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«Ma famille a dû verser une forte somme d’argent pour me sortir de là»

« Si tu as un passeport Syrien, les pays du monde entier ne te donnent pas de visa, ils pensent que tu es un terroriste ou que tu vas demander l’asile. »

Arrivé en France au début de l’année 2017, Salah Al Ashkar a dû fuir la Syrie à cause des articles et reportages qu’il a effectué durant la révolution. Accueilli à la Maison des journalistes, il a récemment obtenu de l’OFPRA le statut de réfugié politique et aspire aujourd’hui à apprendre le français pour pouvoir à nouveau être journaliste.

Salah est un journaliste Syrien de 30 ans. Il utilise un nom de code depuis le début de la révolution syrienne pour signer ses articles. Né en Syrie, il a été diplômé en finances de l’université d’Alep en 2011. Rien chez Salah ne laisse présager de son parcours. Ses yeux bleus derrière des lunettes, un visage presque enfantin et un ton calme, posé, même lorsqu’il conte la violence du régime qu’il a fui.

Lorsque la révolution syrienne a commencé, il a créé un groupe avec des amis pour décrire la situation et dénoncer les crimes du régime. Ils publiaient leurs articles sur un site internet et sur les réseaux sociaux. « En 2011, alors que je filmais une manifestation de la révolution, j’ai été arrêté par les services secrets syriens. Ils m’ont frappé. Je suis resté en cellule pendant 10 jours. Ils m’ont accusé d’aller à l’encontre des intérêts du pays. Ma famille a dû verser une importante somme d’argent pour me sortir de là. »

En 2012, l’armée de libération syrienne a pris le contrôle d’Alep Est. Salah rejoint cette partie de la ville pour pouvoir continuer à travailler. Il créée un journal, une chaine YouTube et assiste les journalistes étrangers venus filmer la situation. « J’ai aidé un journaliste pour un documentaire diffusé sur TF1 et j’ai travaillé pour l’AFP mais aussi pour Al Jazeera. »

Plus tard, le régime Syrien a conclu un marché avec la Turquie pour que les habitants d’Alep Est puissent quitter la ville avant que l’armée d’Assad ne rentre dans la ville. « J’ai donc quitté Alep pour la Turquie. De là, je me suis rendu à l’ambassade de France d’Istanbul et j’ai obtenu un visa pour la France. »

Salah arrive en France le 12 avril 2017. Il bénéficie de l’aide d’une famille française qui le connait à travers ses articles publiés sur internet. Ils habitent Arras. « Chez eux, j’ai effectué une démarche auprès de la MDJ puis j’ai obtenu une place quelques mois plus tard ».

Aujourd’hui, Salah ne travaille plus.  Une partie de sa famille est restée à Alep, sa sœur est en Turquie. Il espère les revoir un jour. En attendant, le journaliste peut compter sur le soutien des autres Syriens présents à la Maison des journalistes.

Souvenir

Quand je vivais à Alep, j’adorais visiter le château de la ville. C’est une place vraiment célèbre et chaque week end j’y allais pour boire un verre avec mon ami. C’est un endroit particulier que je ne peux pas retrouver autre part dans le monde. Mes amis aussi me manquent parce que quand je suis arrivé en France, je n’avais plus personne. J’ai créé d’autres relations entre temps mais mes amis me manquent toujours.

Je n’ai pas plus de maison aujourd’hui, le régime l’a détruit. Il me reste celle de mes parents. Mais ma maison me manque. Et faire du sport aussi me manque. A l’université je jouais au basket, dans l’équipe de l’école. Je ne suis pas très grand mais je vise bien. J’aimerais rejouer ici mais personne ne fait de basket dans mon entourage. Ils préfèrent le football et d’autres sports. Maintenant j’aimerais aller à la gym pour perdre le poids que j’ai pris en venant ici. Mais j’ai besoin de temps et d’une personne qui me supporterais et dirais : « vas-y, vas y »

Rédigé par Romain Vignaux-Demarquay et Valentine Zeler

Le prince, la métisse et le panda : Les bons contes font les bons comptes !

Moi, Yuan Meng, mangeur de bambou né en exil au zoo de Beauval, je sais maintenant ce qui vous intéresse, vous les gens d’ici et d’ailleurs… même si vous faites mine de nier, vous préférez les contes de fée aux horreurs de vos petits matins pâteux, faits de croissants trop mous et de café réchauffé. Du coup, je crois pouvoir sortir les exilés de leur impasse. Voici comment.

Cela fait un trop long moment que Brigitte Macron, ma marraine présidentielle, n’est pas venue jusqu’à moi, toutes caméras en action et micro branchés, tournés en direction de notre belle aventure commune. C’EST POURQUOI je pense (car le panda pense, ainsi que vous le savez désormais) je pense donc qu’il est urgent de susciter de nouveau de l’intérêt à mon sujet.

Une idée m’est venue en observant simplement le monde : il y a quelques jours (c’était pourtant l’un de ces samedis ensoleillés qui invitent à la promenade) les alentours de mon enclos étaient déserts. Renseignements pris, je découvre alors qu’un prince britannique épousait une starlette américaine et que l’événement avait vidé les rues, les campagnes et les zoos. La planète préférait se faire un plateau-télé plutôt que de venir me voir.

Je suis un métis

Et puis voici qu’on me précise également que la dame qui a décroché le gros lot (gros lot = prince) au loto de l’amour…que la dame, donc, est métisse.

WHAT, WHAT, WHAT ? Par l’effet magique des circonvolutions de mon animal de cerveau, je fais, en une fraction de seconde, le rapprochement avec qui ? Réponse : avec moi, évidemment. Panda noir et blanc, je suis, comme elle, une sorte de métis.

Etant mâle et non femelle – c’est là mon unique différence avec la starlette susnommée – j’ai convoqué la direction du zoo et ordonné ce qui suit : « Trouvez-moi d’urgence une fille de sang royal. Il y en a sûrement ici, au zoo… Ne dit-on pas que le lion est le roi de la jungle ? S’il a procréé, voyez ce que vous pouvez faire ».

Ne te trompe pas de carrosse, camarade !

Contrairement à ce que vous imaginez, la direction du zoo a bien compris le parti à tirer des paillettes et des bons sentiments qui stimulent l’industrie du Kleenex (aux larmes, citoyens !). Elle en a même rajouté à mon argumentation avec des mots choisis : « la starlette dont tu nous causes, notre panda chéri, est en plus une exilée. Elle est forcée de vivre à Londres, si loin d’Hollywood. C’est un peu ton histoire, vois-tu, en gros, en très gros ! Mais en même temps, comme dirait notre Président bien-aimé, notre phare de la pensée disruptive : tout ça c’est un conte de fée… excellent pour nos comptes. Car, pour ce genre d’événement on trouve toujours de l’argent et, bien entendu, on en attire aussi ! »

Morale de l’histoire : l’exil est ta force, camarade… il suffit que tu ne te trompes pas de carrosse… et les financements qui manquent habituellement pour accueillir les exilés comme toi ou moi apparaîtront brusquement, dans un scintillement céleste, COMME PAR MAGIE.

Un conte de fée, te dis-je, nom d’un bambou !

Crédit : Sylvie Howlett

Yuan Meng

(Traduction de Denis PERRIN)

Exilé du paradis, l’écriture devient un refuge et un combat

[Par Lisa Viola ROSSI]

« Un voyage d’un endroit à l’autre, en tant qu’exilé d’abord, en tant que fugitif ensuite, plus tard comme simple observateur ». C’est le voyage d’ « Exilé du paradis », de Jacobo Machover (Lemieux éditeur, 2015) universitaire, écrivain et journaliste cubain né à La Havane en 1954 et exilé en France depuis plus de cinquante ans. L’auteur nous emmène dans le conte de sa vie de dissident, tissée à la fois au périple de sa famille, juive, persécutée par le nazisme, à l’Histoire de son peuple, des cubains, oppressés et exilés, comme lui. Un voyage sans retour où le témoignage autobiographique devient le cœur de ce que Machover lui-même appelle une « littérature d’urgence ».

Une littérature d’urgence, lieu de refuge et appel à la justice. L’écriture, explique l’auteur, « devient un refuge, un endroit situé loin de l’île et, le plus souvent, des grandes maisons d’édition, pour chuchoter, insinuer, ce qu’il leur [aux exilés cubains ndr] est impossible de crier sur la place publique, en espérant qu’un jour ces paroles parviendront à leur public naturel, celui qui pourra peut-être les faire entièrement siennes, et qui leur rendra un minimum de considération et de justice ».

 Une histoire personnelle qui se reflète et s’enlace à l’Histoire commune. Exilé du paradis est structuré en deux parties : la première, est intitulée  « La fuite, l’initiation », et la deuxième, « Les nôtres, in memoriam ». La narration commence dans l’automne 1963. « L’enfant (moi) vient d’arriver à Paris, à la gare de l’Est, après un long voyage et d’inconcevables détours. J’ai traversé un pan de l’Histoire sans m’en rendre compte, entouré de mes parents, Isaac et Rebecca, et de mon frère ainé, Daniel. Pourtant, je suis seul au monde, sans personne à qui me confier, sans aucun endroit auquel me raccrocher. » A partir de là, l’autobiographie de Jacobo Machover se déroule mêlant l’Histoire aux péripéties d’un jeune inquiète, par ailleurs déserteur de l’armée française et passionné par les femmes et par la vie. Le conte se poursuit en illustrant par images éparses le périple familial de l’auteur et coule finalement, dans la deuxième partie du livre, dans un véritable portrait de l’exil. « L’exil est un territoire étrange, sans véritable centre autre que la mémoire », nous dit l’auteur. La mémoire, qui devient le moteur de l’action littéraire de Machover, est dans ce livre cultivée et gravée. Son but, comme l’explicite l’auteur lui-même, est de « conquérir la liberté, celle de mon île, ou, tout du moins, de perpétuer la mémoire de ceux qui en avaient été expulsé : les exilés, comme moi-même ». Puis que les exilés de l’« île maudite », précise l’écrivain, ne sont pas tout à fait comme les autres : « eux [d’autres exilés, d’ailleurs ndr], ils étaient perçus comme des héros qui avaient combattu les dictatures, pas comme nous, les Cubains, qui avions fui la révolution. Inutile d’expliquer quoi que ce soit. Nous, nous n’étions pas légitimes ».

La douleur d’un exil, le véritable, sans adjectifs : « On ne peut pas rajouter d’adjectifs à cette douleur, à cette calamité ». L’exil, « sans aucun espoir de retour », dont le goût Machover a « appris à aimer » grâce à l’écriture et l’engagement. « J’ai résolu de suivre la voie qui m’était dictée, depuis toujours, je crois, par cette Histoire délirante, mais unique, presque incroyable, inexplicable en tous cas : écrire, pour ne pas sombrer, dans le désespoir, l’abandon, l’indifférence, la drogue, l’alcool. Mais je n’avais plus pour moi le territoire magique et initiatique de mon île, à partir duquel j’aurais pu construire un univers. Il me fallait récupérer, du moins l’espace d’un instant, le monde de l’enfance perdue».

Un combat pour la délivrance des cubains. Page après page, la narration de Machover nous accompagne à dévoiler la cohérence d’un parcours erratique ayant pour but le combat pour une légitimité des dissidents cubains, pour lesquels l’auteur se bat sans cesse, depuis toujours : « Pendant près de vingt-cinq ans, je les [les dissidents anticastristes cherchant une protection à l’étranger ndr] ai écoutés répéter les mêmes récits. Ils m’entretenaient d’un univers abstrait auquel seuls les élus ont accès. Je suis allé les chercher aux quatre coins du monde, loin du pays qui les a vus naitre, le plus souvent dans la capitale de notre exil, une copie presque conforme de l’île maudite, mais plus ordonnée, trop impersonnelle. Je n’ai pas compté le temps, ni le mien ni le leur ».

D’un exilé, des exilés. Survivre, pour vivre. Combien de temps encore ? « La vie en exil n’est pas la mort. C’est autre chose, en équilibre non seulement entre deux géographies, mais aussi entre deux temps. Ceux qui ont échappé au malheur sont pris d’une frénésie de vivre […] ils étaient capables de tout affronter pour fuir, mais ils se sont retrouvés désarmés face aux tracas de la vie quotidienne dans un environnement non pas hostile, plutôt indifférente. Je les vois encore […] Jesús, qu’il a fallu faire sortir de l’île où il avait de fortes chances d’aller croupir pour de longues années en prison, du fait qu’il tentait simplement d’écrire, de décrire, la réalité de ce qu’il vivait dans des articles que pratiquement personne ne pouvait lire sur place : il était journaliste indépendant, c’est-à-dire sans entraves, non reconnu, non officiel. Il a du partir en avion, laissant sa femme et sa fille, en pleurant sans cesse leur absence, sans espoir de les revoir avant longtemps. Combien de temps ? »

Le secret du roman : Hommage à la MDJ

[Par Maha HASSAN]

Est-ce le hasard si la Maison des journalistes est la dernière adresse que j’ai vue avant de quitter Paris ? Ou est-ce un hasard objectif, comme l’appelait André Breton, comme en un roman qui me pousse à écrire ce qui suit avant de quitter Paris ?

(Auteur : @ENPC)

(Auteur : @ENPC)

Quand je suis arrivée à Paris pour la première fois, j’ai eu la chance d’être logée à la MDJ au bout de quatre mois de mon séjour parisien.
Quand je suis arrivée, également pour la première fois dans le quinzième arrondissement et que je suis descendue au métro Javel, j’ai presque poussé un cri de surprise en regardant le Pont Mirabeau.
En Syrie, sans connaître ce pont, sauf par le poème d’Apollinaire, mon premier roman commence par la chanson que mon héros écoutait : « Sous le pont Mirabeau coule la Seine… ».
J’ai publié mon premier roman, L’infini, en 1995, et me retrouve dix ans après à côté du Pont Mirabeau.
Et voilà, dix ans encore après mon arrivée à la MDJ, je prépare mon départ de Paris. Le secret du roman me pousse encore une fois vers la Maison des journalistes, comme s’il me fallait dire au revoir au Pont Mirabeau où coule la Seine.
Un ami romancier et journaliste qui a quitté son pays en fuyant la guerre et les menaces des djihadistes arrive à Paris une semaine avant mon départ.
J’ai contacté Darline, la directrice de la Maison, pour prendre un rendez-vous pour cet ami ; Darline me donne aussitôt une date, serrée, un jour juste avant mon départ.
Je vais avec mon ami pour le présenter à la MDJ et chercher son soutien. On passe devant le Pont Mirabeau comme si je le faisais il y a dix ans, comme si ces dix ans ne s’étaient pas écoulés.
Depuis la Syrie en 1995, à Paris en 2005 puis en 2015, le Pont Mirabeau m’accompagne.
Ce n’est donc pas le hasard qui me ramenait à la MDJ un jour avant de quitter Paris, mais le roman. Le roman qui a créé un lien secret entre le Pont Mirabeau, mon roman et le roman de mon ami, pour lequel je suis allée à la MDJ.

(source : http://les-balades-de-yaya.over-blog.com/)

(source : http://les-balades-de-yaya.over-blog.com/)

Aujourd’hui, une semaine est passée… Je suis dans mon nouvel exil, mon deuxième exil. Mon ami vient de m’appeler pour m’annoncer que Frédéric (qui travaille à la MDJ) lui avait trouvé une chambre pour demain. Il pourra ainsi commencer son nouveau chemin à Paris, celui que j’ai moi-même terminé.
Mon ami dont je ne veux pas dévoiler le nom, va mettre à son tour, les pieds sur le chemin de son premier exil, alors que moi, en même temps, je m’engage dans mon second exil.
Entre ces exils, entre Paris et la Bretagne, la seule différence, la grande différence est que je sens naturellement que je suis chez moi à Morlaix, où le sentiment d’exil se confond avec la sensation d’être chez moi. J’en suis à penser que le secret du roman c’est vivre toujours en exil, même si on vivait dans son pays natal. L’écriture même est un acte d’exil. On se déplace entre réalité et fiction.
Finalement, la sécurité de l’exil français est indispensable pour les journalistes et écrivains- journalistes pour vivre leur exil intime, l’exil intérieur. Sans la sécurité de l’exil extérieur nous ne pouvons pas écrire et nous déplacer dans le grand terrain de l’exil choisi.
La Maison des journalistes est un grand pas pour trouver cette sécurité recherchée et pour y vivre tranquillement notre exil.

 

 

Chaque matin chez l’exilé…

[Par Sintius MALAIKAT]

Chaque matin à travers la fenêtre de ma chambre, sur un cimetière se pose mon regard. Souvent je vois des gens poser des gerbes de fleurs ou nettoyer les tombes des membres de leurs familles ou amis qui y sont enterrés. “Aurai- je un jour l’occasion de le faire pour les miens enterrés au Rwanda?” Exilée, je suis privée du droit de retourner dans ma patrie.
Que le monde est injuste!

Chaque matin j’attends vainement un appel ou un courrier porteur d’une bonne nouvelle. Pourquoi tout ce temps d’attente avant d’avoir le statut de réfugiée? Pourtant, je suis dans un pays de droit! Oui, nombreux sont les dossiers de demande, mais est-il juste d’attendre aussi longtemps? Heureusement dans les couloirs, je croise mes collègues de la Maison des journalistes, qui comme moi ont connu ces moments difficiles, et qui me remontent le moral en me disant “Patience est mère de sûreté”.

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Malheureusement qui sait qu’un maudit matin je serai peut-être obligée de partir, disparaître dans un centre sans collègue pour m’encourager? Un entourage sans affinité est une voie sans issue, une pièce sans sortie, un hôpital sans médecins.
Chaque matin à travers ma fenêtre, j’aperçois des enfants sur leur chemin de l’école. Forcée de vivre tout ce temps d’éloignement, sans lueur au bout du tunnel, je me demande quand mes filles pourront me rejoindre et en fin vivre en sécurité.
Chaque matin est le début d’une journée dure pour tout demandeur d’asile dont la procédure n’avance pas. Sur mon passé amer s’ajoute cet accablement.
Chaque matin…

 

 

 

 

Mon exil, ma dépression et mon combat

[Par Sékou Chérif DIALLO]

« Tu as l’air triste ! » me dit-on souvent. Je réponds « Ça va je vais bien ! ». Avec un sourire de tristesse pour paraître normal, rongé par l’incertitude et le doute, depuis un certain temps j’incarne un personnage différent. Toute ma fierté d’autrefois est remise en question mais pas forcément mon âme et mes convictions. J’essaye de survivre sans exigence particulière, je me contente du minimum mais je regarde l’avenir.

(Source : carrerond.be )

(Source : carrerond.be )

Fataliste résigné ? Non ! Réaliste obstiné. Oui ! J’essaye d’avancer, loin de subir, je résiste. Avec un cœur meurtri mais plein d’espoir, j’appréhende la réalité avec une certaine lucidité et sans prétention aucune. Ce combat est le mien, c’est un choix conscient que certains appelleront idéaliste mais j’y crois. Sociologue, j’ai cherché à comprendre l’Homme, ses actions et ses motivations. Journaliste, j’ai opté pour le partage et la liberté d’opinions.
Influer positivement sur les mentalités, ma démarche est avant tout pédagogique. J’apporte une modeste pierre à l’édifice. Je viens d’un pays “célèbre” je voulais dire “tristement célèbre” par l’image qu’il véhicule dans la presse internationale (26 ans de régime dictatorial de Sékou Touré avec son cortège macabre, 24 ans de régime militaire de Lansana Conté, une parenthèse d’une année de Moussa Dadis Camara avec le massacre du 28 septembre 2009 et 4 années de désillusion avec Alpha Condé et comme couronnement malheureux, l’épidémie d’Ebola). Avec un tel diagnostic, les raisons de ce combat sont évidentes : Il faut agir et sortir de cette fatalité ambiante. Se poser les bonnes questions en privilégiant l’essentiel. Toutes les sociétés à un moment donné de leur histoire ont interrogé leur intellect sur le “pourquoi” et le “comment”.

Démocratie moutonnière vue par Salah Elayoubi. (Source : musique.arabe.over-blog.com)

Démocratie moutonnière vue par Salah Elayoubi. (Source : musique.arabe.over-blog.com)

« Tu n’es pas un patriote toi ! » me reprochent certains esprits étroits qui ne perçoivent que la superficialité des choses. Le patriotisme, un terme profondément galvaudé dans mon pays. Toutes les idées ou positions contraires à la “pensée unique” celle du pouvoir, sont perçues comme ce que Sékou Touré appelait dans les années 70 contraire à « la classe peuple ». Alpha Condé, l’actuel président de la Guinée n’est ni socialiste, ni communiste, ni libéral, il est simplement un « improvisionniste », autrement dit, un président sans aucune visibilité sur un quelconque programme de développement. Dans un environnement politico-médiatique où les faits divers ont plus d’échos que les programmes d’éducation ou de santé, il va s’en dire qu’Alpha Condé tire son épingle du jeu. Quelle alternative alors ? Avec une opposition piégée dans ses compartiments ethnico-régionalistes, elle est plutôt une chance pour le pouvoir qu’un obstacle car elle contribue et alimente les débats qui sont en déphasage avec les préoccupations des guinéens. L’armée ? Jamais je ne miserais sur elle. Tout coup d’Etat militaire est un recul démocratique. La jeunesse ? Quelle jeunesse ? Celle qui se laisse manipulée par des politiques à coup de billets de banque ? Les potentialités démagogiques de ce pays sont consternantes. Sur qui compter alors ? Point de réponse et c’est inquiétant. La lecture faite par la fameuse communauté internationale est malheureusement biaisée ou sciemment orientée. Mais, je ne ramène pas ici ce traditionnel discours réactionnaire truffé de clichés sur la coopération Nord-Sud. Aujourd’hui l’enjeu est d’offrir à nos populations des conditions de vie décente et pour ce faire le leadership politique doit être repensé. Reprendre l’initiative, le peuple burkinabé vient de donner l’exemple.