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Nous, les ennemis du terrorisme islamique

Comme tous les français, j’ai été attristée par l’attaque à la préfecture de police de Paris, le jeudi 3 octobre. Mais ma tristesse, peut être, dépasse celle des français, car je suis aussi kurde syrienne. Je me présente toujours comme française d’origine kurde. En Syrie, je n’avais pas le sentiment d’être citoyenne, mais j’en suis devenue en France ; une citoyenne. J’ai deux cœurs, un français et un kurde. Aujourd’hui, mes deux côtés sont brisés.

Dimanche soir, le 6 octobre 2019, j’ai suivi le débat avec les invités au France 5 venus parler du film “Sœurs d’armes” de Caroline Fourest.

J’ai été stressée en écoutant la journaliste Caroline Fourest et l’actrice Amira Casar, en ayant peur qu’ils se trompent au sujet de mon pays. La présence de l’écrivain Patrice Franceschi, auteur de ‘Mourir pour Kobané‘, connu pour son engament pour la cause kurde me rassurait.


En tant de kurde, je sais que les ennemis d’Erdogan ne sont pas les islamistes mais les kurdes. J’ai peur, non seulement pour les kurdes, mais aussi pour les français.


J’étais fière d’écouter ces trois gens formidables, qui mettent en lumière la lutte des femmes kurdes. Pour moi, l’apparence des femmes Peshmerga est un symbole de la destruction de l’État Islamique ; nous savons que les femmes kurdes ont combattu des membres de Daech et le film de Caroline Fourest montre aussi cela.

Donc j’ai eu un sentiment partagé : triste pour la morte de policiers à la préfecture, mais rassurée par l’existence des combattants kurdes et leurs amis français.

Lundi matin, le 6 octobre, les réseaux soucieux étaient saturés par le tweet de Donald Trump qui a décidé le retrait des soldats américains du côté syrien de la frontière avec la Turquie.

En tant de kurde, je sais que les ennemis d’Erdogan ne sont pas les islamistes mais les kurdes. J’ai peur, non seulement pour les kurdes, mais aussi pour les français.

L’expérience de bataille d’Afrine, baptisée “Opération Rameau d’Olivier” par l’armée turque contre les forces kurdes, avait rempli cette zone kurde laïque de comportements religieux islamiques étrangers aux habitants de cette région.


Aujourd’hui, si on laisse à nouveau la Turquie rentrer au Rojava, cela augmentera encore les activités d’État Islamique.


Avant cette bataille, mes amis du Rojava m’ont parlé du mode de vie civile et de l’égalité entre les femmes et les hommes. Ils me poussaient à venir voir sur place cette démocratie incroyable, malgré la guerre et les ennemis de la liberté.

Tout cela s’est écroulé avec l’offensive de l’armée islamique aux ordres d’Erdogan. Cette armée qui considère les kurdes comme des ennemis contrairement aux islamistes intégristes.

Aujourd’hui, si on laisse à nouveau la Turquie rentrer au Rojava, cela augmentera encore les activités d’État Islamique.

Je parlerai un jour du rôle d’Ankara qui soutient les islamistes. En attendant je vous partage le lien d’un film qui vient de paraitre intitulé  “Turquie… La sage-femme qui a créé ISIS” de Shiar Nayyo. Ce film qui explique comment la Turquie a participé activement à la création de l’Etat Islamique.


Je n’arrête pas de me poser la question, plus précisément, depuis l’attentat du 7 janvier 2015 contre Charlie Hebdo : que puis-je faire ?


Mardi matin, j’ai suivi à la télévision l’hommage rendu aux quatre fonctionnaires de la préfecture de police de Paris, tués ce 3 octobre lors de l’attaque perpétrée par Mickaël Harpon.

La révélation de la découverte d’une clé USB appartenant à Mickaël Harpon aggrave la situation. Selon Le Parisien, cette clé contient trois éléments à charge: “des fichiers informatiques avec de nombreuses vidéos de décapitation de Daech”.

En tant que journaliste et écrivaine française et kurde, je me trouve concernée deux fois par cette interconnexion: le terrorisme islamique en Syrie qui touche la France. Je suis consternée par mes deux cœurs qui battent en même temps, le français et le kurde.

Je n’arrête pas de me poser la question, plus précisément, depuis l’attentat du 7 janvier 2015 contre Charlie Hebdo : que puis-je faire ?

Et je pense que je pourrais faire plein de choses. Le rôle que je pourrais jouer, c’est d’expliquer comment nous pouvons libérer les bons musulmans des mauvais, et également sauver l’image de l’Islam des escrocs qui la manipulent !

Le premier point commun que je trouve dans la majorité des tueurs au nom de l’Islam, c’est que ces gens sont nés en Europe et qu’ils ne parlent pas bien la langue arabe, la langue du Coran. Ils ont appris l’Islam radical par des malfaiteurs qui ont leurs agendas politiques. Donc cet Islam, soit-disant djihadiste, n’a rien avoir avec l’Islam que nous l’avons connu et vécu dans les pays arabes.


Nous avons besoin aujourd’hui en France, je pense, de présenter une autre image de l’islam ; une histoire ouverte, tolèrante et libre.


Je parle toujours, comme écrivain, de ma grand-mère kurde musulmane qui m’a inspirée pour écrire mes premiers romans en arabe. Halima était la mère d’un fils communiste ; mon père.

Elle voyait mon père boire de l’alcool et elle priait près de lui en s’adressant au ciel pour protéger son fils. Gamine, je n’avais pas encore trouvé mon chemin. J’ai avoué à ma grand-mère que je suis athée, et en même temps, je l’accompagnais à la mosquée de quartier pendant le mois de Ramadan et je priais avec elle.

Ma grand-mère ne me l’a jamais reprochée, elle m’acceptait comme j’étais en espérant que Dieu m’oriente vers le bon chemin.

Voici un Islam que les tueurs ne connaissent pas, un islam spirituel et tolérant. Je suis née musulmane, d’un père laïque et d’une mère pratiquante, mais j’ai eu la chance de vivre la religion comme une tradition, pas comme une confession sacrée.

Ma mère n’hésitait pas à goûter, par curiosité, le verre de mon père, puis elle demandait à Dieu de la pardonner. Ma mère, ma grand-mère et beaucoup des femmes et d’hommes musulmans voyaient le Dieu comme tolérant, pas comme un gardien de prison, cette image imposée par les escrocs qui appellent à tuer les autres au nom de Dieu !

Grâce à mon éducation, j’ai grandi avec la critique de cette tradition et j’ai échappé à l’enfermement d’un culte éternel. 

Nous avons besoin aujourd’hui en France, je pense, de présenter une autre image de l’islam ; une histoire ouverte, tolèrante et libre.

Je pense énormément aux enfants français de Daech, ceux qui étaient avec leurs parents en Syrie ou en Irak. Ces enfants vont jouer un jour leur rôle en France, c’est pourquoi je me sens responsable de me lutter pour l’avenir, même si le présent est encore noir pour moi et je ne sais pas a qui le tour demain d’être encore assassiné par ce terroriste, mais il ne faut pas baisser les bras, nous avons besoin d’ouvrir un dialogue libre pour arracher les garnis terroristes, car Daech est une tendance cultuelle et moral, et pour la détruire, il ne faut une arme culturelle.

Nous pouvons combattre ce terrorisme en ouvrant les portes aux défenseurs de la liberté: les kurdes en Syrie. Il faut les protéger militairement et politiquement, et aussi communiquer avec “les intellectuels” engagés en faveur de la liberté religieuse culturelle.

La guerre contre Daech est divisée en deux flancs : sur le terrain en Syrie, et en France ; et partout, pour la gagner, il nous faut chacun lutter à sa manière.

Je suis une femme kurde française, mon combat est en France, contre les idées terroristes qui menacent mon pays “Kurdistan” et menacent également le futur de mon pays “France”. Nous, kurdes libres, femmes combattantes, journalistes, écrivains, chercheurs… notre grande responsabilité aujourd’hui est de travailler ensemble. Nous sommes tous des cibles de Daech, et nous sommes tous leurs ennemis.

En Algérie, la gestion des cultes est dans l’impasse

[Par Larbi GRAÏNE]

Algérien d’origine kabyle mais de confession chrétienne, Slimane Bouhafs a été condamné par la Justice algérienne à 5 ans de prison ferme pour « atteinte à l’islam et au prophète Mohamed ». Ces accusations sont basées sur des messages qu’il aurait postés sur Facebook. Ses avocats ont fait appel et le verdict est attendu pour le 6 septembre prochain.

Slimane Bouhafs (Source : siwel.info)

Slimane Bouhafs
(Source : siwel.info)

Ad ṣelliɣ af nbbi lmexttar taqbaylit teswa kter (je traduis du berbère (1), je prie sur le Prophète élu (Mahomet) mais la kabylité est d’un meilleur prix.) (2) Ce blasphème prononcé par un thaumaturge kabyle du XIXe siècle, Cheikh Mohand-ou-Lhoussin, illustre parfaitement la philosophie qui imprègne l’islam kabyle sous l’ère du maraboutisme et du confrérisme. L’islam est alors compris comme une religion de tolérance et de pardon, qui de par cette qualité ne saurait absorber le code de l’honneur adopté en pays kabyle. Mais sous l’impulsion du réformisme musulman d’origine levantine, né en réaction à l’expansionnisme colonial, le mouvement national algérien a combattu d’une manière opiniâtre l’islam traditionnel. Pourtant, la période ayant précédé le réformisme a été jalonnée par de hauts faits d’armes sous la conduite de grands marabouts. Mais, le récit national, très lacunaire sur ce point, attribue la résistance à autre chose que le maraboutisme. Si la mémoire de l’Emir Abdelkader est officiellement célébrée et honorée, on fait tout pour faire oublier ses origines maraboutiques. (3) Ce qui est mis en avant c’est son côté guerrier et chevaleresque et sa stature d’homme d’Etat. (4) De même, on éprouve de la gêne quand il s’agit d’évoquer la révolte kabyle de 1871 à laquelle avait participé le chef de l’ordre confrérique Rahmaniyya, le cheikh Aheddad. En outre, l’évocation de l’insurrection des Ouled Sidi Cheikh, puissante famille maraboutique du Sud-Oranais, est encore perçue comme problématique du fait qu’elle fait référence à une tribu de marabouts. La volonté d’occulter l’islam traditionnel a été imposée au FLN par les Ulémas. L’historiographie algérienne, d’ailleurs, fait débuter l’histoire de l’Algérie le  1er novembre 1954, soit au moment du déclenchement de la guerre d’indépendance. L’Algérie indépendante a, ensuite adopté l’islam comme « religion d’Etat ». Cette formulation est une pure abstraction, car l’Etat y prétend connaître ce qu’est l’islam. Ce dernier n’ayant pas de clergé, il va s’en accaparer pour fabriquer une religion artificielle expurgée de toute spiritualité. Ce qui fera office de clergé est une espèce de cléricature fonctionnarisée disséminée dans les rouages administratifs de l’Etat. Un ministère des Affaires religieuses est requis pour moduler la religion, désormais propriété de l’Etat, et assurer la police des cultes autres que musulmans. C’est alors qu’on assistera à la naissance d’un marketing islamique radiophonique et télévisuel, dont la finalité est de scénariser les rituels religieux.

Alors que l’islam traditionnel s’appuie sur les zaouïas et les écoles coraniques, le néo-islam se développera sur les pupitres d’écoliers, les universités et autres instituts spécialisés, sur les ondes de la radio, de la télévision, les séminaires de la pensée islamique animés par de doctes messieurs rappelés de l’Orient. L’islam est forcé de se couler dans le moule de la République une et indivisible, et gommer toutes ses aspérités jusqu’à devenir une matière irrémédiablement lisse. Le prêche hebdomadaire télévisé sert de modèle pour des milliers de mosquées que compte le pays qui répète à l’envi le discours des imams souvent dépourvus de culture générale. Sans s’attarder sur le drame qui va éclater durant les années 1990, il convient de signaler l’émergence depuis le début des années 2000 d’une nouvelle communauté religieuse extérieure à l’islam : les convertis au christianisme dont Slimane Bouhafs, 49 ans, en est un bel exemple. Sortis du giron du mouvement évangélique, leur nombre qui n’est pas encore estimé en l’absence d’enquêtes officielles ou officieuses, semble tout de même important en Kabylie. D’après des recoupements personnels, dans cette région berbérophone, le mouvement évangélique est en constante progression. Pour l’instant on n’en connait pas la raison précise. Est-ce une réaction au déni identitaire ? aux restrictions des libertés ? Je pense qu’on ne tardera pas à le savoir.

Les convertis au christianisme, une nouvelle donne

Quoi qu’il en soit, l’irruption des convertis sur la scène nationale algérienne est une nouvelle donnée importante. Certes, une tentative d’évangélisation des Algériens durant la colonisation a eu lieu sous l’instigation du Cardinal de Lavigerie, mais elle s’est globalement soldée par un échec. Le peu de convertis qu’avait pu former cette campagne, ont, dès l’indépendance du pays, rejoint la France. Les personnages les plus connus de cette communauté chrétienne aujourd’hui disparue, sont les membres de la famille Amrouche : Jean, Taos et Fadhma, tous écrivains qui ont fait de la revendication de la berbérité l’un de leur leitmotiv. En dehors de cet épisode, l’Algérie n’a pas connu de communauté chrétienne établie sur son sol. Sans remonter à l’Eglise d’Afrique et à Saint-Augustin, on peut trouver trace d’une très petite communauté chrétienne au temps de la dynastie berbéro-musulmane des Hammadides. Mais elle sera décimée au XIIe siècle sous les Almohades.

Le berbère devient officiel, mais la Kabylie continue d’entretenir son particularisme

En gros, la Kabylie est la région d’Algérie la moins infectée par l’islam bureaucratisé de l’Etat. Elle y a échappé grâce au mouvement culturel berbère et à la forte émigration vers l’Europe que connait la région depuis le début du XXe siècle. Avec l’affaire Bouhafs le gouvernement algérien se retrouve dans l’impasse. Si son illégitimité le pousse à rechercher le soutien des populations les plus travaillées par l’islam étatique, il échoue cependant dans sa tentative de mettre un frein aux campagnes d’évangélisation. Force est d’observer que sa loi sur le culte autre que musulman, qu’il a fait adopter en 2006 n’a pas eu l’effet escompté. Pis, la chape de plomb islamiste que les autorités font peser sur le pays est en train de créer une fissure entre la Kabylie et le reste de l’Algérie. Alors qu’il n’y a pas longtemps, la revendication kabyle se limitait à la langue, elle s’ouvre maintenant à la revendication d’un territoire.

Militants du mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK) (Source: Algerie1.com)

Militants du mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK)
(Source: Algerie1.com)

Le Mouvement pour l’Autodétermination de la Kabylie (MAK) est en train de se tailler des fiefs dans certaines localités de cette région, lesquelles entendent ne pas se laisser soumettre à la morale publique imposée dans le pays et à la police des mœurs qui sévit à l’effet d’interdire la consommation d’alcool, les loisirs, etc.Le MAK est en possession d’un projet politique qui ne souffre d’aucune ambiguïté. Il veut l’indépendance de cette région et il possède une politique claire envers les convertis auxquels il promet, – s’il venait à asseoir l’Etat kabyle – un régime de laïcité. En revanche, n’ayant aucun projet politique, en face l’Etat algérien navigue à vue. Actuellement il est occupé à gérer la maladie du chef de l’Etat dont il se plait, suivant un programme savamment orchestré, à en exhiber à la face du monde, l’image horrifiante.

 

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(1) Le berbère (tamazight) a été promu en février 2016 langue officielle en Algérie à côté de l’Arabe.

(2) Mouloud Mammeri, Inna-yas Ccix Muḥend ( Cheikh Mohand a dit), à compte d’auteur, Alger, 1990.

(3) Que cela soit dit en passant, Abdelkader dans son exil à Damas en Syrie, a sauvé des centaines de Chrétiens d’un massacre certain.

(4) D’une certaine manière le nationalisme algérien a repris à son compte le portrait d’Abdelkader tel qu’il a été élaboré par la France coloniale, qui insiste sur les traits nobles et aristocratiques de l’homme par comparaison avec ses comtes et marquis.

 
 
 

Partir rejoindre Daech n’est pas une promenade !

[Par Maha HASSAN] Jeudi 10 mars dernier, deux nouvelles inquiétantes sont tombées le même jour : De la Syrie,  où Daech a exécuté le poète syrien Bachir Alani et son fils Ayas, les accusant d’être des apostats.  Du Royaume-Uni, où 22 000 noms de jihadistes de l’État islamique ont été révélés par la chaîne Sky News, parmi eux au moins 500 Français. Ces renseignements ont obtenus d’un déserteur de Daech, déçu de l’Islam revendiqué et appliqué par l’organisation, qui n’a plus grand chose à voir avec la religion. Ces deux nouvelles ne sont pas très étonnantes. Daech tue tous les jours des personnes en Syrie en les accusant d’apostasie. De même, les infos nous relatent également souvent des cas des français ou d’autres européens qui fuient les islamistes de l’EI, après les avoir rejoints dans un premier temps en Syrie ou en Irak. Si on essaye de lier ces deux nouvelles, on peut alors poser plusieurs questions aux gens qui pensent encore que Daech défend l’Islam : 1. Un poète qui écrit et qui reste discret sur sa pratique de l’Islam, est-il un apostat pour autant ? le poète Bachir Alani est musulman, même si, peut être, il n’est pas pratiquant, mais il n’a jamais déclaré, même à ses amis les plus proches dans la petite société poétique, qu’il ne croit plus en l’Islam. Le page de Bachir sur facebook était pourtant claire, il écrivait des poèmes, il exprimait son attachement à sa ville (Deir ez-Zor), qu’il refusait de quitter malgré la guerre. Il racontait son chagrin d’avoir perdu sa femme et à la fois son contentement de lui avoir trouvé une tombe pour qu’elle puisse reposer dignement, alors que plein de Syriens sont morts et n’ont jamais eu de funérailles décentes. 2. On peut se demander également comment peut-on défendre une réligion (ici l’Islam) en tuant des humains ? Quel est ce combat absurde auquel prennent part de plus en plus de jeunes gens, quittant une vie en Europe et surtout en France pour y participer ? Jusqu’à aujourd’hui, Daech n’a pas combattu contre le régime en Syrie, il ne fait que terroriser des peuples innocents. Le premier problème de ces «rêveurs du jihad»,  c’est qu’ils ne parlent par l’arabe, ils sont très étrangers, loin de cette culture, et grâce à cela c’est très facile d’être manipulé par la propagande de Daech. Le second grand problème est que les gens européens voient les événements en Syrie de loin, par Internet, ils sont victimes des mensonges et lorsqu’ils arrivent là-bas, c’est presque impossible de quitter Daech. L’État Islamique n’est  pas une promenade, une aventure ou une fugue à faire lors de sa crise d’adolescence comme le pense la majorité de ces jeunes gens, surtout les mineurs, ceux qui désespèrent de leur avenir en Europe, tout en espérant que le jihad va changer leur vie. Daech est un piège létal, quand vous tombez dedans, au bout du chemin,  il n’y a que la mort. La mort, non pas pour l’Islam ou pour des raisons d’honneur,  mais pour des mensonges. Et si vraiment quelqu’un, au fond de lui, croit en Dieu, avec un peu de logique, il comprendra que Daech fait n’a rien à voir avec Dieu, ou la religion. Mourir chez Daech ou pour Daech, cela ne sert en aucun cas une cause juste. Et quand vous êtes sur le point de disparaître, il est trop tard pour comprendre et vous ne pouvez que regretter de quitter le vrai combat qu’est la vie. Dites-vous que vous êtes bien plus utiles en vie que mort. Et souvenez-vous qu’il n’est pas de religion et encore moins l’Islam qui va vous encourager à vous sacrifier inutilement ou à tuer des innocents.

Je ne suis pas un arabe

[Par Mourad HAMMAMI]

Je ne suis pas un arabe !

Mes respects pour les vrais arabes ! Pas question de laisser les « cerveaux » du chaos ériger l’islam en une identité. L’Islam est une religion et ne doit en aucun cas être une identité.

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Symboles de l’Islam (source: français.islammessage.com)

Dieu n’est pas arabe !

Dieu n’a pas ordonné d’appliquer un Etat islamique sur Terre !

Dieu n’a pas besoin de défenseurs zélés sournois, hypocrites et violents…

Dieu n’a pas besoin d’avoir des défenseurs zélés et ignorants recrutés parmi la pègre, les repris de justice, les trafiquants, les belliqueux et les sanguinaires.

Dieu a créé la diversité et ses adeptes zélés et hypocrites veulent instaurer le contraire en unifiant le monde en une seule culture, libertaire, violente, fasciste, raciste et dévastatrice.

Je n’accepterai jamais que l’Islam fasse de moi un arabe de fait.

C’est la pus grande arnaque au nom de Dieu et de l’Islam.

Une identité artificielle

Cette violence permanente allant du Maroc jusqu’au fin fond de l’Extrême-Orient s’explique en grande partie par la déperdition identitaire.

C’est sur les décombres des autres civilisations, des autres identités qu’on a greffé une identité artificielle. C’est en écrasant les identités des Berbères, des Kurdes, des Assyriens…que l’on a imposé une autre idéologie, une autre identité et ce par la force et la violence.

Ces peuples depuis l’effacement de leur identité sont comme des organes génétiquement modifiés (OGM). Ils sont dans l’égarement permanent. Cette perte de repères crée des dysfonctionnements et des perturbations psychologiques et sociologiques importantes qui aboutissent à des impasses et à des violences inouïes.

En Iran, qui est pourtant un Etat islamique, l’on enregistre moins de violence et d’égarement. Car tout simplement l’Iran a su comment conserver en partie son identité. On ne peut assimiler l’Islam à une identité… car, dans le sillage de l’Islam exporté, on glisse une culture venue de l’Arabie et de surcroît, une culture rétrograde, figée à 14 siècles en arrière. On ne peut imposer ou inculquer une culture de l’Arabie à des peuples situés à une dizaine de milliers de kms de là.

La Kabylie est connue pour son Islam modéré et équilibré. Car malgré des attaques, cette région a su comment constituer un système de défense pour ne pas céder à l’Islam idéologique, l’Islam dogmatique. Elle accepte l’Islam spirituel, l’Islam tout court.

Pour sauver l’Islam il faudra combattre frontalement l’islamisme

Il est clair que la priorité est à la lutte armée contre ces gens violents et barbares, mais au-delà, si l’on souhaite garantir l’avenir, il faudra bel et bien attaquer le mal dans ses racines. L’une de ses racines est cette dépravation, ce détournement des identités au nom de Dieu et de l’Islam.

Non je ne suis pas un arabe. Je suis musulman et j’assume bien mon islamité. Non jamais je ne considérerai que l’Islam est mon identité. Ni l’Islam ni aucune autre religion ne peuvent constituer une identité. Pour sauver l’Islam il faudra combattre frontalement l’islamisme.

A bon entendeur, salut.

L’Islam et la République : La classe politique et les imams décriés

[Par Larbi GRAÏNE]

Actualité oblige, avec la tuerie de Charlie-Hebdo, la Mairie du XVe arrondissement de Paris a récemment accueilli une conférence sur le thème « l’Islam et la République », organisée par le Forum France-Algérie (FFA) en présence de son président, Farid Yaker.

Edwy Plenel et Ghaleb Bencheikh

Edwy Plenel (source : blogs.mediapart.fr) et Ghaleb Bencheikh (source : algeriepatriotique.com)

A la tribune, deux invités bien connus : il s’agit de Ghaleb Bencheikh, franco-algérien, docteur en sciences qui dirige la conférence mondiale des religions pour la paix et Edwy Plenel, journaliste-essayiste, ancien directeur du quotidien le Monde et cofondateur du journal en ligne Médiapart.
Les deux hommes ont paru s’accorder sur l’essentiel à savoir : la nécessité d’amorcer des réformes profondes à l’effet de renforcer le régime laïque, qui à leurs yeux est le plus à même de garantir l’ensemble des libertés pour tous les Français. Cependant si le premier a axé son intervention sur le culte musulman dont il a dénoncé le mauvais fonctionnement qu’il a attribué du reste à certains imams, le second, quant à lui, a fustigé la gestion de l’Islam par l’Etat français. Plenel est revenu sur la marche des « Beurs » en 1983 pour expliquer, que pour une fois que des Français d’origine algérienne ont manifesté pour l’égalité, c’est-à-dire en faisant valoir des revendications citoyennes, on avait recouru à la manipulation en renvoyant les manifestants à leurs origines. Et l’orateur de rappeler que Pierre Mauroy, alors Premier ministre, avait taxé ce mouvement social de « grèves islamistes » allant jusqu’à proposer « un coin pour faire la prière ».

La haine ne peut être mêlée à l’humour
Développant une idée très rarement entendue en France à propos des caricatures de Mahomet, Edwy Plenel pense que « l’espace public n’est pas là pour offenser les identités, ni les moquer ». « La haine, soutiendra-t-il, ne peut être mêlée à l’humour ». Plenel s’est dit malgré tout fan du « droit à la liberté d’expression et du droit à la transgression ». Il s’en est pris à Manuel Valls à qui il a reproché d’utiliser le terme d’apartheid, inadéquat selon lui, avec la réalité française. C’est le seul point sur lequel il sera taclé par l’autre animateur de la conférence. En effet Bencheikh estime que l’apartheid est « de facto même s’il n’est pas de jure ».

Pour une refondation de la pensée théologique

Analysant l’organisation du culte musulman en France, Ghaleb Bencheikh s’est résolu finalement à lancer un appel pour l’adoption de « la modernité intellectuelle » et de « la refondation de la pensée théologique » non pas par simple « aggiornamento ». Très remonté contre les imams, il a dénoncé l’obséquiosité de certains d’entre eux qui « répondent à des convocations » de la part de l’administration, chose qu’on n’a jamais vu s’appliquer, a-t-il expliqué, aux représentants des religions chrétienne et juive. Soulignant « le naufrage de l’école », Bencheikh a également déploré la « défaite de la pensée et la démission de l’esprit » chez les élites musulmanes.
D’après lui, lors des campagnes électorales, certains imams sont enclins à dérouler le tapis rouge aux hommes politiques alors qu’ils devaient tout simplement les boycotter, estimant que ces derniers ne méritent pas qu’on leur porte tant d’attention.

Les Français et la communauté musulmane : doutes et réalité

[Par Raafat ALOMAR ALGHANIM]

Traduit de l’arabe au français par Emmanuelle Ricard.

Le conflit entre l’Orient et l’Occident est antérieur au christianisme et à l’islam. Il s’agit d’une longue histoire.

Avant l’islam, Rome, se sentant menacée par le royaume de Palmyre gouverné par la reine Zénobie et dont les frontières atteignaient les rives du Bosphore, a rassemblé ses troupes pour le détruire. De même, avant le christianisme, Hannibal a tenté de franchir les Alpes avec des éléphants pour détruire Rome, dans une opération qui reflète un entêtement et une grande force de désespoir.
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A l’issue de l’une des rencontres auxquelles j’ai participé sur France 24, j’ai discuté avec le présentateur sur le pas de la porte et l’un des invités a dit : « en France, on peut douter de l’existence de Dieu mais on ne peut pas dénoncer l’holocauste ». Le présentateur a riposté : « nous avons fait une émission consacrée à l’holocauste dans laquelle nous avons invité des personnes qui le mettaient en doute ».

Avant, comme après cet épisode, j’avais discuté avec un grand nombre de membres de la communauté arabe et musulmane de France, de ceux qui considèrent que tout ce qui circule dans les médias français est prémédité, et pour cette raison j’avais volontairement critiqué le gouvernement français dans les émissions qui ont suivi en disant : « les français nous ont menti » lors d’une intervention sur la révolution syrienne. J’avais alors fait porter aux services de renseignement français la responsabilité du départ et du séjour des combattants en Syrie, et je leur avais demandé de les faire revenir car certains d’entre eux, une fois confrontés à la réalité, veulent revenir, et j’avais demandé que la route du retour ne leur soit pas fermée.

Des regrets exprimés

François Hollande (BERTRAND GUAY / AFP)

François Hollande (BERTRAND GUAY / AFP)

Dans ce contexte, j’avais également condamné la déclaration du Président de la République français François Hollande sur les combattants, dans laquelle il disait : « nous les combattons et nous les combattrons ». Ce que j’ai alors oublié de mentionner sur la chaîne de télévision est qu’une partie de ceux qui adoptent l’idéologie de combat le regrettent lorsqu’ils y sont confrontés. Cette idée a été exprimée par l’intellectuel français Régis Debray : « nous nous sommes impliqués comme des révolutionnaires à cause de notre amour de la littérature fantastique. Nous avons découvert que la réalité était différente ». Les textes invitant au jihad et les Dits du Prophète sur les anges et autres miracles ne sont pas loin de la littérature fantastique.

Les responsabilités des Etats-Unis

Lorsque le collègue Tawfiq Majid qui m’a invité à participer à l’émission «l’événement» pour aborder le thème : « l’Arabie saoudite réveille-t-elle les cellules dormantes ? », le débat a été particulièrement intéressant.

Ben Laden

Ben Laden

J’ai affirmé que les Etats-Unis étaient responsables de la montée du djihadisme car ils avaient développé et renforcé les djihadistes durant la période du conflit contre les Soviétiques en Afghanistan, en collusion avec la famille royale saoudienne. J’ai également affirmé que l’oppression et les expulsions auxquelles sont confrontés les Palestiniens, l’oppression à laquelle sont soumis les ressortissants du monde arabe de la part de gouvernements alliés aux Etats-Unis ont conduit la rue arabe (mais pas tous les Arabes, bien évidemment) à considérer Ben Laden comme un héros et à justifier les actions des djihadistes. J’ai alors cité un propos de Noam Chomsky « les Arabes ont soutenu Ben Laden, non pour ses idées mais à cause de l’injustice des Etat-Unis envers eux », en ajoutant qu’un grand nombre de ceux qui ont soutenu Ben Laden sont bien plus proches de la désobéissance à Dieu que de la religion et de ses enseignements.

J’ai développé ces idées sans être contredit, et lors de mes discussions avec des membres de la communauté musulmane, j’insultais, je discutais, je justifiais l’existence des djihadistes ; et les réponses que j’obtenais n’étaient jamais loin du proverbe « c’est un éléphant, même s’il est rose ».

Mon précédent développement, qui s’appuie sur le point de vue politique et qui a suscité l’intérêt, ne reflète naturellement pas l’intégralité du spectre. En effet, les liens entre le monde musulman et le monde occidental moderne intègrent un grand nombre d’éléments imbriqués et interdépendants, ce qui rend la problématique complexe. Le conflit entre l’Orient et l’Occident est antérieur à l’islam et au christianisme. Avant l’islam, Rome, se sentant menacée par le royaume de Palmyre gouverné par la reine Zénobie dont les frontières atteignaient les rives du Bosphore, a rassemblé ses troupes contre lui. De même, avant le christianisme, Hannibal a tenté de traverser les Alpes avec des éléphants pour détruire Rome, dans une opération qui reflète un entêtement et une grande force de désespoir.

Raafat AlGhanim lors d'une émission sur France24

Raafat Al Ghanim lors d’une émission sur France24

Un autre point, non moins important, est que l’on ne peut omettre ce que j’ai omis volontairement lors de rencontres sur le plateau de France 24, lorsque je m’efforçais de démentir les convictions ancrées dans l’esprit arabe disqualifiant des représentations fondées sur la généralisation aux autres de son propre réel et dont le résultat est que chacun pratique une forme d’oppression et que la vérité est dissimulée. J’avais en effet abordé le volet politique, qui préoccupe les musulmans au détriment du volet idéologique de la civilisation islamique. En effet, celle-ci se trouve encore au stade de l’adolescence politique et intellectuelle contrairement au christianisme et au judaïsme lesquels ont muri et franchi cette étape, ce que montre aujourd’hui le fait que Charlie Hebdo, qui a critiqué toutes les religions, a été attaqué par les seuls musulmans.

L’idéologie islamique en est au stade de l’adolescence

Concernant le volet idéologique que j’avais volontairement omis, il faut préciser que l’idéologie islamique se trouve au stade de son adolescence intellectuelle. Premièrement en raison du faible nombre d’intellectuels et de philosophes dans la civilisation musulmane, dont découle l’absence de critique de la pensée islamique dominante et son maintien sous le joug des préconisateurs de l’islam politique, contrairement au christianisme et au judaïsme qui ont produit un grand nombre d’intellectuels et de philosophes qui ont éclairé le chemin de leurs peuples, comme Spinoza et Voltaire.

Voltaire

Voltaire

Le lecteur ici pourra suggérer de nombreux penseurs arabes, à juste raison, mais, outre leur faible nombre comparativement à l’Occident, ils n’ont pas eu de réel impact dans leur milieu social qui n’a eu de cesse de les refuser depuis la défaite d’Averroès au Maghreb. Lorsque le Calife al-Mutawakkil est arrivé au pouvoir au Proche-Orient, il a combattu les Mu’tazilites qui représentent l’héritage rationnel de la civilisation islamique. En raison du refus des sociétés arabes de leurs intellectuels, on constate qu’un grand nombre d’entre eux a choisi de s’allier avec les dictatures contre le principe de la démocratie dont ils estiment qu’elle ne convient pas à ces peuples.

La deuxième raison est l’absence d’éducation responsable et impliquée dans le développement des sociétés. En effet, l’éducation se limite dans le monde arabe et musulman à glorifier le dictateur. La vie entière est centrée sur ce dictateur qui, lui, se préoccupe de ses plaisirs et de ses affaires personnelles, de son armée, de ses forces de sécurité, et de tous ceux qui s’occupent de sa sécurité et de la sécurité de ce dont il jouit.

Depuis la défaite d’Averroès, l’islam vit une situation de déclin intellectuel, ce qu’a appelé Mohammad Arkoun « le passage de l’âge classique à l’âge scolastique », c’est-à-dire de l’étape de l’effort personnel et de la joute intellectuelle à celle de la répétition mécanique, loin de son époque et ancrée dans le passé.

Après l’attaque terroriste que la revue Charlie Hebdo vient de subir, les interrogations concernant l’idéologie islamique ressurgissent. Dans la cacophonie des voix qui s’élèvent sur ce sujet, une voix arabe s’est distinguée, clamant que les services de renseignement français et le Mossad avaient orchestré cette opération avec pour objectif de ternir l’image de l’islam. Cette voix évite ainsi toute critique de l’islam politique tel qu’il domine actuellement… et peut-être même n’est-elle pas convaincue de ce qu’elle répète. Dans ce contexte, je me souviens avoir discuté avec une personne qui accusait le Mossad et les services de renseignement français d’avoir orchestré l’attaque contre le siège de la revue. Je lui ai alors fait écouter, sur Youtube, ce que prône le wahhabite Mohammad al-Arifi dans lequel il expose la nécessité de tuer tous ceux qui se moquent du prophète Mohammad. Al-Arifi a parlé durant 12 minutes, en citant uniquement des textes musulmans propres à faire naître la ferveur dans le cœur des auditeurs. Après avoir tout écouté, celui qui accusait le Mossad a finalement dit qu’il a été convaincu par le discours d’Al-Arifi.

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