La jambe morte du Narcisse syrien

[Par Rana ZEID]

J’ai un beau visage. Je ne suis pas Narcisse ; mais, je suis quelqu’un qui est tombé amoureux du visage de son cadavre retourné à la vie, du reflet de soi-même mort, à la surface d’un sang blanc. Je suis un narcisse syrien, un combattant (Ahmed.I). Je ne peux pas aller sur ma tombe, dans la ville de Al-Bab, dans la banlieue d’Alep. L’EIIL domine la région. Mais, je reviens de ma mort, pour tuer mon tueur.

Ahmed.I

Je ne savais pas encore que j’étais mort. Mon père est venu vers moi, trois heures après l’amputation de ma jambe. Il a dit : «Nous avons pris ta jambe pour l’enterrer, elle était encore fraiche, dégoulinante de sang, comme vivante».
Je lui ai dit: «Est-ce qu’elle est toujours vivante? Est-ce vrai qu’elle n’est pas morte ?».
Mon père et mes oncles ont embrassé ma jambe amputée et l’ont enterrée dans le cimetière près de l’hôpital. Sur la tombe, ils ont écrit : »Tombeau du martyr (Ahmed.I) 09/10/2012».
L’EIIL as tué mon oncle, un combattant de l’Armée Libre ! Mais, après sa mort, sa phrase s’est enfuie vers moi: «Quand on l’a enterrée, ta jambe était comme un poisson au moment où il quitte l’eau».
Dans le reflet, à la surface du sang blanc, je suis un cadavre. Et l’écho répète: «ta jambe est vivante. C’est toi qui es mort».
L’armée du régime syrien tentait de nous envahir, d’entrer dans notre secteur par Said Ali. Et nous, entre Said Ali et la Porte de la Victoire, nous étions cinq combattants d’un bataillon qui avait pour nom « Brigade de l’Unification». Nous couvrions la retraite d’autres bataillons de l’Armée Syrienne Libre, à Al Azaza.
Une Kalachnikov à l’épaule (type 56, chinoise), j’étais prêt pour ma scène de mort : «en silence, je fume une cigarette et feuillette un livre idiot sur Saddam Hussein ; je suis assis sur une chaise, attendant la balle». La ville d’Alep me doit un peu de sang, car depuis longtemps, je voulais saigner, même un peu, sur son territoire. J’aime ses pavés anciens.
Nous poussons la terre avec nos pieds, nous la faisons dérouler dans la direction opposée à celle vers laquelle nous courons. L’armée du régime fait le contraire, pour nous priver de notre terre. C’est à cause de cela que nous sommes en conflit avec elle, pour empêcher sa terre étroite de repousser notre vaste terre. Nous avons récolté une terre hérissée d’épines, pour y planter une fleur, seulement une fleur. C’est notre guerre. Aucune fleur jusque-là n’a résisté. L’armée du régime a tué toute idée.
Comme un corbeau brise une noix, le tueur déchiquette un corps, et le laisse moisir, derrière lui. Je suis un homme qui aime son corps, je lui mets une couronne d’or, j’orne mes jambes de bois de narcisses jaunes. Et mon sang est de narcisses blancs. Chaque fois que je tue l’un de ces monstres, son corps redevient humain dès qu’il touche le sol.
Al AZAZA. Je suis blessé à la jambe droite, six doigts au-dessus du pied. Le chef de la bande du vieil Alep, Khitab Almaraei, de son nom de guerre, a été envoyé à la pointe du combat. Je suis dans une situation difficile. D’autres combattants sont abandonnés à eux-mêmes. Je garde l’endroit, et j’écoute ce bruit de forage qui se rapproche. Je ne sais pas si c’est l’ennemi qui fore ou si ce sont les nôtres qui violent les bâtiments, pour progresser à travers les trous ainsi dégagés. Quelqu’un brise ma solitude, un combattant d’un autre bataillon. Il vint parler avec moi: «Mon frère, cet endroit est risqué. Il est visé. Abandonne-le», j’ai répondu: «Eh bien, battez en retraite», il répond alors avec le ton de son milieu : «Vous êtes du peuple de la campagne, vous avez de l’orgueil ». Mais , moi, je suis d’Alep. Alors j’ai crié: «Vous devriez mourir ici, plutôt que de quitter votre poste». Il a répondu tout en courant : «Meurs toi-même, ici ».
J’ai trouvé un livre couvert avec une photo de Saddam Hussein, je l’ai pris et j’ai commencé à le lire; alors le crépitement des balles s’est atténué, et le forage a cessé. J’attendais ma mort. Le sniper de l’armée syrienne nous a rejoint, a découvert l’endroit ; mon ami a été touché par quatre balles, dans la tête et le ventre, mais il a survécu comme une fleur de cactus. Le médecin syrien a dit: « Votre opération est pour demain ». Ce lendemain-là, ils ont découvert des bouts d’artères dans mes jambes. Ils m’ont envoyé dans un hôpital d’Al- Bab.
Mes jambes sont mortes. La gangrène s’est infiltrée jusqu’au-dessus du genou. Un égyptien de Médecins Sans Frontières a dit : »La balle explosive était également empoisonnée».
Je suis le combattant de la mort, je visite ma tombe tous les soirs.

Après l’opération, le régime syrien a volé mon cadavre, mon visage, mes jambes, mes cheveux, et jusqu’au khôl noir de mes yeux ; il m’a volé à moi-même. Est-ce parce que j’ai tardé à déserter, mon Dieu? Maman criait: «Comment vas-tu porter les pantalons et les chaussures, que tu avais tant désirés ?».
La guerre est nue ; un voyage dans tout ce qui est noir.
Tout le monde le savait, que le vieux sage de Marea (Hajji Marea) ne voulait pas soigner ceux qui étaient uniquement de Marea. Mais le chef des opérations militaires de la «Brigade de l’Unification», le martyr Abed Qader Saleh, Samir Kavrir, m’a dit: « va en Turquie et enracine-toi chez Mahmoud ».
Les images de la mort de Narcisse flottent dans ma tête, image après image. Tout est lent, les bruits sont lents, seules les images viennent rapidement. Le jeune homme lui-même, les respirations, les mêmes, se répètent. Un jeune que je ne connaissais pas me portait sur son dos, et il a couru sur une distance de deux cents mètres. Je n’ai pas vu son visage. Comme j’aurais aimé le rencontrer !
Sa voix est mon sang versé, mon sang qui a peur, et mon sang blanc: «Nous allons au paradis. Je suis aussi infecté que toi, mon frère». Vertiges, ses paroles sont lentes et le paradis est fait d’images rapides qui vont et qui viennent. Il m’a posé sur le chariot de légumes et puis est tombé sur le sol. Le chariot s’est mis à bouger, trois hommes le poussaient. J’ai dit: « le vendeur d’Alep a dû mettre une chaîne, pour bloquer la roue, pour éviter que le chariot ne soit volé par les tyrans». Je suis un grain de raisin craquelé de douceur. Je suis dans le paradis du chariot en mouvement, chantant pour mon frère, tombé à la terre: « on ira tous les deux au paradis ». Les amis du bataillon m’ont dit qu’ils avaient vidé un chargeur entier pour briser la chaîne du chariot.
Nous attachons le bol de lait à Alep, avec une longue chaîne, après l’avoir troué, car les chats sont perfides et lèchent le lait et dévorent après lui la soucoupe.
Cher Saint-Georges, quand vous tuez le monstre sous votre jument, n’oubliez pas que vous le tuez, pour défendre notre âme assassinée.
Nous restions dans le “zoo”, à Douma, pour chasser les oiseaux migrateurs, venant de l’inévitable parti en Syrie (le parti Baath). Les manifestants de la liberté à l’extérieur des murs du jardin, ont réveillé les canards ! J’ai dit à l’officier: «Ne m’attribuez pas une arme à feu !» Il m’a frappé jusqu’à ce qu’il tombe de fatigue.
Je suis une recrue de la Garde Républicaine (Ahmed.I), mon numéro, 7340. Mais je ne me souviens pas des autres numéros. J’annonce que je déserte de l’armée du régime et du livre de Gibran « les ailes cassées » ; je l’annonce aux camarades qui ne l’ont pas fait, et je leur donne mon carnet de notes, qui était ma façon à moi de résister à la puissante organisation militaire qui a essayé de faire de moi un monstre, un tueur, uniquement pour rendre éternelle l’image du chef, accrochée au-dessus du lit militaire, un lit dont la couverture verte et mystique et moisie recouvre notre squelette. Je suis (Ahmed.I), un cadavre pur et sincère, insensible à vos efforts pour me stimuler ou me terrifier. Je ne dirigerai pas mon arme vers la poitrine de mon frère rebelle. (décembre 2011).
Mon oncle a dit à mon père : «Le sucre manque. Je vous en enverrai un sac. Essaye de le cacher». Je n’ai pas compris à l’époque le sens du mot sac. Mon oncle, cet après-midi, pensa sur le trou dans le temps, les récipients, la tasse de thé chaud, et le calmant (Alcetacodaúan).
Je me suis fondu dans la ville de Marea, la ville de Riyad Saleh Hussein, et suis resté là deux mois, à l’écart des opérations militaires, des bataillons, au début de la création de l’Armée Syrienne Libre. Nous étions dix-huit rebelles. Parmi nous le bon chef Al-Saleh, rien à voir avec nous, sauf les armes, rustiques et légères. Ibrahim est mort, c’est un martyr, et, moi, j’ai été attristé. Je suis comme lui, mort et martyr. C’est pourquoi je reviens, afin de tuer mon tueur.
Au sommet de la montagne, j’étais orphelin, couvert de neige : «Oh, mon Dieu faîtes que j’obtienne une permission, une seule. Si je demande au chef, il m’écrabouillera le visage. Le battement de la désertion s’entend. L’officier nain a faim. Il dévore le cou du rebelle. Les exercices militaires ont fait de moi un cadavre.
Les cheveux poussent tous seuls, sur le cadavre des recrues. J’ère et mes cheveux sont semblable à une herbe hybride plantée sur mon corps. Sous la couverture verte et mystique et moisie, je recherche dans le livre « les ailes cassées » la terre de Droit. Je suis une recrue syrienne, (1991- 2012), un cadavre qui a mémorisé le chant des oiseaux et les répète, puis se rappelle de la manière dont le vent caressait ses longs cheveux.
J’ai reçu un document du chef de la brigade 104, après qu’il ait défendu les rebelles au cours d’une assemblée militaire. Il dit: « A transporter vers la Direction générale de la Police (22), dans la prison de la Garde républicaine (nom de code: Moulin Rouge), à cause de son incitation à la division et l’abaissement du prestige de l’Etat ».
Je suis un cadavre féroce. Seuls les mots dans « les ailes cassées » apaisent ma douleur, l’engourdissement, lors de l’exercice matinal.
Ils m’ont mis avec les détenus, dans une pièce étroite, à la prison de Mezze. Vase en verre, brisé, urinoir, collectif. Ils ont écrit sur le mur: « C’est quoi ta pointure? Ajoute 50 ». « Quelle dimension, exacte, pour le trou de ta tombe? » Un soldat n’a pas le droit à une tombe. J’ai été torturé pendant six jours, comme un arabe accusé. Mon corps est boursouflé à cause de la chaîne en silicium et du bâton électrique. Mon âme est épuisée. Je suis devenu un oiseau blanc de sang.
Le tyran Bashar al-Assad m’a tué avec un couteau, a tué les manifestants par balle et mon frère Ayman avec un missile, avant que la Terre ait fait un tour.

 

 

15 septembre, Journée internationale de la Démocratie : Pour l’engagement des jeunes

[Par John CHITAMBO LOBE]

La journée internationale pour la démocratie, invite tous les leaders politiques du monde entier à écouter, à respecter les valeurs et les principes de la démocratie et à répondre avec loyauté aux peuples qu’ils dirigent, soit en s’exprimant directement au peuple soit à leurs représentants élus par le peuple.

L’Assemblée Générale des Nations-Unies,  aujourd’hui, encourage tous les gouvernements du monde entier, à promouvoir les valeurs, les principes et les programmes de la démocratie dans leurs pays.

Personnel électoral lors des élections nationales soudanaises Photo ONU / Mohamed Siddig

Personnel électoral lors des élections nationales soudanaises
Photo ONU / Mohamed Siddig

Elle a décidé que le 15 septembre de chaque année soit la date réservée pour: “la journée internationale de la démocratie” (ou en Anglais: International Day of Democracy). Le thème pour cette année 2014 est : “Engager les jeunes gens dans la démocratie“. Ce thème a été choisi suite aux manquements d’engagement politique des jeunes gens pour la démocratie, ces dernières années et ce, un peu partout dans le monde entier. Alors, il faut mobiliser les jeunes gens démocratiquement et politiquement afin qu’ils soient responsables dans le fonctionnement des affaires de l’Etat et dans leur pays et qu’ils prennent au sérieux les affaires politiques et publiques de leurs pays. Il faut également faire participer les jeunes gens au  développement politique de la démocratie de leur pays et les informer, en tant que jeunes engagés, sur les risques, les profits et opportunités existant dans le processus de la démocratie de leur pays.

L’épanouissement, le progrès et le développement de la démocratie à travers le monde actuel est une réussite significative. A notre époque, presque dans tous les pays du monde, le peuple veut le système de la démocratie, c’est à dire le pouvoir du peuple : « pour le peuple et par le peuple ». Malgré cela, il y a encore beaucoup à faire pour le développement de la démocratie dans de nombreux pays du monde ;  par exemple, là  où la démocratie est plus jeune,  camouflée ou masquée par la dictature et vraiment menacée  par des leaders politiques égoïstes qui ne veulent pas partager le pouvoir démocratiquement mais qui veulent rester au pouvoir, avoir un pouvoir à vie comme des rois et des princes, et cela , surtout dans les pays africains, au proche et moyen orient, dans les pays asiatiques et dans quelques pays d’ Europe et d’ Amérique.

Le monde change, évolue, tout doit changer politiquement, socialement, économiquement culturellement. Les époques de dictature, de coups d’état militaires sont révolues. Tous les Etats du monde et leurs leaders politiques doivent pratiquer les valeurs et les principes de la démocratie dans leur pays et cela au profit du peuple. Ils doivent mettre fin aux rébellions militaires, au terrorisme, aux invasions frontalières, aux combats inter- gouvernementaux entre les différents pays,  ainsi qu’aux discriminations socio-politiques ou religieuses et ce, pour un monde démocratique.

La démocratie est une valeur universelle basée sur la libre expression de la volonté du peuple pour déterminer son système politique,  économique, social et culturel et sa participation complète à tous les aspects de sa vie.

Ces valeurs et ces principes forment un pouvoir basé sur la loi et exercé sous le respect des droits humains et de la liberté fondamentale pour tous. La démocratie est donc un gouvernement qui respecte les droits humains et la liberté fondamentale du peuple, qui promeut et accomplit ses promesses afin de permettre à son peuple de vivre dans la dignité.

Le peuple doit prendre part aux décisions qui touchent sa vie. Les femmes sont en partenariat avec les hommes dans le domaine des affaires politiques.

Tout le monde est libre de s’exprimer sur la race, l’ethnie, la classe sociale, le sexe, l’âge, … Les valeurs et les principes que tout le monde doit suivre pour une grande participation sont : l’égalité,  la sécurité et le développement humain.

Des écoliers de l'école de Kamwala, près de Lusaka [Photo tirée du site : rnw.nl]

Des écoliers de l’école de Kamwala, près de Lusaka – Zambie [Photo tirée du site : rnw.nl]

Les jeunes sont l’avenir de ce monde. Dans ma langue maternelle, le Bemba, en Zambie, on dit: “Imiti ikula impanga” qui veut dire tout simplement que ce sont les jeunes qui feront le monde de demain.  La majorité de la population du monde entier est constituée de jeunes âgés de15  à 25 ans. Ils doivent être éduqués, formés et être préparés politiquement et démocratiquement pour être dirigeants ou leaders du monde de demain.  J’ai interviewé quelques jeunes résidents : étudiants, demandeurs d’emploi, jeunes exilés au centre France Terre d’Asile et à la préfecture de police de Paris. Tous ces jeunes proviennent de différents pays du monde, vivent en France ; certains sont à la recherche d’un travail, dans les rues de Paris, dans les fameux quartiers Château Rouge et Château d’Eau ; d’autres  sont étudiants dans différentes universités de Paris, je les ai rencontrés à la bibliothèque national François-Mitterand.  Ils m’ont fait part de leurs différentes opinions sur le manque d’engagement démocratique dans leur pays. Voici ce qu’ils m’ont rapporté : Dans beaucoup de pays en voie de développement dont ils sont issus la politique n’est pas une affaire de jeunes car ils risquent leur vie ; en Afrique, en Asie, au Proche Orient, au Moyen Orient, les jeunes sont souvent sous évalués. La politique n’est pas pour les jeunes, ils ne sont pas assez mûrs ou sages pour être de bons dirigeants. Il y a une vraie  discrimination politique à l’égard des jeunes; ceux qui sont au pouvoir ne leur donnent pas la chance ni de s’exprimer,  ni de prendre part aux affaires et fonctions publiques de leur pays. Ils sont seulement utiles, comme militants de partis politiques lors de manifestations. Pendant les campagnes politiques, lors d’élections,  on leur fait de fausses promesses dans le but de gagner les élections. Après  la victoire, ils sont oubliés, complètement dans la misère,  dans la rue sans travail malgré leurs qualifications, leurs diplômes : licences, masters ou doctorats. C’est le chômage. Souvent ils sont utilisés seulement dans les propagandes pour gagner le pouvoir, dans des rébellions, des guerres civiles; parfois ils sont recrutés  de force au profit de vieux dirigeants au pouvoir qui écartent souvent les jeunes sous prétexte qu’ils manquent de sagesse pour diriger. Les jeunes sont intimidés par les vieux leaders politiques et s’ils  essaient de s’exprimer contre leurs dirigeants ils sont frappés, arrêtés, emprisonnés, envoyés en exil et même tués. C’est pourquoi les jeunes ne s’intéressent plus à la politique ou aux affaires du gouvernement juste parce que la démocratie ne marche pas dans leur pays. Ils ne profitent en rien de la démocratie et la politique met toujours leur vie en danger. Rien ne change,  ils ont peur, sont découragés pour s’intégrer dans les affaires politiques de leur pays. La conséquence de tout cela est qu’une majorité de jeunes gens vivent dans la pauvreté totale et toujours en conflit avec leur gouvernement. Dans beaucoup de pays du monde, l’espoir des jeunes gens dans la politique diminue avec le manque de participation aux élections.

Des Afghans votent lors d'élections historiques. [Fardin Waezi / UNAMA]

Des Afghans votent lors d’élections historiques. [Fardin Waezi / UNAMA]

Au Zimbabwe, le président Robert Mugabe au pouvoir, ne veut pas donner la chance aux autres. Chez moi, en Zambie, dans ma langue maternelle le Bemba:”Insansa ku chinjana” signifie : «  dans la joie, il faut échanger et donner la chance aux autres ». Au Zimbabwe, les soi- disant élections démocratiques menées dans ce pays, ne sont pas crédibles et justes. Elles sont corrompues, truquées.  Les opposants politiques sont arrêtés, mis en prison, frappés, menacés de mort ou parfois même tués. Cela n’est pas la démocratie.

Cette journée internationale  donne encore une nouvelle opportunité de revoir  le  progrès,  le développement et l’état de la démocratie dans le monde entier ainsi que  de juger le comportement  des différents leaders politiques au pouvoir. Sont-ils démocrates ? Ont- ils respecté les valeurs et les principes de la démocratie pendant leur mandat politique? Allons- nous les réélire prochainement ?  Cela  permettra  de renforcer les principes de la démocratie dans le monde et dans nos pays et de mettre fin  à la tyrannie ou la dictature de certains de nos leaders politiques .

En ce qui concerne l’instauration de la vraie démocratie dans nos différents pays,  c’est un processus qui demande beaucoup d’efforts et de volonté au niveau national et international. C’est seulement avec la participation complète de tout le monde  qu’on pourra changer quelque chose dans nos pays  sans oublier bien sûr le soutien de la communauté  internationale, des gouvernants et des gouvernés, de la société civile et des individus, afin que l’idéal  démocratique se réalise et que tout le monde (jeunes et vieux) se réjouisse.

Des résidents du camp IDP dans le nord du Darfour votent lors des élections soudanaises. Photo ONU/Albert Gonzalez Farran.

Des résidents du camp IDP dans le nord du Darfour votent lors des élections soudanaises. Photo ONU/Albert Gonzalez Farran.

Les liens entre la démocratie et les droits humains sont dans les articles suivants de la déclaration des droits de l’homme: Toute personne a droit à une nationalité (Article 15). Toute personne a droit à la liberté d’opinion et d’expression (Article 19). Toute personne a droit à la liberté de réunion et d’association pacifiques (Article 20(1). Toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par l’intermédiaire de représentants librement choisis (Article 21 – 1). Toute personne a droit à accéder, dans des conditions d’égalité, aux fonctions publiques de son pays (Article 21 – 2). La volonté du peuple est le fondement de l’autorité des pouvoirs publics; cette volonté doit s’exprimer par des élections honnêtes qui doivent avoir lieu périodiquement au suffrage universel  et au vote secret ou suivant une procédure équivalente assurant la liberté du vote (Article21(3). Toute personne a le droit d’élire un leader de son choix (Article 25). Toute personne a le droit de voter et de la liberté d’expression (Article 19). La démocratie élimine toutes formes de discriminations sociopolitiques contre les femmes et elle assure une égalité de pouvoir avec les hommes, celle de voter et d’être élues, de participer à la vie publique et de prendre des décisions (Article 7).

En conclusion, dans beaucoup de pays du monde, les femmes et les jeunes gens sont toujours sous représentés en tant  qu’élus, c’est une des raisons pour lesquelles ces pays échouent. Il faut répondre  aux échecs et aux besoins des jeunes et des femmes pour protéger leurs droits.

 

 

Si Douarnenez m’était conté

Reportage réalisé par Larbi GRAÏNE, photos de Muzaffar SALMAN

Quel lien y a-t-il entre les minorités culturelles au sens de l’ethnie et les minorités sexuelles dont les identités gravitent autour du corps ? Le festival de cinéma de Douarnenez du 22 au 30 août 2014 esquisse à sa manière une réponse en faisant venir sur la terre bretonne, peuples et personnes intersexes de l’Indonésie et d’ailleurs.

De gauche à droite : Vincent Guillot et Mami Yulli

De gauche à droite : Vincent Guillot et Mami Yulli

Les lèvres peintes de rouge fluorescent, une longue chevelure noire de jais qui lui retombe sur le côté droit de son visage, Mami Yulli, 52 ans, forme le V de la victoire. Mami est une waria. En langue indonésienne, ce mot désigne la personne transsexuelle (dit péjorativement travestie). Ce terme de waria, est en fait, un néologisme formé à partir de la contraction de wanita (femme) et de pria (homme).

Pour Mami Yulli, « une waria est une femme dans un corps d’homme». Elle a la conviction de mener une guerre éminemment politique contre l’injustice. Elle voit en le festival de cinéma de Douarnenez une belle tribune pour dénoncer l’exclusive dont sont frappés les warias dans son pays « Oui je crois que l’internationalisation de la question des warias va servir notre cause ». Attablée sous le chapiteau, Mami Yulli tourne vers nous un visage vigoureux aux traits viriles. Mais elle a des gestes graciles et la silhouette languide.
Elle a été contactée par Vincent Guillot, le transsexuel du cru, chargé par la direction du festival de prospecter à travers le monde la planète transgenre. Yulli a passé une jeunesse troublée et malheureuse. Renvoyée par sa famille, elle a dû vivre dans la rue et s’adonner à la prostitution durant 17 ans. Après une longue traversée du désert, elle entame des études en droit à l’université qui lui ont permis de devenir la première waria à être admise comme étudiante en licence puis en master. A l’université, elle va se distinguer par le port d’habits féminins singuliers censés refléter sa véritable personnalité. Devenue un modèle pour les autres warias, elle s’impose comme leur cheffe de file. Aujourd’hui, mère de 3 enfants, Mami Yulli, dirige en Indonésie ( le plus grand pays musulman du monde de par sa population), une association de warias qui revendique 7 millions de transsexuels sur une population de 240 millions de personnes.
Contrairement à ce qu’on peut penser, les warias ne se font pas une haute idée de la civilisation occidentale. « La religion musulmane certes pèse mais l’Indonésie n’est pas un Etat islamique, il y règne une forme de démocratie » fait -elle observer. Et d’analyser « le nombre important de warias, a permis à celles-ci de s’organiser au sein des communautés, et faire ce qu’elles veulent en privé ».
Tout ce que la culture locale a de mauvais en elle dans ses rapports avec les transgenres, Yulli l’impute à « l’influence néfaste » de l’Occident. « Chez nous, les gens sont tolérants et sont capables de pardon » explique-t-elle. Transsexuel venu d’Allemagne, Ins A. Kromminga, 44 ans, a été lui aussi invité par le festival. A travers une exposition de dessins, il dénonce la médecine qu’il présente comme une cure « tendance » bon chic bon genre, une sorte de science normée qui reçoit ses ordres de la société dans laquelle elle s’insère. Il décrit comme d’infamantes mutilations les opérations pratiquées sur les organes génitaux. La cinquantaine bien sonnée, hermaphrodite, les cheveux longs peints en rouge, les ongles en bleu indigo, Vincent Guillot, dont on a déjà parlé plus haut, approuve. Un tantinet porté sur le comique, ce natif de Landeleau en région Bretagne, sait se composer un visage grave et sérieux quand il le faut. Pour lui la langue bretonne est « une langue qui ne veut pas mourir ». A ses dires elle serait la langue vernaculaire dans la foire à chevaux (qui a lieu dans la région) car les paysans en l’utilisant cachent les défauts des bêtes afin de trouver preneurs. Ouvrier agricole, s’il se dit père de 4 enfants, il reconnaît néanmoins ne pas en être le géniteur. « Je ne comprends pas pourquoi on n’admet pas qu’un transsexuel puisse devenir le père d’enfants qu’il n’a pas conçus alors qu’on trouve la chose tout à fait normale quand il s’agit de personnes dont la sexualité est ordinaire ». Ses enfants sont-ils comment sur le plan sexuel ? Pour Vincent, la sexualité n’est pas héréditaire. La médecine, il n’en a cure et son cas est suffisamment éloquent. Vincent parle avec fierté de ses « quatre enfants épanouis qui ont tous fait des études ».Ses enfants sont hétérosexuels et leur personnalité est bien construite. Je pense à une question, et celle-ci est partie trop vite. Trop tard pour faire marche arrière : comment lui, hermaphrodite dominé peut-être par des tendances féminines peut-il incarner une présence masculine dont les enfants ont grandement besoin ? C’est la première fois au cours de cette conversation à bâtons rompus que je vois Vincent s’emporter. Il bondit de sa chaise et part aussitôt dans une diatribe contre la psychanalyse. Ma question l’a d’autant plus heurté qu’il connaissait mon origine nord-africaine. Je devais comprendre que « la culture orientale a été malheureusement pourrie par la psychanalyse, et qu’elle a fini par assimiler le discours colonialiste ». L’islam m’explique-t-il a toujours toléré l’hermaphrodisme alors que l’Occident confond souvent hermaphrodisme et pédérastie. Pour la psychanalyse, fulmine-t-il, nous sommes de la m…(les transsexuels, NDLR)

Une cité hantée par la mer

Julien

Julien

Les cheveux ébouriffés, Julien a l’allure d’un chanteur anglais de rock, pourtant il n’est qu’un marin pour le plaisir. Il a appris sur le tas après un stage de 3 mois auprès d’un ami, à conduire son bateau à moteur qui lui sert également de logis. Nous sommes trois journalistes du kezako, (un bulletin d’information papier sur le festival de cinéma) à s’être embarqués pour une petite incursion maritime dans la baie de Douarnenez. Un vent frais souffle. Toutes voiles déployées, la petite embarcation glisse sur les flots. Quand j’ai revu Julien, la soirée même, je l’ai trouvé au chapiteau dressé sur la place du festival en train de danser sur le rythme endiablé de la fanfare Reuz Bonbon. Julien ne dansait pas, plutôt il tanguait comme tout à l’heure à bord de son yacht. On le voyait comme un beau diable, tantôt rembobiner, tantôt débobiner les cordes, tantôt passer d’un côté à un autre au grès des changements de cap. Les Douarnenistes sont un peu comme Julien. La mer les habite, les imprègne même si elle ne les nourrit plus comme jadis. Douarnenez a, du reste associé son nom à son port de pêche renommé pour ses sardines à tel point que ses habitants sont appelés parfois « Penn sardin », (Tête de sardine) allusion aux ouvrières des conserveries à qui revient, entre autres, la tâche de couper la tête de ces poissons.

Mille et une légendes

La mémoire collective fourmille en outre de mille et une légendes qu’on ne cesse de conter depuis les temps les plus reculés. Quand on ne comprend pas la langue locale, on a tendance à rechercher dans le toponyme incompréhensible qu’est Douarnenez, le segment phonétique qui serait la trace du français. C’est ainsi qu’on repère la déclinaison en « nez », laquelle désignerait l’organe nasal. Or en réalité, il n’en est rien. Douarnenez veut dire en breton la terre de l’île (Douar an enez). Car l’île en question existe bel et bien. Elle s’appelle Tristan, et s’étale sur 6 hectares environ. Située à 50 mètres environ de la berge, on y accède à pied en temps de marée basse. Non seulement il y a l’île mais celle-ci n’est pas n’importe laquelle. Elle a naguère abrité les célèbres amours de Tristan et Iseut, les héros de l’œuvre de Béroul qui fait écho à un mythe breton très ancien. Tristan est appelée parfois localement l’île des brigands, preuve s’il en est, que l’histoire peut voisiner avec la pure légende. Cette île fut en en effet à la fin du XVIe siècle la base arrière du bandit Guy Éder de La Fontenelle dit en breton « Ar Bleiz » (Le Loup). On rapporte encore aujourd’hui sa fin tragique puisqu’il mourut supplicié sur la place de grève à Paris. Difficile de garder son calme à bord du yacht de Julien. Les vagues sont assez fortes pour le faire chavirer. Avant notre montée à bord, on nous a fait le récit de la ville d’Ys, qui aurait été engloutie par l’océan. Encore une légende bien douarneniste puisque la cité disparue avait été édifiée au large de Douarnenez. La ville d’Ys est liée à l’histoire de Dahut, fille du roi Gradlon, qui menant mauvaise vie, a provoqué le châtiment divin qu’elle méritait. Le roi Gradlon réussit seul à s’échapper des flots. Depuis cette époque dit la légende, la ville de Quimper, (distante de 25 km de Douarnenez) devint sa nouvelle capitale.

L’avenir de la pêche en question

Bruno Claquin

Bruno Claquin

La pêche à Douarnenez accuse un recul depuis la fin des années 1980 à cause de l’absence de relève dans une profession qui se transmettait jusque-là de père en fils. Arrivés à la retraite les propriétaires des gros chalutiers ont préféré larguer définitivement les amarres que de perpétuer le métier. Bruno Claquin, 51 ans, est l’exception qui confirme la règle. On n’a pas eu de difficulté à repérer son « Saint-Anne II » qui était amarré en rade. Ce marin-pêcheur qui a débuté sa carrière à 16 ans s’apprête après 23 années de pêche au large à transmettre le témoin à l’un de ses trois enfants qui a suivi un bac professionnel en pêche. Bruno Claquin est très sollicité, il cumule d’ailleurs les fonctions de vice-président du comité départemental des pêches du Finistère et de président de la Société nationale de sauvetage en mer de Douarnenez. « L’Europe a donné à partir des années 80 des subventions pour la construction de bateaux neufs mais personne n’a voulu investir, tous les patrons ont préféré vendre et aucun n’a renouvelé sa flotte» regrette-t-il. Il évoque avec nostalgie « l’époque des 6 hauturiers qui partaient pour 15 jours de mer jusqu’en Mauritanie pour pêcher la langouste ou jusqu’en Irlande et en Islande pour pêcher le lieu-noir ». A présent dans tout Douarnenez il ne reste qu’un seul sardinier immatriculé en ce port. C’est la région voisine, le pays Bigouden ( Ar Vro Vigoudenn, en breton, au sud-ouest de Douarnenez) qui a pris le relais. Les bateaux de gros tonnage appartiennent aux marins pêcheurs de Saint-Guénolé, du Guilvinec ou de Loctudy. Le port de Douarnenez est devenu un port de débarquement puisqu’on y débarque le poisson frais avant son acheminement par voie routière vers les ports de Concarneau ou de Saint-Guénolé. « La raison tient au fait que les ports du pays Bigouden sont des ports à marais qui ne peuvent recevoir de gros bateaux. Le port de Douarnenez offre l’avantage d’être un port à eau profonde, il y a au moins 15 mètres, c’est pourquoi il est devenu un port relais » précise Claquin.
Le port de Douarnenez paraît calme et peu actif. Pour Claquin « ce n’est qu’une impression, en réalité l’activité y est très intense, on ne la remarque pas, car les bateaux aussitôt qu’ils débarquent leur marchandise, repartent en haute mer »

Kezako bretonnant

Des membres de l'équipe du Kezako

Des membres de l’équipe du Kezako

La langue bretonne s’est taillée au festival de Douarnenez une bonne place même si elle n’a pas égalé celle du lion. Elle serait parlée en Bretagne par environ 200 000 personnes croit savoir Joubin Maelan, 30 ans, bretonnant et employé à l’Office public de la langue bretonne. Maelan a assuré les pages en breton du kezako. Il appartient au cercle privilégié des bretonnants en ce sens qu’il a appris le breton auprès de ses parents avant d’en consolider les acquis à l’école. Beaucoup de bretonnants aujourd’hui n’ont pas eu cette chance, ayant appris cette langue uniquement sur les bancs de l’école.On dit bretonnant pour désigner le locuteur du breton. Étrange vocable que ce mot dès lors que tous les locuteurs des autres langues sont déclarés, germanophones, anglophones ou berbérophones, c’est selon. « Bien que le mot existe, on ne dit pas brittophone, parce que le qualificatif de « bretonnant » est consacré par l’usage depuis le moyen-âge, il est d’ailleurs dérivé du verbe « bretonner », qui a préexisté aux vocables ayant le suffixe en -phone et qui, à la base ne sont pas des verbes mais des substantifs » nous explique cette dame cinéaste qui paraît être bien documentée sur la question. Une littérature en breton existe. Dans son magasin de bouquiniste sur le front de mer, impressionnant par sa surface, Jean-Pierre originaire de Paris, y tient un rayon dédié à cette langue. Y figurent entre autres des textes religieux, des poèmes anciens, des romans et des dictionnaires. « Il y a beaucoup de curieux qui viennent fouiller dans ce coin, même des non locuteurs du breton ont acheté des dictionnaires français-breton, ou anglais-breton » soutient-il. Paradoxalement une certaine rupture s’est opérée entre l’ancienne génération des bretonnants et celle qui a bénéficié de l’enseignement. « Les personnes âgées éprouvent un complexe à parler en breton avec les jeunes gens l’ayant appris à l’école, ils se sentent comme pris en défaut de parler une langue fautive, pensant qu’ils ont en face d’eux des locuteurs d’un breton académique» fait observer Patrick, un jeune homme bretonnant rencontré au festival. Cheville ouvrière de la cinémathèque du festival, l’anthropologue Claude Le Gouill, a trouvé aussi le temps pour alimenter de ses écrits les colonnes du kezako. Entre deux présentations de films, le voilà discourant sur les prochaines représentations. Il n’a jamais appris le breton, il se souvient que ses « grands-parents n’en voulaient pas ». Il ne cache pas le fait que cela l’ait amené à s’interroger sur sa propre identité. Un questionnement qui n’est pas du reste étranger aux recherches qu’il mène depuis des années sur les Amérindiens de Bolivie. « On a dit qu’il va disparaître dans les années 90, mais il n’a pas disparu, mais je pense qu’il y a un problème sur le plan numérique, l’avenir du breton est compromis si les choses reste en l’état » pense Jean-Arnault Derens, journaliste, spécialiste des Balkans qui a rempli les fonctions de directeur de la rédaction du kezako. Valérie Caillaud, présidente du festival ne croit pas que le breton puisse devenir vernaculaire dans sa région, même si elle souligne « l’atout que représente le soutien de l’Union européenne aux langues régionales ». D’après elle « le breton en tant que territoire – culturel et historique – et identité peut être renforcé si la Loire-Atlantique est rattachée à la Bretagne ».

 

 

Nous

Un poème de Ahmad BASHA.

Traduit de l’arabe au français par Florence Damiens.

(Cliquez ici pour télécharger la version originale en arabe)

Des petites filles assistent à des cours dans une école dans un bidonville de la banlieue d'Islamabad. [Une photo tirée de Franceinfo.fr]

Des petites filles assistent à des cours dans une école dans un bidonville de la banlieue d’Islamabad. [Une photo tirée de Franceinfo.fr]

Nous, nous sommes ceux qui grandirent dans la pauvreté des chantiers, des garages, des travaux de
peinture et de plomberie.
Nous ne pensions pas à écrire un jour sur les sacs de ciment.
Nous ne nous en servions que pour allumer le feu.
Pour nous, la nostalgie n’avait pas de sens, si ce n’est dans les coups douloureux infligés par la famille
et ses insultes intarissables.
Nul d’entre nous ne pouvait rendre heureuse la jeune fille qu’il aimait depuis peu, sauf en lui disant :
« Je t’épouserai bientôt. »
***
Nous, nous sommes les maîtres des histoires crues d’adolescents ;
Parmi nous se trouve celui qui s’adonnait au plaisir solitaire devant ses camarades alors que la
nouvelle maîtresse écrivait au tableau ;
Et un autre qui, lors de la Fête du Professeur, offrait à sa maîtresse
Un sac de pain.
***
Nous, nous sommes ceux qui, lorsqu’ils souffraient, frappaient leur tête contre le mur
Et arrachaient leurs molaires à l’aide d’une pince.
Nous, nous sommes ceux qui sentaient la valeur de la connaissance lorsque nos familles disaient à nos
professeurs :
« Frappez-les, si nécessaire. »
***
Nous, nous sommes ceux qui ont appris à nager dans des réservoirs.
Nous croyions aux pouvoirs des amulettes confectionnées par les mages,
Comme nous croyions aux apparitions du visage de Saddam sur la lune
Et de celui de Hafez.
***
Nous, nous sommes ceux qui enviaient l’homme assis à une belle table devant les toilettes publics.
Nous avions le sentiment d’être riches lorsque nous jetions dans son assiette une pièce de monnaie.
C’est encore nous qui organisions autant de mariages que de funérailles Pour leur abondance de nourriture.
***
Nous sommes ceux qui retenaient par cœur les films des bus « Hop hop »;
Qui ne se préoccupaient, dans les journaux, que des pages dédiées aux accidents et aux crimes.
De tous les livres, celui qui nous importait le plus était
Le carnet où l’épicier de notre quartier notait les comptes de ses clients.
***
Nous sommes ceux qui retenaient toutes les chansons irakiennes.
Lorsque nous désirions être heureux,
Nous pleurions.

 

79ème Fête de l’Humanité : La Courneuve village planétaire pendant 3 jours

[Par Carole ATTIOUMOU-SERIKPA]

La Courneuve accueille la 79ème Fête de l’Humanité les 12, 13 et 14 septembre prochains, précisément à l’Espace fête du Parc départemental Georges-Vallon. Cette édition rassemblera durant ces trois jours, des artistes populaires et engagés pour les causes humanitaires, mais aussi de jeunes talents, venus des quatre coins du monde.

humaniteSur la grande scène le public verra en attraction des célébrités comme, Massive Attack, Bernard Lavilliers, Alpha Blondy, Scorpions, Ayo, IAM… De grosses pointures de la musique mondiale qui non seulement feront vibrer leurs fans à cette occasion, mais saisiront également l’opportunité de cette tribune pour délivrer des messages de paix et d’amour à travers le monde. Comme cela se fait depuis l’institution de cette manifestation. Jazz, rock, reggae, classique…toutes les colorations musicales seront représentées à cette fête qui consacrera une part belle par ailleurs, aux expositions, aux débats, aux livres.

Le sport ainsi que des animations pour enfants marqueront aussi cet événement, dont l’objectif est de développer la diffusion de l’Humanité et dégager des bénéfices pour financer le journal l’Humanité.

La première fête de l’Humanité ou fête de l’Huma s’est tenue en septembre 1930, au Parc Sacco et Vanzetti, à Bezons. Elle a été interrompue pendant les années d’occupation et reprend juste à la libération. Jusqu’en 1956, elle se tient au bois de Vincennes. Puis en 1957 et 1958, la manifestation est déplacée au Parc Montreau, à Montreuil. En 1959, ce sont les terrasses de Meudon qui l’accueillent. De 1960 à 1971 des centaines de milliers de personnes prennent le chemin du parc des sports de la Courneuve, avec une escapade de 1966 à 1970 sur la pelouse de Reuilly, au bois de Vincennes, où elle ne cesse de grandir. De 1972 à 1998, la manifestation se tient dans le parc paysager de la Courneuve. Et depuis 1999, la fête de l’Humanité a posé ses valises à l’Espace fête du Parc départemental Georges-Vallon de la Courneuve.

8 septembre 2014 : Pourquoi les analphabètes existent-ils encore dans nos sociétés ?

[Par John CHITAMBO LOBE]

L’humanité a connu des avancées spectaculaires en matière d’éducation. Mais beaucoup reste à faire.

Photo tirée du site de l'Unesco

Photo tirée du site de l’Unesco

Il y a aujourd’hui exactement quarante-huit ans, l’Organisation des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture (UNESCO) décidait de faire du 8 septembre la «Journée Internationale de l’alphabétisation». C’était en 1966. Chaque année, cette journée est célébrée partout dans le monde pour attirer l’attention des citoyens et des dirigeants sur le rôle essentiel de la lecture, de l’écriture et du calcul dans la société moderne.
Car en dépit des efforts et des succès réalisés en matière d’éducation de base, de nombreux citoyens de la planète ne savent pas toujours lire, écrire et calculer. Près d’une personne sur sept demeure illettrée, et on compte jusqu’à 860 millions d’adultes analphabètes.
Et comme dans d’autres domaines, les femmes qui en constituent les deux tiers, soit 500 millions, sont les plus touchées. Dans beaucoup de pays d’Afrique et d’Asie, les chemins de l’école restent interdits aux jeunes filles à cause des politiques de discrimination qui trouvent leurs sources aussi bien dans la religion que dans les coutumes ancestrales.
D’où l’intérêt de continuer à souligner l’importance de l’alphabétisation auprès des citoyens et des relais sociaux que sont les collectivités, les communautés et les associations.
Depuis sa création en 1965, l’Assemblée générale des Nations Unies n’a eu de cesse de promouvoir l’alphabétisation pour tous et de rappeler son importance fondamentale en tant que droit humain. Néanmoins, relever le défi de l’alphabétisation au niveau mondial reste difficile.
L’alphabétisation est le fondement de l’apprentissage tout au long de la vie de chaque être humain. Elle participe à l’amélioration de son bien-être. Elle est le moteur du développement durable, de la technologie et du savoir. Au fil des années, la leçon d’alphabétisation a évoluée, mais le concept d’origine limité à l’acquisition des compétences de base en lecture, en écriture et en calcul est encore largement répandu. De même que la notion d’alphabétisation fonctionnelle qui associe l’alphabétisation et développement socio-économique de chaque pays. C’est pour cela que l’Unesco finance la construction d’écoles, forment et paye des éducateurs, alloue des fonds aux Etats en difficulté et organise des événements à travers le monde, notamment les prix internationaux d’alphabétisation.

 

Pauvreté, droit de la femme et analphabétisme

Photo tirée du site de l'Unesco

Photo tirée du site de l’Unesco

Les données collectées par l’Unesco montrent qu’il existe un lien entre l’analphabétisme et la pauvreté. Ainsi, au bas du tableau de la liste des pays par taux d’alphabétisation, on trouve des pays où le taux de pauvreté est très élevé comme le Mali, le Soudan du Sud, l’Afghanistan, le Niger et le Burkina Faso. Alors qu’à l’opposée, les pays développés ont les taux d’alphabétisation les plus élevés qui frôlent les 100%. D’autre part, ces statistiques montrent également un lien entre le respect des droits des femmes et le niveau de scolarisation général. « Éduquer une femme, c’est éduquer toute une nation”, dit-on en Zambie.
Toutefois, il ne suffit pas d’instituer l’école obligatoire pour tous comme le font les pays développés, pour résoudre le problème d’analphabétisme. Au Canada comme en France, de nombreux jeunes arrêtent leurs études sans avoir acquis le minimum nécessaire pour lire et écrire correctement.
Dans mon pays la Zambie qui compte un peu plus de 13 million d’habitants, jusqu’à 800 000 adultes sont analphabètes, ce qui est inacceptable, cinquante ans quarante ans après l’indépendance. Dans les zones rurales où sévit la pauvreté, de nombreuses jeunes filles abandonnent précocement leurs études très souvent après une grossesse non désirée qui les confinent à leur rôle de mères seules privées de soutien familial. D’autres, à peine pubères, sont mariées de force par leurs parents en échange de l’insalamu » ou le « lobola », la dot versée par la famille de l’époux.
Même la loi qui punit de plus de 20 ans de prison et aux travaux forcés les coupables de mariages forcés ne dissuade pas les adeptes des coutumes fermement établies.
Même des jeunes garçons se voient parfois contraints d’abandonner leurs études pour aider leurs parents dans les travaux champêtres ou la pêche. Résultat, à l’âge adulte, plus de deux millions de personnes ne possèdent que de faibles compétences en lecture, écriture et calcul. En d’autres termes, ces personnes ne disposent pas des aptitudes minimales pour traiter les informations de la vie courante ou utiliser les technologies de l’information. Un vrai scandale.

 

Célébrer pour sensibiliser

Photo tirée du site de l'Unesco

Photo tirée du site de l’Unesco

La célébration de la Journée Internationale de l’alphabétisation a commencé en 2000, et propose thèmes spécifiques pour sensibiliser le monde entier au sujet des bienfaits de l’éducation scolaire. Car l’éducation rend pérenne les objectifs de développement, pendant que l’alphabétisation est le fondement de tout apprentissage. L’éducation fournit aux individus les compétences nécessaires pour mieux comprendre le monde. Elle permet également aux individus de participer au processus démocratique, leur donne une voix et renforce leur identité culturelle. En 2007 et 2008, l’Unesco avait choisi pour thème: «l’alphabétisation et la sante». L’objectif était de lutter contre les épidémies et les pandémies comme la tuberculose, le sida, la malaria et d’autres affections. Il s’agissait de souligner l’importance de l’alphabétisation pour les individus et les communautés dans la prévention et le traitement des maladies. En effet on estime que plus le niveau d’instruction de la mère est élevé plus son nourrisson aura de chance de passer l’âge de 5 ans. A l’heure où la propagation du virus Ebola inquiète l’humanité, ce thème est plus que jamais d’actualité.
En 2009 et 2010, le thème était «l’alphabétisation et le pouvoir» et insistait sur l’égalité entre l’homme et la femme souvent marginalisée.
2012, c’était «l‘alphabétisation et la paix». On sait par exemple qu’au Nigeria, la secte islamiste Boko Haram a déclaré la guerre contre le système éducatif occidental. Ses adeptes incendient les écoles, enlèvent les jeunes filles pour les vendre comme esclaves. En République démocratique du Congo, le viol est devenu une véritable arme de guerre. Autant d’obstacles qui empêchent l’Unesco d’atteindre son objectif d’éducation pour tous. D’où la nécessité de continuer la mobilisation.

 

 

« 1989 » de Djibril Diaw : Pour une Mauritanie qui se pardonne et s’accepte

[Par Makaila NGBUEBLA]

Exilé en France, Djibril Diaw, journaliste et réalisateur mauritanien, il a présenté, le 29 août 2014, à la Maison des journalistes, son film, « 1989 », devant ses collègues, des militants associatifs venus nombreux.

Un moment de la projection de « 1989 » [Crédit photo : Lisa Viola Rossi]

Un moment de la projection de « 1989 » [Crédit photo : Lisa Viola Rossi]

Intitulé « 1989 », le film de Djibril Diaw, rappelle les événements malheureux qu’a connus, son pays, la Mauritanie.

Djibril Diaw [Crédit photo : Lisa Viola Rossi]

Djibril Diaw [Crédit photo : Lisa Viola Rossi]

Parti du village de Diawara, situé sur une île du fleuve Sénégal, un conflit ayant opposé des bergers Mauritaniens à des paysans Sénégalais, est à l’origine d’un drame qui a causé la mort de deux personnes. Ce triste événement a finalement entraîné les deux peuples unis par des liens confessionnels historiques, dans un conflit qui a fait des milliers de morts, des centaines des déplacés et poussé en exil des milliers des négros-mauritaniens déportés vers le Sénégal et le Mali.

Des activistes Tunisiens, des journalistes et responsables des organisations politiques de la Mauritanie, ont répondu présents à l’invitation de la Maison des journalistes qui a prévu, dans le cadre des activités de son programme, de projeter le film, « 1989 », de Djibril Diaw, journaliste-réalisateur mauritanien accueilli en tant qu’exilé en France.

Ciré Kane de l’Alliance pour la Justice et la Démocratie/Mouvement pour la Réconciliation (AJD/MR) [Crédit photo : Marta Fallani]

Ciré Kane de l’Alliance pour la Justice et la Démocratie/Mouvement pour la Réconciliation (AJD/MR) et le réalisateur Djibril Diaw [Crédit photo : Marta Fallani]

Djibril Diaw se dit être inspiré par la tenue vestimentaire multicolore qui symbolise la diversité de la Mauritanie de M.Abderrahmane Ahmed Salem, directeur de la maison des cinéastes et motivé par Rachef Effantin, chargée de formation au sein de la dite structure.
Dans sa quête et pour son combat qui consiste à souhaiter que vivent ensemble les fils et filles de la Mauritanie, le réalisateur s’est intéressé particulièrement aux événements fâcheux de 1989 qui ont fractionné la société mauritanienne.

Des témoignages pathétiques

Le film « 1989 », dure 52 mn. Par des témoignages pathétiques, des victimes et bourreaux, le film rapporte d’une manière ou d’une autre, les faits qui ont endeuillé et séparé des familles, détérioré les relations humaines entre les différentes composantes de la société mauritanienne.
Pour son auteur, ces témoignages d’anciens corps d’armée, de veuves et des exécutants, visent à permettre aux Mauritaniens de faire table rase de ce passé douloureux et tragique afin d’envisager ensemble une réconciliation humaine et fraternelle.

Makaila Nguebla [Crédit photo : Lisa Viola Rossi]

Makaila Nguebla [Crédit photo : Lisa Viola Rossi]

Par ailleurs, des voix indépendantes se sont exprimées pour éclairer l’opinion du public sur la genèse du conflit. De l’avis, d’un sociologue mauritanien interrogé par le réalisateur, l’événement de 1989, a été déclenché du fait d’une conjugaison de facteurs. Parmi ceux-ci: le manifeste politique, de 1966, rendu public par des intellectuels négro-africains mauritaniens, l’arabisation du système éducatif, l’échec d’une tentative manquée de coup d’Etat, des arrestations arbitraires et des exécutions extra-judiciaires, dont ont été la cible des officiers noirs et la politique d’exclusion de l’ancien régime de Maaouya Ould Taha, qui chercherait à « dénégrifier », son pays de sa composante.

Film fédérateur et débats enrichissants

Ibrahima Diallo, porte-parole des Forces de libération africaine de la Mauritanie (FLAM)

Ibrahima Diallo, porte-parole des Forces de libération africaine de la Mauritanie (FLAM) [Crédit photo : Lisa Viola Rossi]

Le film « 1989 », a servi de point de rencontre entre les acteurs politiques mauritaniens mobilisés pour la circonstance. Il a aussi ouvert la porte à un débat passionnant.
Ibrahima Diallo, porte-parole des Forces de libération africaine de la Mauritanie (FLAM), et Ciré Kane de l’Alliance pour la Justice et la Démocratie/Mouvement pour la Réconciliation (AJD/MR), ont respectivement pris la parole pour féliciter Djibril Diaw et apporter leur lecture des faits.
Pour Ibrahima Diallo : « les événements de 1989, ont été l’aboutissement d’un conflit que tout le monde voyait venir à cause des émissions diffusées sur les ondes de la radio nationale. »
Ciré Kane, a estimé que si, aujourd’hui, la question de cohabitation sociale entre les différentes composantes de la nation tend à s’améliorer, il relève toutefois le déficit d’unité et les dissensions internes des forces politiques négro-africaines entre elles.
Pour sa part, Maha Abdelhamid, militante pour la cause des noirs tunisiens, a jugé que, pour une véritable cohésion sociale en Mauritanie, il faut que justice soit faite et que les uns et les autres se pardonnent.
Le réalisateur a ensuite, pris la parole pour répondre à des questions posées par des journalistes. Il a expliqué que sa démarche ne vise pas à remuer le couteau dans la plaie d’une société mauritanienne traumatisée par cet épisode mais plutôt à faire accepter les uns et les autres dans leurs différences dans un pays qui se veut véritablement pluriel.
Remerciant les personnes ayant participé à la projection du film, Djibril Diaw en a annoncé un autre. Il sera consacré au sort des réfugiés mauritaniens qui ont été déportés en 1989 et qui ont opté pour le retour au bercail. Que sont-t-ils devenus ?
« A suivre  … » selon la formule empruntée au journaliste-réalisateur mauritanien.