.
L’assainissement du climat politique, passant par la libération des prisonniers politiques, ainsi que par le retour au pays des exilés… ont été passés à la trappe. Avec soin.
En tout et pour tout, on se retrouve, aujourd’hui, à la case départ. Qui a pour nom «usine à gaz». La dernière tuyauterie de celle-ci a été posée, jeudi 19 juillet, dans laquelle circule plutôt le sang bouillant du peuple. A bout de patience. Le sang de la révolte. Scène déjà démontrée à travers les marches des chrétiens réprimées dans le sang. «Sang des martyrs qui ne sèche point sans vengeance».
Le régime dictatorial de Mobutu l’a expérimenté. Sonnant le glas de sa propre existence, à travers le massacre d’étudiants, au campus de Lubumbashi (sud-est), en mai 1990.
Tous les signes, dans ce parallélisme, sont réunis. Bien visibles. Commençons donc à compter à rebours. Et à conclure avec Paul Valery dans cette réflexion interrogative : «L’expérience du passé sert-elle à vivre le présent et à construire l’avenir ?».
En franchissant le Rubicon contre le peuple, Kabila et ses affidés ont répondu, malheureusement, par la négative. Ouvrant la porte à toutes les contingences. Dans les circonstances présentes, on est en droit de penser que les élections n’auront pas lieu. Et, si, par extraordinaire, elles ont lieu, elles ne porteront pas une solution attendue, mais plutôt un «problème plus corsé». Redouté.
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Alain de Monéys qui sait qu’il va mourir demande aux gens qui l’assaillent de le fusiller. Mais il essuie un refus catégorique. Accéder à cette doléance équivaudrait à abréger les souffrances du supplicié et à empêcher ceux qui se prennent pour des justiciers d’assouvir leur vengeance contre la Prusse qui a tué beaucoup de Français. Ce serait également priver les gens du plaisir qu’ils éprouvent (l’espace d’un instant) à exercer le pouvoir absolu des maîtres ayant droit de vie ou de mort sur leurs sujets. Aussi, use-t-on fièrement de coups de poings, d’aiguillons et de pieux pour l’élimination du « Prussien ». Ces personnes qui ne savent pas encore qu’elles sont des assassins, ressentent une joie jubilatoire à l’idée de défendre la France et son Empereur. Piétiné, Monéys qui traîne une « tête comme un globe de sang » succombe sous les coups de ses assassins. Alors qu’il gît inerte, la foule continue de le battre. Le « Prussien » est certes mort, mais il faut maintenant détruire son corps pour que l’anéantissement soit total et pour qu’il ne puisse jamais reposer en paix. Un ennemi ne mérite pas de vivre, encore moins d’avoir une sépulture. Le cadavre est tantôt traîné sur le dos, tantôt face contre le sol, la tête ricochant sur le chemin. La mort physique est ainsi redoublée d’une mort symbolique dont la cristallisation induit la destruction intégrale ou partielle du corps. Aucun souvenir de l’être exécré ne devrait subsister parmi les vivants. La dévastation des traits de la victime, les offenses et les supplices qu’on lui fait subir, valent déchéance de son humanité. Ainsi, on jette le cadavre sur les pierres comme s’il s’agissait d’une bête inanimée n’inspirant plus aucune compassion. Aussi, une dizaine de personnes déclenchent-elles le massacre ultime. Après avoir amassé du papier et de la paille, elles en font un bûcher sur lequel elles placent la dépouille de Monéys. On se presse alors pour attiser le feu. Nombreux sont les gens qui prennent plaisir à remuer les restes carbonisés de la victime. Certains même s’amusent à en extraire des tisons pour allumer leur cigarette. On se gausse du reste « d’avoir fait griller un fameux cochon ». Ce crime commis par ceux qui pensent agir en justiciers, est conçu comme un juste châtiment. Les meurtriers agissant en toute conscience, pensant bien faire. Exultant de joie, ils sont persuadés de leur bonne action en faveur de la France et de l’Empereur en danger. Cette mise à mort publique, bien assumée, est mue en réalité, principalement par des ressorts politiques et non pas psychologiques ou pathologiques, comme on aurait tendance à le croire. A peine quelques heures après ce forfait, les gendarmes arrivent pour mener l’enquête. Quand il fut établi qu’Alain de Monéys était un Français et qu’il n’avait aucun lien avec la Prusse, on arrêta les meurtriers qui furent, après leur emprisonnement, condamnés à la peine capitale et guillotinés.
Le lecteur averti saura que l’histoire dont je viens de rappeler les péripéties vient d’être revécue en Kabylie, presque dans les mêmes termes. Le crime de Hautefaye entre en résonance avec celui de Larbaâ Nath Irathen survenu le 11 août 2021. Cela soit dit en passant, le hasard a voulu que les deux forfaits, séparés par un siècle et demi d’intervalle, se fussent déroulés au mois d’août. Au-delà de la différence de culture et d’époque qui eût pu constituer une barrière, ces crimes survenus respectivement en Dordogne et en Kabylie, présentent des traits communs. Les spécialistes de la foule ont, du reste déterminé des lois régissant les comportements collectifs. Gustave Le Bon, cerne bien la question lorsqu’il affirme que la foule criminelle se forme généralement sur la base d’une suggestion puissante. Les personnes qui se mettent à tuer sont convaincues, explique-t-il, qu’elles ont obéi à un devoir, c’est tout le contraire du criminel ordinaire qui agit de son propre gré.
En Kabylie, en proie à de gigantesques incendies, tous les éléments concouraient pour accréditer l’idée que les feux ont été causés par des actes volontaires. La communication du gouvernement, fort anxiogène, avait du reste distillé l’information selon laquelle les incendies sont d’origine criminelle. De ce fait, conditionnée, la population n’attendait que de lyncher les pyromanes au cas où elle parviendrait à mettre la main dessus. La puissante suggestion dont parle Le Bon est donc actée. Elle est même accentuée par le comportement de la police qui embarque à bord de l’un de ses fourgons un jeune homme originaire de Meliana, ville située hors de la Kabylie. Si la police l’a arrêté, c’est qu’il a été pris en flagrant délit. En tous les cas, la nouvelle se propage comme une traînée de poudre, « on a attrapé un pyromane !» La personne qui va incarner le rôle de Monéys est désormais Djamel Bensmaïl, un hirakiste, de surcroît artiste, qui s’était porté volontaire pour aider à éteindre les feux. Certes, comparaison n’est pas raison, mais il est intéressant de retrouver dans l’événement récent ce que le passé lui a déjà réservé. Mon propos n’est pas d’affirmer que l’histoire est répétitive, mais d’en souligner les écarts. Ce qui différencie le crime de Larbâa Nath Irathen de celui de Hautefaye, réside dans son caractère préfabriqué : Djamel Bensmaïl fut livré à la foule par la police. Ce dernier se serait, d’après des sources policières, mis sous la protection d’une patrouille de police après qu’il a été accusé par certains villageois de pyromanie. Embarqué, Djamel est emmené au commissariat de police dont le siège jouxte la place où s’est amassée une foule nombreuse, qui plus est, chauffée à blanc par la chaleur des incendies et les informations que font circuler les autorités à ce sujet. Au lieu d’éviter tout ce qui peut nuire à la sécurité de leur protégé, les policiers garent leur véhicule au milieu de l’attroupement. Ils ne s’avisent pas d’user au préalable de leurs talkies-walkies pour s’enquérir de l’unité de police la plus susceptible d’accueillir Djamel dans les meilleures conditions possibles. Ainsi, sitôt le véhicule immobilisé parmi la multitude, il est pris d’assaut par des gens déchaînés. C’est à ce niveau qu’interviennent les smartphones inconnus du temps de Monéys. Car les vidéos postées sur les réseaux sociaux fournissent les détails de la molestation. Après que les agents de police ont cédé, Djamel est frappé et battu jusque même à l’intérieur du véhicule de police. La victime est ensuite poussée vers la sortie où elle est rouée de coups répétés et nourris. Ballotté entre de nombreuses mains, son corps meurtri est traîné sur la place avant d’être brûlé.
L’assassinat de Djamel Bensmaïl marque ainsi le passage de la foule intelligente à la foule meurtrière. Tout se passe comme si le crime de Larbâa Nath Irathen survenait pour gommer d’un trait les foules intelligentes et pacifiques du Hirak qui n’avaient eu de cesse, depuis maintenant presque trois ans ,d’ébranler les assises du régime. En outre, sur un registre plus sécuritaire, les services algériens chargés de l’ordre public semblent ignorer les enjeux criminologiques dès lors qu’ils se permettent de faire l’économie d’une anticipation des conséquences qui découleraient du fait de livrer en pâture à la foule une personne qu’ils sont censés protéger. Pourtant, l’histoire de Monéys, et il en existe probablement d’autres, fait partie d’un corpus de criminologie devenu classique. N’empêche, si l’on veut voir par une sorte de grossissement comment prend fin l’histoire de Djamel en comparaison à celle de Monéys, le moins que l’on puisse dire est qu’elle s’achève en queue de poisson. Les assassins de Djamel dit la version officielle ne seraient pas les véritables assassins. La main qui les a armés, serait celle du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK), lequel aurait été appuyé par le Maroc et Israël ! Ainsi, même la guerre avec l’ennemi trahit-elle un aspect fictif puisque le Maroc et Israël réunis ne font pas la Prusse. Il est évident qu’au moment des faits, l’Algérie ne faisait pas la guerre au Maroc, pas plus que le MAK ne prenait les armes contre lui-même.
Larbi Graïne
Journaliste algérien établi en France
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/dans Afrique, Chroniques, Tribune Libre /par Larbi Graine« Les mesures du 25 juillet » est l’euphémisme qu’ont préféré utiliser certains titres de la presse tunisienne pour qualifier ce putsch contre la constitution du pays. Tout dans cette mise en scène qui a entouré l’intervention présidentielle, rappelle la déloyauté et les tonalités autoritaires dont le régime algérien s’est fait une spécialité. Grandiloquence dans le propos, habits de scène faits de casques et de bottes avec à la clé l’engagement à respecter la constitution…
Pourtant, Kaïs n’est pas Bouteflika. Il en est même l’antithèse. Le premier a été élu et le second a été coopté par l’armée. N’empêche, les différences entre les deux personnages sont encore plus importantes que les similitudes.
Quant à la comparaison des régimes des deux pays respectifs, il est à se demander, au-delà de l’apparente césure entre un système formaté par une révolution populaire et un système militariste rigide, s’ils n’ont pas en commun de subir, malgré tout, le diktat de l’État profond. Qu’on se souvienne des circonstances dans lesquelles l’actuel locataire du palais de Carthage fut élu. Toujours est-il, quand on voit comment la démocratie est malmenée sur les terres mêmes qui l’ont vue naître et grandir, il est permis de se dire que la démocratie nord-africaine, à peu près la seule dans la région qui ait pu atteindre un tel niveau, est, peut-être, en train d’imiter les défauts de ses devancières occidentales, étant donné qu’il est plus facile de mimer les travers que les qualités. En cette époque d’incertitude perpétuelle, jamais la criminalisation de la protestation politique et son corollaire, la surveillance intégrale des citoyens, n’ont trouvé meilleur alibi que le terrorisme. Avec l’affaire Pegasus, on se surprend à penser que finalement, si petit que puisse être un pays, si misérable que puisse être son économie, il est susceptible de développer un gigantisme ombrageux et monstrueux pour peu qu’il ait assez d’argent pour acquérir les nouvelles technologies de dernier cri .
Mais que sait-on réellement de l’activisme souterrain des grandes puissances ? La digression étant faite, revenons à la Tunisie. Mais il y a plus à dire sur la régression de l’islamisme que ce qui peut se dire de la violation par Kaïs Saïed de la constitution. L’argument massue en faveur de la politique du coup de pied dans la fourmilière, est celui qui consiste à mettre en avant le devoir moral de combattre la corruption. Eh quoi ? L’éradication de la gabegie, des malversations, du népotisme et l’instauration de la justice sociale, n’étaient-elles pas la raison d’être du parti islamiste Ennahdha? Les islamistes des places de Tunis, Alger et Rabat qui se prenaient pour le centre du monde, sont désormais rappelés à leur condition de mortels. Leur parcours n’est pas sans rappeler celui des communistes. Comme quoi, les utopistes, qu’ils soient laïques ou religieux, deviennent des gens des plus ordinaires dès lors qu’ils se diluent dans la nomenklatura. Il ne subsiste de leur ancienne vie que des signes qui font ambiance, le voile pour les uns, le foulard rouge pour les autres. Même s’il survit socialement, l’islamisme a cessé pourtant d’être un projet d’État. Il se réinvente en dehors de ses circuits traditionnels en investissant de plus en plus des individualités qui expriment des opinions divergentes, se conformant ainsi à une certaine vision « démocratique », disons plurielle de la société. Les réseaux sociaux, du reste, relaient ces voix multiples. Cette évolution confirme, si besoin est, que l’islamisme, pris dans son acception pragmatique (loin de ses penchants consuméristes), est une stratégie d’appropriation de la modernité. C’est pourquoi, l’élan putschiste tunisien me paraît d’autant plus injustifié qu’il vise un mouvement rongé par la déliquescence et condamné à la chute.
Larbi Graïne
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Législatives en Algérie : Abdelkader et le degré zéro de la politique
/dans Afrique, Chroniques, Tribune Libre /par Larbi GraineMême le rafistolage des chiffres n’a pu cacher le fait que les « vainqueurs » des législatives (le Front de libération national – FLN, islamistes-maison et le Rassemblement national démocratique RND réunis) sont d’un poids politique infiniment infinitésimal, et pour tout dire : nul. C’est cette nullité paroxystique que le chef de l’État entend assumer. Ainsi, d’une manière officielle, Monsieur Abdelmadjid Tebboune a fait savoir, le jour même de la tenue du scrutin que le taux de participation ne l’intéressait pas. Autrement dit, les élections seront validées dussent-elles provoquer des fous rires. Un simple calcul basé sur les résultats définitifs publiés dans le Journal officiel, donne les pourcentages suivants : Le FLN qui soi-disant a remporté les élections, n’a pu décrocher que 1.18% des voix, les islamistes du Mouvement de la société pour la paix (HMS), 0.85% et le Rassemblement national démocratique (RND), 0.81 %.
Bienvenu dans le monde à l’envers ! On a un pouvoir schizophrène qui, lui-même, met à nu la démocratie de façade. C’est la folie du pouvoir, une maladie dont seul Tebboune serait, dit-on, atteint. Dans un pamphlet publié sur sa page Facebook, Noureddine Boukrouh, ex ministre de Bouteflika a suggéré que le chef de l’État devrait être interné dans un asile psychiatrique. Sous le titre « Ce fou de Tebboune », le post a terriblement fait sensation sur les réseaux sociaux.
Connu pour être proche des services de renseignements-aile de l’ex DRS [Département du renseignement et de la sécurité], cet ex ministre n’a pas été inquiété alors que des activistes du Hirak ont été jetés en prison pour moins que rien. Mon propos n’est pas de souhaiter la prison aux politiques ou d’exiger des sanctions à leur encontre, ce serait une atteinte à la liberté d’expression. Toujours est-il que ce n’est pas Boukrouh qui va être emprisonné mais Nordine Aït Hamouda. Tout porte à croire que l’opération a été montée dans le cadre d’une guerre des services. Aït Hamouda aurait été attiré sur le plateau de Hayat TV dans un guet-apens. Ex député, Aït Hamouda est le fils du colonel Amirouche, maquisard kabyle tué par l’armée française, célèbre dans toute l’Algérie. Les hirakistes, des quatre coins du pays se réclament d’ailleurs de lui. L’un de leur slogan est « Nous sommes les enfants d’Amirouche, nous ne ferons pas marche arrière ». Acquis aux idées d’un courant berbériste non consensuel, on aurait fait dire, haut et fort, à Aït Hamouda, ce qu’on pressentait qu’il serait capable de dire dans un débat à forte portée idéologique : l’Histoire en l’occurrence. C’est, du reste, avec fougue qu’il dénonça comme « traîtres » Houari Boumediene, ancien chef de l’État, Messali Hadj, le père du nationalisme algérien et l’émir Abdelkader, icône de la résistance algérienne à l’occupation française lors de ses débuts. Toutes ces personnalités vitupérées par Aït Hamouda appartiennent au courant arabo-islamiste. Arrêté et mis sous mandat de dépôt, le fils du colonel Amirouche est accusé d’ « atteinte aux symboles de l’État et de la révolution », « atteinte à un ancien président de la République », « atteinte à l’unité nationale », « incitation à la haine et discrimination raciale ». Toutes les voix sensées ont appelé à la libération de l’ex député arguant que l’affaire devrait être recadrée par les historiens. Oubliés donc les projectiles tirés sur Tebboune. Ainsi, ce dernier est gommé par un ancien chef d’État. A défaut de débattre des problèmes du présent, les Algériens sont ainsi conviés à s’occuper du passé.Il est utile de souligner que ce n’est pas la première fois qu’une personnalité historique est la cible de calomnies. Sous Bouteflika, Messali Hadj a été également dénoncé comme « traître » par un ex chef d’un parti berbériste. Plus près de nous, en 2020, c’est Abane Ramdane, un des principaux dirigeants du FLN historique, qui a fait l’objet d’une accusation de traîtrise de la part d’un fonctionnaire arabophone exerçant au niveau de l’administration de la wilaya (département) de M’sila. En outre, de son vivant, Ben Bella avait estimé que le congrès de la Soummam, qui devait organiser la révolution algérienne et dont Abane fut l’architecte, avait été une « trahison ». Dirigeant d’origine kabyle, partisan de l’éviction des militaires de la scène politique, Abane a été également célébré par les hirakistes qui se sont reconnus dans son combat.
Le débat sur l’histoire : un débat culturel
Force est de constater que ce débat sur l’Histoire renvoie à un conflit culturel dont les protagonistes ne sont autres que les élites politiques arabistes et berbéristes. Chacun de ces deux camps voit dans l’histoire de l’Algérie une histoire habitée par une succession de traîtres quoique différents selon que l’on se situe d’un côté ou de l’autre. Aussi, depuis la présence romaine, la figure de la traîtrise est toujours liée à un ancien colonisateur. c’est pourquoi d’aucuns diront que l’aguellid (roi) Massinissa fut le « chien » de Rome. L’historien et anthropologue Alain Mahé a bien cerné le problème lorsqu’il écrit que « la singularité de ces affrontements culturels [entre militants arabistes et militants berbéristes] réside dans le fait que les militants d’une cause ne parviennent à flétrir la cause adverse qu’en faisant intervenir un élément tiers, en l’occurrence un conquérant ou un colonisateur. [1]». Le discours historique des berbéristes « conduit implicitement à l’équation : arabe = colonisé, mais il en va de même dans les représentations qu’entretiennent les populations arabophones sur l’identité berbère.[2] » Mais ces derniers propos sont à relativiser vu que le Hirak qui est lui même un phénomène culturel, a fait évoluer les choses.
Un déluge de répression
Tout ce tintamarre fait autour de l’émir Abdelkader survient sur fond d’un déluge de répression visant les marches, les partis, les associations, les militants du Hirak, du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK) et les autonomistes. L’Algérie n’est pas loin d’atteindre 400 prisonniers politiques. Même Fethi Gheras, chef de file du MDS, héritier du communisme algérien, s’est vu arrêté à son domicile. Cette opération spectaculaire vise à semer la terreur dans la population. Ce n’est pas que le multipartisme soit menacé, c’est qu’il n’existe pas. Mêmes divisés en pro et anti-Tebboune, les généraux algériens, semblent penser qu’ils sont en mesure de réduire le Hirak et neutraliser le MAK en Kabylie, et ce, peut-être en favorisant les autonomistes avant de se retourner contre eux. L’accusation de terrorisme qui vise le mouvement indépendantiste ne peut s’expliquer pour le moment que de cette façon.
[1] Alain Mahé, Histoire de la Grande Kabylie, XIXe-XXe siècles. Anthropologie historique du lien social dans les communautés villageoises, Bouchene, Paris, 2001, pp. 478-479.
[2] Ibid.
Larbi Graïne
Journaliste algérien établi en France
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De l’usage de la politique dégénérative en Algérie
/dans Afrique, Chroniques, Tribune Libre /par Larbi GraineImposé par le commandement militaire dont les principaux représentants sont des gérontocrates, Tebboune perpétue l’impasse plus qu’il ne l’a résout. Et ce n’est pas un hasard si le mouvement anti-régime s’est donné pour nom « Hirak », qui signifie étymologiquement « mise en mouvement ». On a ainsi, d’un côté, une classe dirigeante moribonde, boiteuse et claudicante, qui, férocement se dispute la rente pétrolière, et de l’autre un peuple de marcheurs impénitents prêts à en découdre.
C’est peu dire que le régime algérien est un régime décadent. Bâti sur l’exclusion sociale, il est l’adepte d’une politique dégénérative ayant pour postulat la dépossession de tout ce qui constitue l’identité politique, culturelle et sociale des différents acteurs sociaux. De cette politique, les généraux ont en fait un instrument stratégique du processus de déclin économique, de décomposition institutionnelle et du dépérissement social. L’élaboration de cette politique est dominée par les stéréotypes qui distribuent aux uns et aux autres les bons et les mauvais points, décrétant ainsi qui doit vivre et qui doit mourir. Ainsi, le Haut conseil de sécurité, en violation de la constitution de 2020, a classé deux mouvements politiques -Rachad et le MAK – comme organisations « terroristes ». Le mouvement associatif n’a pas échappé à la vindicte du gouvernement. Implantée dans un quartier de la capitale, l’association SOS culture Bab El Oued, s’est vue accuser de financement étranger alors que ses dirigeants ont été qualifiés de « criminels ».
En réalité, c’est le soutien actif de cette association au mouvement populaire qui lui a valu les foudres des autorités. Non moins grave, a été la procédure judiciaire initiée par le ministère de l’Intérieur pour dissoudre le Rassemblement action jeunesse (RAJ), une association qui n’a eu de cesse d’œuvrer pour la consolidation du Hirak. Ces actions appuyées par des arrestations de militants et d’activistes ainsi que de journalistes ont préludé à la répression massive des manifestations du vendredi et du mardi habituellement animées par les étudiants. Les hirakistes se sont cependant distingués par un pacifisme sans faille, refusant de verser dans la violence alors même que l’occasion leur a été offerte. Il en est résulté que les rues d’Alger s’emplissent chaque vendredi de cars de police aux lieu et place des foules grandioses. Une confrontation avec les forces de l’ordre aurait débouché sur une situation catastrophique qui aurait pu justifier le report ou l’annulation des élections législatives prévues le 12 juin prochain. Ces élections, dont personne ne veut, vont se dérouler si elles venaient à se tenir sur un fond aux teintes sombres. Les populations revendiquent une transition démocratique, jugeant que le parlement sert d’objet ornemental à un système dont le vrai pouvoir est exercé par les généraux.
Ainsi, le pouvoir en place peine à mobiliser l’électorat et à trouver des candidats. Les moins de quarante ans ont été avisés qu’ils pouvaient percevoir la somme de 30 millions de centimes (1800 € environ) en guise de financement de leur campagne. Mais l’attrait du lucre est d’autant plus intéressant que les députés et les sénateurs touchent un traitement « 20 fois supérieur au salaire minimum » selon le mot du politologue Lahouari Addi. N’empêche, des partis sur papier et des personnalités « indépendantes » croient savoir qu’ils ne doivent pas rater la chance de leur vie pour se remplir les poches. On ne peut expliquer autrement les motivations des participationnistes dès lors qu’un minimum d’éthique politique et de rectitude morale auraient incité à l’abstention.
En effet, dans une Algérie où croupissent en prison 180 détenus d’opinion, il ne saurait avoir d’élections démocratiques. Le Hirak, objectivement, est appelé à perdurer pour longtemps…
Larbi Graïne
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