Burundi : bruits de vote et de bottes ?

[Par Jean-Jules LEMA LANDU]

En mai et juin, les Burundais seront appelés aux urnes. Pour autant, la présidentielle reste encore sujet à controverse.

Le président en exercice, Pierre Nkurunziza, voudrait rempiler pour un troisième mandat, en violation de la Constitution. Les partis politiques et la société civile s’y opposent. Quelle en sera l’issue ? Le spectre d’une nouvelle guerre civile hante les esprits.

Une image des élections en Burundi en 2010 (source :  insightonconflict.org)

Une image des élections en Burundi en 2010 (source :
insightonconflict.org)

Pierre Nkurunziza (source : bakolokongo.com)

Pierre Nkurunziza (source : bakolokongo.com)

La genèse de l’histoire récente du Burundi est douloureuse. Coups d’Etat à répétition, assassinats de masse, rébellions endémiques et, au bout du compte, une guerre civile, longue de treize ans (1993-2000). Un moment, accablée par des preuves de crimes de sang, la communauté internationale était tentée de qualifier la situation de ce pays de « génocidaire. » On parle de quelque 300 000 morts.

 

Burundi (source : unesco.org)

(source : unesco.org)

Minuscule pays d’Afrique centrale (23 fois plus petit que la France), le Burundi accède à son indépendance, en 1961, mais il ne tarde pas à basculer dans la violence ethnique et la lutte pour le pouvoir. En 2000, c’est la fin de la guerre civile, après un dialogue politique ardu, à Arusha en Tanzanie, sous la houlette de l’Onu et de l’Afrique du Sud. Basé sur une simple logique des quotas pour le partage de pouvoir entre les Hutu, ethnie majoritaire (80 %) et les Tutsi, ethnie minoritaire (20 %), le compromis semble avoir été équitable.

C’est dans ce cadre-là que le président en exercice, Pierre Nkurunziza (Hutu), a été élu en 2004, et réélu en 2010. « Un mandat de cinq ans, renouvelable une fois », selon la Constitution, en son article 96. Depuis, la concorde et le retour à la paix sont, bon an mal an, en passe de s’inscrire dans la durée.

Les élections, au Burundi, ont toujours été marquées par un climat politique pour le moins délétère : arrestations arbitraires et assassinats ciblés, notamment. Sans, toutefois, réveiller les démons des bisbilles ethniques, ce ferment essentiel des guerres en Afrique. Aujourd’hui, en sera-t-il encore le cas, alors que le président de la République, contre vents et marées, s’apprête à violer la Constitution, dans le but de rempiler pour un troisième mandat ?

La réponse n’est pas aisée. On observe que les leçons de la guerre civile ont appelé les Burundais à transcender, de plus en plus, les clivages ethniques. En témoigne le fait que les partis politiques, qui revêtaient auparavant un caractère ethnique, ratissent large, aujourd’hui, sur la base d’un programme estimé crédible par les adhérents. Déjà, c’est un grand pas sur le chemin de la réconciliation des cœurs.

Agathon Rwasa (source : damienroulette.wordpress.com)

Agathon Rwasa (source : damienroulette.wordpress.com)

Cependant, dans un pays où les ambitions politiques sont féroces, cette considération, à elle seule, ne peut prétendre à la vertu d’une panacée. Tout comme, globalement, les accords d’Arusha n’ont pas valeur de parole d’Evangile pour tous les Burundais. C’est le cas d’Agathon Rwasa, ancien grand seigneur de guerre, qui n’avait pas signé lesdits accords. En embuscade depuis plusieurs années, il pourrait profiter de cette « aubaine » pour entraîner le Burundi, encore une fois, dans le chaos. En charge pour le président de la République de la jouer “démocrate”.

Le Burkina, l’Afrique et l’an 2015

[Par Jean-Jules LEMA LANDU]

Comme d’habitude, en 2014, l’Afrique a croulé sous le poids de ses maux : dictature, corruption, coteries, absence criante d’idéal d’excellence, etc. Mais, en novembre, le Burkina Faso s’en est offusqué et a manifesté sa colère. Pour une fois, la pression de la rue a fait tomber un dictateur, Blaise Compaoré, au pouvoir pendant 28 ans. Est-ce un signe positif pour 2015 ?

Burkina Faso (source : la-croix.com)

Burkina Faso (source : la-croix.com)

Mobutu-KedhafiUn retour rapide sur quelques événements, à travers le continent, nous place devant un terrible paradoxe. Citons-en deux, à titre d’exemple : l’après-Mobutu, en République démocratique du Congo, et l’après-Kadhafi, en Libye. La chute de ces deux despotes, renversés par les armes, ont conduit au déluge, plutôt qu’aux effets escomptés : la démocratie. Depuis, les guerres n’ont cessé au Congo, tandis que la Libye se délite, chaque jour, à l’œil nu.

Or, les institutions instaurées par Compaoré n’étaient en rien différentes de celles qui étaient établies hier ou qui sont encore en place aujourd’hui, presque partout : une sorte de despotisme éclairé, à l’« africaine », avec l’existence d’une opposition et d’un parlement bidons, à la coupe du pouvoir. Le mal est qu’au fil des années, cette idéologie avait fini par se cristalliser et devenir un « principe normal » de la vie politique, toléré, et même accepté – au bas mot – par les peuples. Au point que Congolais et Libyens ne manquent pas, aujourd’hui, de regretter les régimes autoritaires.

constitutionLe Burkina Faso échappera-t-il à ce schéma ? Réponse à la normande, tant que l’autocratie sera encore vue, en Afrique, comme un « phénomène de société ». C’est la racine du mal, dont le spectre se profile à l’horizon 2015. En cette année, des élections vont se dérouler dans plusieurs pays. Les chefs d’Etat d’une dizaine d’entre eux se  proposent de modifier les Constitutions pour leur permettre de rempiler. Il s’agit de la République démocratique du Congo, du Burundi, du Rwanda, du Bénin, pour ne citer que ceux-là.

A en décrypter leur attitude, il est clair que ces chefs d’Etat, malgré le cas à tonalité pédagogique du Burkina Faso, sont décidés d’aller jusqu’au bout de leurs ambitions. Au Rwanda, par exemple, les milieux officiels croient dur comme fer que la « démocratie à la rwandaise » n’a de leçons à recevoir de personne. Comment, dans cette hypothèse, envisager l’avenir politique du continent avec optimisme,  sans y voir de beaux désordres, en perspective ?

Pourtant, c’est la politique qui commande l’économie et le reste. Le pays de Mandela, un des géants économiques de l’Afrique, nous en donne un exemple patent. Depuis le glissement de la politique dans le népotisme et la corruption, l’économie sud-africaine est à la traîne. Le taux de croissance pour 2014, selon les prévisions, doit graviter autour de – 0,6 %. Un bilan très négatif.

D’où l’éclipse sur 2015. Même si, avec l’espoir que le taux global de croissance du continent dépasse, en 2014, les 7 % réalisés en 2013. Car, des résultats statistiques à la jouissance du pactole, il y a toujours loin de la coupe aux lèvres.

INTERVIEW. Côte d’Ivoire : « Ouattara est un président bâtisseur »

Franklyn Nyamsi (source : leseptentrion.net)

Franklyn Nyamsi (source : leseptentrion.net)

Franklin Nyamsi, 42 ans, est professeur agrégé de philosophie, et chercheur à l’Université de Lille 3. D’origine camerounaise, il fait partie des rares intellectuels à avoir conservé leur indépendance vis-vis du pouvoir de Yaoundé. Il critique en effet régulièrement l’immobilisme qui le caractérise.
Polémiste parfois passionné, c’est l’Afrique de l’Ouest – notamment le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire – qui constitue son principal centre d’intérêt. Un choix de cœur, sans doute. Au début des années 90, il dut partir en exil, lors de la répression brutale qui sanctionna une longue grève des étudiants de l’université de Yaoundé. C’est la Côte d’Ivoire qui l’accueillit et lui permit de poursuivre ses études dans de meilleures conditions, avant de répondre à l’appel de l’université française. Depuis, il suit de près les soubresauts politiques du pays de Félix Houphouët-Boigny. Dans cette interview, il répond aux questions que de nombreux observateurs se posent au sujet des choix économiques du président Alassane Ouattara, et esquisse l’avenir de ce pays, qui sort d’une longue période de troubles politiques.

[Interview réalisée par René DASSIE]

Alassane Ouattara (source : amanien.info)

Alassane Ouattara (source : amanien.info)

1- Professeur, vous êtes Français d’origine camerounaise. Mais vous êtes plus présent sur la scène ivoirienne qu’ailleurs. Qu’est ce qui explique ce lien particulier avec ce pays ?
Votre question ne me surprend point. Elle confirme ce bon mot de Heidegger qui dit que « la célébrité n’est que la somme des malentendus qui se forment autour d’un nom ». Pour en venir au fond, je me définis avant tout comme un être humain, et à ce titre, un citoyen du monde, car mon idéal est d’enraciner l’action dans une vision qui articule l’ici et l’ailleurs, dans un Tout harmonieux. Être Camerounais ou être Français ne sont de ce point de vue, que des déterminations accidentelles de mon être, puisque je m’efforce essentiellement d’être tout simplement un homme dans son siècle. Cela dit, vous rendez-vous compte que j’ai écrit deux livres sur le Cameroun et un seul sur la Côte d’Ivoire ? Vous rendez-vous compte que pour beaucoup d’Ivoiriens, je suis essentiellement Camerounais comme pour beaucoup de Camerounais, je suis éventuellement franco-ivoirien ? J’ai horreur d’être défini, daté et classifié comme une boîte de sardines sortant de sa fabrique. J’existe, et exister c’est être en devenir tout en demeurant soi-même. La Côte d’Ivoire, comme pays, a une plus grande ouverture sur le monde que mon Cameroun natal. Je me dois de penser que si l’on me connaît surtout pour mon engagement ivoirien, c’est parce qu’une voix qui parle de Côte d’Ivoire touche plus vite l’Afrique entière qu’une voix qui parle de Yaoundé ou de Douala. L’enclavement mental et médiatique, mais aussi une certaine politique enténébrée caractérisent un peu trop les pays de la forêt équatoriale d’Afrique Centrale. Communiquer, c’est sortir de la forêt, c’est savoir habiter la savane où autant en emporte le vent. Une véritable déforestation politique du Cameroun s’impose. Elle seule pourra du reste empêcher la déforestation sauvage de la flore naturelle du Cameroun. Enfin, j’ai envie de vous dire, journaliste camerounais de votre état, que je ne vous parlerai pas de la Côte d’Ivoire si vous ne me posez pas des questions sur la Côte d’Ivoire. Le tropisme ivoirien que vous m’attribuez est sans doute celui de la presse camerounaise elle-même, lasse de parler du régime monotone de Paul Biya et avide de parler d’un pays comme la Côte d’Ivoire, qui a changé par quatre fois de Chef de l’Etat en moins de vingt ans.

2- Le troisième pont d’Abidjan a été inauguré en grandes pompes il y a quelques jours. Cela faisait au moins quatorze ans que le lancement de sa construction traînait. Peut-on enfin dire que le pays se relève après une longue crise ?
Vous l’avez dit vous-même. La renaissance ivoirienne n’est pas une fiction idéologique. Elle se concrétise dans l’action d’un président résolument bâtisseur, doué d’une vision et d’une volonté de grandeur pour son pays qu’il a manifestée en moins de trois ans de pouvoir. Rien à voir avec les slogans creux qu’on nous a servis ailleurs pendant plus de trente ans. J’aime beaucoup ce mot du Président Ouattara qui, citant Newton lors de son discours d’inauguration le 16 décembre 2014, a souligné que les hommes devraient cesser de construire entre eux des murs, pour mettre en lieu et place des ponts. La politique au sens le plus noble est un art du pontificat. Elle tisse des liens féconds au cœur de la pluralité humaine. La symbolique de ce 3ème pont sur la lagune Ebrié est remarquable : il relie deux grands quartiers de la capitale, l’un bourgeois et l’autre, populaire. Il unit deux grands hommes d’Etat, qui ont reconstitué une union ivoirienne plus parfaite après avoir été les pires ennemis de la république : les présidents Bédié et Ouattara, dont la leçon de fraternité servira sans doute de schème à l’espérance ivoirienne. Enfin, ce pont est un succès architectural et une belle promesse de fluidité commerciale pour la capitale économique ivoirienne, qui méritera encore plus son doux surnom de « perle des lagunes ».

© Reuters par DR  Tourisme - Vue aérienne d`Abidjan Photo : le pont Félix Houphouët-Boigny et le Plateau, centre d`affaires

© Reuters par DR
Tourisme – Vue aérienne d`Abidjan
Photo : le pont Félix Houphouët-Boigny et le Plateau, centre d`affaires

3- Ce pont a coûté très cher. 270 millions d’euros. C’est deux fois le prix qu’auraient proposé les Chinois, selon certaines sources.
Ce pont rapportera à long terme davantage que son prix. Votre allégation est donc infondée sur ce point. Je n’aime ni la Françafrique, ni la Chinafrique, ni la Russafrique, ni l’Américafrique. L’impérialisme m’insupporte, d’où qu’il vienne. Les décideurs ivoiriens, légitimement et légalement élus par leur peuple, ont cependant le droit de choisir le rapport qualité/prix qui leur convient entre plusieurs offres internationales. Je ne pense pas que le seul coût du pont puisse servir de critère suffisant à la décision des autorités ivoiriennes.
• Pourquoi le président Ouattara a-t-il préféré l’offre de Bouygues ? Un cadeau pour dire merci à la France ?
Je conteste votre méthode. Vous posez une question en préemptant la réponse. Par hypothèse, il faut aussi se demander si la France n’a pas fait l’offre la plus fiable en rapport qualité/prix. Je ne suis pas certain que la Chine ait atteint tous les standards de qualité des entreprises françaises dans tous les domaines. Je laisse donc ouverte l’hypothèse d’une préférence objective des Ivoiriens pour les entreprises françaises, y compris en raison de la longue histoire qui lie ces deux pays. Car il y a quelque chose que les Camerounais ne veulent pas confondre. En Côte d’Ivoire, le sentiment anti-français a parfois été instrumentalisé par le régime Gbagbo, mais il n’y a pas véritablement de camp politique anti-français en Côte d’Ivoire. Rendez-vous compte que c’est la France jospinienne qui a été la première à aider Laurent Gbagbo à s’installer au pouvoir en octobre 2000 ! Lui-même l’a dit, dans une vidéo disponible sur le web : « en 2000, la France nous a aidé sur tous les plans ». Et d’ailleurs, sous Gbagbo, la France a toujours eu la plupart des gros marchés internationaux ivoiriens. Alassane Ouattara, de ce point de vue, est dans la parfaite continuité de la tradition de coopération privilégiée entre Français et Ivoiriens depuis Félix Houphouët-Boigny.
• Ce pont doit permettre de désengorger Abidjan. Cependant, la traversée sera payante. Interdit aux pauvres donc ?
Le pont n’est pas interdit aux pauvres puisqu’il est fait pour des véhicules que les pauvres ne possèdent pas mais qu’ils pourront emprunter, sous forme par exemple de transports publics. Je crois donc que votre objection est sans fondement, car les pauvres passeront sur le pont via les transports publics qui sont accessibles à leur portefeuille modeste. Je crois savoir aussi que le péage de ce pont ne sera pas indéfini. Le pont finira par fonctionner comme toutes les routes urbaines.

4- Sur le même plan, selon Jeune Afrique, l’Autorité nationale de régulation des marchés publics (ANRMP) que dirige M. Coulibaly Non Karna a émis le 18 septembre un rapport très critique sur le mode de passation des contrats par le gouvernement. Jusqu’à 500 milliards de F CFA de marchés publics ont été passés de gré à gré, entre 2011 et 2013, c’est-à-dire en contournant la procédure usuelle des appels d’offres. N’y a pas là un risque évident de favoritisme ?
Oui, c’est un grave risque de favoritisme. Il y a urgence que l’éthique de la bonne gouvernance redresse les réflexes de prédation délétères. Et le gouvernement Ouattara, qui a commandité ce rapport, manifeste ainsi sa réelle volonté de combattre la corruption d’Etat, véritable fléau mondial et africain que les Camerounais connaissent d’ailleurs davantage que les Ivoiriens. N’est-ce pas ?
• L’urgence qu’il y a à relancer l’économie suffit-elle à expliquer ce procédé de gré à gré ?
Il s’agit là de nos pesanteurs sociologiques africaines, à surmonter de toute urgence. On peut constater, dans tous nos pays d’Afrique francophone par exemple, que la tentation de gestion patrimonialiste de l’Etat est très développée. Le rapport Coulibaly doit permettre au gouvernement Ouattara de mettre un coup de pied dans cette fourmilière de parasites qui jouissent au détriment des plus besogneux.

5- La croissance de la Côte d’Ivoire en 2013 qui est d’environ 8,8 est vigoureuse malgré un léger repli par rapport à l’année précédente. On doit cela notamment à la politique de relance par les grands travaux entrepris par le gouvernement. Cependant, le PIB par habitant reste faible par rapport à son niveau de 2000. On entend ainsi des Ivoiriens dire : « on ne mange pas béton ». Quelles sont les mesures que le président prévoit pour :
• Améliorer le pouvoir d’achat des Ivoiriens ?
• Pérenniser cette croissance ?
• Inciter le secteur financier en surliquidité, à financer les PME ?
• Créer des emplois au profit des jeunes Ivoiriens ?
• Améliorer la compétitivité du pays qui souffre, selon le rapport Paying Taxes 2014, de procédures douanières peu fluides et d’une fiscalité très complexe (62 dossiers d’impôts face à 36 en moyenne en Afrique)?

Williamsville, un des quartiers pauvres d'Abidjan (source : 20minutes.fr)

Williamsville, un des quartiers pauvres d’Abidjan (source : 20minutes.fr)

Je ne suis pas le porte-parole du gouvernement ivoirien. J’observe cependant que le Président Ouattara a relevé le SMIG ivoirien à 60000 CFA. J’observe qu’il envisage une croissance à deux chiffres pour son pays, avec de solides raisons d’y croire. J’observe qu’en septembre dernier, il a publiquement critiqué la surliquidité des banques ivoiriennes qui ne prêtent pas autant aux entrepreneurs locaux qu’elles le font avec les grandes firmes internationales. Je vois le Président Ouattara soucieux d’employer des centaines de milliers de jeunes dans l’industrie, dans l’agriculture et de donner à chacun une chance de s’en sortir par la politique de micro-crédits qui va sans doute être plus vigoureuse dans son second mandat. Toutes les mesures que j’entrevois ainsi me semblent être des axes de la politique du gouvernement ivoirien. La fluidification du code des investissements, l’amélioration constante des indices de référence de la Côte d’Ivoire dans les classements Moody’s et Doing Business témoignent d’une forte volonté de progrès constant impulsée par le manager d’exception qu’est le président Ouattara. Comme vous le savez sans doute, la croissance – en attendant l’élaboration d’indices plus diversifiés – est encore la clé de tout, à condition qu’elle ne produise pas cette incongruité qui veut dans bien des pays africains, que les chiffres macroéconomiques élogieux ne se reflètent pas toujours positivement dans le panier de la ménagère. Le second mandat du Président Ouattara sera sans doute un mandat social. Je le vois prendre à bras le corps, après avoir reconstruit les fondamentaux.

6- Parlons maintenant un peu de politique. Laurent Gbagbo, Blé Goudé jugés à La Haye et sans doute bientôt Simone, l’épouse de M. Gbagbo. Comment mettre fin aux rancœurs dans ces conditions?
La justice politique est longue et patiente. Laurent Gbagbo, Blé Goudé et Simone Gbagbo sont les vrais responsables de l’escalade sanglante de 2010-2011 en Côte d’Ivoire. Je ne suis pas surpris qu’ils aient été sévèrement épinglés par la justice internationale et nationale. S’ils n’avaient pas voulu usurper le vote populaire, ils vivraient librement chez eux en Côte d’Ivoire. Quand vous parlez de rancœur, je vous réponds que vous oubliez un peu trop les victimes du régime discriminatoire de l’ivoirité. 3000 morts, tout de même, par la faute originelle de ces téméraires ! Ne les oublions pas si vite ! La justice est réparation des torts faits aux victimes, pas glorification des coupables. Laissons-la faire son travail.

7- Les enquêtes internationales ont reconnu des torts partagés, peut-être pas au même niveau, dans la crise sanglante qui a suivi la présidentielle de 2010. Seuls des membres du camp Gbagbo se retrouvent devant la justice à Abidjan et à La Haye. Justice des vainqueurs ?

La Haye -  Tribunal international

La Haye – Tribunal international

Vous faites une lecture morale et politique erronée du conflit ivoirien. A-t-on condamné et emprisonné les résistants français qui ont défait les nazis parce que des civils innocents étaient morts lors de leurs combats contre l’Allemagne nazie ? A-t-on condamné l’ANC combattant contre le régime de l’Apartheid parce que des civils étaient parfois tombés lors des attaques de l’Umkhonto we Sizwe, la branche armée de l’ANC ? Faut-il condamner les upécistes camerounais qui ont pris les armes entre les années 50-70 pour délivrer le Cameroun du colonialisme français et de ses héritiers, parce que lors de leurs confrontations avec le colon des civils trouvèrent la mort ? Il n’y a, hélas, pas encore de guerre propre au monde ! Telle est la dureté de l’Histoire, par quelque bout qu’on la prenne. Il vous faut apprendre que la résistance contre l’idéologie criminelle de l’ivoirité, bien qu’elle ait été violente, n’a pas la même portée morale que les agressions violentes du régime illégitime de Gbagbo contre les populations ivoiriennes. C’était une question de vie ou de mort pour les citoyens exclus et ostracisés par les Escadrons de la mort de Laurent Gbagbo et ses milices xénophobes. La légitime défense trace la ligne de démarcation nécessaire entre les victimes et les coupables. Depuis le charnier de Yopougon jusqu’aux tirs d’obus sur les femmes d’Abobo, le régime Gbagbo n’a pas laissé le choix aux vaillants ivoiriens. Ils devaient vaincre Gbagbo ou périr sous Gbagbo. Les Forces Nouvelles de Guillaume Soro, puis les FRCI sous les ordres du Président Ouattara ont sauvé le peuple de Côte d’Ivoire d’une dislocation certaine dans une tragédie génocidaire.

8- Sur le même plan, la Commission dialogue, vérité et réconciliation a plutôt déçu les attentes. Peu d’impact à travers le pays, en dépit des commissions locales installées un peu partout dans les communes. Certains pensent que cette commission souffre d’un péché originel : elle est présidée par l’ancien Premier ministre Charles Konan Banny, alors qu’elle aurait dû se placer au-dessus des chapelles politiques. Etes-vous d’accord avec cette analyse ?
Je ne crois pas en la capacité de l’homme le plus saint au monde d’être dépourvu de vision politique. Le Christ, Gandhi, Luther King, etc., avaient tous une vision politique de l’humanité. Sortons donc de cet angélisme désuet qui consiste à croire qu’il y a des hommes « au-dessus des chapelles ». Etre « au-dessus des chapelles », c’est appartenir à une chapelle tout de même : la chapelle de ceux qui se croient ou qu’on croit être au-dessus des chapelles. Non. Assumons nos valeurs. Une commission de telle nature a toujours des résultats dans le temps long. Je n’ai pas eu le sentiment que la CDVR ivoirienne était partiale, bien que son président, Charles Konan Banny, ait davantage parfois pensé à son propre avenir politique qu’au succès de sa mission capitale. Soyons mesurés. On ne panse pas les plaies morales d’une société en un tour de passe-passe verbal. Il faut laisser aux mémoires le temps de l’émotion, puis celui de l’apaisement. Le travail de la justice vient aussi clarifier les responsabilités et ramener les choses aux proportions de la raison. Le régime Ouattara a tout de même mobilisé 16 milliards de FCFA pour les travaux de cette Commission dont les conclusions devraient inspirer une meilleure justice transitionnelle ivoirienne dans les prochaines semaines.

9- Si la réconciliation n’est pas effectivement réalisée, ne risque-t-on pas de renouer avec les troubles lors des prochaines élections ?
La qualité des élections et le respect des résultats justes sont les conditions de la paix postélectorale. La force doit, bien sûr toujours, demeurer au droit. Je ne saurais préjuger des comportements de tous les acteurs politiques. Je souhaite simplement que Gbagbo ne fasse pas tâche d’huile parmi les leaders politiques ivoiriens, car son attitude terrible en 2010-2011 a failli tuer la Côte d’Ivoire.

Guillaume Soro (source : laguneinfo.net)

Guillaume Soro (source : laguneinfo.net)

10- Enfin, le président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro, est très actif au plan international, surtout africain. Certains le présentent comme le dauphin du président Ouattara. Vous qui êtes proche de lui, partagez-vous ce regard?
Selon la constitution ivoirienne, le président de l’assemblée nationale est le dauphin du président de la république. Voilà qui est clair et sans commentaire. Pas la peine ici donc, d’enfoncer les portes ouvertes. Pour ce qui est de l’avenir, Guillaume Soro lui-même répond toujours : « la patience est de Dieu ; la précipitation, du Diable ». J’aime beaucoup cette sagesse du Chef du parlement ivoirien. Et la proactivité du parlement ivoirien devrait servir de modèle positif dans toute l’Afrique francophone, au lieu de susciter une jalousie stérile, comme c’est parfois malheureusement le cas. Guillaume Soro est essentiellement un homme de mission et non l’esclave de quelque grande ambition de pure forfanterie.

Afrique : La Tunisie se détache du lot

[Par Jean-Jules LEMA LANDU]

Parmi les trois pays impliqués dans le « Printemps arabe », seule la Tunisie a tiré son épingle du jeu. En témoigne l’élection, lundi 22 décembre, de Béji Caïd Essebsi, du parti laïc « Nidaa Tounès ». Avec 55,68 % des voix. Et cela, après quatre ans d’une transition relativement apaisée.

Béji Caïd Essebsi (Source : AFP / humanite.fr )

Béji Caïd Essebsi (Source : humanite.fr )

C’est le premier président démocratiquement élu, depuis 1956, date de l’indépendance du pays. Sans contestations de la part de l’opposition. Un des cas rares à rapporter dans les annales de la politique africaine. Pourtant, la voie empruntée par la Tunisie pour parvenir à ce bon résultat n’était pas pavée de roses. Mais elle a tenu bon, les yeux fixés sur l’objectif à atteindre : la réalisation de la démocratie.

Dès le départ, la Tunisie s’est détachée du lot, par une sorte de pragmatisme politique, qui a su maintenir intacte la cohésion nationale. Les deux grandes tendances religieuse et laïque, déclinées en partis politiques, ne se sont pas regardées en chiens de faïence. En dépit de quelques accrochages parfois entachés de sang. Ceci a permis de mettre en œuvre tout le processus de démocratisation, du projet de la Constitution, à l’élection présidentielle, en passant par les législatives. Un véritable parcours du combattant ! Quitte à consolider ce précieux acquis, dans la paix, en vue d’engager le pays sur la voie du développement.

Une « nouvelle Tunisie »

Si, en Tunisie, des voix discordantes se sont élevées pour décrier l’âge très avancé (88 ans) du nouveau président ainsi que son passé, en tant qu’acteur au sein d’anciens régimes autocratiques de Bourguiba et de Ben Ali, celui-ci ne semble s’en tenir qu’ à sa promesse de campagne : offrir aux Tunisiens une « nouvelle Tunisie ».

Où seraient donc passés les deux autres pays, compagnons du « Printemps arabe », à savoir l’Egypte et la Libye ? La première, presque à la hussarde, a retrouvé ses anciennes amours : la dictature militaire : après avoir éliminé, avec une rare férocité, « Les Frères musulmans » et après s’être fait élire président, « à l’africaine ». Une véritable chienlit. De son côté, à la peine, la Libye est en train d’agoniser. Sous le feu allumé par des factions armées pour le contrôle du pétrole… sans compter d’autres objectifs cachés.

Dans les autres pays

Pour sa part, l’Algérie continue d’être gouvernée par un homme malade et sénile, par la volonté d’une caste, chevillée au pouvoir. Erigée en principe d’Etat entre Arabes et Négro-Africains, la discrimination divise les Mauritaniens. La paix sociale y est relative. Sans parler d’élections souvent contestables.
Quant à l’Afrique subsaharienne, elle n’a cessé de défrayer la chronique. En mal. Avec, en tête d’affiche, les guerres ethniques, la famine, les maladies… en permanence… Et, pour l’heure, l’amendement constitutionnel pour le maintien des dictateurs au pouvoir. Osera-t-elle, cette Afrique, lever les yeux, vers le Nord, pour contempler la levée du soleil démocratique qui éclaire déjà le visage de la Tunisie ? Pas sûr, étant donné l’ego de la plupart de ses dirigeants.

Le cas de la Tunisie, à plus d’un titre, devrait interpeller l’Afrique. Pour une sévère autocritique.

 

Iran : Grève de la faim de 27 prisonniers politiques kurdes à Orumieh

[Par Rebin RAHMANI]

Traduit de l’anglais au français par Quentin DAVIDOUX

Le jeudi 20 novembre 2014, vingt-sept prisonniers politiques kurdes ont entamé une grève de la faim pour protester contre le transfert dans leur section de criminels et de malfaiteurs notoires et le départ pour d’autres sections de certains des leurs.

La prison d'Orumieh (source :hra-news.org)

La prison d’Orumieh (source :hra-news.org)

La section douze de la prison d’Orumieh, d’une capacité de cinquante personnes, est connue comme le quartier des prisonniers politiques. Mais les autorités pénitentiaires s’efforcent depuis deux ans de mettre fin à cette habitude en déplaçant certains de ses prisonniers politiques dans d’autres sections abritant des meurtriers et des criminels des milieux de la drogue, tout en amenant dans la section douze des criminels et malfaiteurs habitués à la violence en prison.
De plus, durant cette période, la plupart des prisonniers politiques nouvellement incarcérés n’ont pas été placés dans la section douze. En ce moment, environ trente-cinq prisonniers politiques sont enfermés dans les quartiers de dangereux prisonniers. Selon les dernières statistiques, quatre-vingt prisonniers (trente prisonniers politiques kurdes pour cinquante criminels) sont retenus dans la section douze. A cause de cette surpopulation carcérale, les prisonniers politiques kurdes souffrent de gros problèmes concernant les aménagement de la prison, notament au niveau des installations sanitaires, de la santé, du renouvellement de l’air etc.
En plus de tout cela, certains gardes spéciaux de la prison viennent dans la sections douze et, tout en insultant les prisonniers politiques, fouillent leurs affaires personnelles et confisquent leurs livres, magazines, et notes.
les prisonniers politiques de cette section n’ont d’ailleurs pas le droit d’utiliser la bibliothèque, ni la salle de gym de la prison, et n’ont pas non plus le droit de recevoir de livres ou de magazines, même approuvés par le ministère de la culture iranien. Une difficulté supplémentaire à gérer pour les prisonniers politiques est la présence d’un bureau du ministère des renseignements au sein même de la prison. Les agents du ministère y convoquent fréquemment les détenus et les menacent de mises en accusation supplémentaires, de transfert dans les locaux du ministère des Renseignements et de la Sécurité nationale, ou d’arrestation de proches du détenu.
Pour protester contre les sévères conditions de détention à la prison centrale d’Orumieh, trente prisonniers politiques de la section douze ont entamé une grève de la faim le 20 novembre, et vingt-six la poursuivent à ce jour. Depuis le début de la grève, les autorités pénitentiaires, au lieu de préter attention à leurs exigences légitimes, ont menacé, convoqué et transféré ces prisonniers. Le 23 novembre, le bureau des renseignements de la prison a convoqué Osman Mostafa Pour (un prisonnier politique kurde condamné à trente-quatre ans de prison, et qui en a déjà passé vingt derrière les barreaux) et l’a conseillé de cesser sa grève de la faim s’il ne voulait pas faire face à une nouvelle sentence et des charges supplémentaires.

Mansour Arwand

Mansour Arwand

Le matin du 29 novembre, les gardes de la prison, équipés de matraques électriques se sont placés devant les portes et les fenêtres de la section douze. Le chef de la prison a averti les prisonniers que, si ceux-ci poursuivaient leur grève de la faim, les gardes attaqueraient la section et battraient les prisonniers. Le même jour, avant les visites des familles, ces prisonniers avaient eu à subir les insultes des officiers et un déshabillage complet pour “rechercher des lettres”. Le prisonnier politique kurde condamné à la peine capitale Mansour Arwand qui avait participé à un rassemblement à la prison, a été transféré sans notification préalable à la prison de Mahabad. La nuit du 29 novembre, les autorités pénitentiaires ont ensuite tenté de faire transférer Mohammad Abdullahi dans la section des meurtriers, mais ils se sont heurtés à la résistance des prisonniers politiques.

Le mardi 9 décembre, le prisonnier politique kurde Ali Afshari, gréviste, a été convoqué au bureau des gardes pour parler par téléphone avec le bureau des renseignements de la prison. On lui a annoncé que les prisonniers politiques devaient cesser leur grève de la faim le plus tôt possible. Autrement, les conséquences seraient terribles. L’agent du service des renseignements a ajouté qu’Ali Afshari précipitait son exécution en poursuivant sa grève de la faim.
Le 9 décembre, Jaafer Afshari, un autre prisonnier politique kurde, a été convoqué au bureau des gardes de la prison et transféré au quartier des travailleurs. Ce jour-là, Arafat Asgeri et Jafar Mirzayi, deux grévistes prisonniers politiques, ont été libérés après une période de six mois en prison.
Le 10 décembre, Ali Afshari a perdu conscience dans les toilettes de sa section à cause de son état de grande faiblesse, d’une basse tension, de troubles respiratoires et des conséquence de la balle reçu lors de son arrestation, toujours présente dans son corps.
Selon les derniers rapports, Reza Rasouli, Yusef Kaka Mami, Sherko Hasanpour, Sirwan Njawi, Abdulla Omumi et Mohammad Abdollahi sont dans un état critique.

Massud Shemsnjad

Massud Shemsnjad

Toujours le 10 décembre, Massud Shemsnjad, un avocat kurde, à entamé une grève de la faim pour protester contre sa détention dans le quartier des travailleurs de la prison d’Orumieh, et pour obtenir une remise en liberté provisoire des autorités pénitentiaires.
Il a été condamné à quatre mois de prison pour avoir eu des contacts avec des médias étrangers et pour son affiliation à des groupes d’opposition. Il a été l’avocat de plusieurs prisonniers politiques kurdes condamnés à mort.
En ce moment, vingt-sept Kurdes poursuivent leur grève de la faim dans la prison de Orumieh. Les noms des grévistes sont:

1-Masoud Shams Nejad , condamné à quatre mois de prison, 2- Sherko Hasan Pour, condamné à cinq ans de prison. 3- Abdullah Bislnun, condamné à un an et demie de prison. 4- Yusef Kaka Mami, condamné à neuf ans de prison, 5- Osman Mostafa Pour, condamné à trente-quatre ans de prison, 6- Mostafa Ali Ahmad, condamné à onze ans de prison, 7- Abdullah Omuyi, en situation irrésolue, 8- Wali Afshari, condamné à cinq ans de prison, 9- Kayhan Darwishi, condamné à trois ans de prison,10- Mostfa Dawoudi, condamné à dix ans de prison, 11- Shursh Afshari, condamné à cinq ans de prison, 12- Khezr Rasul Mrwat, condamné à cinq ans de prison, 13- Mohammad Abdullah Bakht, condamné à un an de prison, 14- Amir Moladust, condamné à quatre ans de prison, 15- Ahmad Tamuy, condamné à quinze ans de prison , 16- Jafar Afsharicondamné à cinq ans de prison, 17- Reza Rasouli, condamné à trois ans et neuf mois de prison. Et aussi dix prisonniers kurdes condamnés à la peine capitale: 1- Sayed Sami Hosseini,2- Sayed Jamal Mohamadi,3- Behruz Alkhani, 4- Ali Ahmad Soleiman, 5- Saman Nasim, 6-Sirwan Njawi, 7- Ebrahim Eis Pour, 8- Ali Afshari , 9- Rezgar Afshari, 10 – Mohamad Abdullahi.

Centrafrique : et la prise d’otages continue…

[Par Marciano Romaric KENZO CHEMBO]

Je ne comprends pas que les Centrafricains et la communauté internationale ne comprennent pas que depuis plus de deux décennies, en République Centrafricaine, l’histoire, tristement, se répète avec les mêmes acteurs, posant les mêmes actes, produisant les mêmes effets tels d’éternelles scènes de répétitions d’acteurs de troupes théâtrales.

Les anciens presidents Bozizé et Djotodja

Les anciens presidents Bozizé et Djotodja

Hélas! ici les scènes sont bien réelles, les conséquences toujours dramatiques et malheureusement les acteurs et les spectateurs ont tous des visions et des méninges enfumées qui les empêchent de voir la réalité, de s’imprégner du quotidien, de se souvenir du passé récent, de se remettre en cause afin de trouver d’efficaces remèdes aux maux qu’ils ont eux-mêmes créés, exploités, entretenus…et qui, au tournant de l’histoire les engloutissent, tel le sable mouvant, petitement, mais inéluctablement, entraînant dans leur décadence des vies innocentes.
Quand la conscience sera-t-elle une denrée partagée par ceux-là même qui nous gouvernent?
Quand les autorités centrafricaines de transition prendront-elles enfin leurs responsabilités en assumant pleinement les rôles qui sont les leurs par des prises de décisions efficaces et courageuses privilégiant et garantissant les intérêts supérieurs de la nation, sans diktat de l’extérieur et des lobbies mafieuses devant les hommes et devant l’histoire et quand la raison rallumera-t-elle la lanterne de la communauté internationale, au chevet de la République Centrafricaine depuis deux décennies ?
Nous nageons, il va sans dire, en pleine eau puante dans ce pays! Et les événements le démontrent à chaque fois!

Rebelles Seleka

Rebelles Seleka

Dommage que seuls les aveugles sont aux commandes du navire Centrafrique qui chavire et les sourds appelés à son secours !!!
Des groupes rebelles et des milices “terroristes” qui prennent en otage toute une Nation, réclamant à cor et à cri la répartition de son territoire, qui décident de l’expatriation forcée d’une composante de sa population, qui instaurent comme mode de gestion la politique du totalitarisme et d’extermination de certaines de ses communautés, qui s’obstinent dans la négation volontaire de la reconnaissance des autorités légitimes et des valeurs républicaines en menaçant de mettre à feu et à sang le pays et qui assassinent des populations misérables, se voient dérouler le tapis rouge et reçus à bras ouverts, le sourire jusqu’aux oreilles et avec les honneurs de chef d’Etat digne de ce nom dans des pseudos conférences de négociations et pourparlers de paix fictive à n’en plus finir, qui au finish n’accouchent que de souris et dont les résolutions n’ont pour durée de vie que le temps de la tenue des dites assises .
La Honte!

Milice Anti-Balakas (source : la-croix.com)

Milice Anti-Balakas (source : la-croix.com)

Jusqu’à quand cette politique de terreur, d’intimidations, de menaces… va-t-elle continuer? Et quand enfin les uns et les autres qui se trompent en organisant ces incessantes messes comprendront-ils que cela n’apportera rien de concret tant que les pressions coercitives et les méthodes fortes n’entreront pas dans les principes du jeu? A quand l’application réelle et effective de la résolution 2127 adoptée par l’ONU le 05 décembre 2013 autorisant l’usage de la force pour « rétablir la sécurité et l’ordre public » en Centrafrique, restaurer l’autorité de l’Etat face à ceux qui n’ont pas intérêt à ce que la paix revienne, qui continuent de terroriser et de tuer des civils, aux regards des évènements du vendredi 05 Décembre 2014 à Bambari, ville du centre du pays, qui ont coûté la vie à trois soldats centrafricains de la garde rapprochée du président du Conseil National de Transition( parlement provisoire), Alexandre Ferdinand Nguéndet qui a failli être tué?
A quand la fin de l’Etat de siège imposé par des bandes armées de tout bord et la communauté internationale qui s’illustre par son mutisme et son inaction, aux Centrafricains?
Que se passe-t-il?
Les autorités de la transition et les Nations Unies, représentées par la Mission Intégrée et multidimensionnelle de Stabilisation de la Centrafrique (MINUSCA) appuyée par son bras armé, les casques bleus, seraient- ils des géants aux pieds d’argile, des “généraux d’opérette” face aux milices chrétiennes Anti-Balakas et aux rebelles musulmans de la coalition Séléka au point de négocier à tout bout de champ et de faire des concessions ne satisfaisant que les intérêts égoïstes, particuliers et partisans des uns et des autres au grand dam du peuple Centrafricain?
Ces bandits et “terroristes” qui sèment désolation, tristesse, mort sur leur passage… depuis plus de deux ans et continuent d’exécuter leurs machiavéliques politiques de destruction et d’aliénation de toute une Nation seraient-ils ainsi assez intouchables et vêtus de cuirasses d’impunité au point de disposer du Droit de vie ou de mort d’un peuple sans pouvoir s’inquiéter en déambulant fièrement avec leurs armes de guerre, arborant leurs galons opportunistes à la barbe de leurs propres victimes, le peuple, au vu et au su des forces internationales et du gouvernement avec qui ils se croisent et se partagent les tribunes des institutions républicaines, sur le sol centrafricain?
De qui se moque-t-on?
Cette politique de “bras ouverts” à sens unique et d’impunité n’octroie-t-elle pas une réputation de “poltrons”, en traduisant une faiblesse du gouvernement centrafricain et de son alliée, la MISCA? Au point de favoriser la radicalisation des positions des belligérants, la redynamisation de leurs ambitions démesurées, leurs velléités politiques et le retour des principaux artificiers de la poudrière Centrafrique, les pyromanes et Seigneurs de guerre , les principaux dirigeants, financiers et pourfendeurs des groupes armés tels le général Koumtamadjim, alias Abdoulaye Miskine, libéré par les autorités camerounaises, puisque servi comme monnaie d’échange en contre partie des militaires camerounais retenus en otage par ses éléments, les anciens chef d’Etat Centrafricains, Michel Djotodja et le Général François Bozizé, pour ne citer que ces deux-là, dont les intentions …pour la reconquête du pouvoir ne sont plus à cacher.

L'armee française
Nonobstant, le peuple dont il a fait couler le sang, arborant son mépris du pays qu’il a dirigé tel un patrimoine familial et sans partage pendant une décennie, le général Bozize, quant à lui, est sorti de son silence ce 10 décembre 2014 dans une adresse faite au peuple Centrafricain pour dénoncer « le caractère inopérant de l’accord de cessation des hostilités », signé à Brazzaville en juillet, d’après ses propres expressions, mais surtout pour réaffirmer sa volonté de renouer avec la vie politique centrafricaine, ayant dans sa ligne de mire les échéances électorales de 2015 …
Il n’y a qu’en République Centrafricaine que le ridicule ne tue pas pas! Les gens ont la mémoire courte !
Mais rien ne nous étonne, telle est la conséquence logique de la passivité, de la “politique du ventre” et de distribution généreuse et gracieuse de l’argent des contribuables et des prêts contractés auprès des institutions de Bretton-Woods et des Bailleurs de fonds internationaux au nom du peuple, par les autorités. La transition, à ceux-là (rebelles, milices) même qui maltraitent, terrorisent et tuent le peuple. Comme si on les supplie de se calmer, de ne pas s’énerver. Comme quoi pour être “quelqu’un” en Centrafrique il faut être un terroriste et assassin! (1)

Scénario digne d’un film hollywoodien qui occuperait la première place du box-office américain! Car plus tu tues et excelles dans la rébellion, plus tu t’élèves dans la société, en Centrafrique. Pour devenir ministre, il suffit d’avoir quelques kalachnikovs, des munitions, réunir les siens, sa communauté, prendre une localité en otage, abattre quelques pauvres citoyens…et se voir bombarder X portefeuilles ministériels, direction générale, être véhiculé, logé, entretenu aux frais l’Etat avec la bénédiction de la communauté internationale…sans être inquiété de lendemains difficiles, ni d’une quelconque poursuite par les juridictions nationales ou internationales. Pauvre Centrafrique!
Nombreux sont ceux qui sont passés par ce tristement célèbre canal, qui ont fait piètre figure…évincés en un temps record, ils veulent encore revenir aux affaires, quitte à massacrer le peuple. Suivez mon regard!
Trop c’est trop!
Le peuple n’a que trop souffert de ces alliances macabres et des calculs politiciens! Et nous sommes en droit de nous poser cette question qui brûle toutes les lèvres: “A quel jeu joue la France et la force Onusienne en Centrafrique?”
Car, plus d’un an après le lancement de l’opération Sangaris et le déploiement des forces onusiennes le bilan est mitigé. La sécurisation du pays et la restauration de la paix sur l’ensemble du territoire sont loin d’être concrétisées.
Les Sélékas bloquent et occupent des villes entières de province avec armes en main, instaurent leur administration, elles font ce qu’elles veulent; les anti-Balakas divisent la capitale Bangui, érigent des barrières illégales et dictent leur loi, pillent, braquent…et Sangaris et force onusienne ne les inquiètent pas. C’est vraiment triste de constater cet amateurisme.
Pourquoi ce jeu??? Il a fallu moins de deux mois à la France de Hollande pour libérer le Mali des groupes rebelles d’Acqmi lourdement armés et de rétablir l’ordre républicain. (2)

La presidente Catherine Samba Panza

La presidente Catherine Samba Panza

Les centrafricains et l’opinion internationale doivent être vigilants. Le peuple demande juste la paix et la liberté ses ses mouvements, c’est à dire le désarmement équitable de toutes les milices (anti Balakas, Sélékas) et autres groupes rebelles, à l’instar du mouvement rebelle ougandais, la LRA, de Joseph Koni ( Sud-Ouest) qui pullulent le territoire centrafricain pour éviter que cet Etat soit le véritable sanctuaire des groupes rebelles et terroristes, car comme le déclarait l’ambassadeur de France en Centrafrique, Charles Malinas, en octobre dernier «Il est clair que le redressement de la situation en Centrafrique joue un rôle important dans la lutte contre le terrorisme. (3) Car si à l’inverse nous n’y parvenons pas, si la République centrafricaine devait glisser comme elle a glissé au mois de décembre 2013 dans des affrontements, naturellement cela formerait un terrain favorable pour les terroristes. Les forces internationales, les Nations unies, l’Union africaine, l’Union européenne, les Etats Unis, la France et les pays voisins de la Centrafrique sont unis pour lutter contre le terrorisme».
Alors il est temps que tout ce beau monde prenne ses responsabilités, afin que le peuple Centrafricain soit enfin libre!
Qui a des oreilles pour entendre, entende!

 

(1) Depuis la mise en place du gouvernement centrafricain de transition, les bailleurs de fond traditionnels de la Centrafrique tels que la France, l’Union Européenne et les pays amis de la sous région à l’instar du Congo Brazzaville, de la Guinée Equatoriale, de l’Angola…ont accordé à la RCA d’importantes sommes d’argent pour la paiement de salaires, le relèvement du secteur économique, la subvention du budget de l’Etat…malheureusement une bonne partie de cet argent est détournée et alimente les comptes de certains chefs rebelles, leurs miliciens et politiciens centrafricains (NDLR affaire 10 millions de dollars octroyés par l’Angola, qui a défrayé la chronique il ya 2 mois).

(2) L’intervention française au Mali en Janvier était baptisée “Opération Serval “. Et il a fallu moins de 2 mois à la France pour “nettoyer” le territoire malien des djihadistes et les mettre en cavale.

(3) Le Sud-Est de la Centrafrique est occupée depuis 2009 par la rébellion ougandaise de la L.R.A (Armée de la résistance du Seigneur) de Joseph Koni et y est élue domicile en semant terreur et désolation dans cette localité sans être inquiétée. La semaine dernière elle a encore fait des malheurs.

 

Cameroun : Quand le projet de loi mélange protestation citoyenne et acte de terrorisme

[Par René DASSIE’]

C’est la première réaction d’hostilité au discours prononcé à Dakar par François Hollande contre la tendance à s’éterniser au pouvoir de certains dirigeants africains. Le pouvoir camerounais envisage d’interdire toute manifestation publique, sous peine de mort. Un projet de loi allant dans ce sens a été déposé à l’Assemblée nationale camerounaise. Ce texte, sur lequel les députés sont invités à débattre dès vendredi, punit de la peine capitale toute manifestation de nature à gêner le fonctionnement normal des institutions. Sous couvert de la lutte contre le terrorisme.

(Source : lepoint.fr)

(Source : lepoint.fr)

L’opposition et la société civile exigent son retrait, jugeant qu’il brime les droits politiques au moment où des voix s’élèvent de toutes parts pour réclamer le départ de Paul Biya, 81 ans, au pouvoir depuis 32 ans.
“Quand on fait voter des peuples pour des Constitutions à travers des référendums, on ne peut pas les modifier impunément. Quand un chef d’Etat reste plusieurs mandats de suite, et qu’à un moment il est fixé une limite d’âge ou il est fixé un nombre de mandats qui ne peut pas être dépassé, il ne peut pas en être décidé autrement”, avait déclaré François Hollande dans un discours prononcé à Dakar, la capitale sénégalaise, lors du 15e sommet de la Francophonie qui s’est terminé dimanche. Un sermon inédit, assené sans langue de bois diplomatique, qui visait particulièrement quelques dirigeants africains, présents eux aussi à ce sommet.
Interrogé peu après par TV5 et France 24 sur la situation de la République démocratique du Congo (RDC), du Congo-Brazzaville ou du Rwanda, le président de la République enfonce le clou. Il laisse entendre que l’expérience burkinabè, où Blaise Compaoré a été forcé par la rue à quitter le pouvoir « peut servir de leçon à beaucoup de chefs d’Etat, pas seulement en Afrique (…) On ne change pas l’ordre constitutionnel par intérêt personnel.»

Louise Mushikiwabo dans France 24

Louise Mushikiwabo dans France 24

Sur France 24, seule la ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo, dont le pays est en froid avec la France au sujet du génocide de 1990, critique M. Hollande. Elle juge son attitude « très inélégante ».
«Je trouve ça gênant qu’un président qui est avec ses pairs, ici, au sommet de la Francophonie ne vienne pas discuter avec eux, mais dicter ce qui devrait se passer dans leur pays.»
« Ce n’est pas Paris qui décide [de l’avenir politique des Africains] », tranche-t-elle.
Les dirigeants africains, eux, ont acquiescé en silence. Parmi eux, Paul Biya. Gêné par la limitation des mandats, il avait réussi à modifier la loi fondamentale camerounaise il y a quatre ans pour se représenter en 2011. Au prix d’une répression féroce des manifestations qui avait fait une centaine de tués. Elu pour sept ans lors d’un scrutin entaché d’irrégularités selon les organisations internationales, son mandat actuel court jusqu’en 2018. Cependant, il craint la contagion de l’expérience burkinabè, où, soumis à la pression de la rue, Blaise Compaoré a dû abandonner un mandat en cours.
A Yaoundé en effet, de plus en plus de voix s’élèvent pour réclamer son départ. Et la nervosité du pouvoir ne cesse de s’accroitre. Un débat consacré à la gouvernance et la démocratie a été interdit. L’élection du nouveau président de la Fédération camerounaise de football (Fecafoot), verrouillée d’avance par le pouvoir qui a éliminé tous les candidats sauf celui qu’il soutenait, a été reportée en 2015. Par crainte des manifestations de rue.
« Après le départ de Blaise Compaoré au Burkina Faso, Paris s’inquiète des risques d’éventuelles pressions de la rue pour obtenir [le départ des] dirigeants au Cameroun et au Tchad », lit-on cette semaine dans le JDD, qui cite une source diplomatique.

Assemblée nationale du Cameroun (source :rjcpatriote.centerblog.net)

Assemblée nationale du Cameroun (source :rjcpatriote.centerblog.net)

Mardi, le gouvernement camerounais a déposé à l’Assemblée nationale un projet de loi portant sur la répression des actes terroristes. Le prétexte ? La lutte contre les islamistes de Boko Haram venus du Nigéria voisin. Depuis plusieurs mois, ceux-ci font des incursions dans le nord du Cameroun, soumettant les populations et l’armée à rude épreuve. Cependant, à la lecture du projet de loi, les opposants et les spécialistes du droit pénal découvrent, horrifiés, qu’il vise en réalité à criminaliser toute manifestation contre le régime.
Le texte amalgame en effet acte de terrorisme et manifestation de protestation citoyenne. Il interdit tout acte qui se traduirait par « la perturbation du fonctionnement normal des services publics, la prestation des services essentiels aux populations », ou qui créerait « une situation de crise au sein des populations ». Sanction : la peine capitale, toujours en vigueur dans le pays.
« N’importe quelle manifestation d’une quelconque opposition à une entité publique ou privée est assimilable à du terrorisme et dès lors, l’auteur est susceptible d’être condamné à mort. A titre d’exemple, la grève de la faim des employés de la CNPS [Caisse nationale de prévoyance sociale] ou la manifestation des étudiants sur la voie publique peuvent désormais entrer dans la même catégorie que le dépôt de bombes des activistes de Boko Haram », a réagi Edith Kah Walla, présidente du Cameroon People’s Party, un des partis d’opposition les plus actifs.
Juriste mondialement connu et ancien ministre délégué à Justice, Maurice Kamto, par ailleurs président du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), un parti d’opposition, ne dit pas autre chose. « Le projet de loi créé manifestement une infraction politique puisqu’il interdit de la sorte l’expression collective, même pacifique, d’un désaccord politique. Il assimile en définitive les populations camerounaises qui manifesteraient leur mécontentement à des terroristes », écrit-il dans un communiqué de presse publié mardi.
M. Kamto ajoute que le texte viole plusieurs dispositions du droit international, notamment la Résolution 2178 du Conseil de sécurité relative à la lutte contre le terrorisme. Laquelle enjoint les Etats confrontés au terrorisme à agir de manière à préserver les droits et libertés individuels.
« Au nom de la liberté et de démocratie chèrement acquises dans notre pays, de la paix si chère à notre peuple, barrons la voie à ce projet de loi inique! Personne ne devra dire demain qu’il ne savait pas », tranche Maurice Kamto.
A sa suite, des citoyens camerounais vivants au pays ou à l’étranger ont initié une pétition, demandant le retrait pur et simple du projet de loi.